Vu du Droit
Agnès Buzyn : toujours plus loin dans
l’indécence.
L’État criminel suite
Régis de Castelnau

Mardi 24 mars 2020 Le média Sputnik
m’a demandé mon avis sur le «
recrutement » de l’ancienne ministre de
la santé et candidate à la mairie de
Paris Agnès Buzyn au sein d’un organisme
appelé Unicancer.
Sputnik : Que
pensez-vous de ce recrutement à titre
bénévole d’Agnès Buzyn chez Unicancer?
Régis de
Castelnau : Décidément, Agnès Buzyn
coche toutes les cases et donne l’image
de l’incarnation parfaite du macronisme.
Voilà une personne dont la carrière est
caractérisée par la course aux places,
les rapports élastiques avec la morale
publique, l’incompétence ministérielle,
et l’absence totale de caractère.
À cet
impressionnant palmarès, elle ajoute
maintenant une forme de duplicité. Après
avoir fort souvent pleurniché devant les
caméras et nous avoir infligé une
stupéfiante confession tout aussi
plaintive publiée par le journal le
Monde, elle nous avait dit qu’elle
entendait mettre ses compétences de
médecin au service des malades frappés
par le covid19, en rejoignant ses
confrères qui depuis le début de
l’épidémie tiennent le front et ont déjà
payé un lourd tribut à ce combat.
Et l’on apprend qu’elle aurait été
recrutée par Unicancer comme
conseillère ponctuelle (!) en charge des
affaires stratégiques et de la gestion
de crise pour Unicancer. Structure
patronale qui fédère les 18 centres
privés de lutte contre le cancer. Dans
un mail adressé aux responsables elle
prodigue quelques conseils en forme
d’enfoncements de portes ouvertes.
Heureusement on apprend qu’elle est
bénévole, parce que payée pour proférer
de telles banalités inutiles qui donnent
l’impression qu’elle tient ses
correspondants pour des demeurés, aurait
été un scandale de plus. Ce qui est
impressionnant avec ce qui arrive à
Agnès Buzyn, c’est cette façon d’être
complètement détaché du réel comme la
plupart des gens qui entourent Emmanuel
Macron. La moindre des choses concernant
ce « recrutement » aurait été de rester
discrète et d’essayer de se faire
oublier après le pitoyable spectacle
qu’elle donne depuis plusieurs semaines
sinon depuis plusieurs mois.
Petit détail
concernant Unicancer, il ne s’agit pas
d’un équipement hospitalier, mais d’une
fédération qui en regroupe une
vingtaine. On gage que les conseils
ponctuels par l’envoi d’e-mails
permettront à Madame Buzyn de rester
éloigné de la ligne de front et de
continuer sa campagne pour les
municipales depuis longtemps transformée
en pantalonnade après la terrible
décision d’Emmanuel Macron d’en
maintenir le premier tour. Détail
savoureux Unicancer est domicilié au
101, rue de Tolbiac, à Paris,
c’est-à-dire au siège de l’Inserm. Qui
dépendait de son ministère et dont son
mari était le président avant d’être
exfiltré face au scandale d’un conflit
d’intérêt plus qu’évident.
Rassurons-nous, il lui a été prestement
trouvé une confortable pantoufle au
Conseil d’État où ce médecin de
formation va pouvoir exercer ses
compétences juridiques (!) On rappellera
aussi que le Canard enchaîné avait
prétendu qu’Agnès Buzyn avait fait « un
chantage à la démission » pour
renouveler le mandat de son époux Yves
Lévy à la tête de l’Inserm… Tout ce
petit monde entretient décidément des
rapports très particuliers avec la
simple décence.
Alors, comme nous
en avons pris l’habitude nous allons
jeter un petit coup d’œil sur ce
parachutage. Unicancer est une
fédération patronale de structures
privées, prenant la forme une
association créée en application de la
loi du 1er juillet 1901,
c’est-à-dire une personne morale de
droit privé. L’article
432–13 du Code pénal réprime le fait
pour les agents publics d’aller
travailler après la cessation de leurs
fonctions dans des entreprises dont ils
avaient la surveillance pendant
l’exercice de leurs responsabilités
publiques. Peut-on considérer que Madame
Buzyn es-qualité de ministre avait la
surveillance d’Unicancer ? Et si la
réponse est positive lui était-il
interdit de prendre quelque
responsabilité que ce soit ? Le
bénévolat ne serait pas exonératoire
dans la mesure où ce poste et cette
annonce n’ont que pour but de lui
redorer son blason terni dans la
perspective du deuxième tour des
élections municipales. Ce qui constitue
un avantage au sens de la jurisprudence
pénale.
À suivre…
Sputnik : Pour
leur gestion du coronavirus, Agnès Buzyn
et Edouard Philippe risquent-ils des
poursuites judiciaires ?
Régis de
Castelnau : Agnès Buzyn commence à
disposer d’une liste impressionnante
d’infractions pénales qui devraient
normalement l’amener devant la Cour de
Justice de la République.
Tout d’abord, une
qui lui est propre et qui est réprimée
par l’article
432–12 du Code pénal qui réprime «
la prise illégale d’intérêts ».
C’est-à-dire le mélange des genres en
confondant casquettes publique et
privée. Toute décision publique doit
être prise exclusivement pour des motifs
d’intérêt général et il est interdit de
laisser se créer une situation qui
pourrait jeter le soupçon sur une
pollution par un intérêt privé. Soyons
clair, c’est le simple soupçon qui est
répréhensible et peut faire l’objet de
poursuites. Toute la gestion du conflit
entre le mari d’Agnès Buzyn président de
l’Inserm et le professeur Raoult fait
encourir à la ministre l’accusation
d’avoir fait prendre à son ministère des
décisions dictées par l’intérêt de son
époux. Cette affaire dans le contexte de
la pandémie jette sur les décisions
prises une lumière vraiment trouble. La
justice serait bien avisée de s’en
saisir.
Il y a ensuite des infractions
d’homicide et de blessures involontaires
qui pourraient être reprochées non
seulement à Agnès Buzyn mais également à
Édouard Philippe Ier ministre et à
Jérôme Salomon directeur général de la
santé.
Les faits
qu’invoque Agnès Buzyn dans ses aveux
publiés par le Monde, s’ils sont établis
encourent l’application des articles
221–6 et 121–3 du Code pénal. Le
problème se pose dans les termes
suivants : lorsqu’est commise une faute
entraînant un dommage corporel, en droit
français, s’applique la théorie
juridique de « l’équivalence des
conditions ». Cela veut dire que
pourront être poursuivi non seulement
les auteurs DIRECTS de la faute à
l’origine du dommage, mais également
tous les auteurs INDIRECTS ayant commis
une faute de nature à avoir contribué ou
aggravé ce dommage.
Il y a des
précédents, l’affaire de l’amiante, dont
la dangerosité scientifiquement acquise
en 1976 n’a pas amené les pouvoirs
publics à prendre les mesures de
protection pour ceux qui étaient
exposés. Cela constituait une faute
administrative mais également une faute
pénale. De la même façon, dans l’affaire
du sang contaminé, lorsque l’on a su que
les transfusions sanguines pouvaient
provoquer la contagion du sida, le fait
de n’avoir pas réglementé cette
institution en imposant le chauffage
préalable du sang était une faute pénale
qui a été réprimée devant les
juridictions judiciaires pour les
fonctionnaires et la Cour de Justice de
la République pour les ministres.
Agnès Buzyn prétend
que le sommet de l’État savait
parfaitement dès le début du mois de
janvier la catastrophe qui arrivait et
que les mesures nécessaires n’ont pas
été prises. Si c’est vrai, les personnes
que j’ai citées ont aggravé les risques
de contracter le virus avec toutes les
conséquences meurtrières que l’on
connaît. La décision de maintenir le
premier tour des élections municipales
en fait bien évidemment partie. Les
textes et la jurisprudence sont d’une
clarté limpide : si les décideurs
publics, n’ont pas pris les mesures
qu’imposaient une situation qu’ils
connaissaient, ils ont exposé autrui à
un risque de mort ou de blessures qu’ils
ne pouvaient ignorer.
Il est inconcevable
qu’une fois la crise passée, la justice
ne demande pas des comptes à ceux qui
auraient été à ce point défaillant.
Madame Buzyn nous l’affirme, et
l’ampleur de la catastrophe tend à le
confirmer.
Si la justice fait
son travail, le jour d’après pourrait
être délicat pour ces gens.
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