|
Iran
Nouveau site nucléaire iranien en construction près de Qom:
objectifs selon Ali Akbar Salehi
Mardi 29 septembre 2009
Traduction de la transcription de
l’interview par Press TV du directeur de l’Organisation à
l’Energie Atomique iranien, Ali Akbar Salehi, portant sur la
réaction des Occidentaux à l’annonce faite par Téhéran qu’ils
construisent un nouveau site d’enrichissement nucléaire au Sud
Ouest de Téhéran.
Press TV : Dr Salehi, vous avez été le représentant de l’Iran
auprès de l’AIEA de 1999 à 2004. Depuis votre récente nomination
avez-vous vu des changements significatifs dans la perception
occidentale du programme nucléaire iranien ?
Salehi : C’est un problème vraiment délicat sur lequel discuter,
concernant la question que vous avez posée, la réponse est non,
en d’autres termes, nous avons constaté que l’ Occident a
continuellement amplifié ses accusations, il semble que leurs
accusations sont sans fin, il y a une expression en Farsi qui
dit que quiconque qui grimpe en haut de l’échelle des
accusations plus haut toujours plus haut, si jamais il tombe ses
os se briseront encore plus fort, donc je ne sais pas s’ils ont
vraiment conscience de cela car un jour la vérité fera surface
et cela créera beaucoup de problèmes pour eux, comme il y a six
ans, quand ils avaient déjà affirmé que nous avions enrichi de
l’uranium à 70% et nous avons insisté que cela était quelque
chose d’importé de l’extérieur, en d’autres termes que cela
n’avait pas été fait à l’intérieur et que nous n’avions jamais
enrichi de l’uranium à 70%. (Référence à des traces d’uranium
trouvées dans des centrifugeuses importées clandestinement via
le réseau du père de la bombe pakistanaise ndlt). Mais ils ont
insisté et finalement trois ans après ils ont trouvé que ce
n’était pas vrai ce sur quoi nous avions insisté.
Il ya de nombreux problèmes identiques sur lesquels ils ont
porté des accusations et nous avons prouvé le contraire mais il
semble qu’ils ne veulent pas en tirer la leçon. Et finalement il
y a eu un plan de travail mis au point entre l’Iran et l’AIEA.
Et dans ce plan de travail on a fait le tour de toutes les
questions et l’Iran a répondu à toutes les questions soulevées,
classées en 6 catégories, et l’AIEA elle –même a admis qu’on
avait parfaitement répondu à toutes les questions soulevées.
Mais malgré cela ils ont continué à avancer d’autres accusations
et les « prétendues études » , qui portent sur des missiles et
des têtes armées et qui n’ont rien à voir avec les questions sur
le nucléaire, donc ce que je peux dire c’est que l’Occident
n’apprend rien de son passé et il a décidé de maintenir la
pression sur l’Iran sans aucune raison.
Mais l’environnement à l’AIEA a changé, en d’autres termes, la
majorité de l’AIEA – à l’AIEA on a un Conseil de Gouverneurs
comprenant 35 membres, peut être un ou deux de plus, environ 35
membres, et l’ Assemblée Générale ou la Conférence Générale qui
comprend l’ensemble des 150 membres. Quand on se rend au Conseil
des Gouverneurs c’est comme au Conseil de Sécurité de l’ONU où
la majorité appartient aux pays occidentaux c’est là qu’ils
cuisinent tout et prennent toutes les décisions car ils ont la
majorité. Mais quand on va à la Conférence Générale et à l’
Assemblée Générale, on a une image complètement différente,
leurs voix ne se font pas entendre là et la majorité a reconnu
les droits de l’Iran, et a reconnu que l’Iran a dit constamment
la vérité et qu’ils ont constamment accusé l’Iran, je dirai sur
la base d’un raisonnement douteux, un raisonnement sans
fondement. Donc je dirai que l’Occident maintient la pression
mais le gros de la conscience du monde, de l‘opinion publique
est avec l’Iran.
Press TV : des gouvernements occidentaux ont accusé l’Iran de
construire un site nucléaire au Sud Ouest de Téhéran dont la
taille ne correspond pas à une centrale d’enrichissement
d’uranium pour une centrale productrice d’énergie nucléaire.
Quelle est votre réponse à ces accusations ?
Salehi : Bien, ce site est un petit site. Nous avons déjà
indiqué à maintes reprises – je l’ai dit dans mon discours il y
a deux semaines lors de la Conférence Générale - que l’Iran a
pris toutes les mesures nécessaires pour protéger ses
installations nucléaires. Il y a un certain nombre de façons de
protéger ses installations et le personnel, les ressources
humaines, l’une c’est la protection active pour laquelle l’armée
est impliquée. Et l’autre c’est la défense passive et non la
défense active - - la défense active à un côté militaire mais la
défense passive à un côté civil. Et cela est un vaste problème
quand on parle de défense passive, cela comprend tant de choses,
cela inclus les abris pour le personnel et les abris souterrains
pour le matériel, c’est un exemple et je dirai que c’est un
endroit qui garantit la continuité de notre activité
d’enrichissement. En d’autres termes nous disons au monde - -
quand je dis dire au monde je veux dire, dire à ces adversaires
- - qu’en aucun cas l’Iran ne renoncera. L’Iran prendre toutes
les mesures nécessaires pour protéger ses ressources humaines,
son personnel et son matériel sensible. Donc, c’est, je dirai,
un endroit qui garantira ceci, il peut résister à toute sorte
d’attaque imprévue car - - je dis imprévue car nous ne nous
attendons pas à une quelconque attaque - - nous prenons toute
menace au sérieux. Donc en d’autres termes, nous sommes une «
nation sur ses gardes «, nous ne sommes pas «endormis » donc
nous sommes prêts pour le pire scénario.
Mais cela ne veut pas dire que nous croyons que le pire
arrivera. Je crois qu’il y a un minimum de prudence dans
l’esprit de nos adversaires, car si de mauvaises initiatives
sont prises, alors les conséquences sont - - je dirai- - pas
très claires. Je veux dire s’ils allument le feu ils ne pourront
pas l’éteindre.
Donc les conséquences sont imprévisibles, je veux dire vous ne
pouvez pas prévoir les conséquences, vous ne pouvez pas deviner
les conséquences. Malgré cela, nous prenons toute menace au
sérieux et nous faisons de notre mieux pour protéger nos
intérêts et en aucun cas nous renoncerons.
Press TV : dites nous pourquoi l’Occident a lancé une attaque
aussi féroce? Et était ce peut être une analyse médiatique
qu’ils avaient préparée avant pour savoir comment ils allaient
présenter cela, comme nous l’avons vu lors de la conférence au
G20 à Pittsburgh, quand ils sont intervenus et ont attaqué de
cette façon.
Salehi : Bien, j’ai été réellement surpris car quand nous avons
déclaré ce site à l’AIEA il y a plus de dix jours - - lundi de
la semaine dernière - - nous nous attendions à ce que cela soit
bien accueilli par l’Occident. Contrairement à nos attentes,
nous avons vu une réaction délirante, de l’agitation, et quelque
chose d’anormal. Et j’ai commencé à réfléchir pourquoi ? Que
c’était-il passé ? Parce qu’ils insistaient en permanence sur le
fait que l’Iran ne déclarait jamais ses sites au bon moment.
C’était une des autres accusations. Cette fois nous avons
déclaré ce site bien avant la date (exigée) sur la base de nos
engagements et de nos droits.
PressTV : Vous savez le monde à l’extérieur pense pourquoi les
Etats Unis, ou la France ou la Grande Bretagne, pourquoi n’ont
–ils pas été informés de ce site nucléaire ? C’est une des
questions qui vient à l’esprit.
Salehi : Bon, de ce que je lis actuellement c’est qu’il y a une
contradiction. Il semble que les Américains, les Français et les
Britanniques et les Israéliens en avaient déjà connaissance.
C’est pour cela qu’ils ont déliré et se sont agités là-dessus.
Je rapporte juste ce qu’ils ont dit. Ce n’est pas ma propre
estimation. Mon estimation c’est que nous procédons selon nos
engagements et notre tradition de transparence et de coopération
avec l’Agence. Mais, d’après ce qu’ils ont dit ils semblent
qu’ils étaient entrain de cuisiner quelque chose pour l’Iran.
Ils voulaient révéler ou faire part de cela au G20 et alors
déclarer que l’Iran ne respecte pas à ses engagements de
sauvegardes et du NPT et alors faire basculer l’opinion en
faveur de leurs propres souhaits. Mais heureusement et Dieu
merci ils n’ont pas réussi et maintenant ils sont en pleine
contradiction. Ils ne savent pas comment résoudre cela car d’un
côté nous l’avons déjà déclaré, et de l’autre ils veulent
insister pour dire que nous avions un site secret. Comment
pouvons-nous avoir un site clandestin et le déclarer à l’AIEA ?
Chose étrange à propos de cela, c’est qu’ils continuent
d’insister pour dire que l’Iran a construit ce site pour
enrichir de l’uranium à plus de 90% à des fins militaires.
Est-ce qu’ils comprennent vraiment ce qu’ils disent ? Ils
parlent au monde entier. Comment pouvons nous construire un site
pour enrichir de l’uranium à plus de 90% sous le contrôle de
l’AIEA et de fabriquer une bombe sous son contrôle ? Ils devront
corriger leurs propos. Et ils le feront bientôt. Ils deviennent
un peu plus doux maintenant. Ils doivent se sortir du marécage
car le monde devient plus conscient.
Press TV : La question suivante c’est s’il y aura une date d’
annoncée pour l’inspection par l’AIEA du site nucléaire.
Salehi : Nous avons un accord de sauvegarde avec l’AIEA. Donc
tout sera fait selon cet accord. Nous avons déclaré à maintes
reprises que nous nous tenons à nos engagements, que nous sommes
respectueux de nos engagements. Oui, les inspecteurs viendront
et inspecterons. Nous présenterons à l’AIEA le RPu (réacteur à
plutonium calibré) de ce site. Nous sommes en contact permanent
avec l’AIEA. Nous sommes entrain de travailler sur un agenda
pour l’inspection. Nous leur écrirons bientôt une lettre pour
fournir la localisation précise du site et d’autres choses. Tout
procède selon nos engagements et nous sommes en contact avec
l’AIEA.
Press TV : Parlons de la proposition de l’Iran dans laquelle il
y a un appel pour un monde sans arme nucléaire. Quelle a été la
réponde des puissances nucléaires occidentales ?
Salehi : La réponse des puissances occidentales c’est qu’elles
suivent la logique du pouvoir. Elle se considèrent comme chargée
de la preuve, comme sachant ce qui est bon et juste pour le
monde. Elles sont le bâton à mesurer les questions politiques
quoiqu’il arrive. En fait, l’Iran a été le premier pays au Moyen
Orient, qui par le biais de l’ONU, a déclaré qu’il voulait que
la région soit libre de toute arme atomique. Maintenant
quiconque suit de près notre problème nucléaire tirera la
conclusion que ce problème n’est pas un problème technique, que
ce n’est pas un problème légal. Il a été politisé et il est
devenu un problème politique simplement pour amener l’Iran à se
plier à leurs (pays occidentaux) propres politiques dans la
région. Donc si l’Iran se conforme avec leurs politiques ils
feront même beaucoup de publicité sur les avancées scientifiques
et techniques de l’Iran et tout changera. Le problème a été
politisé et il a besoin d’une solution politique. Comme l’a
déclaré notre président à maintes reprises, nous n’avons
absolument aucun problème sur ce sujet et l’AIEA l’a dit. Le
dernier rapport de l’AIEA comprend une partie sur les
sauvegardes qui dit que l’AIEA en tant que responsable de la
vérification, dans toute la première partie a donné raison à
l’Iran sur toutes les questions. Il n’y a qu’une autre question
sur laquelle l’AIEA a dit qu’elle n’était pas en position
d’authentifier les documents et cela porte sur les « prétendues
études » dont le problème a été soulevé par les Américains. Il y
a eu un document, un ordinateur portable, ont-ils dit, qui a été
transmis à l’AIEA mais pas à nous et c’est ce qu’on appelle les
« prétendues études ». Donc lorsqu’il est question de l’AIEA,
comme seul organisme de contrôle concernant les problèmes
portant sur les activités nucléaires des états membres, on nous
a donné raison. Nous n’avons pas de question en suspens.
Press TV : Croyez vous que le Président US (Barack Obama) peut
aider en quoi que ce soit à sortir de l’impasse sur le programme
nucléaire de l’Iran ?
Salehi : C’est une question très sensible car si vous demandez
au Premier Ministre Britannique, Gordon Brown, ou au Président
français, Nicolas Sarkozy, s’ils croient que l’Iran a des armes
nucléaires ils diraient non. Car leurs services de
renseignements l’ont dit. Croyez vous réellement que l’Iran
travaille à la production d’armes nucléaires ils diraient aussi
non. Mais alors on devrait leur demander pourquoi vous faites
autant pression sur l’Iran. Les puissances occidentales vous
diront que c’est parce que les Iraniens ont la technologie et
ils pourraient dans le futur avoir l’intention de détourner
leurs activités vers la production d’armes nucléaires. Comment
pouvons-nous mesurer des intentions ? Existe-t-il une
organisation internationale pour mesurer les intentions des pays
sur les années à venir ? Nous avons fait nos preuves lors de la
guerre avec l’Irak. Nous avons été attaqués avec des armes de
destruction massive principalement des armes chimiques mais nous
n’avons pas répondu en utilisant les mêmes armes. Bien que nous
aurions pu, nous ne l’avons pas fait. Parce que nous sommes
fidèles à notre éthique. Nous croyons en nos valeurs de base.
Notre dirigeant a indiqué à de nombreuses reprises que c’est
contre notre religion de produire, utiliser ou posséder des
armes atomiques. Comment pouvons- nous faire connaître notre
position plus clairement que cela ? Nous avons dit cela depuis
1974. D’un autre côté, nous ne pouvons pas vraiment avoir
confiance dans leurs intentions à cause de leur expérience
passée de colonialisme. Je parle de gouvernements et pas des
nations. Toutes les nations aiment la paix. Personne n’aime la
guerre ou l’injustice. L’Iran a-t-il tué des millions de
personnes ? L’Iran a-t-il attaqué un pays ces dernières
centaines d’années ? Donc s’il y a un côté qui doit réellement
mettre en doute les intentions de l’autre, c’est le notre et pas
le leur.
Press TV : Pourquoi Israël qui dit ne pas avoir d’armes
nucléaires n’a pas subi de pression internationale pour
abandonner son programme nucléaire ?
Salehi : Je ne considère pas Israël comme une entité
indépendante. Israël est l’extension de l’Occident au Moyen
Orient. C’est le bras étendu de l’Occident au Moyen Orient.
C’est la raison.
Press TV : Parlons des discussions à venir avec les membres
permanents du Conseil de Sécurité plus l’Allemagne en Octobre.
Qu’attendez -vous de cette rencontre ?
Salehi : Si chacun participe à cette rencontre avec de bonnes
intentions beaucoup de choses peuvent en sortir. L’Iran a
déclaré qu’il est près à entamer un dialogue inconditionnel.
Donc l’Iran est prêt à mener un dialogue inconditionnel,
discuter de tous les problèmes qui présente un intérêt pour la
communauté internationale dans la région. L’Iran est une
puissance régionale. L’Iran est la clé d’or du Moyen Orient.
L’Iran a beaucoup d’influence sur les peuples du Moyen Orient et
du monde islamique. Donc sans l’Iran ils ne pourront jamais
résoudre les problèmes au Moyen Orient donc ils doivent saisir
cette opportunité pour que cette rencontre porte ses fruits.
Sinon, si la rencontre est futile, ce n’est pas nous qui seront
perdants.
Press TV : Comment croyez vous que le nouveau directeur de
l’AIEA s’occupera du programme nucléaire iranien ?
Salehi : J’ai eu l’honneur de le rencontrer il y a deux
semaines. Il nous a promis qu’en acceptant ce poste il agira
comme responsable international. Il travaillera pour le bien de
la communauté internationale. C’est ce qu’il a promis. Nous
n’aurons pas à attendre longtemps pour voir car la logique du
pouvoir fonctionne toujours dans les organisations
internationales telles l’AIEA. Quiconque paie plus ou est plus
fort, sa voix a plus de poids. Et ce n’est pas juste. Donc
attendons pour voir.
Traduction Mireille Delamarre
|