Libye-Dossier
spécial 2/4
Libye An III post Kadhafi,
Le projet « C . C» de la Rand
Corporation
René Naba
Photo:
D.R.
Vendredi 11 avril 2014
I- From
Confrontation to Containement: Le projet
de la Rand corporation
-«La stratégie
américaine, depuis 2007, a visé à
confier la gestion de l’Islam politique
aux Frères Musulmans afin que la
confrérie assume le rôle de chef de file
du courant se réclamant de l’Islam
modéré». Elle s’est inspirée d’un
rapport de la Rand corporation, qui
avait pour nom de code «C-C» pour «From
Confrontation to Containement».
La Rand corporation
est un Think Tank américain chargé
d’élaborer des prospectives en vue de
nourrir la réflexion stratégique
américaine, en complément d’une
structure jumelle, la Ford Foundation,
dont la directrice régionale pour le
Moyen-Orient, basée au Caire, n’était
autre que l’universitaire franco
syrienne Basma Kodmani, la première
porte-parole de l’opposition syrienne
off-shore, chargée de la promotion de
L’ «Arab Reform Initiative», un projet
financé par des capitaux mixtes
notamment de la principauté d’Abou
Dhabi.
-«Morsi au Pouvoir
était pleinement conforme aux
desideratas américains. Mais les
Américains baignent dans la
contradiction. Ils ont certes protesté
contre la destitution du de l’ancien
président égyptien comme étant contraire
à la légalité, mais n’ont soufflé mot
lorsque en Libye, le vainqueur des
élections législatives, la «Coalition
des Forces nationales», a été privée du
pouvoir par la force des armes».
-«Al Qaida, les
takfiristes, les djihadistes ont été
instrumentalisés par certains cercles
occidentaux dans le but de les canaliser
et de les diriger vers des lieux précis,
non pour les affronter, mais pour les
contenir. Le courant islamiste devrait
veiller à éviter de servir de prétexte à
une intervention militaire étrangère».
II – Le printemps
arabe en rapport avec le conflit israélo
palestinien: Le sud Sinaï, le Hong Kong
des Arabes.
-«Le printemps
arabe avait un rapport avec le règlement
du conflit israélo arabe. Le projet
prévoyait l’affectation d’une portion du
désert du Sinaï à l’installation de
Palestiniens de la diaspora dans le sud
de la péninsule. Ce projet devait être
complété par la création d’une zone
franche à l’est de Suez et des
investissements considérables pour en
faire de cette zone de démarcation entre
Israël et l’Egypte Le Hong Kong
des Arabes».
La Syrie: Le régime
syrien sera préféré aux djihadistes du
fait du désarmement de son arsenal
chimique. «Le désarmement chimique de la
Syrie donne désormais à ce pays une
importance plus grande aux yeux des
américains et des occidentaux que les
djihadistes. Assad désarmé est un atout
considérable pour la sécurité d’Israël,
dont le maintien sera préféré à la
présence d’un inconnu extrémiste. Le
règlement en Syrie interviendra selon le
schéma yéménite. Le maintien des
structures du régime sans Assad. Un de
ses proches lui succédera et Assad ne
sera pas poursuivi par la justice pénale
internationale.
La faiblesse des
démocrates arabe: «Le printemps arabe a
tué le printemps arabe. Nous lui avons
fait supporter plus qu’il n’en pouvait.
La paternité du terme revient d’ailleurs
au journaliste américain Thomas Friedman
du New York Times par comparaison avec
le phénomène qui s’est produit en Europe
centrale» dans la décennie 1990.
-«La Libye
contenait en germes les indices d’une
malformation. La Syrie en a démontré
l’ampleur. En Libye la violence était
contenue dans tous les aspects de la
phase de transformation. En Syrie, la
violence a atteint un degré
catastrophique. Le drame du Monde arabe
réside dans la faiblesse des démocrates.
-«Si la Libye fait
face à un problème de gestion des
richesses, la Tunisie et l’Egypte
connaissent un problème de création de
richesse. Les investissements ont chuté
de 90 pour cent durant cette séquence,
dont 30 pour des recettes touristiques
tant pour l’Egypte que pour la Tunisie,
alors que l’Algérie demeure une énigme
de par son attentisme lors du printemps
arabe. C’est l’attaque d’Inn amenas,
début 2013, qui conduira Alger à
autoriser le survol de son territoire
par l’aviation française lors de
l’opération Serval au Mali.
«Les objectifs
américains dans la zone ont été
pleinement atteints. La sécurité
d’Israël et du pétrole n’ont jamais été
aussi grands. L’Irak et la Syrie ont été
détruits. L’Egypte a besoin d’un
véritable plan Marshall pour son
redressement afin de retrouver son rôle
pilote dans le Monde arabe. Tout cela a
déblayé la voie à l’émergence de l’Iran
et de la Turquie en tant que puissances
régionales avec les rivalités que cela
implique.
III – Le rôle de
Nicolas Sarkozy: Le soulèvement de
tripoli, le 14 juillet.
«La France a été le
premier pays au Monde à reconnaitre le
Conseil National de transition de Libye,
avant même les pays arabes et cela a
placé dans l’embarras bon nombre de
pays».
-«La rapidité avec
laquelle Nicolas Sarkozy a procédé à
notre reconnaissance m’a surpris. Sans
doute a-t-il voulu compenser son
comportement tardif vis-à-vis de la
Tunisie, le partenaire historique de la
France, et de l’Egypte. La tension était
d’autre part vive entre Sarkozy et
Kadhafi. Son positionnement courageux à
notre égard devait dans son esprit
améliorer les sondages en sa faveur
alors que sa popularité était au plus
bas. L’affaire des infirmières bulgares,
les rumeurs sur le financement de sa
campagne électorale… tout cela a donné
naissance à une forme de détestation
mutuelle entre Sarkozy et Kadhafi».
-«Nicolas Sarkozy a
été très clair dans son «engagement à
fournir toutes sortes d’aide, ce qui
impliquait l’aide militaire». Il s’est
impliqué en Libye «pour des raisons
politiques et personnelles», sans doute
pour apporter la preuve qu’il avait
repris la main après le double fiasco
français en Tunisie (Ben Ali) et en
Egypte (Moubarak) et gommer toute trace
de financement éventuel de sa campagne
présidentielle de 2007.
«Nicolas Sarkozy a
suggéré que le soulèvement de Tripoli
ait lieu le 14 juillet, de manière à le
faire coïncider avec la date de la fête
nationale française, tout en menant,
dans le même temps, des tractations en
coulisses sur le sort de Kadhafi.
((NDLR: En fait,
dans la perspective de sa réélection,
Barack Obama a multiplié les coups de
main audacieux. Quatre mois après
l’assassinat d’Oussama Ben Laden au
Pakistan le 2 Mai 2011, la chute de
Tripoli a été programmée, dans l’ordre
symbolique, en septembre 2011,
correspondant à deux dates chargées de
signification historique, le 1 er
septembre 1969, date du coup d’état anti
monarchique de Kadhafi, et, le 11
septembre 2001, le raid d’Al Qaida
contre les symboles de l’hyperpuissance
américaine.))
Parallèlement à sa
requête, «Sarkozy m’a demandé d’examiner
attentivement une proposition de Bachir
Saleh, le secrétaire particulier de
Kadhafi, dont les termes consistaient à
obtenir la démission de Kadhafi et son
placement en résidence surveillée sous
protection française, en contrepartie du
fait que, Moi, Mohamad Jibril, dirige le
gouvernement pendant une période
transitoire de quatre ans, au terme de
laquelle Seif Al Islam Kadhafi, le fils
puiné du Guide, pourra se présenter aux
élections présidentielles».
Bachir Saleh passe
pour avoir été le principal témoin du
financement de la campagne électorale de
Nicolas Sarkozy de 2007. Réfugié en
France, il a précipitamment quitté le
pays à la défaite de Nicolas Sarkozy, en
2012, trouvant refuge en Afrique du sud.
Mahmoud Jibril ne
s’est pas étendu sur les raisons
personnelles de l’engagement pro libyen
du président français, motivations que
le lecteur pourra découvrir en cliquant
sur ce lien:
http://www.renenaba.com/libye-le-zele-de-la-france-en-suspicion/
Sur les malheurs du
peuple libyen, Nicolas Sarkozy a en
effet scellé sa réconciliation avec le
plagiaire Bernard Henry Lévy, purgeant
un contentieux souterrain para
matrimonial, dont la descendance du
roman-enquêteur en porte les stigmates
brunis, à la faveur d’un indécent ballet
diplomatique, instrumentalisant
l’opposition libyenne sur fond de
gesticulation médiatique. Carla Bruni,
épouse du président Nicolas Sarkozy,
avait été auparavant, la compagne du
philosophe Jean Paul Enthoven, ami de
BHL. Lors d’un séjour de vacances à
Marrakech, dans la propriété de BHL,
Carla est tombée amoureuse du propre
fils de son compagnon, Raphaël Enthoven,
à l’époque marié avec la propre fille de
Bernard Henry Lévy, Justine Lévy, qui
narrera ses déboires conjugaux dans un
ouvrage intitulé «Rien de grave».
(Editions Stock 2004).
Carla Bruni et
Raphael Enthoven ont eu un enfant,
Aurélien, Bernard Henry Lévy, quant à
lui, avait soutenu Ségolène Royal, la
rivale socialiste de Nicolas Sarkozy,
lors des dernières élections
présidentielles françaises, en 2007. En
donnant le beau rôle à BHL dans
l’affaire libyenne, au détriment du
ministre des affaires étrangères Alain
Juppé, Nicolas Sarkozy, a purgé ce
contentieux sur les débris de la Libye.
Mohamad Jibril
assure avoir vu la dépouille de Kadhafi
tué de deux balles, l’une au front,
l’autre à la poitrine. Il a démissionné
de son poste le 23 octobre 2011, trois
jours après le décès de l’ancien guide,
en rétablissant son curseur personnel
dans le sens nationaliste coïncidant
avec le dégagement de Mohamad Morsi,
premier président néo islamiste de
l’histoire arabe démocratiquement élu
par le général Abdel Fattah Sissi,
ministre de la défense.
Près de 260
manifestations ont été dénombrés en 2013
en Libye contre le gouvernement et le
Parlement. Plus grave, le 10 octobre
2013, le Premier ministre en personne a
été enlevé dans un hôtel en plein centre
de Tripoli, alors qu’un chef de milice,
Ibrahim Jadhran, proclamait, en novembre
2013, un gouvernement autonome de la
Cyrénaïque. Parallèlement, Fethallah Al
Gaziri, nouveau Chef des renseignements
a été assassiné à Derna, en décembre
2013; Hassan Al-Droui, vice-ministre de
l’Industrie à Syrte, a, lui, été
assassiné début janvier, l’Hôpital
central de Tripoli saccagé, le 20
janvier 2014; Enfin un ingénieur
français a été assassiné le 2 mars à
Benghazi et deux nouveaux députés de la
nouvelle assemblée, blessés par balles,
le même jour.
Face à un tel
chaos, Mohamed Jibril a lancé le 28
décembre 2013 une «Initiative de
sauvetage national» et le chef nominal
de l’opposition pro atlantiste, Mustapha
Abdeljalil, a préconisé la constitution
d’un «Groupe national pour le dialogue»,
dans un contexte exacerbé par les
rivalités factionnelles marquées par
trois coups d’éclat: le 7 janvier 2014
la quasi démission d’Ali Zaidan de son
poste de Premier ministre, le 7 janvier
2014, suivie une semaine plus tard, 14
janvier, de l’irruption des hommes armés
au Parlement pour demander son départ,
et le retrait du gouvernement, une
semaine plus tard, le 21 janvier, des
ministres du Parti de la justice et de
la construction.
Pour aller plus
loin
Les Frères
Musulmans vus par René Naba
-Avant la prise de pouvoir
http://www.renenaba.com/les-freres-musulmans-egyptiens-a-lepreuve-de-la-revolution/
http://www.renenaba.com/les-freres-musulmans-egyptiens-a-lepreuve-de-la-revolution-2/
http://www.renenaba.com/les-freres-musulmans-egyptiens-a-lepreuve-de-la-revolution-3/
-Lors de l’exercice
du pouvoir
http://www.renenaba.com/egypte-les-freres-musulmans-au-seuil-du-pouvoir/
-Les raisons de la
chute du pouvoir de la confrérie
http://www.renenaba.com/egypte-le-reve-fracasse-du-califat/
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