Vu du Droit
Robert Badinter,
le macronisme
révélateur des impostures
Régis de Castelnau

Mardi 28 janvier 2020 Dès 1968, j’ai su à
qui on avait affaire avec Daniel
Cohn-Bendit ses copains. Toute leur
trajectoire était inscrite dans
l’imposture qui nous fut alors infligée.
Il était à la tête du combat des
petits-bourgeois qui en mai 68 faisaient
leur 14 juillet contre le mai ouvrier.
La crapulerie finale de son ralliement à
Macron n’est finalement que la signature
et nous montre le macronisme comme un
révélateur final de la réalité des
impostures.
C’était pareil avec
tous ces gauchistes, trotskistes,
maoïstes donneurs de leçons, ces «
intellectuels de gauche » qui toisaient
le peuple et surtout les ouvriers de
façon méprisante. Ils ont à peu près
tous trahi, et c’était pour moi évident
dès le départ. Et je n’ai ressenti
aucune surprise de voir se presser les
survivants derrière Emmanuel Macron.
Quant aux
socialistes, ils nous prenaient par la
gauche, comme par exemple Chevènement et
ses amis qui nous donnaient des leçons
de marxisme, et nous expliquaient qu’eux
étaient à gauche, nous nous étions à
l’est… Ils ont pourtant à peu près tous
accompli le chemin qui les a amenés
derrière Hollande puis derrière Macron.
Et Jean-Pierre Chevènement l’homme qui
n’a servi à rien, de célébrer béat le
triomphe de la méritocratie républicaine
avec l’élection d’Emmanuel Macron !
Il fut cependant un
temps où on pouvait compter sur eux pour
la défense des libertés. Je me rappelle
les combats menés avec des gens que je
considérais quand même comme des
camarades. Hélas c’est fini,
complètement fini. Ils ont rallié Macron
en gros bataillons et soutiennent
tranquillement la mise en place d’un
régime liberticide. Il n’en reste qu’une
poignée, fidèles à leur amour de la
liberté avec à leur tête le grand Henri
Leclerc, l’arbre qui ne cache plus la
forêt.
Je me suis toujours
méfié de Robert Badinter. Intelligence,
charisme et prestance incontestables, il
commença à apparaître en duo avec Jean
Denis Bredin. Lorsqu’ils se mirent à
écrire leurs articles chacun de son
côté, nous pûmes constater méchamment
lequel des deux était la plume.
Cependant le combat de Badinter contre
la peine de mort fut admirable, qui
commença vraiment avec l’exécution de
Bontemps condamné à mort par la cour
d’assises de l’Aube, et qu’il accompagna
au pied de l’échafaud. Malgré ce
traumatisme il retourna devant les mêmes
assises de l’Aube pour un combat que
l’on disait perdu d’avance pour sauver
la tête de Patrick Henry le tueur
d’enfants. Ayant relevé ce défi avec un
courage extraordinaire, il le remporta
magnifiquement. Par la suite, François
Mitterrand eut le courage politique dans
sa campagne électorale de 1981 de
s’engager à abolir la peine de mort s’il
était élu alors que les Français y
étaient majoritairement opposés. Robert
Badinter Garde des Sceaux porta ce
combat avec une incontestable grandeur à
l’Assemblée nationale. Il l’incarne
encore aujourd’hui et c’est justice.
Mais
malheureusement ce fut tout. Médiocre
Garde des Sceaux il laissa le service
public de la justice, comme un parent
pauvre de la république. Tolérant
beaucoup trop de choses dans ce début
des années fric. Puis président du
Conseil constitutionnel, il en accentua
la dérive juridictionnelle qui a fait de
cet organe un outil de limitation de la
souveraineté du peuple. Puis il a enfin
rejoint le confort du Sénat en
remerciement de ses mérites. Pendant
tout ce temps, intégré à la grande
bourgeoisie à laquelle il appartient, il
a incarné une sorte de grande
conscience, ce qui n’était pas
complètement usurpé, statut entretenu
par quelques interventions en général
sans grand écho.
Aussi, il n’y a pas
lieu d’être surpris de la sortie
qu’il vient de faire sur un plateau de
télévision, ou enfilant l’uniforme
du commandeur et affichant une intense
colère surjouée il a dénoncé avec
vigueur la présence dans une des marches
aux flambeaux des luttes contre la
réforme des retraites, de deux
manifestants portant des piques au bout
desquelles figuraient des répliques de
la tête d’Emmanuel Macron.
Il a exprimé sa
mâle colère de la façon suivante : «
Rien n’excuse ce degré de violence non
pas physique encore, mais verbale. Rien.
La représentation d’une tête au bout
d’une pique, qui n’est rien d’autre que
la guillotine, est pour moi absolument,
totalement, condamnable. On ne peut pas
admettre dans la République française,
dont je rappelle la devise, que quelque
homme politique que ce soit, quelque
femme politique que ce soit, on promène
sa tête au bout d’une pique avec ce que
cela signifie. Ce n’est pas admissible !
Je le dis du fond du cœur, aucune cause
ne justifie cela, aucune. Vous
avez tous les moyens, toutes les
libertés, mais PAS la violence physique
! »
Mais dites-nous,
Monsieur Badinter, de la violence
physique depuis plus d’un an ce n’est
pas ce qui a manqué. Le déchaînement des
violences policières avec leur terrible
bilan vous a laissé muet et encore cette
fois-ci. Vous ne montez sur vos grands
chevaux que pour une violence symbolique
très marginale. Sans avoir un mot sur ce
que subit le peuple français de
violences politiques, de violences
sociales et de violences physiques tout
court. Et quand vous ajoutez que les
opposants « ont tous les moyens,
toutes les libertés » c’est
simplement un mensonge. La liberté
d’expression est lourdement mise en
cause dans notre pays quand des gens
sont condamnés à de la prison pour avoir
scandé « Castaner assassin » dans
une manifestation. Quand des lois
liberticides sont adoptées en cadence
comme la loi fake news, la loi
anticasseurs (la liberté
constitutionnelle de manifestation est
une liberté d’expression), l’effrayante
loi Avia, sans que cela provoque chez
vous la moindre contrariété. Pas plus
que la répression de masse du mouvement
social des gilets jaunes avec ses 3000
condamnations pénales et ses 1000 peines
de prison infligées dans des conditions
de légalité approximative et dans une
urgence complètement anormale. Les
milliers de gardes à vue préventive (!)
qui sont autant de séquestrations
arbitraires ne vous ont guère ému non
plus.En revanche, vous tonnez et sonnez
le tocsin pour deux initiatives
peut-être malvenues mais en tout cas
sans conséquence.
Cette sortie
consternante a été mise par beaucoup sur
le compte du grand âge. C’est à la fois
insultant et faux, Robert Badinter ayant
fait consciemment ce qu’il pensait
nécessaire. Prendre la défense d’un
régime qui entretient
désormais des rapports lointains
avec une démocratie représentative
républicaine, mais qui protège les
intérêts de sa classe.
C’est peut-être
désolant, mais aujourd’hui Robert
Badinter est dans le même camp que le
préfet Didier Lallement.
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