Vu du Droit
Meurtre de Bayonne, où sont les
fascistes ?
Régis de Castelnau

Jeudi 16 juillet 2020
Le mouvement
ouvrier français issu du XIXe siècle et
organisé au XXe avait lui aussi
construit un roman national, avec ses
mythologies, ses héros et ses mythes.
Parmi les figures les plus marquantes,
celles qui constituaient l’aristocratie
ouvrière, il y avait les mineurs,
aujourd’hui disparus, les métallos, les
cheminots qui payèrent un lourd tribut à
la Résistance, et les traminots, ceux
qui assuraient les transports dans les
villes. La deuxième mort
de Philippe Montguillot
Philippe
Montguillot était un traminot. Et c’est
comme ça qu’on l’aurait appelé s’il y
avait eu encore une gauche dans ce pays
et un vrai Parti communiste.
Chauffeur de bus
sur une ligne régulière à Bayonne,
Philippe Montguillot faisait bien son
boulot, c’était sa fierté. Et il voulait
faire respecter les règles, estimant que
c’était son devoir. Payer sa place c’est
respecter les autres, ceux qui le font
et sur lesquels retombe la conséquence
de la fraude, et appliquer les règles de
sécurité c’est protéger les autres.
Pour cela, il a été
massacré par quatre représentants d’un
lumpen à la violence duquel un État en
faillite abandonne de plus en plus les
villes et leurs habitants. Il s’est
trouvé un ministre pour qualifier ce
meurtre « d’incivilité » sans
avoir peur de l’infamie.
La « gauche »
d’aujourd’hui n’a pas bougé, pas un mot
juste, pas une action digne, pas un
hommage pour ce « working class hero
» comme disent les anglo-saxons.
Jusqu’au président de la république
rester muet sur son sacrifice lors de
son intervention du 14 juillet.
On retiendra le
tweet tardif de Jean-Luc Mélenchon, qui
concentre à lui tout seul le désintérêt
de cette « gauche » pour les
travailleurs de ce pays. « Deuil
affligé après la mort du chauffeur de
bus bordelais (!). Ces assassins nous
révulsent. Puisque les autorités être
plus soucieuse de ces gens qui font
fonctionner ce pays à leur poste de
travail ». Sauf que le chauffeur de
bus était de Bayonne, et qu’il avait un
nom. Est-il possible d’être plus
désinvolte ?
C’est que, le
pouvoir et cette « gauche » ont d’autres
préoccupations, d’autres héros à mettre
en avant, d’autres comportements à
saluer. Pour ces gens-là, les icônes, ce
sont les membres de la fratrie Traoré.
C’est face à eux qu’on va mettre genou
en terre, c’est à eux qu’on va donner
des façades d’immeubles municipaux pour
y peindre des fresques à leur gloire,
c’est pour eux que l’on va se précipiter
ventre à terre à des manifestations pour
imposer le mensonge.
Rappelons, qu’Adama
Traoré n’a pas été interpellé parce que
noir et que la preuve que son décès soit
dû à des violences policières n’a pas
été rapportée. En faire un martyr d’une
violence policière raciste est déjà une
imposture.
Mais il y a pire.
On sait aujourd’hui de façon irréfutable
que la fratrie Traoré était composée de
délinquants d’habitude, et que
l’arrestation d’Adama était liée à ce
statut. Entendre aujourd’hui sa sœur
Assa Traoré venir prétendre que ses
frères incarcérés sont des « prisonniers
politiques » est insupportable. Ils ont
été condamnés pour des infractions
particulièrement abjectes comme par
exemple celles d’extorsion de fonds sur
personne vulnérables. Et leurs casiers
judiciaires continuent à se remplir.
La promotion de
la pègre
Ce qui est
intéressant au fond est que la séquence
qui s’est ouverte avec l’importation en
France par le « comité Adama »
des conséquences de la mort de Georges
Floyd aux États-Unis, c’est le constat
qu’ensemble, la bourgeoisie au pouvoir
et les couches moyennes qui se
prétendent de « gauche » ont choisi
l’alliance avec et le soutien à ce
lumpenprolétariat violent et délinquant
dont la fratrie Traoré est le
représentant achevé. Il n’a été que
d’assister effaré aux réactions
officielles d’Emmanuel Macron demandant
à sa Garde des Sceaux de recevoir en
urgence la famille Traoré, d’entendre le
ministre de l’intérieur décréter pour
eux une dispense du respect de la loi,
d’apprendre le projet d’une cérémonie
officielle dans la cour de la préfecture
où les policiers se seraient mis à
genoux. Depuis, toute la presse entre
les mains de l’oligarchie met
systématiquement en avant Assa Traoré,
avec la volonté affirmée d’imposer le
mensonge du faux martyr et d’en faire
une icône intouchable. La revue des
couvertures des magazines de papier
glacé, de Paris-Match à Vogue en passant
par le M du Monde, les Inrocks et autres
permet de le constater en vérifiant que
ce sont les mêmes qui avaient assurés la
promotion massive d’Emmanuel Macron en
2017.
Ce type d’alliance
a déjà existé dans l’Histoire, Karl Marx
utilisant l’expression de «
lumpenprolétariat » l’a pointé dans son
ouvrage relatif à l’arrivée au pouvoir
de Louis Napoléon Bonaparte. Le fascisme
du XXe siècle ne se réduit pas à cette
alliance, mais elle y fut extrêmement
importante. Forme terroriste de la
domination du Capital, le fascisme a pu
s’instaurer par la combinaison de
plusieurs volontés : d’abord celle de la
bourgeoisie classiquement fascinée par
la pègre et soucieuse d’une défense
étroite et sans scrupule particulier de
ses intérêts, fut-ce au prix de
l’abandon des libertés démocratiques.
Ensuite celle d’une petite bourgeoisie
dépravée, base de masse classique du
fascisme, et dont nous avons aujourd’hui
l’expression avec ces habitants des
métropoles défenseurs acharnés de la
censure, armés de leur souverain mépris
des couches populaires, et indifférents
à la violence d’État qu’elles subissent.
Et enfin, la pègre elle-même, celle qui
aujourd’hui a pris le pouvoir dans les
parties du territoire que l’État lui a
abandonné, ou pire, confié la gestion.
Gangsters et mafieux, grands ou petits
ont toujours eu une place importante
dans les dictatures fascistes, que ce
soit en Europe ou en Amérique latine.
Rappelons juste une petite anecdote,
même si comparaison n’est pas raison,
c’est l’histoire d’Horst Wessel petit
proxénète nazi, transformé en martyr et
qui donna son nom à l’hymne de son
parti, devenu quasiment un hymne
national dans le troisième Reich.
Il y a quelque
chose de frappant lorsque l’on fait
petit tour des autres pays occidentaux
qui ont été marqués par le mouvement
BLM. Partout, les grands intérêts
soutiennent bec et ongles le mouvement
et le financent massivement, faisant
apparaître de façon criante les enjeux
politiques. Aux USA c’est bataille du
camp démocrate contre Donald Trump. Et
pour ne prendre qu’un seul exemple alors
qu’il y en a tant, le spectacle de ces
personnes âgées priant autour de la
statue de Saint-Louis dans la ville du
même nom et faisant l’objet de la part
de soi-disant antifas et de militants
noirs d’une violence incroyable,
réactive de très sales images.
Une ruse de
l’histoire ?
Et si le risque
n’était pas celui-là ? Par une étonnante
ruse, l’Histoire, faisant apparaître non
pas face à la crise du néolibéralisme,
l’instauration d’une « démocratie
illibérale », mais la tentation d’une
solution autoritaire et répressive. Il
n’y a peut-être pas aujourd’hui un
risque immédiat de dictature fasciste en
France, mais un certain nombre de
symptômes peuvent apparaître très
inquiétants. Dérives liberticides,
censure, répression brutale des
mouvements populaires comme celui des
gilets jaunes, petite bourgeoisie
arrogante et répressive, espaces publics
abandonnés à la pègre, tout ceci
fabrique un cocktail auquel il faudrait
prendre garde.
Les fascistes ne
sont peut-être pas là où on nous le dit.
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