Syrie
L’Initiative du
Président syrien,
Genève 3 et le gibet de
potence de l’Histoire
Nasser Kandil
Vendredi 29 janvier 2016
Il y a trois ans, le 6 janvier
2013, le président Bachar al-Assad a
exposé devant les comités et
organisations populaires syriennes sa
vision de la solution politique à ladite
« crise syrienne » [1].
Trois ans
durant lesquels la Syrie s’est vue
envahir par des dizaines de milliers de
terroristes venus des quatre coins de la
planète en préparation d’une invasion
militaire concrétisée, l’été 2013, par
le positionnement de la VIe
flotte des États-Unis devant les côtes
syriennes [2], suivi de
l’instauration de l’EIIL [État Islamique
en Irak et au Levant ou DAECH], puis du
parrainage ouvertement déclaré du Front
al-Nosra [branche officielle d’Al-Qaïda
en Syrie] par la Turquie, l’Arabie
saoudite et Israël…
En bref :
toutes les options ennemies de mise sous
tutelle ou d’invasion de la Syrie ont
été testées. Mais le temps a passé et
les projets étatsunien, turc, saoudien
et israélien s’appuyant sur une solution
politique fondée sur la destitution du
président syrien avec remise du pouvoir
à une prétendue opposition syrienne
inféodée à l’étranger ont échoué. La
Syrie a résisté. En conséquence, ses
alliés ont résisté aussi. L’accord sur
le nucléaire iranien a quand même été
ratifié. La Russie s’est décidée à
intervenir militairement et la
contre-attaque de la Syrie et de ses
alliés a commencé.
C’est ainsi
que les concepts de « la solution
politique à la crise syrienne » sont
passés de celui adopté dans le
communiqué final communément désigné par
« Genève 1 » [3], à ceux de
Vienne 1 et de Vienne 2 [4] ,
puis à celui de la Résolution 2254 [5] ;
Genève 3 se préparant à accueillir pour
la deuxième fois des pourparlers entre
une délégation du gouvernement syrien et
une délégation de l’opposition ; [Genève
1 s’est tenue en l’absence de
représentants du gouvernement syrien ;
NdT].
Une
délégation de l’opposition ressemblant
fortement à celle qui a participé à la
réunion de « Genève 2 » [6] en
janvier 2014, cramponnée au Communiqué
final de la réunion de Genève 1, du 30
juin 2012 ; lequel communiqué fut
approuvé par les ministres des Affaires
étrangères des USA et de la Russie, mais
dont la mesure de mise en place d’un
organe de « gouvernement transitoire qui
aurait les pleins pouvoirs exécutifs »
était suffisamment imprécise pour
suggérer à certains qu’elle impliquait
implicitement le départ ou la
destitution du président syrien.
Ceci, alors
que la Résolution 2254 du Conseil de
sécurité [adoptée à l’unanimité le 18
décembre 2015 ; NdT] se fonde sur un
appel au dialogue censé aboutir à un
accord sur le cessez-le-feu, le retour
des personnes déplacées, la formation
d'un gouvernement d'union nationale
chargé de l'élaboration d'une nouvelle
Constitution, suivie de nouvelles
élections.
Données que
le Secrétaire d'État, John Kerry, a dû
préciser aux membres de l'opposition
[notamment ceux qui se sont réunis le 9
décembre 2015 à Riyad sous la férule des
Saoudiens, des Qataris et d’Erdogan ;
NdT] en leur expliquant qu’il s’agit
d’une transition politique conduite et
prise en main par les Syriens, [laquelle
souscrit au Communiqué de Genève 1 et
avalise les Déclarations de Vienne ; NdT];
autrement dit, de la formation d’un
gouvernement de transition avec maintien
du président actuel et de ses
prérogatives constitutionnelles, les
futures élections devant décider qui
gouvernera la Syrie [7].
Ci-dessous le
texte de la solution politique proposée
par le président Bachar al-Assad il y a
trois ans. Le lecteur sera surpris de
constater que sa vision et son
vocabulaire semblent constituer la
principale source de la résolution 2254
et des Déclarations de Vienne, avec
cependant plus de clarté et de détails
sur les différentes étapes du processus
politique et davantage de tolérance
politique et humaine par son appel au
pardon et à la réconciliation :
« Partant
de nos constantes de principe ; à
savoir, la souveraineté de l’État,
l’indépendance de sa décision, les
principes et objectifs de la Charte des
Nations Unies, le Droit international ;
lesquels confirment tous, la
souveraineté, l’indépendance,
l’intégrité territoriale des États,
ainsi que la non-ingérence dans leurs
affaires internes. Et, étant donné
que nous sommes convaincus de la
nécessité du dialogue entre les enfants
de la Syrie, sous direction syrienne,
pour rétablir la sécurité et la
stabilité ; la « solution politique en
Syrie » se fera comme suit :Première étape :
1. Les États concernés, régionaux
et internationaux, s’engagent à cesser
de financer, armer, et héberger les
combattants armés ; parallèlement à
l’arrêt des opérations terroristes de
ces derniers. Ceci, facilitera le retour
des Syriens déplacés vers les lieux de
leur résidence d’origine, dans le calme
et la sécurité. Ce n’est qu’ensuite que
nos forces armées mettront fin à leurs
opérations militaires, tout en se
réservant le droit de riposter au cas où
la sécurité de la patrie, des citoyens,
des entreprises publiques et privées,
serait menacée de n’importe quelle
attaque.
2. Trouver une procédure pour
s’assurer que toutes les parties
respectent le précédent engagement avec,
en particulier, le contrôle des
frontières.
3. Le gouvernement en exercice se
charge d’initier directement les prises
de contact avec toutes les catégories de
la société syrienne, les partis, et les
organisations pour permettre les
échanges et préparer à une « Conférence
de dialogue national », à laquelle
participeront toutes les forces
extérieures et intérieures, désireuses
de trouver une solution en Syrie.
Deuxième étape :
1. Le gouvernement en exercice
invite à tenir une conférence de
dialogue national et global, pour
décider d’une « Charte nationale » qui
affirme la souveraineté et l’intégrité
territoriale de la Syrie, le rejet de
toute ingérence dans ses affaires, ainsi
que le renoncement au terrorisme et à la
violence sous toutes ses formes. C’est
cette charte qui tracera l’avenir
politique de la Syrie et qui dessinera
le système constitutionnel et
judiciaire, les caractéristiques
politiques et économiques, et les
projets de lois issus du consensus,
concernant les partis, les élections,
l’administration locale etc.
2. La charte devra être soumise à
référendum national.
3. Elle sera suivie de la
formation d’un gouvernement élargi à
toutes les composantes de la société
syrienne, chargé de la mise en œuvre des
dispositions de la « Charte nationale ».
4. Organisation d’un référendum
sur la Constitution. Après son adoption,
le gouvernement élargi adoptera les lois
consensuelles issues de la « Conférence
du dialogue national » conformément à la
nouvelle constitution, dont celles
portant sur la loi électorale qui
permettra de tenir de nouvelles
élections législatives. Ceci dit, tout
ce qui concerne la Constitution et les
lois pourrait être précédé du
conditionnel « si », autrement dit en
cas d’accord lors de la « Conférence du
dialogue national », une conférence
permettra de débattre des nouvelles lois
ou de la nouvelle constitution ; le
gouvernement travaillant à sa
visibilité.
Troisième étape :
1. Formation d’un
nouveau gouvernement conformément à la
Constitution adoptée selon les modalités
précédentes.
2. Tenue d’une « Conférence de
Réconciliation Nationale », et
déclaration d’une amnistie générale pour
ceux qui ont été emprisonnés en raison
des événements, avec maintien de leurs
droits civils.
3. Travaux préparatoires pour la
réhabilitation des infrastructures, la
reconstruction, et l’indemnisation des
citoyens pour les dommages subis du fait
des événements.
Concernant l’amnistie générale,
elle se fera en effet avec la
conservation des droits civils, car
l’État a le droit d’accorder la grâce
dans le domaine du Droit public, alors
qu’il ne dispose pas de cette
possibilité dans le domaine du Droit des
personnes… Je pense que lorsque nous
serons arrivés à ce stade, il faudra que
le pardon soit l’affaire de tous, non
seulement par amnistie de l’État. Ce
n’est qu’alors que nous parviendrons
pratiquement à la « Réconciliation
nationale », tout un chacun ayant
pardonné à tous ! »
Après tout ce
qui s’est passé en Syrie, l’opposition
qui refusera de participer aux
pourparlers de Genève 3 devra assumer,
devant les Syriens et le monde, la
responsabilité d’avoir transformé la
Syrie en foyer et couloir de passage à
la pire espèce de terroristes
ensauvagés, d’avoir été sourde aux
avertissements et d’avoir vendu son âme
au Diable.Quant à
l’opposition qui participera à ces mêmes
pourparlers de Genève 3, elle devra
expliquer, aux Syriens et au monde,
pourquoi elle accepte maintenant ce
qu’elle a refusé il y a trois ans,
pourquoi ce qui est devenu halal
aujourd’hui était haram hier, et qui
sont les responsables du sang versé et
de la dévastation du pays tout au long
de ces années.
La seule
différence entre ces deux types
d’opposants, ceux qui refusent de
participer et ceux qui acceptent, réside
dans l’identité de ceux qui les
exploitent et les financent. Ils sont
dans la position de l’esclave
obéissant ; avec d’une part, un maître
qui ne cherche que le chaos et la
destruction ; d’autre part, un projet où
la Syrie est devenue l’arène de toutes
sortes de pressions et de marchandages.
Mais leurs effets sont désormais
inopérants et leur fardeau est devenu
plus lourd que les intérêts que leurs
maîtres pouvaient en attendre.
Aucun de ces
opposants n’a le droit de parler de
trahison ou de coup dans le dos. Tous
savent qu’ils ont ruiné leur pays et
détruit sa civilisation, assouvissant la
haine qui habite les dirigeants des Pays
du Golfe, d’Ankara et de Paris [8]
envers la Syrie pour ce qu’elle
représente d’un point de vue historique
et géographique. Tous savent que rien de
ce qu’ils ont fait n’était syrien et que
rien de ce qu’ils feront ne le sera,
qu’ils participent aux pourparlers de
Genève 3 ou pas.
Une telle
opposition ne mérite que le gibet de
potence de l’Histoire !
Nasser
Kandil
28/01/2016
Source :
Al-Binaa
http://www.al-binaa.com/?article=93669
Article
traduit de l’arabe par Mouna Alno-Nakhal
Notes :
[1] Le
président al-Assad lance une solution
politique de la crise en Syrie.
Texte intégral du
discours du 06/01/2013
http://www.palestine-solidarite.org/discours.Bachar_al-Assad.060113.htm
[2] La vraie
bataille pour la Syrie, celle dont les
médias ne vous parleront jamais
http://reseauinternational.net/la-vraie-bataille-pour-la-syrie-celle-dont-les-medias-ne-vous-parleront-jamais/
[3] Communiqué final de la Réunion du
Groupe d'Action pour la Syrie, à Genève
le 30 juin 2012.
http://discours.vie-publique.fr/notices/122001263.html
[4] Syrie : de
Vienne 1 à Vienne 2, un champ de mines ?
http://www.palestine-solidarite.org/analyses.mouna_alno-nakhal.201115.htm
[5] Résolution
2254 (2015). Adoptée par le Conseil de
sécurité à sa 7558e séance,
le 18 décembre 2015
http://www.un.org/fr/documents/view_doc.asp?symbol=S/RES/2254%282015%29
[6] Syrie /
Genève 2 : Nous sommes venus vous mettre
face à vos responsabilités !
http://www.palestine-solidarite.org/intervention.walid_al-mouallem.030214.htm
[7]
Encore et toujours, l’impasse pour
l’opposition syrienne
https://www.lorientlejour.com/article/966856/encore-et-toujours-limpasse-pour-lopposition-syrienne.html
Plusieurs membres du CNS ont dénoncé,
ces derniers jours, les propos de Kerry
concernant la formation d'un
gouvernement d'union nationale et la
candidature d'Assad aux élections
futures…
[8]
Communiqué final de la réunion des
« forces de la révolution et de
l’opposition syriennes » (10 décembre
2015)
http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/dossiers-pays/syrie/la-france-et-la-syrie/actualites-2015/article/communique-final-de-la-reunion-des-forces-de-la-revolution-et-de-l-opposition
NB :
Aux dernières nouvelles de cette nuit
sur Al-Mayadeen TV, les membres du haut
comité des négociations [HCN] de ces
« forces de la révolution et de
l’opposition syriennes » dont le
négociateur en chef est Mouhamad
Allouche du groupe terroriste armé Jaïch
al-Islam, auraient déclaré qu’ils ne
participeront pas aux pourparlers de
Genève 3.
Le
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