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The Los Angeles Times

La position du Hamas. Un responsable du mouvement en expose les objectifs, concernant la totalité de la Palestine
Mûsâ Abû Marzûq


Mûsâ Abû Marzûq - Photo CPI

in The Los Angeles Times, July 10, 2007

http://www.latimes.com/news/opinion/commentary/la-oe-marzook10jul10,1,6983951.story?ctrack=1&cset=true

[M. Mûsâ Abû Marzûq est le vice-président du bureau politique du Hamas, mouvement de la Résistance islamique palestinienne]

Damas (Syrie). « La libération par le Hamas d’un journaliste de la BBC retenu captif, à Gaza, la semaine passée, est certes une nouvelle réjouissante. Mais je tiens à dire clairement ceci : nous n’avons pas extirpé Alan Johnston des griffes de ses ravisseurs en guise de je ne sais trop quel gage de bonne volonté obséquieuse envers les puissances occidentales.

Non : nous l’avons fait dans le cadre de nos efforts visant à sécuriser Gaza contre l’anarchie des milices et contre les violences, quelle qu’en soit l’origine. Gaza retrouvera le calme, et vivra dans l’état de droit. Ce sera un endroit où tous les journalistes, tous les étrangers et tous les invités du peuple palestinien seront traités avec dignité. Le Hamas n’a jamais approuvé une quelconque agression contre des Occidentaux, et c’est là quelque chose que nos détracteurs les plus acharnés ne peuvent faire autrement que nous concéder ; notre combat est depuis toujours focalisé sur l’occupant et sur notre résistance légale contre lui – c’est là le droit de tout peuple soumis à occupation étrangère, explicitement garanti par la Quatrième des Conventions de Genève.

Néanmoins, notre mouvement est en permanence associé, par le président Bush et le Premier ministre israélien Ehud Olmert, à des idéologies dont ils savent pertinemment qu’elles nous sont totalement étrangères, comme l’agenda d’Al-Qa’ida et de ses affidés.

Le déni américain de la volonté de l’électorat palestinien, au moyen de la destruction de notre gouvernement chancelant, n’a pas réussi – au contraire, le coup d’état du Fatah, assisté par les Etats-Unis, n’a fait que multiplier les problèmes auxquels se trouve confrontée l’oxymore de « solution à deux Etats » de Washington.

Pour le moment, Washington s’est trouvé un ami docile, en la personne d’Abû Mâzin, un « modéré », du point de vue américain, mais quelqu’un qui ne saurait sérieusement escompter inspirer la confiance dans les rues de Gaza ou de la Cisjordanie, après avoir empoigné des armes américaines et israéliennes en vue de destituer par la force le gouvernement palestinien démocratiquement élu. Nous déplorons ces paris, actuellement, sur le canasson « Fatahland » ou sur l’alezan « Hamastan ». A la fin, il ne saurait y avoir qu’un unique Etat palestinien.

Mais que dire de cette stigmatisation, par l’Occident, de notre mouvement, qui serait exclu du discours civilisé ? Notre position « militante » ne saurait, en elle-même, représenter un quelconque facteur disqualifiant, dès lors que de nombreuses luttes armées ont, historiquement, abouti à une place autour de la table des nations. Personne, non plus, ne peut dénier le caractère raisonnable de notre lutte contre l’occupation, ni le droit des Palestiniens à la dignité, à la justice et à l’autodétermination.

Pourtant, tout au long de mes nombreuses années d’examen de tous les aspects de la « question palestinienne », au cours desquelles j’ai conservé une ouverture d’esprit maximale, y compris ces années que j’ai passées dans une prison américaine, dans l’attente de la « justice » israélienne, on n’a jamais cessé d’exiger de moi que je reconnaisse le droit putatif d’Israël « à l’existence », condition sine qua non de l’examen de tout dol, et de renoncer à des positions exhumées de la charte du Mouvement de la Résistance Islamique remontant à 1988, alors qu’il s’agissait d’un document essentiellement révolutionnaire, rédigés dans des conditions intolérables sous occupation militaire, voici de cela plus de vingt ans.

Le point d’achoppement de la « reconnaissance » est utilisé comme une sorte de test au papier tournesol afin de juger les Palestiniens. Pourtant, comme je l’ai déjà mentionné, un Etat peut avoir un droit à exister, mais absolument pas au détriment d’autres Etats, ni, plus important encore, aux dépens de millions d’être humains et de leur droit à la justice. Pourquoi quiconque devrait concéder à Israël un « droit » à l’existence, dès lors que celui-ci n’a jamais reconnu les crimes fondateurs – massacres et épuration ethnique – au moyen desquels Israël s’est emparé de nos villages et de nos villes, de nos fermes et de nos vergers, faisant de nous une nation de réfugiés ?

Pour quelle raison un Palestinien, ou une Palestinienne, quel qu’il soit ou quelle qu’elle soit, devrait « reconnaître » le crime monstrueux perpétré par les fondateurs d’Israël, et poursuivi par son Etat moderne monstrueux d’apartheid, dès lors qu’il – ou elle – doit s’entasser à dix dans la pièce unique d’une baraque en parpaings, au toit de tôle, des Nations unies ? Ce ne sont pas, là, des questions abstraites, et nous ne saurions être taxés de négationnistes au seul motif que nous avons toujours refusé d’abandonner les victimes de 1948 et leurs descendants.

Pour en revenir à la charte de 1988 : si un Etat ou un mouvement devait être jugé uniquement sur la base de ses documents fondateurs, révolutionnaires, ou sur les idées de ses initiateurs, il y aurait beaucoup à dire, de tous côtés. La Déclaration américaine d’Indépendance, avec son affirmation tautologique de l’égalité, non seulement n’a pas garanti (tout du moins, pas dans l’esprit de la plupart de ses illustres signataires) un statut tel aux 700 000 esclaves africains qui y vivaient, à l’époque ; ni la Constitution n’a évité que l’esclavage soit codifié comme une institution comme une autre, en considérant, tout simplement, que les gens inscrits sous la rubrique « autres origines » n’étaient des êtres humains qu’aux trois cinquièmes… Israël, qui n’a jamais adopté de constitution qui lui soit propre, et préfère s’édifier sur l’accrétion lente de Lois Fondamentales, se déclare explicitement Etat pour les juifs, en conférant un statut privilégié fondé sur la religion sur une terre où des millions d’habitants sont des Arabes, d’une autre religion, non-juive, à savoir des musulmans et des chrétiens.

Les écrits des « fondateurs » d’Israël, d’Herzl à Ben Gourion, en passant par Jabotinsky, lancent des appels continuels à la destruction des habitants non-juifs de la Palestine : « Nous devons chasser les Arabes, et prendre leurs territoire ». Plusieurs partis politiques sont aujourd’hui représentés au parlement israélien, la Knesset, qui préconisent l’expulsion des citoyens arabes d’Israël, et des Arabes, du reste de la Palestine, envisageant un seul Etat – mais juif – s’étendant entre le Jourdain et la Méditerranée. Pourtant, je n’entends nulle protestation s’élevant de la communauté internationale exigeant d’Israël qu’il répudie ces propos, en préalable incontournable à tout droit à la parole ?

En tous les cas, moi, en ce qui ME concerne, je ne me casse pas la tête avec la « reconnaissance » du « droit à l’existence d’Israël » : cela n’est pas, après tout, un problème épistémologique : Israël existe. Cela, n’importe quel petit garçon de Rafah, sur son lit d’hôpital, avec des shrapnel offerts par « Tsahal » dans la poitrine, pourra vous le dire. Ce tango de rejet mutuel n’est rien d’autre qu’une distraction, qu’une diversion, quand tant de gens sont en train de mourir, ou vivent prisonniers, depuis deux générations, dans des camps de réfugiés ! Tandis que j’écris ces mots, des incursions israéliennes à l’intérieur de la bande de Gaza viennent de faire quinze tués supplémentaires, dont un enfant. Qui, mis à part un Jacobin, osera disputer du « droit » des nations, devant un tel état de violence aussi impitoyable contre une population occupée militairement ?

J’aspire à ce jour où Israël me dira, et à des millions de Palestiniens : « Voici, c’est la maison de votre famille, près de la mer. Voici vos citronniers, voici l’oliveraie que votre père soignait amoureusement. Rentrez chez vous, et soyez à nouveau vous-mêmes. »

Alors, mais pas avant, nous pourrons parler d’un avenir ensemble.

Traduit de l’anglais par Marcel Charbonnier



Source et traduction : Marcel Charbonnier


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