Syrie
Bye bye Genève, bonjour Damas 1 !
Nahed Hattar
Vendredi 24 janvier 2014
Le 6 Janvier 2013, le
Président Bachar al-Assad formulait sa
« solution politique » et celle du
gouvernement syrien [1] pour la
résolution d’une « crise » dont le monde
entier reconnait, aujourd’hui, les
aspects mensongers ayant conduit à une
terrible souffrance du peuple syrien, à
des milliers de morts, à la destruction
d’une grande partie du pays, dans une
guerre « par procuration » qui n’a
respecté ni les morts, ni les vivants.
Le monde entier
reconnait, mais il faut croire que le
désir hégémonique a aussi ses raisons
que la raison n’a pas ! D’où l’évidence
qui veut que « la réponse militaire peut
accélérer la solution politique », sauf
que cette idée semble valable pour
l’agresseur [2] et l’agressé. Nous voilà
donc revenus à « la Loi du plus fort » !
[NdT].
Les deux seules
interventions significatives de « Genève
2 » [Montreux, 22 janvier 2014] sont
celles du ministre syrien des Affaires
étrangères, Walid al-Mouallem, et de son
homologue saoudien, M. Saoud al-Fayçal.
La plaidoirie
historique du premier pour la défense de
l’État syrien - fondée sur ses valeurs
nationales et civiles, son rôle
régional, et sa combativité face à une
horrible agression criminelle qui dure
depuis bientôt trois années - s’est
heurtée à celle du second, venu
confirmer la politique haineuse du
royaume saoudien à l’égard de la Syrie,
de sa civilisation et de son peuple.
Sinon, ce premier
jour de « Genève 2 » aura été une
cérémonie folklorique, étant donné qu’«
après l'heure ce n'est plus l'heure » !
En effet, ces six derniers mois, les
facteurs dont dépend le règlement de la
situation syrienne se sont radicalement
modifiés :
-
L’Armée
nationale syrienne a repris
l’initiative et a commencé à
concrétiser ce qu’il était convenu
d’exclure : son contrôle militaire
du terrain ! C’est Moscou qui le
dit, non un quelconque responsable
syrien.
-
Le Président
Bachar al-Assad n’est plus un sujet
de litiges pour la majorité des
Syriens. Et, alors qu'au début de
2013 il n’était qu’acceptable
jusqu'à la fin de son mandat actuel,
sa candidature aux présidentielles
de 2014 est devenue une nécessité
autant pour la Syrie que pour
l’International. Plus personne ne
discute du fait qu’il peut gagner
les élections.
-
Le
gouvernement syrien est resté
solidaire, a tenu bon, et a
progressé dans sa bataille
politique ; et l’État syrien a
retrouvé sa capacité de gestion du
pays avec une efficacité raisonnable
en temps de guerre.
-
L’opposition
syrienne s’est désintégrée et s’est
dispersée dans des pays moribonds; à
savoir, le Qatar, la Turquie, et les
derniers de ses sponsors atteints de
la démence du perdant, dont l’Arabie
saoudite, la France, et les services
troubles du renseignement régional
et international ; cette prétendue
opposition étant désormais logée
sous l’enseigne du takfirisme et du
terrorisme bestial, qu’il s’agisse
de DAECH, de JABHAT Al-NOSRA, ou du
FRONT ISLAMIQUE, factions aussi
monstrueuses les unes que les
autres !
Par conséquent, cette
première manifestation de « Genève 2 »
n’est que temps perdu, sinon qu’elle
aura une seule utilité : une déclaration
internationale contre le terrorisme.
Déclaration qui sera une sorte de
parapluie politique, car l’Arabie
saoudite continuera sa guerre. Elle
continuera jusqu’à la défaite ! Pendant
ce temps, les points de passage turcs
seront fermés et ceux de la Jordanie...
presque fermés.
Mais il sera
difficile de transformer la Jordanie en
front de guerre contre la Syrie. Ceci,
pour trois raisons : sa situation
interne ne le permet pas ; les
arrangements Irak-Jordanie-USA ont
plutôt tendance à se concentrer sur la
lutte contre le terrorisme à l'ouest de
l'Irak ; et enfin, il y a un risque
d’interactions avec le projet de Kerry
dans le coin... Par conséquent,
intervenir en Syrie mélangerait les
cartes et allumerait la mèche de toutes
ses contradictions à la fois. D’autant
plus que la Jordanie est sur le point de
tomber sous la menace terroriste ; des
milliers de terroristes et plus d'un
million de pièces de combat étant,
d’ores et déjà, présents sur son
territoire, sans compter les craintes
sérieuses venant d’une possible
irruption des terroristes à partir du
Horan [Syrie].
C’est pourquoi, la
question principale du moment concerne
la guerre contre le terrorisme. En
pratique, elle devrait consister en un
front réunissant les pays voisins de la
Syrie, l’Axe de la résistance, la
Russie, et les États-Unis. Il est
évident que ce front élargi comporte une
somme d’intérêts contradictoires, mais
l’essentiel est que l'opposition
syrienne n'est plus qu’une façade
suspecte de terrorisme !
Dans ces conditions,
le camarade Qadri Jamil insistera t-il
toujours sur son appartenance à une
opposition telle que celle-ci ?
Pourtant, il avait donné très tôt la
bonne réponse pour la sortie de crise en
déclarant son appartenance au
gouvernement syrien de là où il était :
sa différence ! Mais il est
malheureusement tombé dans la grande
erreur, celle de rester persuadé que
« la solution militaire serait
impossible » ; et aussi, celle de croire
que le costume de l’opposant était plus
beau
et plus élégant. Il s’est donc accroché
au mirage de « Genève 2 » ainsi qu’à la
solution internationale exigeant un
gouvernement de transition, et s’est
précipité là où il pensait pouvoir se
garantir une place dans le rang des
opposants.
Voilà « Genève 2 »,
camarade Jamil, et te voici. Te voici
avec Haytham Manaa en dehors de « Genève
2 » ! Et voici la délégation de
l’opposition réduite à quelques
individus trainés, à la va vite, par
Washington pour parfaire le décor ;
alors que le vrai règlement n’a lieu que
dans un cadre d'entente entre Washington
et Damas sous parrainage et garantie
russe ; un cadre semblable à celui de
l’entente entre les USA et l’Iran au
sujet du programme nucléaire iranien.
Bien ! Mais nous
pourrions peut-être faire remarquer que
le vrai cheminement de toutes les
discussions est inverse, et que c’est
plutôt la Russie qui prend les
initiatives, comme cela s’est passé pour
l’accord sur les armes chimiques
syriennes.
Un règlement sérieux
et viable est naturellement encore
possible, mais sa place est à Damas ! Un
règlement par le dialogue menant à un
« Gouvernement d'union nationale » pour
faire face au terrorisme, s’engager dans
la reconstruction du pays, et lancer un
processus politique qui mène vers une
Syrie nouvelle qui maintiendrait sa
politique étrangère et stratégique, tout
en bâtissant son système social
démocratique.
Aujourd’hui, ce n’est
plus honorable qu’un Syrien se réclame
de l’opposition. Ce n’est plus sérieux
d’attendre « Genève 2 ». La seule voie
ouverte est celle qui mène vers l’union
de tous les patriotes syriens, à Damas,
et sans conditions préalables ; le
premier ordre du moment étant de tenir à
l’écart « les facteurs externes », et de
rassembler les forces compétentes pour
la reconstruction du pays.
La solution est
syrienne et en Syrie. Ce n’est ni la
soumission, ni l’opposition. C’est un
mouvement populaire unique et pluriel
qui se lance dans la bataille du présent
et construit l’avenir !
Nahed Hattar
23/01/2014
Aricle original :
Al-Akhbar [Liban]
بهدوء | باي باي جنيف، أهلاً دمشق 1
http://www.al-akhbar.com/node/199233
Article traduit de
l’arabe par Mouna Alno-Nakhal
Notes :
[1] Syrie : Qui est
dans le déni de la réalité ?
Le président al-Assad lance une solution
politique de la crise en Syrie.
http://www.mondialisation.ca/le-president-al-assad-lance-une-solution-politique-de-la-crise-en-syrie/5318025
[2]
Syrie : "Une
action militaire peut accélérer la
solution politique" (Hollande)
http://www.franceinfo.fr/monde/intervention-en-syrie-une-solution-militaire-peut-accelerer-la-solution-pol-1132757-2013-09-06
Monsieur Nahed Hattar
est un écrivain et journaliste jordanien
résidant à Amman.
Le sommaire de Mouna Alno-Nakhal
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