Opinion
Entente Iran – États-Unis sur le
nucléaire
Robert Bibeau

Robert
Bibeau
Mercredi 8 avril 2015
http://www.les7duquebec.com/...
Les géostratèges s’égarent
Voici que les géostratèges
s’agiotent et tentent de comprendre les
tourments de la politique américano
-Européenne au Moyen-Orient. Tout un
chacun devise à propos des intentions
cachées des différents camps engagés.
Pour ces gens, la politique est un
divertissement pour grands manants – et
certains pleurniches qu’on les traite de
«conspirationnistes» – alors que
d’autres se questionnent sur les
objectifs de ces tractations (1).
«On nous cache de plus en plus de
choses et les nouvelles sont filtrées,
même à la BBC! L’impression est que
l’alliance fragile USA-Union-Européenne
se cherche des ennemis pour se
justifier et qu’elle est en train de
trop en créer : Afghanistan,
Irak, Syrie, Yémen, Libye, État
islamique + radicalisation turque,
Kurdistan et conflit avec la Russie…
Allons-nous vers une guerre mondiale
apocalyptique à plus ou moins longue
échéance impliquant le bloc USA-Union
Européenne contre la Chine et la Russie
? » (2)
Vous aurez compris qu’ici l’expert de
salon propose un sophisme comme
explication à ses
supputations. L’alliance É.-U. –
Union-Européenne se chercherait des
ennemis comme une bande d’amis se
cherche des ennuis sur les quais de
Miami (!) Il y a là comme une absurdité.
Les bourgeoisies milliardaires
mèneraient la guerre pour se distraire,
pour le plaisir de s’unir et de
justifier leur alliance décevante (?) Le
pendant de ce salmigondis est bien
compris, il suffirait à la première
occasion électorale venue de changer
d’un Président «faucon»
à un Président «moron»
pour changer la politique d’une nation
(sic). Pourtant, à la dernière occasion
les États-Unis ont changé leur président
faucon (Georges W. Bush) par la colombe
Barak Obama (sic) et rien n’a changé
dans la politique de la classe
capitaliste américaine en faillite. On a
pu observer la même fumisterie
électoraliste bourgeoise en République
démocratique de France citoyenne, au
Royaume-Uni monarchique, au Canada
parlementaire, etc.
La guerre est le prolongement
de la politique.
La guerre est le prolongement
de la politique. La
politique est le prolongement des
conflits économiques entre
multinationales milliardaires
concurrentes. L’alliance É.-U. – Canada
– Union européenne a été conçue pour
défendre les intérêts économiques des
conglomérats impérialistes
transatlantiques. Voilà le motif de
l’existence d’une alliance militaire
comme l’OTAN.
L’alliance économique transatlantique (Traité
de libre-échange de l’Atlantique Nord)
vise la conquête de marchés, de zones de
ressources et de secteurs de
valorisation de la plus-value (3).
Cette alliance économique
d’abord, politique
par la suite et
diplomatique et militaire
ensuite, ne peut mener ces agresseurs, à
la fois «alliés» et «adversaires», qu’à
attaquer les alliances concurrentes et à
agresser certains pays à leurs
frontières (Serbie, Afghanistan, Irak,
Ukraine, Syrie, Iran, etc.).
Il est véridique que l’économie
politique des États-Unis et de l’Europe
décline et que la crise économique
systémique – soit l’incapacité de
valoriser le capital-profit – force les
grandes puissances à attaquer leurs
concurrents d’Orient et d’Occident
entrainant la création de nombreux
fronts d’agression, ce qui constitue la
conclusion et non l’initiation de ces
collusions.
S’unir pour attaquer et
partager
Les puissances impérialistes
déclinantes ne mènent pas ces guerres de
rapines pour justifier leur union. Elles
s’unissent afin d’écraser et de
soumettre leurs concurrents et pour
s’emparer de leurs marchés, de leurs
sources de matières premières et de
leurs secteurs de valorisation des
profits. Ainsi, nous le disions dans un
article précédent – la tactique
d’encerclement de la Russie par
l’impérialisme américain et européen
conjoint ne vise pas à détruire la
Russie, mais à la contraindre de se
détacher de la Chine et à rejoindre le
camp Trans Atlantique (4).

L’agression
américaine en Ukraine vise à rapprocher
les têtes nucléaires de l’OTAN
des bases militaires russes. L’agression
américaine et européenne contre la Syrie
vise à fermer la base militaire russe de
Tartous. Si
demain Bachar al Assad répudiait le
traité qui permet aux navires de guerre
russes de mouiller dans les eaux
syriennes, ce chef d’État honni par le
Pentagone deviendrait un interlocuteur
valable pour Washington. En Afghanistan,
quand les talibans ont finalement
accepté de négocier et de collaborer
avec les services secrets américains
pour couper les oléoducs russes situés à
proximité de leurs frontières, et pour
interdire toute construction d’oléoducs
iraniens à destination de la Chine, ils
sont soudainement devenus des
interlocuteurs crédibles pour
l’impérialisme américain.

Comme le butin n’est pas suffisant
pour tous les goinfres, et que les
attaques pour étendre les zones
d’influence ne donnent pas les succès
escomptés, cela entraine des
divisions parmi les partenaires
(USA – Canada – UE). Les Européens
trouvent que l’ogre américain avale plus
que sa part du carnage. Ce à quoi
rétorque le Pentagone, leurs troupes de
choc et leurs drones accomplissent le
gros de l’ouvrage. À compter du mois
d’avril, le Canada lancera donc ses F-18
dans le ciel d’Irak et de la Syrie pour
agresser les troupes syriennes et
irakiennes, et en soutien à
DAESH et à
l’État Islamique. On
pourrait en dire autant des autres pays
de l’OTAN engagés dans ce bourbier.
L’histoire de la lutte de
classe
Chacun l’aura remarqué, les É.-U. ont
leurs propres objectifs et leurs propres
priorités dans ce charnier. Ce sont eux
qui sont sur la touche et au bord du
gouffre – le dollar étant floué de tout
côté –. Ils agressent donc et perdent du
terrain sur tous les fronts. Nous
assistons au changement de la garde
hégémonique impériale et ces
changements se font rarement dans le
calme et la sérénité.
L’impérialisme européen joue le
second violon dans ces malversations,
car ces nations ont moins à perde que
leur champion. Aussi, les pays de la
vieille Europe impérialiste sont plus
accommodants avec certains
belligérants, alors que les
impérialistes américains sont très
occupés à assassiner parce que
désespérés. C’est le dollar qui est mis
à mal et c’est l’hégémonie étatsunienne
qui est ostracisée dans le monde entier,
de la frontière afghane jusqu’en
République Centre Afrique.
Les géostratèges du dimanche
constatant la multiplication des fronts
de résistance locale, nationale et
régionale – et croyant la puissance
américaine invulnérable – imaginent que
cette profusion de fronts procède d’un
plan ourdi – d’une machination – pour
produire du chaos et pour multiplier les
foyers de résistance aux complots. Les
comploteurs, les géostratèges amateurs,
et les équilibristes du cataclysme
oublient simplement que
l’histoire des sociétés est l’histoire
des luttes de classe. Ceci
signifie que pour chaque complot ourdi
par une clique impérialiste – divers
autres complots sont ourdis par les
cliques impérialistes concurrentes et
chacune de ces conjurations entraîne des
résistances locales, nationales et
régionales parmi les classes assaillies
par ces manigances violentes.
Le micmac en Irak
Analysons la seconde guerre de la
coalition américaine contre l’Irak
capitaliste (2003). La grande
bourgeoisie irakienne, refusant de jouer
plus longtemps les supplétifs après
qu’elle eut perdu la guerre des années
1980 contre l’Iran, l’intendance
américaine pensa qu’elle pourrait
changer de paladin à la tête de cet État
pantin. La première manche jouée dans
une guerre conventionnelle où la
puissance de feu américaine était
infiniment supérieure à celle d’un
adversaire équipé des restants de
l’armement étatsunien fut un succès
facile et éclatant pour la «Coalition».
Rapidement les milices
chiites – sunnites – kurdes – wahhabites
– djihadistes s’organisèrent,
chacune soutenue par différentes
puissances étrangères, et par diverses
factions et clans de la bourgeoisie
irakienne déchue. Le quotidien de ce
pays se transforma en une guerre civile
fratricide où la classe ouvrière et la
paysannerie servirent de chair à canon à
l’encontre de leurs intérêts profonds.
Tout cela ne visait pas à appliquer la
stratégie du complot et du chaos (sic).
Cette guérilla se développa à l’encontre
de la tactique étatsunienne qui n’est
jamais parvenue à faire de ce pays une
base stable pour attaquer la puissance
iranienne qui veillait au grain.
Après des millions de morts,
d’estropiés et de réfugiés, et après des
centaines de milliards de dollars
dilapidés, la puissance américaine se
retira sans avoir rien accompli de ses
projets de faire de ce pays une base
d’agression contre l’Iran. Pire, c’est
l’Iran qui, à la faveur de la guerre
civile, gagna la partie et fit du
gouvernement Maliki et des milices
chiites les gérants de ce pays conquis.
Les États-Unis ourdirent une tactique
alternative par la création d’un État
islamiste voyou regroupant les restants
de leurs milices irakiennes et syriennes
regroupées à la frontière entre les deux
pays détruits.

Entre temps, les puissances
occidentales avaient ouvert un second
front en Syrie dans l’espoir
d’éparpiller les efforts de l’Iran
sur plusieurs fronts. Le Pentagone
croyait venir à bout facilement du
gouvernement syrien en soutenant des
paladins européens errants et quelques
malandrins pétaradants aux frontières du
pays avec la Turquie et avec la
Jordanie. Mal leur en prit. La Russie
refusa le compromis et maintient sa base
navale en Syrie. Pire, la Russie
équipa l’armée syrienne de missiles
antiaériens efficaces ce qui fit reculer
l’aviation étatsunienne et israélienne.
Quant à l’Iran, cette puissance
capitaliste, elle maintient son soutien
à ses milices aussi bien en Irak, au
Liban qu’au Yémen et en Syrie.
Nous en sommes là aujourd’hui. L’Iran
a lancé le Hezbollah
du Yémen contre la coalition
américano-saoudienne. L’Iran a lancé le
Hezbollah d’Irak contre
Daesh et
l’État islamique, alors
que l’armée syrienne, aidée par le
Hezbollah, bloque la fuite de Daesh vers
l’Ouest. La frontière turque sera
bientôt leur seule porte d’évasion ce
qui ne plaît pas du tout aux
capitalistes turques qui sont à repenser
leur soutien à ces milices terroristes
financées par le Qatar, l’Arabie
Saoudite, les États-Unis et la France.
Pour les oligarques turques, une guerre
de clans en Syrie peut être encouragée,
mais pas question que ce conflit soit
exporté vers le Kurdistan Turque (5).
Nos pronostics
Nous prévoyons que les milices du
Hezbollah contiendront les milices
terroristes (Turquie, Arabie, Qatar,
Jordanie, France, États-Unis) et que la
Turquie se retirera de ce conflit contre
la promesse que le Kurdistan irakien ne
s’étendra pas au-delà. L’Irak
sera sous contrôle iranien et vendra son
pétrole en devises américaines. La
Syrie sera
pacifiée et les milices sanguinaires
massacrées ou chassées du pays via la
Jordanie. La main tendue par les
États-Unis à Bachar al Assad laisse
entrevoir l’issue du conflit, au grand
dam des impérialistes français qui se
seront fait flouer. La go-gauche de
l’Hexagone l’avait prédit. La gauche
parisienne n’en finit plus de réclamer
une meilleure défense des intérêts de la
patrie face à la perfide Albion des
Anglo-saxons (sic).
L’accord sur le nucléaire
iranien
Et voici que les États-Unis laissent
tomber leurs proches alliés, l’Arabie
Saoudite, le Qatar et Israël, l’immortel
fraternel (sic) pour s’aboucher avec l’Iran
des mollahs milliardaires et vindicatifs
dans une entente à propos du nucléaire
iranien dont les Américains n’étaient
préoccupés que pour faire chanter ce «non-aligné».
L’entente avec l’Iran comprend des
clauses publiques et des clauses
secrètes qui stipulent probablement que
l’Iran utilisera le dollar américain
pour ses échanges pétroliers (6).
L’Union européenne aura été trahie
par son «ami» en hégémonie dans cette
suite de conflits que l’Occident ne
pouvait pas gagner depuis que leur
champion est en perdition. La Russie a
renforcé ses positions en Syrie sauf que
son rapprochement avec l’Iran en sort
ébranlé (7).
Les capitalistes chinois seront
restés derrière les rideaux même si ce
sont eux qui sont interpellés. Les
Chinois poursuivent frénétiquement leurs
préparatifs de guerre en prévision de
l’affrontement inévitable qui pourrait
voir triompher le prétendant au titre de
champion de l’impérialisme moribond,
accordant un sursis à ce mode de
production en perdition.

La classe
ouvrière internationale subit
passivement ces guerres entre puissances
militaires dont les préparatifs
s’intensifient. Saura-t-elle affronter
toutes les factions de la bourgeoisie
mondiale avant que celles-ci ne se
lancent dans un conflit atomique ? Ou
alors, comme en 1914, la classe ouvrière
internationale attendra-t-elle de
déclencher l’insurrection après
l’explosion ? Une chose est certaine
cependant, la classe ouvrière détient
entre ses mains la solution à cette
succession de carnages.
MANIFESTE DU PARTI OUVRIER »»
http://www.publibook.com/librairie/livre.php?isbn=9782924312520
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