Venezuela
Derrière ces étudiants se cache
l'opposition putschiste
Salim Lamrani
Salim
Lamrani - Photo: D.R.
Mercredi 19 février 2014
http://www.elwatan.com/hebdo/etudiant/...
Salim Lamrani, Docteur ès Etudes
ibériques et latino-américaines que nous
avons interrogé sur les événements du
Venezuela, exprime à El Watan étudiant
une opinion alignée. Il considère pour
sa part que les Etats-Unis jouent un
rôle majeur dans la déstabilisation du
Venezuela. Et que les étudiants
contestataires ne sont pas
représentatifs de l’ensemble du monde
universitaire.
-Selon vous, quel serait le poids réel
en termes de représentativité et de
mobilisation des étudiants
protestataires ?
Les
actuelles manifestations au Venezuela
sont une inquiétante réminiscence des
événements d’avril 2002 qui avaient
débouché sur un coup d’Etat contre le
gouvernement démocratiquement élu du
président Hugo Chávez. Rappelons qu’en
2002, des protestations similaires
organisées par la droite vénézuélienne
avaient fait plusieurs victimes aussi
bien parmi les partisans du gouvernement
que parmi ses détracteurs. La suite est
connue de tous : une partie de l’armée
en connivence avec les médias privés du
pays et l’opposition radicale ont rompu
l’ordre constitutionnel et imposé une
dictature qui n’a heureusement duré que
48 heures grâce à la mobilisation
massive du peuple.
Il ne faut
pas se voiler la face, derrière ces
étudiants – qui sont loin d’être
représentatifs de l’ensemble des
étudiants du pays – se cache
l’opposition putschiste et
antidémocratique – soutenue
politiquement et financièrement par les
Etats-Unis – qui a toujours refusé
d’accepter la volonté populaire depuis
1998. Le but est de déstabiliser le pays
afin de justifier par la suite un coup
de force. Etant donné que la droite
vénézuélienne est incapable depuis 1998
de prendre le pouvoir par la voie
démocratique, elle opte pour la
violence.
-Quelle est la part de légitimité à
l’aspiration démocratique dans la
contestation des étudiants qui
manifestent dans les rues de Caracas
contre la «vie chère et l’insécurité» ?
Est-on devant une nouvelle confrontation
qui oppose l’opposition libérale aux
chavistes, accusés «d’absolutisme» par
jeunes interposés?
Dans
l’histoire de l’Amérique latine, aucun
gouvernement n’a disposé d’une aussi
grande légitimité démocratique que celle
d’Hugo Chávez, qui avait remporté 16
scrutins sur 17 en 15 ans. Pourtant, il
était massivement décrié par les médias
occidentaux qui en ont présenté une
image caricaturale, loin de la réalité
du processus bolivarien. Il me semble
que la manière dont les médias
occidentaux présentent la Révolution
bolivarienne constitue l’un des plus
grands échecs du journalisme. L’actuel
président, Nicolás Maduro, a été élu
lors d’un scrutin démocratique reconnu
par les plus éminentes institutions
internationales, de l’Union européenne
en passant par l’Organisation des Etats
américains et le Centre Carter.
Depuis son
arrivée au pouvoir en avril 2013, il y a
eu deux processus électoraux et il en
est sorti vainqueur en toute
transparence. L’insécurité et la vie
chère sont un prétexte pour justifier
des actes violents. Il est curieux de
noter que les taux de criminalité les
plus élevés se situent dans les Etats
gouvernés par l’opposition. Quant à la
vie chère, elle est due en grande partie
aux spéculateurs qui accaparent des
produits de première nécessité afin de
créer artificiellement des pénuries. Les
autorités ont pris des mesures actives
pour lutter contre ces dérives qui
constituent de graves délits. Parler
d’«absolutisme» au Venezuela, dans un
pays où 80% des médias sont privés et où
l’opposition contrôle de larges secteurs
de l’économie n’est pas sérieux.
-Le Venezuela est-il en train de vivre
un printemps latino ou est-ce un énième
épisode de ce qu’on appelle la «Guerre
froide 2.0» ? Quel serait le rôle réel
des Etats-Unis dans les événements qui
secouent le Venezuela?
La
démocratie vénézuélienne est en grand
danger du fait des activités violentes
et subversives de l’opposition. Le
pouvoir se gagne dans les urnes et non
pas par le crime. Les Etats-Unis jouent
un rôle majeur dans la déstabilisation
du Venezuela. Il s’agit-là du cinquième
producteur mondial de pétrole et
l’arrivée au pouvoir de Chávez a permis
au pays de retrouver sa souveraineté
politique, économique et énergétique.
Désormais, les richesses nationales sont
destinées à la majorité et non plus
uniquement aux multinationales
étasuniennes et à l’oligarchie
pétrolière du pays.
-La division politique qui marque le
Venezuela depuis l’arrivée de Chavez
a-t-elle fini par scinder la jeunesse
vénézuélienne en deux camps qui
s’affrontent avec deux notions
antagoniques de la «révolution»?
Aucun
gouvernement vénézuélien n’a autant fait
pour la jeunesse du pays que celui
d’Hugo Chávez et Nicolás Maduro, que ce
soit en termes d’éducation, de santé,
d’accès à la culture et aux loisirs. Les
manifestations de certains étudiants –
l’immense majorité procédant des classes
aisées du pays – ne sont pas
représentatives de l’ensemble du monde
universitaire. La Révolution
bolivarienne, les 80% de la population
qui n’avait pas voix au chapitre
auparavant.
-Comment conjecturez-vous la suite des
événements ? Y a t-il un risque
d’enlisement vers une situation
d’instabilité sécuritaire dans la
région?
Toute
l’Amérique latine a condamné les
violences au Venezuela et rejette les
tentatives putschistes de l’opposition.
Les institutions sont fortes au
Venezuela et les dirigeants ont 15 ans
d’expérience dans la lutte contre la
subversion. De toute manière, l’Amérique
latine n’acceptera jamais un autre 11
avril 2002 (coup d’Etat contre Chávez).
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