En direct de Gaza
PALESTINE – Gaza : piqûre de
rappel…
Ziad Medoukh
Jeudi 19 janvier 2017
Source :
http://lecourrierdumaghrebetdelorient.info/...
Depuis plus de dix ans, et à la fin de
chaque année, les habitants de la bande
de Gaza font le bilan du blocus
israélien, de la poursuite des attaques
sur leur prison à ciel ouvert, et de
l’isolement de cette région oubliée.
Depuis
le retrait israélien de la bande de Gaza
et l’évacuation des colonies
israéliennes en 2005, et depuis le début
du blocus israélien imposé contre cette
région isolée en 2006, la bande de Gaza
vit une situation désastreuse à tous les
niveaux, une situation qui rend la vie
de deux millions d’habitants de plus en
plus intolérable.
En dix
ans, la population civile a subi trois
offensives militaires israéliennes
majeures qui ont fait des milliers de
morts et des milliers de blessés, sans
oublier la destruction massive de toute
une région.
Dix
années se sont écoulées, et les
Palestiniens de Gaza vivent toujours en
état de guerre ; la souffrance, c’est
tous les jours, les massacres et les
crimes commis par l’armée d’occupation,
contre les gens, contre les maisons et
les écoles, contre les usines et les
routes…
En
2016 Gaza a continué d’endurer cette
routine macabre, abandonnée par une
communauté internationale complice.
L’année 2016, pour les habitants de la
bande de Gaza, a été marquée par…
Le
maintien du blocus israélien imposé de
façon illégale par les forces de
l’occupation depuis plus de dix ans, et
la fermeture permanente des passages qui
relient la bande de Gaza à l’extérieur.
Concernant les passages commerciaux :
actuellement, par jour, 270 à 320
camions entrent à Gaza via le seul
passage commercial ouvert cinq
jours par semaine, ce passage se situe
au sud de la bande de Gaza, mais la
moitié de ces camions sont ceux des
organisations internationales et
desservent leurs projets de
reconstruction d’écoles et de stations
d’eau. Parmi ces camions, 5 ou 6
seulement contiennent des matériaux de
construction, notamment le ciment. Ce
passage se ferme sous n’importe quel
prétexte, par décision israélienne, sans
prendre en considération les besoins
énormes de la population civile.
Gaza
n’a droit qu’à 120 produits au lieu de
950 avant le blocus, quelques produits
et médicaments n’entrent pas, ce qui a
aggravé la situation sanitaire. Selon
les estimations des organisations
internationales, la bande de Gaza a
besoin de plus de 1.300 camions par jour
pour répondre aux besoins énormes d’une
population en augmentation permanente.
Cette
fermeture a empêché la libre circulation
des importations et des exportations des
biens et produits de Gaza, en
particulier les matières premières et
les produits semi-finis ; d’où un
effacement progressif du potentiel
industriel de la région.
Le
gouvernement israélien refuse
l’ouverture des passages d’une façon
régulière et maintient son blocus sur
Gaza. Les organisations internationales
n’arrivent pas à faire pression sur ce
gouvernement, et les Palestiniens de
Gaza demeurent dans cette attente
éternelle.
Les
projets de reconstruction public ou
privé sont au point mort. Imaginez !
Aucune maison n’a été reconstruite, un
an et demi après la fin de la dernière
attaque massive contre Gaza, durant
l’été 2014. Le Comité national de la
reconstruction de Gaza a déclaré que
seulement des réparations aux maisons
partiellement détruites par les
bombardements israéliens ont pu être
réalisées.
Seulement 45% des fonds promis lors de
la conférence sur la reconstruction de
la bande de Gaza, les 11 et 12 octobre
2014, au Caire (5,6 milliards dollars
avaient été promis) ont été versés, soit
directement à l’Autorité palestinienne,
qui se heurte à d’énormes
difficultés pour mener des projets de
reconstruction dans la bande de Gaza –et
qui réellement n’y exerce aucun pouvoir,
à cause des mesures israéliennes d’une
part et des divergences politiques entre
les différents partis palestiniens
d’autre part-, soit aux organisations
internationales, dont la priorité est de
distribuer des aides alimentaires aux
sans-abri et non de commencer la
reconstruction des habitations
détruites.
Le
plan Siry –du nom du responsable des
Nations-Unies-, qui prévoit l’entrée
quotidienne d’un nombre limité de
camions de ciment à Gaza sous contrôle
israélien, a donné une légitimité
internationale au blocus et a
permis à Israël d’engranger des profits
supplémentaires ; c’est un gain
politique pour Israël, alors que, en
revanche, le plan, en pratique, n’est
pas appliqué, grevé par les autorités
israéliennes qui, sous n’importe quel
prétexte, se désengagent de leur
engagement,
Gaza
est passé, suite à cette situation
surréaliste, d’une économie de
subsistance devenue familiale depuis
longtemps déjà, à une économie désormais
dépendante d’Israël et des organisations
internationales.
La
poursuite des incursions, bombardements,
malgré une trêve respectée par les
factions armées de Gaza, jamais par
l’armée d’occupation israélienne…
On
compte plus de 200 violations
israéliennes en 2016 !
50
bombardements, 60 incursions dans
différentes zones frontalières au sud et
au nord de la bande de Gaza, 90 attaques
contre les pêcheurs et leurs bateaux de
pêche ; cette année, 32 Palestiniens ont
trouvé la mort à Gaza suite à ces
attaques et bombardements.
Le
maintien de la division
inter-palestinienne : malgré la création
d’un gouvernement d’union nationale dans
les territoires palestiniens,
l’hostilité reste vive entre le Hamas et
la Fatah, facteur aggravant de la
souffrance des Gazaouis. Actuellement,
il y a donc deux gouvernements
palestiniens, un à Gaza et un en
Cisjordanie ; leurs divergences et leurs
décisions contradictoires nuisent au
quotidien des habitants de Gaza.
Ainsi,
l’Autorité palestinienne (basée en
Cisjordanie) verse leur salaire aux
70.000 fonctionnaires de Gaza via les
banques ; mais elle ne contrôle pas les
administrations de cette région dominée
jusqu’à maintenant par le Hamas.
La
dégradation de la situation économique :
le taux de chômage dépasse les 65% de la
population civile ; mais le phénomène le
plus dangereux est la hausse du chômage
chez les jeunes de moins de 30 ans, qui
a atteint 80% en 2016 ; plus de 50.000
personnes se sont ainsi ajoutées au
nombre des sans emploi.
La
pauvreté : 70% de la population de Gaza
vit en dessous de seuil de pauvreté.
L’augmentation du nombre de personnes
qui dépendent des organisations
humanitaires : 75% des Gazaouis vivent
de l’aide alimentaire. Selon les sources
du bureau des Nations-Unies pour les
réfugiés palestiniens (UNRWA), dans la
bande de Gaza, plus de 990.000 personnes
ont bénéficié du programme de l’aide
alimentaire géré par le bureau en 2016 ;
ce programme a élargi ses services pour
assister les citoyens et non plus
seulement les réfugiés.
Pour
beaucoup d’économistes, l’année 2016 est
considérée comme la plus
catastrophique pour l’économie
palestinienne depuis 20 ans.
Le
soulèvement populaire en Cisjordanie
commencé en octobre 2015 : il a détourné
les yeux de la problématique de Gaza,
qui intéresse moins l’Autorité
palestinienne et le monde. Préoccupées
par ce soulèvement populaire, qui entre
dans sa deuxième année, les aures
institutions palestiniennes oublient les
Gazaouis.
La
fermeture des passages qui relient la
bande Gaza à l’extérieur, notamment le
passage de Rafah, au sud de la bande de
Gaza, et le passage d’Iretz, au nord de
la bande de Gaza, a entravé plus encore
le déplacement des Palestiniens de Gaza.
Le passage de Rafah, contrôlé par la
dictature égyptienne, n’a été ouvert que
90 jours en 2016, tandis que le passage
d’Iretz, contrôlé par l’armée
israélienne n’est autorisé qu’à 7% de la
population gazaouite, principalement les
malades, quelques hommes d’affaires et
des cas humanitaires.
Aucune
solution n’a été proposée, aucun plan de
sortie de crise n’existe pour la bande
de Gaza : que ce soit les deux
gouvernements palestiniens, les
organisations internationales ou les
pays voisins ou l’ONU, il semble que la
crise peut durer à tout jamais. Les
problèmes d’eau, d’électricité,
d’infrastructure, de chômage, de
pauvreté, de précarité et de
reconstruction… pour toujours.
La
seule centrale électrique, qui avait été
bombardée lors de la dernière agression,
fonctionne désormais à 30% de sa
capacité ; depuis lors, chaque foyer à
Gaza reçoit 8 heures de courant
électrique par jour, rien n’a changé…
Concernant l’eau : les dommages causés
aux canalisations d’eau et
d’assainissement ont été immenses. En
décembre 2016, plus de la moitié des
Gazaouis n’a plus aucun accès à l’eau.
La
situation et les événements dans la
région et dans des pays arabes, en
particulier en Syrie et au Yémen : ils
monopolisent l’attention des dirigeants
arabes et internationaux ; la cause
palestinienne est passée au deuxième
plan. Or, les crises se multiplient et
s’intensifient, dans une région arabe de
plus en plus instable ; 2017 ne ramènera
pas Gaza sur le devant de l’actualité.
L’aspect le plus grave de ce marasme
inextricable, c’est l’absence de
perspectives pour tous ces gens qui
constatent que les choses n’avancent
pas, ne bougent pas, qui survivent dans
l’injustice, l’incompréhension,
l’amertume, la rancœur : c’est un
traumatisme social de plu en plus
sensible, un sentiment horrible, qui va
influencer l’avenir de la génération née
dans ce chaos et qui commence à perdre
espoir en un avenir immédiat meilleur et
à chercher d’autres voies à suivre…
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