Amnesty International
Israël-Gaza : l'application des
recommandations de la mission Goldstone est nécessaire pour que
justice soit faite
Mardi 15 septembre 2009
Tous les organes compétents de l’Organisation des Nations
unies doivent entamer rapidement une action coordonnée afin
de mettre en œuvre les recommandations du rapport Goldstone,
a déclaré Amnesty International ce mardi 15 septembre 2009.
La mission Goldstone, mise en place par les Nations unies, a
enquêté sur les violations du droit international commises à
Gaza et dans le sud d’Israël fin décembre 2008 et en janvier
2009.
« Le Conseil des droits de l’homme de l’ONU doit souscrire
au rapport et à ses recommandations et demander au
secrétaire général des Nations unies de les porter devant le
Conseil de sécurité, a déclaré Donatella Rovera, qui a
dirigé l’enquête d’Amnesty International sur le conflit en
Israël et à Gaza.
« Le Conseil de sécurité et d’autres organes des Nations
unies doivent maintenant prendre les mesures nécessaires
pour que les victimes obtiennent les mesures de justice et
de réparation qui leur sont dues et que les auteurs de ces
crimes ne restent pas impunis. »
Malgré les preuves patentes de crimes de guerre et d’autres
atteintes graves au droit international relevées pendant et
après le conflit, il s’avère que ni Israël ni le Hamas n’ont
mené une enquête fiable sur les faits ou poursuivi en
justice les responsables présumés. Le Conseil de sécurité
des Nations unies a condamné les attaques de civils
perpétrées pendant le conflit et exhorté les deux
belligérants à respecter le droit international, mais
jusqu’à présent il a fait la sourde oreille aux allégations
de crimes de guerre et d’autres atteintes graves commises
tant par l’une que par l’autre partie.
« Il incombe désormais à la communauté internationale, et en
particulier au Conseil de sécurité, en tant qu’organe le
plus puissant des Nations unies, de prendre des mesures
décisives pour que les auteurs soient tenus de répondre de
leurs actes et que les victimes obtiennent justice, a ajouté
Donatella Rovera. Si Israël et le Hamas n’entreprennent pas
des enquêtes fiables dans un délai établi et limité, le
Conseil de sécurité se devra de porter les conclusions de la
mission Goldstone devant le procureur de la Cour pénale
internationale (CPI).
La mission d’établissement des faits, mise en place par le
Conseil des droits de l’homme des Nations unies et menée par
le juge Richard Goldstone, a rendu publiques ses conclusions
et ses recommandations dans un rapport de 575 pages paru ce
mardi 15 septembre. Elle concluait que tant les forces
israéliennes que les groupes armés palestiniens ont commis
des atteintes graves au droit international, y compris des
crimes de guerre et des actes qui pourraient être considérés
comme des crimes contre l'humanité.
Les conclusions du rapport concordent avec celles d’Amnesty
International, qui a elle-même enquêté sur place sur le
conflit de vingt-deux jours qui, du 27 décembre 2008 au
18 janvier 2009, a fait 1 400 morts parmi les Palestiniens
et neuf parmi les Israéliens. La plupart des Palestiniens
tués par des soldats israéliens étaient des civils non
armés, dont quelque 300 enfants. Trois civils et six soldats
israéliens ont été tués par des tirs de roquettes
palestiniens (et quatre autres soldats par des « tirs amis »
imputables aux forces israéliennes). Les forces israéliennes
ont aussi mené des opérations de destruction massives et
injustifiées à Gaza, laissant des quartiers entiers en
ruines, et utilisé des Palestiniens comme boucliers humains.
Amnesty International se félicite des recommandations
énoncées par la mission. Si elles sont appliquées, elles
offrent de grands espoirs de justice et de
responsabilisation. L’organisation exhorte :
• le Conseil des droits de l’homme des Nations unies à
souscrire aux recommandations de la mission d’établissement
des faits, à surveiller leur application à intervalles
réguliers, à demander au secrétaire général de l’ONU de
transmettre le rapport au Conseil de sécurité et à prier le
Conseil de sécurité de porter ses conclusions devant le
procureur de la CPI afin qu’il engage des poursuites contre
Israël et le Hamas s’ils ne garantissent pas que justice
soit rendue aux victimes ;
• le secrétaire général des Nations unies à soumettre
le rapport au Conseil de sécurité sans tarder ;
• le Conseil de sécurité à mettre sur pied rapidement
un comité d’experts chargé de surveiller et d’évaluer toute
action intentée sur place par Israël et le gouvernement de
facto du Hamas à Gaza, et à exiger que tant Israël que le
gouvernement du Hamas rendent compte dans un délai maximum
de six mois des enquêtes indépendantes qu’ils auront menées
sur les atteintes graves au droit international humanitaire
et relatif aux droits humains commises et des poursuites
qu’ils auront engagées ;
• le Conseil de sécurité à porter l’affaire devant le
procureur de la CPI si aucune enquête fiable n’a été menée
par Israël et le gouvernement de facto du Hamas dans les
délais impartis et conformément aux normes internationales ;
• l’Assemblée générale des Nations unies à prier le
secrétaire général de lui faire rapport sur les mesures
prises par les deux parties pour garantir que les auteurs
d’atteintes graves au droit international doivent répondre
de leurs actes, et à créer un fonds pour le versement
d’indemnisations satisfaisantes aux victimes qui, des deux
côtés, ont subi des pertes ou des dommages du fait d’actes
illégaux.
Voici les principales conclusions de la mission
d'établissement des faits internationale et indépendante
mandatée par les Nations unies et dirigée par le juge
Richard Goldstone :
Les forces armées israéliennes ont commis des violations du
droit international humanitaire et relatif aux droits
humains qui peuvent être assimilées à des crimes de guerre
et dont certaines sont peut-être assimilables à des crimes
contre l'humanité. Notamment, les enquêtes menées sur de
nombreux cas d’attaques mortelles contre des civils et des
biens de caractère civil ont révélé que ces attaques étaient
délibérées, que certaines avaient été lancées dans le but de
semer la terreur au sein de la population civile et sans
objectif militaire justifiable et que les forces
israéliennes avaient utilisé des civils palestiniens comme
boucliers humains.
Les forces israéliennes ont commis des infractions graves à
la Quatrième Convention de Genève, notamment des homicides
intentionnels, des actes de torture et des traitements
inhumains, causant intentionnellement de grandes souffrances
ou portant des atteintes graves à l'intégrité physique ou à
la santé, et elles ont détruit des biens sans que cela soit
justifié par des nécessités militaires, sur une grande
échelle et de façon illicite et arbitraire. Constituant des
infractions graves, ces actes relèvent d’une responsabilité
pénale individuelle.
Israël a enfreint l’obligation qui lui incombait de
respecter le droit de la population de Gaza à un niveau de
vie suffisant, ce qui comporte l’accès à la nourriture et à
l'eau en quantité suffisante ainsi qu’à un logement
convenable. On peut assimiler à une persécution et donc à un
crime contre l’humanité les actes qui privent les
Palestiniens de Gaza de leurs moyens de subsistance, de leur
emploi, de leur logement, de leur droit à l’eau, qui les
empêchent d’exercer leur liberté de mouvement et leur droit
de quitter leur pays et d’y revenir, et qui limitent leur
accès à un recours utile.
Les groupes armés palestiniens ont violé le principe de
distinction en lançant des roquettes et des obus de mortier
qui ne peuvent viser de façon suffisamment précise des
cibles militaires, et les attaques qu’ils ont conduites
contre des zones civiles ne comportant aucune cible
militaire constituent des attaques délibérées contre des
civils. Ces attaques sont des crimes de guerre, et sont
peut-être assimilables à des crimes contre l’humanité.
Les combattants palestiniens ne se sont pas toujours
suffisamment distingués de la population civile et ont
exposé des civils au danger de façon inutile lorsqu’ils ont
lancé des attaques à proximité de bâtiments civils ou
protégés.
La mission d’établissement des faits n’a trouvé aucune
preuve que des groupes palestiniens aient dirigé des civils
vers les zones attaquées, ni qu'ils aient forcé des civils à
rester à proximité de ces zones, ni que des installations
hospitalières aient été utilisées par le gouvernement de
facto du Hamas ou par des groupes armés palestiniens pour
couvrir des activités militaires, ni que des ambulances
aient été utilisées pour transporter des combattants, ni que
des groupes armés palestiniens aient participé aux combats à
partir d’hôpitaux ou de locaux des Nations unies utilisés
comme abris.
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