Vu du Droit
Arrestation Soral : pourquoi il ne faut
pas jubiler
Régis de Castelnau

Vendredi 31 juillet 2020
Comme on est
précautionneux, et que l’on n’a pas
envie de se fâcher avec tout le monde,
on va commencer par confirmer qu’Alain
Soral est un personnage totalement
exécrable. Aigri, haineux, antisémite,
négationniste (pour moi le pire) il
coche quand même un maximum de cases. Et
lorsqu’il aura débarrassé le plancher on
respirera un peu mieux. Mais,
L’exultation
bruyante que l’on entend résonner
partout
à la suite de son interpellation met
quand même un peu mal à l’aise. Entendre
acclamer des mesures pénales contre
l’expression d’opinions fussent-elles
détestables est toujours gênant.
Comme d’habitude on
va casser les pieds à tout le monde en
rappelant quelques éléments juridiques :
•
toutes les procédures qui existent
jusqu’à présent contre lui relèvent de
son expression verbale ou écrite. Et par
conséquent de la loi de 1881 sur la
presse qui organise en France
l’application de la déclaration des
droits de l’Homme sur la liberté
fondamentale de la libre expression de
ses opinions.
•
Il est possible de porter par la loi
atteinte à cette liberté normalement
absolue, dès lors que les limitations,
qui doivent être très limitées,
répondent à un motif d’intérêt général.
L’autre principe est que c’est le JUGE
disposant de pouvoirs très encadrés par
des règles particulières (la loi de 1881
justement) qui apprécie À POSTERIORI les
éventuelles infractions.
•
Soral est actuellement l’objet d’un
certain nombre de procédures dont, sauf
erreur, aucune n’est arrivée à son terme
et n’a abouti à une décision judiciaire
DÉFINITIVE, donc exécutoire. La nouvelle
affaire qui vient de s’ouvrir à la
demande du parquet est une instruction
judiciaire qui va prendre du temps et
donner lieu à un débat contradictoire au
cours duquel accusation du parquet et
défense de Soral devront être à armes
égales. Ça ce sont les principes qui
nous protègent tous, et ne sont pas à
géométrie variable. Les violer pour
Soral c’est nous exposer tous. La
liberté d’expression n’est pas
actuellement en si grande forme que l’on
puisse s’amuser à ça.
•
Enfin, l’utilisation du chef de
poursuites relatif à la « provocation
à porter atteinte aux intérêts
fondamentaux de la Nation » c’est la
porte ouverte à tous les arbitraires.
D’abord, s’il y a bien des gens qui
portent atteinte aux intérêts de ma
Nation, ce sont ceux de la clique au
pouvoir actuellement. Ensuite on nous
dit que Soral aurait appelé à la
constitution d’un « pouvoir fasciste
» . Il me semble qu’il faut faire très
attention, parce que ce genre d’approche
permettrait alors d’incriminer les
royalistes (coucou les amis de la NAR)
qui s’opposent à l’article 89 de la
Constitution qui interdit de changer la
forme républicaine du gouvernement. Et
pour ma part, jusqu’à l’abandon de la «
dictature du prolétariat » par le 22e
congrès du PCF en 1976, je ne voyais
guère d’inconvénient à l’instauration
(progressive, attention progressive,
nous n’étions pas des brutes) d’un
système où la punition des méchants
aurait été possible. D’ailleurs,
aujourd’hui encore, lorsque je pense à
l’avenir de mon pays, je me dis qu’après
la prochaine Libération de la France de
la dictature du Capital néolibéral,
quelques séjours roboratifs en Camargue
pour la culture du riz rouge seraient
peut-être envisageables.…
Porterais-je ainsi
atteinte aux intérêts fondamentaux de la
Nation ? Je pense que c’est exactement
le contraire et que sur ce point mon
patriotisme est inattaquable. Mais
actuellement ce n’est pas mon avis qui
compte, c’est celui des imposteurs qui
tiennent les manettes,
haïssent la liberté d’expression et
dont on sait bien qu’ils n’auraient
aucun état d’âme à se servir d’outils
liberticides. Parce qu’avec la nouvelle
procédure Soral, le problème sérieux,
c’est que l’utilisation de ce chef de
mise en examen crée un précédent
détestable. Aujourd’hui l’abject Soral,
demain qui ? Est-on sûr de pouvoir faire
confiance à la bande actuellement au
pouvoir ? À cette partie la magistrature
qui s’est mise spontanément à son
service comme l’a démontré la répression
des gilets jaunes ?
Alors, combattre
Soral, oh que oui.
Mais pas avec les
armes de l’arbitraire donc, parce que
l’on sait comment ça commence, et
parfois comment ça finit.
Martin Niemöller
nous a prévenu.
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