MADANIYA
Turquie Otan 2/2 : Vers une épreuve de
force
entre Erdogan et ses anciens
lieutenants
Ahmed Daoud Oglo et Abdullah
Gül
René Naba
Jeudi 30 janvier 2020 1- Une épreuve
de force qui pourrait donner le signal
de l’ère post Erdogan.
L’intervention
turque en Syrie a mis en sourdine
l’épreuve de force engagée depuis le
printemps 2018 par Recep Tayyib Erdogan,
d’une part, et ses anciens lieutenants,
d’autre part, l’ancien premier ministre
Ahmad Daoud Oglo et l’ancien ministre
des Finances, Ali Babaçan, soutenu par
l’ancien Président de la République
Abdullah Gûl.
L’issue de ce bras
de fer pourrait déterminer la définition
du contour du pouvoir en Turquie et,
dans le cas de l’échec du président
turc, donner le signal de l’ère post
Erdogan.
Ce conflit entre
les anciens frères d’armes se déroule
sur fond du double revers électoral des
municipales d’Ankara et d’Istanbul, en
Avril 2019, en superposition à la
pulsion vindicative de l’Arabie saoudite
visant à déstabliser le régime
néo-islamiste, allié du Qatar et surtout
le dénonciateur bavard de l’équarrissage
du journaliste saoudien Jamal Khashoggi,
au consulat saoudien d’Istanbul en
octobre 2018..
Telle est du moins
l’impression qui se dégage aux
observateurs à la lumière de la vive
polémique qui a opposé Recep Tayyip
Erdogan et ses anciens plus proches
collaborateurs depuis la défaite
électorale du printemps 2018.
2 – Le
traumatisme électoral d’Istanbul
La fronde n’est pas
anodine en ce qu’elle vise un dirigeant
généralement considéré comme l’un des
plus importants de l’histoire turque,
après Ataturk, le fondateur de la
République.
Son succès
ouvrirait au tout puissant président la
voie à l’exercice d’un pouvoir
absolutiste. Son échec engagerait la
Turquie sur la voie post Erdogan.
Depuis 2002, aucun
parti politique turc, en dépit de son
ancrage et de son ancienneté, n’a pu
concurrencer le PJD. Mais la donne
paraît avoir changé.
Des tracts on fait
leur apparition en septembre 2019 à
Ankara et les grandes villes turques
annonçant la naissance de deux nouvelles
formations politiques fondées
précisemment par les deux principaux
lieutenants du président Erdogan, Ahmad
Daoud Oglo, le théoricien de la nouvelle
diplomatie ottomane de «zéro problème
avec les voisins», et Ali Babacan,
ancien ministre des finances et père de
la prospérité économique turque, qui a
valu au Parti de la Justice et du
Développement (PJD) sa grande popularité
durant les deux dernières decennies. M.
Babaçan est soutenu dans sa démarche par
M. Abdullah Gûl, ancien Président de la
république.
La démission du
PJD, en septembre 2019, de MM. Daoud
Oglo et Babaçan devrait fragiliser le
pouvoir de M. Erdogan, alors que le
président turc fait face à une
conjoncture difficile, tant en Syrie, à
la suite des revers militaires de ses
alliés relevant de la nébuleuse du
terrorisme islamique, notamment à Khan
Cheikhoun, en septembre 2018, que face à
l’Otan.
La défiance des
deux lieutenants ne porte pas tant sur
le parti au pouvoir en lui même, la
matrice originelle du néo-islamisme
ottoman, mais sur la personne même du
président qui a placé le PJD en coupe
réglée, plaçant des hommes à sa dévotion
aux principaux rouages de la formation.
Au terme d’un
trimestre d’escarmouches verbales, le
ton est brusquement monté en septembre
2019, lorsque M. Erdogan a qualifié de
«traitre» ces anciens compagnons
d’armes. Une telle accusation dans les
usages turques prélude généralement à
des représailles.
Ahmad Daoud Oglo a
alors présenté sa démission du PJD. Et,
en réplique, il a menacé de faire des
révélations «qui noirciraient les
visages des personnes visées par les
secrets étalés sur la voie publique».
«La période allant
du 7 juin au 1 er Novembre 2016 a été la
plus dangereuse de l’Histoire moderne de
la Turquie», a asssuré M. Daoud Oglo
faisant allusion aux manoeuvres du
Président Erdogan en vue de museler le
«Parti Démocratique du Peuple», grand
vainqueur des élections législatives
turques.
Selahattin
Demirtas, figure de proue de
l’opposition de la gauche démocratique
turque, a en effet été placé en garde à
vue, dans la nuit du 3 au 4 novembre
2016, au cours d’un vaste coup de filet
contre le Parti Démocratique des Peuples
(HDP), portant sur onze membres de cette
formation représentant majoritairement
les Kurdes de Turquie.
Le prétexte invoqué
par les autorités turques est leur lien
présumé avec le PKK, le Parti des
Travailleurs du Kurdistan, la bête noire
du régime.
Pour aller plus
loin sur cette affaire, cf. ce lien:
Selahittin Demirtas, figure de proue de
la gauche démocratique turque en garde à
vue
https://www.madaniya.info/2016/11/04/selahattin-demirtas-figure-de-proue-de-lopposition-de-gauche-democratique-turque-garde-a-vue/
Partenaire
réfractaire des Occidentaux, qui lui ont
barré l’accès à l’Union Européenne, la
Turquie a opéré un rapprochement
sensible avec la Russie, rival
planétaire de l’Amérique, et l’Iran, la
bête noire de l’Occident, à la faveur de
la guerre de Syrie, dans le cadre des
consultations tripartites du groupe
d’Astana.
Ce rapprochement
est intervenu dans la foulée du coup
d’état anti-Erdogan de 2015 et le
soutien accordé par les Américains et
les Français aux séparatistes kurdes de
Syrie. Il vise à prémunir la Turquie
contre toute action hostile résultant de
son rôle ambigu dans la guerre de Syrie,
principale plateforme du transit des
terroristes néo islamistes vers la Syrie
et principal volant régulateur du flux
migratoire arabe et moyen oriental vers
l’Europe occidentale.
En prévision du 2me
round des élections municipales
d’Istanbul, M. Erdogan avait multiplié
les ouvertures en direction des Kurdes,
-qu’il réprime pourtant sur le plan
interne et combat en Syrie-, allant
jusqu’à faire miroiter la possibilité de
la libération du chef historique du PKK
Abdallah Oçalan, en contrepartie du vote
de la population kurde en faveur du
candidat de son parti à Istanbul, afin
de lui sauver la mise.
Istanbul contitue
un symbole politique et un enjeu
économique. C’est à Istanbul en effet
que Recep Tayyip Erdogan a remporté son
premier succès politique, en1994. Cette
métropole fut son tremplin et le
président turc aime répéter que «celui
qui tient Istanbul tient la Turquie».
Depuis un quart de
siècle, la gestion municipale a été à la
fois la vitrine et le creuset de
l’islamisme politique turc. Un enjeu
économique, voire un enjeu financier
vital pour l’AKP, car les municipalités
– à commencer par Istanbul – alimentent
les caisses du parti au pouvoir à
travers des marchés publics.
L’opposition ayant
remporté Istanbul, elle pourrait trouver
des dossiers embarrassants dans les
archives.
3- La création
de «Geleceki Partisi», le parti de
l’avenir, d’Ahmed Daoud Oglu et
l’émergence de Khalmed Khojja, un ancien
dirigeant de la coalition de
l’opposition off shore syrienne comme
membre fondateur du parti turc.
Un mois après
l’échec d’Istanbul, M. Ali Babacan,
figure éminente du parti, claquait la
porte de l’AKP évoquant de «profondes
divergences» avec la formation présidée
par Recep Tayyip Erdogan.
Ali Babacan a créé
un nouveau parti politique avec l’ancien
président Abdullah Gül, alors que l’AKP,
le parti islamo-conservateur au pouvoir,
est fragilisé par les difficultés
économiques et, sur le plan politique,
par la perte de la mairie d’Istanbul au
profit du Parti républicain du peuple
(CHP, opposition laïque).
Dans les
circonstances actuelles, la Turquie a
besoin d’une «vision totalement nouvelle
pour son avenir. Il faut corriger les
analyses dans tous les domaines,
développer de nouvelles stratégies, de
nouveaux plans et de nouveaux programmes
pour notre pays », a souligné Ali
Babacan dans le communiqué annonçant sa
démission de l’AKP.
« Il est devenu
inévitable d’amorcer un nouvel élan pour
le présent et l’avenir de la Turquie.
Beaucoup de mes collègues et moi
ressentons une grande responsabilité
historique », a ajouté celui qui fut
ministre de l’Economie et des Affaires
étrangères avant de devenir vice-Premier
ministre d’Erdogan entre 2009 et 2015.
4 – Khaled
Khojja, alias Al Bitkine Khoja Oglo: un
sous-marin de la Turquie au sein de
l’opposition off-shore syrienne.
Finalement, au
terme d’un semestre d’escarmouches,
Ahmed Daoud Oglu franchissait à son tour
le pas, annoncant le 13 décembre 2019,
la création de son parti «Geleceki
Partisi», le parti de l’avenir, dont le
bureau politique de nature pluraliste
est marqué par la présence de
personnalités arméniennes et alévies de
Turquie telles l’alévi Dogan Dirim. La
communauté alévie de Turquie compte 15
millions de personnes.
La grosse surprise
est venue de la propulsion d’un syrien,
Khaled Khojja, ancien dirigeant de la
coalition de l’opposition off-shore
syrienne comme membre fondateur du parti
d’Ahmad Oglo. Naturalisé turc bien avant
le soulèvement populaire de Syrie, le
syrien s’était bien gardé de révéler sa
double nationalité afin de ne pas
compromettre son ambition de présider
l’opposition soutenue par une coalition
islamo-atlantiste et de dénoncer, par
voie de conséquence, la duplicité de la
Turquie.
Khaled Khojja, qui
a dirigé la coalition de l’opposition
syrienne en 2015, a été présenté au
public lors du meeting de lancement du
parti sous le nom d Al Bitkine Khoja
Oglo. Il figurait au 17eme rang des 154
des membres fondateurs de la direction
du nouveau parti. Ce qui en fait un
membre de la garde rapprochée d’Ahmed
Daoud Oglu.
Sa double casquette
lui a permis en tout cas d’opérer un
hold up sur l’opposition off shore
syrienne pour le compte de la Turquie
dans une apparente parfaite légalité. A
«l’insu du plein gré» des services
occidentaux?
Une telle
révélation a plongé dans un profond
embarras les parrains de l’opposition
off shore syrienne, dupés par la
duplicité turque en ce qu’elle pose la
question de savoir si l’opposition
anti-Assad était présidée par un turc,
par abus de confiance d’Ankara vis à vis
de ses autres partenaires, ou si Khaled
Khojja a fait valoir a posteriori sa
nationalité turque après la déconfiture
de l’opposition off-shore syrienne et
ses parrains occidentaux en Syrie. En
tout état de cause, l’épisode Khaled
Khojja, sous-marin de la Turquie dans la
guerre de Syrie, contribue à accréditer
l’idée d’un complot international contre
le pouvoir baasiste, et discréditer
d’autant les islamophilistes français
dont le chef de file le plus en vue
n’est autre que François Burgat Burka.
Gageons que l’ancien résident français à
Damas saura théoriser une nouvelle
tortuosité intellectuelle pour justifier
cette double imposture, celle de Khaled
Khojja et la sienne propre.
Mohamad Allouche
recyclé dans la restauration haut de
gamme en Turquie.
Un autre chef de
l’opposition pétromoarchique Mohamd
Allouche, qui présida un temps
l’opposition pro-saoudienne aux
négociations internationales de Genève
sur la Syrie, ancien chef de Jaych Al
Islam, (Armée de l’Islam) (2012-2015),
qui controlait le secteur d’Al Ghoutta,
dans la banlieue de Damas, exhortant ses
troupes à combattre jusqu’à la mort pour
ne pas céder du terrain, s’est
métamorphosé à la veille du nouvel an
2020, en prospère restaurateur à
Istanbul, inaugurant en grande pompe son
luxueux restaurant de plusieurs étages
d’une valeur de vingt millions de
dollars pour une clientèle haut de
gamme.
Des activitistes
des réseaux sociaux ont lancé un appel
au boycott de ce restaurant, édifiés
grâce au «prix du sang versé par les
martyrs syriens». Un Autre de ses
collégues de Jaych Al Islam, Abou Hammam
Al Bouidani, s’est lui aussi recyclé en
Turquie, devenant un entrepreneur dans
le BTP.
Pour le locuteur
arabophone, pour aller plus loin sur
cette affaire
cf. ce lien
La naissance d’un
parti rival pourrait faire perdre
quelques points précieux à l’AKP, qui a
déjà perdu sa majorité absolue aux
élections législatives organisées il y a
un peu plus d’un an, obligeant Erdogan à
s’allier à l’extrême droite
nationaliste.
5 – Les
recommandations d’Ahmed Daoud Oglo
Intitulé
«Recommandations pour le sauvetage» du
régime, le document a été publié par le
site en ligne «Ar Rai Al Yom». «Ar Rai
Al Yom», site de l’influent journaliste
arabe Abdel Bari Atwane, a comparé la
démarche d’Ahmed Daoud Oglo à celle de
Kutchi Mohamad au Sultan Murad IV.
Pour le locuteur
arabophone,
cf. ce lien
Ahmed Daoud Oglo
considère que le régime présidentiel
instauré en Turquie à la suite du coup
d’état manqué, en 2015, a provoqué une
polarisation de l’opinion et desservi le
parti.
Il recommande de
reconsidérer le système et déplore que
la presse en Turquie soit réduite à une
fonction de «caisse de résonnace» du
gouvernement.
Dans une allusion à
peine voilée au népotisme du président
Erdogan et à sa duplicité dans le combat
contre «l’organisation terroriste
Fathallah Gulen», M. Daoud Oglo déplore
que le régime néo islamiste se soit
«écarté de nos valeurs et de nos
principes».
En fait, Daoud Oglo
a exprimé publiquement ce que bon nombre
de dirigeants turcs pensent en privé.
Par ses responsabilités antérieures,
Daoud Oglo dispose d’une solide
expérience dans les domaines de
l’économie, de la diplomatie, de la
sociologiue et des relations
internationales et ses propos pèsent
d’un poids certain dans le débat interne
turc.
En préambule, Daoud
Oglo précise avoir fait part oralement
de ses recommandations au président
Erdogan, soucieux que ses propos ne
soient pas exploités par les adversaires
du régime. Toutefois, les résultats des
élections du 31 Mars 2019 l’ont incité à
en rendre compte à l’opinion publique
«dans l’intérêt du régime et du pays».
Le document de 15
pages, de haute tenue universitaire,
contient les principaux points suivants:
- Nous sommes
écartés de nos valeurs et de nos
principes.
- L’usage des
réseaux sociaux dans les campagnes
électorales a eu des effets néfastes
sur notre parti.
- La présence au
sein du parti d’un groupe en mesure
de contraindre à la démission d’élus
du peuple a été contre productif,
infligeant de dégâts considérables
au parti. Pire, le groupe s’est
considéré comme au dessus des
instances du parti, agissant en tant
que structure parallèle aux organes
officiels.
- Le nouveau
régime présidentiel, instauré par Le
président Erdogan, à la suite de la
tentative de coup d’état, en 2015, a
provoqué une polarisation de
l’opinion. Il importe de
réconsidérer ce système.
- La crise en
résulte pas de la perte de confiance
envers l’économie, mais de la perte
de confiance à l’égard de la
politique économique.
((NDLR A propos de
l’économie turque: fuite des cerveaux et
des touristes.
Le nombre de
faillites a augmenté de 37% en 2017, et
même de 120% dans le secteur du
bâtiment-travaux publics.
L’environnement des affaires est devenu
imprévisible depuis le coup d’Etat raté
de 2016 contre Erdogan.
La répression s’est
traduite par l’arrestation de 60.000
personnes, quelque 150.000 autres ont
été suspendues ou licenciées dans
l’appareil administratif, éducatif et
sécuritaire. Dans cette atmosphère
devenue irrespirable, la fuite des
cerveaux s’est accélérée. Dans les
années 1960, les classes populaires
quittaient en masse le pays pour
s’installer en Allemagne.
Désormais, ce sont
les intellectuels libéraux et les
possédants qui cherchent à s’exiler.
« L’AKP de Recep Erdogan est en train
d’infliger de graves dommages à long
terme à l’économie turque, affirme
l’économiste turco-américain Timur
Kuran, professeur à la Duke University
de Caroline du Nord. La corruption est
en augmentation, la qualité de
l’éducation en chute libre, les
tribunaux outrageusement politisés. »
A la répression
politique su superpose, la dégradation
des relations avec l’Europe: l’Allemagne
a reconnu en 2016 le génocide arménien
et la France a décrété en 2019 le 24
avril date commémorative du génocide
arménien.
Sous l’égide de
l’AKP, au pouvoir depuis 2002, le rêve
démocratique de la Turquie a dérivé vers
un cauchemar autoritariste. Fin de la
note))
L’accord conclu
entre le PJD et le mouvement national
turc a causé de graves dégâts au parti
et au gouvernement. En prévision des
élections législatives de 2018, une
Alliance populaire (en turc: Cumhur
İttifakı) a été constituée, une
coalition électorale entre le Parti de
la Justice et du developpment (AKP) et
le Parti d’Action Nationaliste (MHP)
pour soutenir l’élection de Recep Tayyip
Erdogan à la présidence de la
République. Ces deux partis ont été
rejoints par le Parti de la Grande Unité
(BBP).
- Respecter les
hommes dont les opinions sont
contraires à ceux du gouvernement.
(NDLR- M. Daoud
Oglo semble faire référence au cas de
Selahattin Demirtas, figure de proue de
l’opposition de la gauche démocratique
truque, placé en garde à vue par les
autorités turques, dans la nuit du 3 au
4 novembre 2016, au cours d’un vaste
coup de filet contre le Parti
Démocratique des Peuples (HDP), portant
sur onze membres de cette formation
représentant majoritairement les Kurdes
de Turquie. (Fin de la note).
- Proscrire la
désignation de proches dans la
hiérarchie administrative. Daoud
Oglo fait ainsi allusion au ministre
des finances du gouvernement, gendre
d’Erdogan, et à la propre fille du
président, qui fait office de
conseiller de son père
présidentiel). La presse est réduite
à un rôle de caisse de résonnance du
gouvernement.
- La
titularisation au sein de la
fonction publique doit se faire en
fonction de la compétence.
L’embauche selon des critères
répondant à d’autres considérations,
a causé de graves dégâts à la
hiérarchie administrative.
- La duplicité
dans le combat contre l’organisation
«terroriste» Fethullah Gulen:
Ménager des proches
de Gulen, d’une part, en les désignant à
des postes sensibles, sans la compétence
requise, tout en écartant, pour les
mêmes raisons, et sans ménagement, des
fonctions subalternes des sympathisants
de Gulen, a affaiblir votre crédibilité.
La règle cardinale
en la matière est la souveraineté de la
loi et sa stricte application.
En conclusion,
Ahmad Doud Oglo estime que «si les
recommandations n’étaient pas prises en
considération, le grand perdant ne sera
pas le président Erdogan ou le PJD, mais
la Turquie et le peuple turc. Les deux
véritables perdants», souligne-t-il.
Le revers militaire
infligé aux groupements terroristes dans
le sud d’Idlib, fin Décembre 2019, tout
comme la perte du sanctuaire djihadiste
de Khan Cheikhoun, en Août 2019,
coïncidant avec le 1 er anniversaire de
l’intervention turque dans le nord de la
Syrie sous le nom de code de «bouclier
de l’Euphrate», comme auparavant Alep
Est, confirment ainsi le fait que la
Turquie est certes une puissance
régionale incontournable, mais aux
capacités limitées……….avec en
perspective les aléas militaires de son
occupation du Nord de la Syrie et la
menace d’une guérilla anti turque et
anti américaine brandie par le président
syrien Bachar Al Assad en vue de déloger
ce qu’il considère être des
envahisseurs, convoitant le pétrole de
Syrie.
6 –Double
objectif sous-jacent de la Turquie:
Accès au pétrole de Syrie et
constitution d’un levier djihadiste dans
la région frontalière syro-turque.
La plus importante
aventure militaire de la Turquie paraît
lourde de périls et d’incertitudes.
Déclenchée en 2011, elle devait
s’achever en quelques semaines. Elle
dure depuis neuf ans, sans qu’il soit
possible d’en prévoir la fin. A titre
d’exemple, la guerre d’Afghanistan
déclenchée en 2001, dure, elle, depuis
dix huit ans.
Au début de la
guerre, le président Erdogan s’était
promis d’aller prier à la mosquée des
Ommeyyades à Damas, pour célébrer sa
victoire, et voilà que les troupes
gouvernementales syriennes se déploient
à nouveau, après neuf ans d’absence, à
la frontière syro-turque,
particulièrement dans la région des
trois frontières (Irak, Syrie, Turquie).
Mieux, la Russie a édifié une nouvelle
base militaire dans le secteur, à
Qamichli, et pris la relève des
Américains dans leurs anciennes bases de
Minbej et d’Ain el Arab, en vue de
sécuriser ses acquis.
Symptomatique des
craquelures de l’OTAN, au début de la
guerre de Syrie, en 2011, le «Groupe des
Amis de la Syrie» comptait 120 membres,
incluant la totalité des membres de
l’alliance atlantique. En 2019, la Task
Force navale chargée de protéger la
navigation dans le Golfe, face à l’Iran,
en regroupait infiniment moins, boudée
par la France et l’Allemagne et par
trois pétromonarchies (Sultanat d’Oman,
Qatar et le Koweït, ce dernier pourtant
redevable de la libération par les Etats
Unis), mais avec la participation
inattendue de l’Albanie, nullement
réputée pour être une puissance maritime
terrifiante, mais dont la présence
folklorique est surtout destinée à faire
nombre
L’invasion turque
du Nord de la Syrie visait un double
objectif sous jacent: l’accès aux
ressources pétrolières du pays et la
modification démographique de la région
frontalière en vue d’en faire un levier
djihadiste au service de la Turquie.
La Turquie au seuil
de l’an 2020 fait face à une manœuvre
d’encerclement de la quasi totalité des
protagonistes de la guerre de Syrie qui
ont pâti de son comportement: En Syrie,
face à la Russie et le pouvoir syrien,
contre le repaire terroriste d’Idlib; en
Libye, contre les islamistes anciens
pupilles de l’Otan.
Signe prémonitoire,
six principaux dirigeants militaires
syriens jadis alliés de la Turquie ont
demissionné de leurs postes après le feu
vert parlementaire donné à Ankara pour
l’envoi des miliciens islamistes syriens
en Libye.
Parmi les
démissionnaires figurent le Genéral
Salim Idriss, chef de l’armée nationale
syrienne (opposition pétromonarchique),
le colonel Adnane Al Ahmad, adjoint au
chef d’état major, Colonel Fadl Al
Hajji, chef du Front de Libération
nationale, Jaber Ali Bacha, chef d’Ahrar
AS Sham, Abou Issa As Sheikh, chef des
Sokkours As Sham, Abou Saleh At Tahhan,
chef du Jaych Al Ahrar.
Sur ce lien, les
démissionnaires
cf. ce lien
Objet de toute les
attentions au début de la guerre de
Syrie, la Turquie ne dispose plus
désormais que d’un allié fiable, le
Qatar. Au terme de neuf ans de guerre,
loin d’être une promenade de santé,
l’aventure turque pourrait se révéler un
cadeau empoisonné, face à un «Otan en
état de coma cérébral» et une «Union
Européenne au bord du précipice», selon
le constat du président Emmanuel Macron.
Un pari risqué pour le président Erdogan
face aux alliés résolus du président
syrien Bachar Al Assad -la Russie et
l’Iran-, nouveaux maîtres du jeu
régional.
Illustration
Erdogan annonce le
début du déploiement de soldats turcs en
Libye – RTS – Le Journal horaire / 19
sec.
Le sommaire de René Naba
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