Interview
Sept réponses sur l’opposition et
le « fascisme » au Venezuela
Salim Lamrani
Photo:
D.R.
Samedi 8 mars 2014
http://www.mdzol.com/nota/518754-siete-respuestas-sobre-la-oposicion-y-el-fascismo-en-venezuela/
L’analyste Salim Lamrani, Docteur de La
Sorbonne, a conversé avec MDZ sur les
différences entre Capriles et López, y
sur ce qu’est le « fascisme » opposé à
Maduro.
Gabriel Conte@ConteGabriel
26 février
2014
Salim Lamrani est un journaliste
français spécialiste des relations entre
les Etats-Unis, Cuba et le Venezuela,
auteur de plus d’une dizaine de libres,
en espagnol et en français, sur le
sujet. Son regard, d’un point de vue
distant des Etats-Unis, lui a permis de
participer à de nombreuses conférences
aux côtés de marxistes de l’envergure du
linguiste Noam Chomsky, l’ancien maire
de Londres Ken Livingston, le
journaliste Ignacio Ramonet et Howard
Zinn, aujourd’hui décédé. Son dernier
ouvrage s’intitule Cuba : les médias
face au défi de l’impartialité
(Paris, Editions Estrella, 2013) avec un
prologue d’Eduardo Galeano.
Néanmoins, sa plume lui a permis
d’être invité dans plusieurs universités
étasuniennes telles que le Massachusetts
Institute of Technology, la Northeastern
University de Boston, la Thomas
Jefferson School of Law de San Diego,
l’Université de Santa Barbara, la Sarah
Lawrence College de New York, la Sonoma
State University, l’Université de
Stanford y l’Université de San
Francisco.
Il est particulièrement actif durant
cette crise vénézuélienne et ses
colonnes d’analyse et d’opinion sont
souvent brandies comme des épées par la
garde militante du chavisme. C’est
pourquoi, au lieu de parler du
gouvernement du Venezuela, nous avons
préféré le consulter directement sur
l’opposition, que le président Maduro
qualifie du terme dur et générique de
« fasciste », et également sur les
« oppositions », car il en a plusieurs
dans le pays. Lamrani répond en tant que
Docteur es Etudes ibériques et
latino-américains de l’Université Paris
Sorbonne IV. Il est Maître de
conférences à l’Université de La
Réunion.
En sept questions/réponses, Lamrani
affirme qu’il n’y a pas de luttes
internes au sein du PSUV (le Parti
Socialiste Uni du Venezuela) et soutient
que les partis d’opposition sont
incapables de triompher aux élections,
malgré le dernier résultat présidentiel
qui ont séparé les candidats d’un 1,5%.
Croyez-vous que le terme « fasciste »
utilisé par le président Maduro est
clairement descriptif de
« l’opposition » vénézuélienne, alors
que celle-ci est ample et variée ?
Pourquoi ?
-Il y a clairement un secteur de
l’opposition vénézuélienne qui a
toujours privilégié un coup d’Etat car
il sait pertinemment qu’il lui sera très
difficile d’obtenir le pouvoir par les
urnes, par la voie démocratique et
républicaine. Il parie donc sur la
subversion, la violence et le crime pour
obtenir ce qu’il ne peut avoir par la
volonté populaire.
Combien de secteurs voyez-vous au sein
de l’opposition au chavisme ?
-Tous les opposants à l’actuel
gouvernement démocratique du Venezuela
ne veulent pas une rupture de l’ordre
constitutionnel. Il y a des secteurs
insatisfaits pour des motifs valables
telle que la violence, l’inflation, la
corruption administrative aux niveaux
intermédiaires de la structure
étatiques, qui veulent des changements
mais par la voie légale et pacifique.
Cette opposition est respectueuse et
respectable, et elle est absolument
nécessaire pour la démocratie
vénézuélienne. Malheureusement, les plus
actifs sont les putschistes qui
bénéficient non seulement du soutien des
Etats-Unis dont l’objectif est un
changement de régime – y compris par la
force – mais également des médias
occidentaux qui présentent la réalité
vénézuélienne uniquement depuis la
perspective du secteur le plus radical
de l’opposition, en passant sous silence
ce qui s’est passé en avril 2002.
Selon vous, pourquoi les partis de
gauche s’opposent à Maduro ?
-La gauche vénézuélienne n’est pas
monolithique. Elle est plurielle et
critique comme elle se doit d’être. Ce
qui est important est qu’elle soit
constructive et qu’elle respecte la
légalité constitutionnelle. Je ne crois
pas qu’il y ait des divergences
d’objectifs entre les chavistes et les
autres secteurs de la gauche. Tous
veulent construire un avenir meilleur
pour tous les Vénézuéliens et édifier la
Patrie de tous. La dissension est utile
si elle prend en compte l’intérêt
général et respecte la volonté populaire
exprimée dans les urnes.
Quelle valeur ont les chavistes (ou ex
chavistes) qui se disent proscrits, mais
qui se revendiquent d’un « chavisme
initial », comme Raul Baduel, lorsqu’il
s’agit de parler d’opposition au
Venezuela ?
-Je ne sais pas ce qu’est le « chavisme
initial » car la Révolution Bolivarienne
est un mouvement de masses et d’idées en
constante évolution. Tous ceux qui
inscrivent leur action dans la légalité
ont le droit d’exprimer leurs points de
vue et de critiquer l’action
gouvernementale, y compris Raul Baduel.
Croyez-vous que les médias
peuvent renverser Maduro ?
-Les médias vénézuéliens, qui sont
privés à 80%, ont déjà perpétré un coup
d’Etat en avril 2002 contre le
gouvernement démocratique d’Hugo Chávez.
Il y a une inquiétante réminiscence des
événements de 2002 avec les
manifestations actuelles. Tout avait
commencé selon le même schéma : appels
de l’opposition à manifester, des morts
des deux côtés, une condamnation
générale des médias privés, un
soulèvement d’une partie de l’armée et
coup d’Etat. Il ne faut pas sous-estimer
le danger d’une rupture de l’ordre
constitutionnel par la violence.
Leopoldo López est-il
différent d’Henrique Capriles ?
-Leopoldo López semble plus radical que
Capriles lors des manifestations
actuelles car il promeut ouvertement un
coup d’Etat. Mais il ne faut pas oublier
que tous deux sont des putschistes car
ils ont participé à la rupture de
l’ordre constitutionnel en avril 2002.
Existe-t-il une opposition
« silencieuse » au sein du PSUV contre Nicolás Maduro ?
-Je ne crois pas qu’il faille
personnifier le processus bolivarien. Le
PSUV n’est pas un parti monolithique. Il
y a différentes tendances et des
critères distincts. Mais je ne crois pas
qu’il y ait des militants au sein du
PSUV qui souhaitent renverser Maduro.
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