Les 7 du Québec
Il y a 50 ans,
la «Révolution culturelle prolétarienne»
en Chine
Robert Bibeau
Mercredi 24 août 2016
http://www.les7duquebec.com/...
Que
devrait-on commémorer ?
« Il
y a 50 ans s’amorçait la Grande
révolution culturelle prolétarienne en
République populaire de Chine. Pendant
plus de 10 ans (1966-1976), des millions
d’étudiants et d’étudiantes, de
prolétaires, de femmes, de paysans et
paysannes, dans tous les coins de la
Chine, répondant à l’appel du quartier
général révolutionnaire dirigé par Mao
Tse Toung, se mettront en mouvement pour
défendre et consolider les avancées du
socialisme. » déclare le communiqué
qui invite à commémorer cet évènement
(1). Justement, se questionne-t-on,
quelles ont été les avancées du
socialisme en Chine depuis 1966 et même
avant ?
« Les
effets de la Révolution culturelle ne se
sont pas limités à la Chine. En effet,
tout comme la révolution d’Octobre en
Russie a marqué le monde en son temps,
la Révolution culturelle a marqué tout
une période historique, notamment par la
conjonction des luttes des peuples dans
les pays dominés par l’impérialisme et
la lutte de la jeunesse, du mouvement
des femmes et du prolétariat dans les
principaux pays occidentaux, conjonction
de lutte qui viendra ébranler les
principales citadelles du capitalisme. »
poursuis le communiqué d’invitation à la
manifestation. Il sera intéressant de
connaitre comment ces militants
apprécient « L’ébranlement des
principales citadelles du capitalisme » que
pour notre part nous n’avons pas
observé ! La crise économique du
capitalisme fait rage en effet, mais les
citadelles tiennent bon, et il en sera
ainsi tant que la classe prolétarienne
ne se sera pas mise en ordre de marche
insurrectionnelle.
Visite de Nixon et
de Kissinger auprès du
Grand Timonier
Il
nous semble qu’en 1976 le mode de
production capitaliste – en phase ultime
impérialiste – était toujours bien en
scelle dans tout l’Occident, au sein du
bloc de l’OTAN, en Chine,
en URSS, dans le bloc du
Comecon et dans le monde entier (2).
En 1972, deux des plus grands criminels
de guerre de l’histoire américaine,
Richard Nixon et Henry Kissinger,
ont rendu visite au Grand Timonier,
le grand prêtre du « maoïsme », alors au
cœur de la tempête
« culturelle prolétarienne » (sic).
Quelles furent les retombées
« révolutionnaires » de ces courtoisies
diplomatiques et de ces tractations
politiques demande-t-on (3) ?
« Aujourd’hui,
loin de nous l’idée d’être des
nostalgiques du passé. En effet, nous
profitons de cet anniversaire non pas
pour refaire l’histoire, mais plutôt
pour faire l’histoire en mettant en
relief les avancées de la révolution
culturelle, en particulier les
principales innovations amenées par les
masses et synthétisées dans le maoïsme.
Comme en fait foi la charge de certains
médias bourgeois cherchant à faire de
Mao le plus grand dictateur de tous les
temps, la bourgeoisie impérialiste a eu
peur de la Révolution culturelle. De
même, le système capitaliste mondial
reposant sur l’économie chinoise, on
comprendra que les révisionnistes en
Chine craignent que les masses se
réveillent de nouveau et se
souviennent d’une des idées phares de la
révolution culturelle, à savoir que : ce
sont les masses prolétariennes qui
doivent diriger la société, toute la
société et exercer une dictature
intégrale sur la bourgeoisie ! » (4)
On
aura remarqué que les laudateurs du « maoïsme »
– l’appellation qu’ils attribuent au
courant idéologique capitaliste
nationaliste en Chine – se glorifient
des conquêtes économiques de la Chine en
phase impérialiste. En effet, même si en
difficulté, les capitalistes chinois
représentent aujourd’hui le fer-de-lance
de l’économie politique capitaliste
globalisée. C’est l’ensemble du monde
impérialiste mondialisé qui est en crise
et la Chine capitaliste ne fait pas
exception, mais elle semble résister
mieux que ses comparses. C’est là un
héritage de la Grande révolution
culturelle (5).
Comment
passer d’une «révolution prolétarienne»
au révisionnisme bourgeois ?
Pour
avoir assisté à nombre de discussions
sur la question de la « Grande
révolution culturelle prolétarienne »,
je sais par expérience, que les exégètes
maoïstes escamotent la question du
passage de la « Révolution
prolétarienne communiste » aux
« révisionnistes au pouvoir
», ces malfrats, soi-disant sans origine
de classe, qui auraient usurpé le
pouvoir des masses (sic) et qui
aujourd’hui craindraient que les « masses se
réveillent à nouveau ! » Difficile
d’expliquer quand, comment et pourquoi
des « masses populaires » en pleine « Révolution
culturelle prolétarienne »
s’endorment brusquement, et comment
après dix années « d’effervescence
révolutionnaire », alors que « les
masses prolétariennes dirigent
toute la société et exerce une
dictature intégrale sur la bourgeoisie ! »,
émerge soudainement une puissance
capitaliste à nul autre pareil ! En
effet, peu de gens parmi les maoïstes et
les économistes d’Occident réalisent que
la Chine contemporaine avec ses 350
millions de prolétaires déjà aliénés et
sa réserve de 350 millions de paysans à
prolétariser, est déjà la première
puissance industrielle du monde
capitaliste et en voie de devenir la
première puissance économique du monde
impérialiste (6). C’est probablement le
plus grand héritage légué par la
Grande révolution culturelle
prolétarienne. Ce qui en définitive
amène la question de la vraie nature de
la Révolution de démocratie
nouvelle en Chine. La Révolution
chinoise de 1949 fut-elle une révolution
prolétarienne – sans prolétariat (?) –
ou fut-ce une révolution antiféodale des
masses paysannes analphabètes et
affamées, dirigées par la bourgeoisie
nationaliste chauvine et que le Parti
communiste chinois avait la prétention
de transformer en révolution
socialiste ? (7)
La
vraie nature de la Révolution culturelle
Les
fondements de la Révolution culturelle
n’étaient pas culturels, politiques ou
idéologiques. La Grande révolution
culturelle prolétarienne fut d’abord
une guerre économique entre quelques
factions de la bourgeoisie au pouvoir à
travers le Parti communiste de Chine et
à travers l’immense appareil étatique
capitaliste chinois. La clique
nationaliste (dirigée par Mao Zedong),
tenante du « socialisme à la chinoise
et du Grand bond en avant » (8), eut
l’idée de lancer une offensive
désespérée contre les cliques adverses,
tenantes d’un développement économique
mondialisé. Une faction bourgeoise fut
rapidement disqualifiée par l’éviction
de Liu Shaoqi, et l’assassinat de
Lin Biao, tenant du développement
capitaliste à la bolchévique, de concert
avec l’Union soviétique et le bloc du
Comecon (9). Restait la clique
entourant Deng Xiao Ping, l’homme
aux devises opportunistes « Peu
importe que le chat soit noir ou qu’il
soit gris – pourvu qu’il attrape les
souris et Enrichissez-vous »
(10). Deng Xiao Ping était
Premier secrétaire du Parti, exactement
comme Staline en son temps.
Deng croyait fermement que la voie
chinoise vers le développement
économique n’était pas du côté de la
Russie et du Comecon, ni du côté
des « non-alignés », comme le
préconisait Chou Enlai, ces
« non-alignés » bien alignés d’un côté
ou de l’autre des alliances
impérialistes,
États-Unis-Atlantique-Otan ou
URSS-Comecon-Pacte de Varsovie
(11). Sous le mode de production
capitaliste qui domine la planète toute
entière pas de place pour une troisième
voie politique – une bourgeoisie
nationale adhère à une alliance
capitaliste ou à une autre. C’est ce que
Mao admettra finalement, en 1972,
en recevant les criminels de guerre
occidentaux Kissinger et Nixon
à Pékin. La clique de Deng venait
de remporter une victoire définitive sur
les nationalistes chauvins de la
Bande des quatre, abandonnée par
leur Grand Timonier (12).
Le développement économique de la Chine
allait désormais se concerter avec
l’alliance impérialiste occidentale. Ce
fut un choix judicieux de la part de
Deng et de ses acolytes puisqu’en
1989 l’alliance impérialiste soviétique
s’effondrait avec ses « Murs » et ses
« ours en papier » comme aimait les
qualifier Mao, le père du
national-socialisme à la chinoise, qui
préféra transiger avec les « tigres en
papier » occidentaux (13).
La voie
bourgeoise chinoise vers l’impérialisme
mondialisé
Deng et sa faction capitaliste
prendront encore six années (1972-1978)
avant de revenir aux affaires et
terminer la conquête du pouvoir
économique et politique, d’abord au sein
du parti, puis à l’intérieur de
l’immense État bourgeois chinois et de
compléter le virage économico-politique
en attirant le capital occidental pour
qu’il vienne exploiter la force de
travail chinoise à bon marché
(délocalisation-relocalisation). Deng
– le Staline de l’empire du
Milieu – avait compris que le
capital chinois se développerait plus
rapidement en fusionnant avec le capital
d’Occident, beaucoup plus abondant ;
sans compter les marchés occidentaux en
plein développement alors que ceux de
l’alliance soviétique allaient
déclinant. De plus, il apparaissait déjà
évident que l’alliance impérialiste
russe avait déjà perdu la bataille de la
mécanisation-robotisation-informatisation
de la production, et donc de la
productivité, source actualisée de la
plus-value sous l’impérialisme
mondialisé (14). Ce n’est pas sous les
coups de l’affrontement politique,
diplomatique ou militaire, ou sous les
coups de la « Guerre des étoiles »,
et autre fadaise reaganienne que
l’empire soviétique s’écroula, mais dans
la guerre à la productivité du travail
salarié que la Russie perdit son pari.
Avec Deng aux commandes tout
allait changer après la défaite des
maoïstes nationalistes et la fin de la
Grande Révolution culturelle
prolétarienne, en rien une
révolution (une révolte de palais tout
au plus), aucunement culturelle, et
encore moins prolétarienne.
Les
capitalistes en Chine depuis la mal
nommée GRCP
C’est
ainsi que la Grande révolution
culturelle prolétarienne – sur
laquelle le prolétariat chinois n’eut
aucune emprise, jouant simplement les
faire valoir – s’éteignit peu à peu,
retournant les enfants, les étudiants,
la petite bourgeoisie intellectuelle,
politique et bureaucratique à leur
servage de classe où elles pourrissent
encore aujourd’hui. Depuis 1989, et les
évènements de la Place Tian’anmen,
il est peu probable que la clique
bourgeoise au pouvoir à Pékin, où le
nombre de millionnaires et de
milliardaires s’accroit régulièrement,
craigne qu’une nouvelle clique
capitaliste nationaliste parvienne à
relancer enfants, étudiants et
intellectuels à la conquête du pouvoir
de l’appareil d’État, complètement
occupé que sont ces gens à travailler, à
consommer et à se concurrencer pour
obtenir une sinécure parmi la hiérarchie
du Parti (15).
Les
maoïstes occidentaux devraient savoir
qu’une révolution sociale ne provient
jamais de la superstructure – de
l’idéologie – de la culture ou des
rapports sociaux de production, pour
s’étendre ensuite à l’infrastructure et
aux forces productives sociales. C’est
toujours l’inverse qui se produit. Ce
sont les transformations subies dans
l’infrastructure économique qui engendre
des bouleversements dans les rapports de
production, la culture et la politique
notamment, qui provoquent des tensions
sociales que l’État bourgeois est censé
endiguer, canaliser ou réprimer, ce que
l’Armée Populaire de Chine a
assuré (16). Les tenants du maoïsme,
tout comme ceux qui spéculent à propos
de la trahison « révisionniste »
khrouchtchévienne des années cinquante
en Union soviétique devraient se
rappeler que des bouleversements
importants dans la superstructure
sociale ont toujours une origine de
classe et que les classes sociales ont
leurs sources dans l’infrastructure de
production (17). Écartons les
explications antimatérialistes
alambiquées du type : « coup d’État
orchestré par une bourgeoise
spontanée ». Une clique de dirigeants
révisionnistes n’apparait jamais
spontanément – elle mature longuement à
la faveur du développement du mode de
production, d’échanges et de
communication. Si ce mode de production
est capitaliste alors tôt ou tard, comme
en Russie et en Chine, et dans les
autres pays dits « socialistes », les
rapports de production et la direction
de classe de l’État s’ajusteront aux
nécessités du mode de production.
In
memoriam à la Grande révolution
culturelle prolétarienne des
Gardes rouges et du petit
Livre rouge des mantras, des
sourates et des versets de la gauche
populiste écarlate. La Grande
révolution culturelle prolétarienne
a marqué l’émergence victorieuse du
capitalisme d’État et la défaite totale
et définitive des reliquats de
féodalisme qui entravaient le
développement économique de la Chine
impérialiste dont on observe maintenant
les résultats.
Il est
indéniable qu’aujourd’hui, en Chine
capitaliste, la classe prolétarienne se
développe rapidement, ce qui n’était pas
le cas en 1949, et pas beaucoup plus en
1966. Les contradictions du
développement économique impérialiste
font murir, là-bas comme ici, les
conditions de la révolution
prolétarienne mondiale à laquelle – il
ne fait aucun doute – le prolétariat
chinois contribuera vaillamment.
(1)
Communiqué du Parti communiste
Révolutionnaire (PCR) 2016.
https://www.facebook.com/events/551278555061498/
et
https://www.facebook.com/maison.normanbethune/
et
http://www.vp-partisan.org/article1619.html
(2)
OTAN.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Organisation_du_trait%C3%A9_de_l%27Atlantique_nord
Comecon.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Conseil_d%27assistance_%C3%A9conomique_mutuelle
(3)
https://fr.wikipedia.org/wiki/Visite_de_Richard_Nixon_en_Chine_en_1972
http://sites.arte.tv/mysteresdarchives/fr/1972-richard-nixon-en-chine-mysteresdarchives
(4)
Communiqué du Parti communiste
Révolutionnaire (PCR) 2016.
https://www.facebook.com/events/551278555061498/
et
https://www.facebook.com/maison.normanbethune/
et
http://www.vp-partisan.org/article1619.html
(5)
La crise économique en Chine (2016)
http://www.les7duquebec.com/actualites-des-7/chine-un-systeme-qui-se-fissure/
(6)
L’économie chinoise (2016)
http://www.les7duquebec.com/actualites-des-7/chine-premiere-puissance-industrielle-mondiale/
(7)
http://french.china.org.cn/archives/chine2007/2007-12/23/content_9419879.htm
et
https://fr.wikipedia.org/wiki/Mao_Zedong
(8)
Grand bond en avant
(1958-1960)
https://fr.wikipedia.org/wiki/Grand_Bond_en_avant
(9)
Lin Biao.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Lin_Biao
Liu shaoqi
https://fr.wikipedia.org/wiki/Liu_Shaoqi
(10)
https://fr.wikipedia.org/wiki/Deng_Xiaoping
(11)
Le mouvement des pays non-alignés
https://fr.wikipedia.org/wiki/Mouvement_des_non-align%C3%A9s
(12)
La Bande des quatre
https://fr.wikipedia.org/wiki/Bande_des_Quatre
(13)
Dislocation de l’URSS
https://fr.wikipedia.org/wiki/Dislocation_de_l%27URSS
(14)
La productivité du travail
http://www.les7duquebec.com/7-dailleurs/aujourdhui-la-productivite-du-travail-double-tous-les-dix-ans/
et
http://www.les7duquebec.com/7-au-front/profits-trop-eleves-comment-dilapider-ces-deniers-mal-acquis/
(15)
Place Tian’anmen (1989)
https://fr.wikipedia.org/wiki/Place_Tian%27anmen
(16)
https://fr.sputniknews.com/presse/201604281024589755-chine-reforme-armee/
(17)
https://fr.wikipedia.org/wiki/Nikita_Khrouchtchev
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