Opinion
Des Européens
reprennent la coopération sécuritaire
avec la Syrie
Samer R. Zoughaib
Samedi 16 novembre 2013
Après
avoir nié, ignoré ou minimisé le rôle
des extrémistes étrangers combattants
dans les rangs des rebelles en Syrie,
l'Occident, plus particulièrement les
Etats européens, commencent à réaliser
l'ampleur et la gravité de ce phénomène
pour la stabilité et la sécurité de
leurs pays. Certains ont rétabli les
canaux de coopération sécuritaire avec
Damas, d'autres ont essuyé une fin de
non recevoir.
Il est difficile de
définir avec précision le nombre des
fameux «jihadistes internationaux» venus
se battre contre l'armée régulière
syrienne. Au printemps dernier,
l'émissaire international pour la Syrie,
Lakhdar Brahimi, avançait le chiffre de
quarante mille combattants étrangers en
Syrie, lors d'une intervention devant le
Conseil de sécurité des Nations unies.
Mais les services de renseignements
russes et occidentaux pensent que leur
nombre serait en réalité beaucoup plus
élevé. Il dépasserait les cent mille.
Les autorités
syriennes affirment que des combattants
de près de 80 pays se trouvent
actuellement en Syrie. Evoquant les
effectifs de certains de ces contingents
étrangers, une source syrienne citée par
le quotidien koweitien Al-Raï donne les
précisions suivantes: 4800 Saoudiens,
4500 Irakiens (essentiellement
originaires des provinces d'Al-Anbar et
de Salaheddine), 3000 Palestiniens, 2700
Tunisiens, 2000 Algériens, 800
tchétchènes, 350 koweitiens, 1100
Indonésiens, 400 Afghans, 1300 Européens
et des dizaines d'Américains.
Les déclarations des
ministres et autres responsables
européens sur le phénomène des
«islamistes radicaux» se rendant en
Syrie ne se comptent plus. De même que
les informations faisant état du
démantèlement de filières chargées du
recrutement et du voyage de «jihadistes»
dans ce pays, pour aller combattre
l'armée régulière. Ils viennent
d'Espagne, de Belgique mais aussi de
France, à l'instar de ces cinq Français
soupçonnés d'avoir voulu braquer un
restaurant Quick pour financer leur
départ vers Damas, comme l'écrit Le
Figaro, début septembre.
Ce journal estime à
quelque 200 le nombre de Français
combattants dans les rangs de la
rébellion syrienne, «très
majoritairement au sein de groupes
islamistes radicaux». Plusieurs vidéos,
traduites en français et visionnées des
dizaines de milliers de fois, appellent
sur YouTube les Français à la «guerre
sainte» contre le président syrien
Bachar al-Assad.
Des «loups
solitaires»
Selon la presse
européennes, la France, l'Irlande et
Grande-Bretagne fournissent les plus
gros contingents de ces extrémistes.
Ramenés au nombre d'habitants, le
Danemark et la Belgique sont les pays
les plus touchés par ce phénomène.
Selon des sources
diplomatiques européennes à Beyrouth, le
nombre de ressortissants des pays
européens se battant en Syrie serait
beaucoup plus important qu'annoncé. Il y
aurait près d'un millier de Français
intégrés dans les rangs des groupes les
plus extrémistes de la rébellion,
notamment l'Etat islamique en Irak et au
Levant (EIIL, proche d'Al-Qaïda), dont
les effectifs seraient à 80% composés de
non Syriens. Il y a aussi le Front al-Nosra,
également proche d'Al-Qaïda et Ahrar
al-Cham, représentant la mouvance dite «salafiste-jihadiste».
Si la plupart de ces
apprentis «jihadistes» européens sont
d'origine arabe, maghrébine plus
particulièrement, des dizaines d'autres
sont des convertis à l'islam, comme
Nicolas, 30 ans, et Jean-Daniel, 22 ans,
les deux fils d'un chef d'entreprise
installé en Guyane.
Après avoir hurlé
dans le désert pendant des mois, les
services de sécurité européens ont
finalement réussi à se faire entendre
par les autorités politiques de leurs
Etats respectifs. A leur retour de
Syrie, ces jeunes extrémistes, dotés
d'une grande expérience militaire et
véhiculant une idéologie des plus
radicales, constituent un grave danger
pour leurs pays, surtout avec
l'apparition du phénomène terroriste dit
du «loup solitaire».
Un effort soutenu a
donc été déployé pour lutter contre ce
phénomène. Mais aussi important soit-il,
il restera insuffisant s'il n'est pas
complété par un échange d'informations
avec les autorités syriennes. En effet,
confrontés sur le terrain depuis plus de
deux ans à ces extrémistes, l'armée et
les services de sécurité syriens les
connaissant bien et sont familiers avec
leurs méthodes.
Conscients de
l'inévitabilité d'une coopération avec
Damas, plusieurs pays européens ont
réactivé, ces dernières semaines, les
canaux de contacts et de coopération
avec les services syriens concernés.
Selon des sources bien informées à
Beyrouth et à Damas, des émissaires
espagnols, italiens et belges se
seraient dernièrement rendus en Syrie
pour discuter de ce phénomène. Les mêmes
sources indiquent que les responsables
syriens ont bien accueilli les
représentants des Etats qui ont adopté
une attitude non belliqueuse vis-à-vis
de la Syrie lors des menaces d'attaques
américaines, en septembre dernier.
Toutefois, Damas a refusé de reprendre
le contact avec les pays qui étaient le
fer de lance du projet d'agression,
comme la France. Selon les mêmes
sources, Paris a essayé, via de
multiples canaux, de rétablir un contact
sécuritaire pour échanger des
informations avec la Syrie. Mais il a
essuyé une fin de non recevoir. Toute
coopération sécuritaire sera tributaire
de la position politique à l'égard de la
crise syrienne du pays qui la sollicite,
indiquent les mêmes sources.
Source :
French.alahednews
Le
dossier Syrie
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