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ALGÉRIE-FRANCE
Il faut un autre regard
Zouhir Mebarki
Nicolas Sarkozy et Abdel Aziz Bouteflika
4
décembre 2007 La France a
tout intérêt à avoir une autre attitude avec l’Algérie. Alors
que toute la presse française évoquait, hier, «le climat
tendu» dans lequel Sarkozy se rendait à Alger, une seule
voix raisonnable est venue remettre les choses au clair. «Nous
avons besoin d’eux (les Algériens Ndlr), ils ont besoin de nous»
estimait sur les ondes de la radio RMC Jean-Marie Bockel, le secrétaire
d’Etat français chargé de la Coopération. voilà qui est bien
dit. Partant de ce postulat, il faudrait parvenir à «des
relations d’Etat à Etat» comme le demandait, tout récemment,
l’ancien chef de gouvernement algérien, Ahmed Ouyahia, et
leader du deuxième parti de notre pays.
Ce qui implique le respect de la souveraineté de chacun des deux
pays et un regard nouveau qui n’intègre que les intérêts
communs en se délestant de toute condescendance, de tout autre
exercice tendant à différencier les Algériens en génération
«du passé» et celle «du futur». Il n’y a
qu’une seule catégorie d’Algériens qui ne peuvent qu’aimer
leur pays pour au moins une raison: celle de n’en avoir pas un
autre de rechange. Si réellement les relations franco-algériennes
pouvaient un jour avoir pour socle cet axiome de Bockel, les deux
pays en tireraient d’énormes bénéfices.
Or à quoi assistons-nous depuis maintenant près d’un demi-siècle,
depuis l’Indépendance de l’Algérie? A une France qui
n’arrive pas à digérer la «perte» de ces trois départements
d’outre-mer et qui le fait savoir cycliquement. Faisant
abstraction des déclarations belliqueuses tenues par des hommes
politiques au niveau intermédiaire pour ne retenir que le sommet
de l’Etat pour citer l’attitude offensante d’un Valéry
Giscard d’Estaing alors président de la République française
qui n’a laissé d’autre choix au président Boumediène que de
le remettre en place. Ou encore l’attitude de parrain d’un
François Mitterrand avec son «il faut que les élections législatives
continuent» (lors de l’arrêt du processus électoral en
1992). Par contre,et conscient de l’intérêt de la France qui résulterait
d’une politique inverse, Jacques Chirac a tenté d’élever le
niveau de la réflexion en militant pour un traité d’amitié
avec l’Algérie, s’inspirant de celui que la France a signé
avec l’Allemagne. Malheureusement, des forces ont torpillé
l’initiative avec la loi du 23 février 2005 sur «les effets
positifs de la colonisation». Le traité ne verra jamais le
jour. Ce n’est pas «le traité d’amitié simplifié»
préconisé aujourd’hui par Nicolas Sarkozy qui pourra recoller
les morceaux.
D’abord parce qu’une amitié simplifiée n’existe pas. Une
amitié est pleine ou ne l’est pas. Elle n’est ni simplifiable
ni soluble dans une alchimie quelconque. Si comme le définit
David Martinon, le porte-parole de l’Elysée, le traité
simplifié c’est «une convention de partenariat» pour
seulement faire du commerce, il faudrait peut-être rappeler que
les comptoirs phéniciens font partie de l’histoire de l’Algérie
et ont été fermés depuis lors.
D’ailleurs, tout semble indiquer que le président Sarkozy est
plus pragmatique qu’il n’y parait. En déclarant à l’Agence
de presse algérienne que «l’Algérie est un pays-clé pour
la France», il va droit au but.
Par sa position géopolitique, par ses réserves énergétiques et
par la jeunesse de sa population, l’Algérie est, en effet, une
clé pour ouvrir beaucoup de portes ciblées par la France. Des
portes dont la toute récente est l’idée d’une «Union méditerranéenne»
lancée par le président français. Il suffirait que l’Algérie
soutienne le projet pour garantir un puissant effet d’aimant.
Pour toutes ses raisons et d’autres encore, la France a tout intérêt
à avoir une autre attitude avec l’Algérie.
Une Algérie qui ne fait plus partie de l’empire, qui n’est la
chasse gardée de personne et qui tient à son histoire et à sa mémoire.
Une Algérie où les jeunes et les moins jeunes sont unis et
solidaires. Est-ce trop demander? Droits de
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Publié le 4 décembre avec l'aimable autorisation de l'Expression
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