Alahed
Les armes iraniennes qui font trembler
l’Amérique
Samer R. Zoughaib
Photo:
D.R.
Vendredi 10 juillet 2015
Lors des derniers mètres des
négociations, les puissances
occidentales tentent d'arracher à l'Iran
des concessions qui n'ont rien à voir
avec le dossier nucléaire. C'est le
programme d'armement de la République
islamique qui est dans le viseur des
Etats-Unis et de leurs alliés. Mais de
quoi ont-ils peur en réalité?
La plupart des
questions relatives au dossier nucléaire
iranien, au mécanisme et au calendrier
de la levée des sanctions, ainsi qu'au
processus de surveillance, ont été
réglées entre les grandes puissances et
l'Iran. Pourtant, l'accord final tarde à
voir le jour et les pourparlers ont une
nouvelle fois été prorogés jusqu'au
vendredi 10 juillet. En réalité, les
Occidentaux tentent d'arracher à l'Iran,
dans les derniers mètres de la
négociation, des concessions dans
l'espoir d'entraver l'industrie
militaire iranienne.
«Les Occidentaux
insistent pour que non seulement les
sanctions soient maintenues sur le
programme (iranien) de missiles
balistiques, mais aussi pour que l'Iran
suspende ce programme», a dit un
responsable iranien, cité par les
agences de presse internationales.
«L'Iran veut défendre ses droits et
demande que toutes les sanctions,
notamment celles qui concernent les
missiles balistiques, soient levées.»
«Les Iraniens veulent
une levée des sanctions sur les missiles
balistiques. Ils disent qu'il n'y a pas
de raison de les lier à la question du
programme nucléaire. C'est une opinion
qu'il est difficile de partager», a pour
sa part déclaré à Reuters un responsable
occidental.
Plus royaliste que le
roi, le ministre français des Affaires
étrangères, Laurent Fabius, qui joue aux
durs, a réclamé que des limitations
soient imposées aux secteurs de la
recherche et de la production militaires
en Iran. Des conditions que la
République islamique ne peut en aucun
cas accepter.
L'attitude des
Occidentaux reflète leurs craintes des
capacités militaires que l'Iran a
développées ces dernières années dans
presque tous les domaines. Et ils ont
raison d'avoir peur, car la République
islamique dispose d'un arsenal dissuasif
efficace et performant, capable
d'assurer la défense du pays contre
toute agression. Zachary Keck, directeur
de la rédaction de la revue américaine
National Interest, a publié une longue
enquête intitulée «5 armes de guerre
iraniennes que l'Amérique devrait
craindre».
Le chercheur souligne
que pour compenser la supériorité des
Etats-Unis, dont les dépenses militaires
représentent deux fois la taille du PIB
de l'Iran, la République islamique a mis
au point «une doctrine militaire basée
sur la dissuasion, reposant sur trois
types de capacités: un arsenal de
missiles balistiques, la guerre navale
asymétrique (en particulier la menace de
la fermeture du détroit d'Ormuz), et des
liens avec des groupes militants
non-étatiques, comme le Hezbollah et la
Hamas».
Les missiles Sajil
La vaste panoplie de
missiles balistiques conçus ou
développés par l'Iran constitue, selon
M. Keck, la pièce-maitresse de l'arsenal
dissuasif iranien.
Parmi ces missiles, il y en a un qui
retient particulièrement l'attention de
l'expert américain, le Sajil, un missile
à deux étages.
Selon lui, le Sajil-1 (et son
successeur, le Sajil-2) devraient
inspirer la plus grande crainte. Le
Sajil-1, testé pour la première fois en
2008, est un missile de surface, de
moyenne portée. Contrairement aux
missiles Chéhab, il est propulsé grâce à
un combustible solide, ce qui réduit
considérablement son temps de lancement,
tout en améliorant sa mobilité.
Dans une déposition au Congrès en
novembre 2009, le secrétaire américain à
la Défense de l'époque, Robert Gates,
avait déclaré que le Sajil aura une
portée d'environ 2000 à 2500 kilomètres.
A cette distance, ce missile peut
transporter une charge utile de 750 kg
d'explosifs, capable d'atteindre
«Israël» et même certaines parties de
l'Europe du sud-est.
Le Sajil-2, testé pour la première en
2009, est probablement encore sous
développement. Citant «Global security»,
Zachary Keck indique que le «Sajil-2,
monté sur véhicule, a une portée de 2510
km avec une ogive tri-conique 650 kg».
Il peut également transporter une ogive
de 1000 kg à une distance de 2000 km.
«Mais le grand progrès du Sajil-2 est sa
précision, ajoute M. Keck. Les
responsables iraniens de la défense
affirment que le missile est équipé d'un
nouveau système de navigation ainsi que
de capteurs précis et sophistiqués.»
Les sous-marins de poche Qadir
Le plus grand atout
de dissuasion de l'Iran est sa capacité
à menacer les livraisons de pétrole dans
le détroit d'Ormuz, par où transitent
environ 20 pour cent des
approvisionnements mondiaux
d'hydrocarbures.
Zachary Keck rappelle que selon
certaines estimations, «les Etats-Unis
ont dépensé quelque 8000 milliards de
dollars depuis 1976 pour protéger le
détroit d'Ormuz». Citant ensuite
«l'Institut pour les études de la
guerre», il ajoute que «dans les eaux
étroites et peu profondes du Golfe
persique, la capacité à déployer des
sous-marins menace efficacement les
navires de surface». Or l'Iran possède
différents types de sous-marins.
Toutefois, la flotte de submersibles de
poche de 150 tonnes de la classe Qadir
serait particulièrement meurtrière lors
de tout conflit. La petite taille et la
signature acoustique de la classe Qadir
rendent difficile sa détection. Chaque
submersible est doté de deux tubes de
torpille de 533 mm, est capable de poser
des mines et, selon les médias iraniens,
pourrait être utilisé pour transporter
et débarquer des forces spéciales en
territoire ennemi. L'Iran disposerait au
moins de vingt sous-marins de la classe
Qadir, selon l'expert américain.
Le missile Khalij-Fars
La troisième arme la
plus redoutable des Iraniens, toujours
selon M. Keck, est le missile balistique
sol-mer Khalij-Fars. Propulsé avec du
combustible solide, ce missile
antinavires est supersonique, d'une
portée de 300 km en transportant une
charge utile de 650 kg. Il est inspiré
du Fateh-110, un missile sol-sol à un
étage à propergol solide, que l'Iran a
testé en 2002.
Les médias iraniens ont décrit le Khalij-Fars
comme le «missile le plus avancé et le
plus important de la marine». Sa
particularité réside dans sa vitesse
supersonique et sa trajectoire. Alors
que les autres missiles se déplacent à
des vitesses subsoniques et dans le
style de croisière, Khalij-Fars se
déplace verticalement après le
lancement, vole à des vitesses
supersoniques, trouve la cible à travers
un programme informatique sophistiqué,
avant de la frapper.
Zachary Keck déclare que le général de
brigade Amir-Ali Hajizadeh, de la
Division aéronautique du Corps des
Gardiens de la Révolution, a indiqué que
l'Iran avait augmenté la précision du
Khalij-Fars de 30 mètres à 8,5 mètres.
Le S-300
Après la visite du
ministre russe de la Défense Sergueï
Choïgou à Téhéran, au printemps dernier,
la Russie a annoncé qu'elle vendra
«probablement» à l'Iran le missile
sol-air S-300. Le président
Vladimir Poutine devait lui-même
confirmer cette décision, quelques
semaines plus tard. Zachary Keck affirme
qu'il s'agit là d'un «développement
inquiétant pour les Etats-Unis et leurs
alliés».
Le S-300 est un missile à longue portée
très performant. Chaque lanceur
transporte six missiles de fabrication
russe d'une portée de 150 km et capable
de frapper des cibles à des altitudes
comprises entre 27 et 30 km. Les camions
dotés de radars peuvent suivre
simultanément jusqu'à six cibles à 300
km de distance et guider douze missiles.
Bien que soumis à des sanctions depuis
des années, l'Iran a réussi à développer
des armes redoutables qui font trembler
ses ennemis. Que ferait-il si les
sanctions étaient levées? On comprend,
dès lors, pourquoi les puissances
occidentales tentent de les maintenir,
voire de les étendre à d'autres secteurs
de l'industrie de l'armement, qui n'ont
rien à voir avec le programme nucléaire
iranien.
Source :
French.alahednews
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