Syrie
Bachar al-Assad : le plus
important est la reconstruction des
esprits pollués par l’idéologie
wahhabite
Mouna Alno-Nakhal
Samedi 21 janvier 2017
Entrevue accordée
par le Président syrien à la chaîne
japonaise TBS
[Texte intégral]
Question 1 :
Merci, Monsieur le Président, pour nous
avoir offert l’opportunité de connaître
votre point de vue sur ce qui se passe
en Syrie et l'avenir de ce pays. Ma
première question : maintenant que la
rencontre d’Astana approche, que
cherchez-vous et qu'en attendez-vous ?
Le
président Al-Assad :
Tout d'abord, vous êtes les bienvenus à
Damas et je suis heureux de m’adresser
au public japonais, pour la première
fois, depuis le début de cette guerre
sur la Syrie. Nous n’avons pas
d’attentes, disons que nous avons
l’espoir qu’Astana devienne une
plateforme de dialogue entre les
différentes parties syriennes sur tous
les sujets. Mais je pense qu'au tout
début, elle se concentrera plus
particulièrement sur le cessez-le-feu en
différents endroits, afin de protéger
des vies et permettre à l'aide
humanitaire d'atteindre les différentes
régions du pays. Ce sera, ainsi que nous
le voyons, la priorité.
Il n’est pas
clair qu’elle puisse porter sur un
quelconque sujet politique, car il n'est
pas encore clair qui va y participer.
Jusqu'ici, il s'agit de discussions
entre le gouvernement et les groupes
terroristes pour établir le cessez-le-
feu et permettre à ces groupes
terroristes de rejoindre le « processus
des réconciliations » ; ce qui signifie,
renoncer à leurs armes et bénéficier de
l'amnistie du gouvernement. C'est la
seule chose que nous pouvons en attendre
pour le moment.
Question 2 : Et,
acceptez-vous que des discussions sur la
formation d'un gouvernement de
transition aient lieu au cours de cette
rencontre ?
Le
président Al-Assad :
Tout ce qui sera discuté devra être
fondé sur la Constitution, parce qu’elle
n’est pas liée à des discussions entre
gouvernement et opposition, ou entre
gouvernement et groupes terroristes;
mais à chaque citoyen qui a le droit de
définir l'avenir de la Syrie. Dans notre
Constitution, il n'y a rien qui
corresponde à un gouvernement de
transition, mais la possibilité d’un
gouvernement régulier, composé de
représentants des différents partis et
des différentes entités politiques, que
nous qualifions de « Gouvernement
d’union nationale ». Par conséquent,
oui, il est ouvert à quiconque voudrait
y entrer, qu’il appartienne à un parti
de l’intérieur ou de l’extérieur de la
Syrie. C’est notre position. Plus tard,
et à partir d’un tel gouvernement, il
sera possible de parler d’élections
législatives ou parlementaires
aboutissant à la formation d’un nouveau
gouvernement, fondé sur les résultats de
ces élections.
Question 3 : Le
nouveau président des États-Unis, M.
Donald Trump, sera bientôt investi dans
ses fonctions. Qu’attendez-vous de lui ?
Qu’espérez-vous comme changement
politique à cette occasion ?
Le
président Al-Assad :
Comme vous le savez, la plupart des
présidents américains étaient issus des
milieux politiques ou avaient occupé des
postes politiques. Ce n'est pas son cas.
Et, si vous lisez les médias, dont les
médias américains, il est considéré
comme imprévisible parce qu’ils en
connaissent peu sur sa vision. La seule
chose sur laquelle nous pouvons fonder
notre jugement est son discours durant
sa campagne pour la présidence, d’où
vous pouvez retenir ce qui est bon pour
nous et notre priorité d’aujourd’hui :
combattre le terrorisme.
Le président
Trump a dit que sa priorité était de
combattre l’EIIL. C’est évidemment l'un
des aspects du terrorisme, l'une des
organisations terroristes. Or, lorsque
vous parlez de l’EIIL, vous devez aussi
parler d'Al-Nosra et, maintenant, de
tant d’autres groupes affiliés à
Al-Qaïda présents en Syrie. Mais je
pense qu’en parlant de l’EIIL, il
faisait du terrorisme sa priorité. Par
conséquent, nous attendons et nous
espérons que la prochaine administration
mettra vraiment à exécution cette partie
de son discours et aidera ainsi non
seulement la Syrie car, aujourd’hui, le
terrorisme n’est plus un problème
syrien, mais le problème du Moyen-Orient
et du monde. Nous espérons que cette
nouvelle administration contribuera
sincèrement à forger une vraie alliance
pour combattre les terroristes dans la
région, alliance dans laquelle la Syrie
sera évidemment en première ligne.
Question 4 :
J'ai lu une entrevue dans laquelle vous
avez parlé des lobbies à Washington DC.
Ils sont entrain d’empêcher le
changement de politique. C’est ce que
vous pensez ?
Le
président Al-Assad : Il
est très clair que de grands médias,
différentes institutions et différents
lobbies se combinent pour empêcher tout
changement qui nuirait à leurs propres
intérêts, une politique destructrice que
nous observons depuis au moins 17 ans.
Depuis l’arrivée de George Bush au
pouvoir en 2000, les États-Unis ne font
visiblement, que lancer des guerres
directes ou par procuration ; ces
compagnies, lobbies et médias y trouvant
des intérêts financiers dans la plupart
des cas. Aujourd'hui, il est évident
qu'ils mettront des obstacles pour
empêcher toute politique du nouveau
président orientée dans le sens de la
lutte contre le terrorisme, le respect
de la souveraineté d'autres pays et même
la détente dans le monde, via de bonnes
relations avec la Russie ou avec toute
autre grande puissance comme, par
exemple, la Chine.
Question 5 :
Dans le cadre de la lutte contre ledit
« État islamique », chercherez-vous une
coordination avec des acteurs tels la
Turquie, les Kurdes et les USA ?
Le
président Al-Assad :
Tout d'abord et pour rester transparent,
l’EIIL a été créé sous la supervision
des États-Unis en 2006. À l’époque il
était confiné en Irak et était désigné
par « État islamique ». Ce n’est qu’avec
le conflit en Syrie qu’il est devenu
l’« État Islamique en Irak et au
Levant » ou EIIL [Daech].
C’est alors
que la Turquie s’est chargée de le
parrainer pour exploiter les champs
pétrolifères syriens, exporter le
pétrole et ainsi obtenir de quoi
financer et armer encore plus de
terroristes. La Turquie a donc été
directement impliquée dans la
contrebande de pétrole et Erdogan,
lui-même, est le complice de Daech. Par
conséquent, nous ne pouvons pas espérer
un vrai combat contre l’EIIL de la part
de la Turquie ou des États-Unis.
L’exemple le
plus frappant est la reprise de Palmyre
par les éléments de Daech, il y a
quelques semaines. Ils sont arrivés par
le désert sous la surveillance des
drones américains. Aujourd'hui, au
moment où nous parlons, Daech mène des
attaques sur Deir ez-Zor à l’Est de la
Syrie, et les Américains ne font rien
pour l’arrêter.
Ladite
« Coalition internationale contre le
terrorisme » opère depuis plus d’une
année et demie. Elle n’a rien accompli,
parce que les États-Unis ne sont pas
sérieux. Quant à la Turquie, Erdogan est
un « Frère Musulman », instinctivement
proche et sympathisant de l’EIIL et
d’Al-Qaïda parce qu’ils partagent la
même idéologie. Il ne peut s’en
éloigner. Il tente quelques manœuvres
pour montrer qu'il est contre les
terroristes de l’EIIL et du Front al-Nosra
mais, en réalité, soutient
quotidiennement ces deux organisations,
soutien sans lequel elles ne peuvent pas
survivre.
Question 6 : À
Alep et ailleurs, vos Forces et les
Forces armées russes ont été critiquées
pour bombardements aériens des zones
résidentielles, des quartiers et des
hôpitaux. Diriez-vous que ces tragédies
humaines étaient inévitables pour
libérer Alep ?
Le
président Al-Assad : En
réalité, les pays qui ont accusé la
Russie et la Syrie de commettre ces
crimes ou d’autres, sont les mêmes pays
qui ont soutenu les terroristes, en
commençant par les États-Unis, le
Royaume-Uni, la France, la Turquie, le
Qatar, l'Arabie saoudite et leurs
semblables. Ceux-là qui ont soutenu les
terroristes directement, à travers les
médias et leurs politiques ou par
l’envoi d’armes, d’argent et toute sorte
de soutien logistique n’ont pas le droit
de pleurer sur les civils syriens, car
c’est à cause d’eux que ces civils
et qu’un peuple innocent ont été
assassinés au cours des six dernières
années. C'est le premier point.
Deuxièmement,
de par notre Constitution, la loi et la
morale, notre rôle de gouvernement est
de libérer les citoyens syriens des
terroristes. Est-il possible que
quelqu'un s’attende à ce qu’un
gouvernement qui voit n’importe quelle
région de son pays contrôlée par des
terroristes qui tuent des gens, qui
détruisent tout, imposent leur idéologie
haineuse à tout un peuple -l'idéologie
wahhabite- regarde sans réagir ?
Si vous
voulez parler des victimes, bien sûr que
toute guerre fait des victimes et que
toute guerre, quelle qu’elle soit, est
une mauvaise guerre avec du sang et des
morts. Vous ne pouvez pas parler d’une
bonne guerre, c’est évident. Et si vous
devez recourir à la guerre pour lutter
contre le terrorisme, vous aurez des
victimes, malheureusement. Nous avons
fait de notre mieux pour l’éviter, mais
ceux qui ont pleuré sur les civils,
ont-ils présenté des preuves attestant
que la Syrie ou la Russie, tuaient des
civils ?
L'autre
question est comment un gouvernement
peut-il moralement tuer son propre
peuple ? Et aussi, si nous tuons notre
propre peuple, les civils, comment
pouvons-nous résister six ans en tant
que gouvernement, Armée et Président ?
Ce n'est pas logique. Ce n'est pas
réaliste. Nous sommes là parce que nous
avons le soutien du peuple. Mais en fin
de compte, comme je l'ai dit, il y a
toujours des victimes, et nous espérons
que nous pourrons vraiment mettre fin à
cette guerre dès que possible; C'est la
seule façon d’arrêter l’effusion du sang
syrien.
Question 7 : Vos
Forces ont été soupçonnées d’avoir
utilisé des bombes contenant du chlore
gazeux. Le nieriez-vous ?
Le
président Al-Assad :
Vous parlez d'armes chimiques,
c'est-à-dire de l’usage d'armes pouvant
tuer des milliers de gens en peu de
temps, ce qui n'a pas été le cas en
Syrie depuis le début de la crise. Le
plus important est qu’en tant que
gouvernement, c'est d’un point de vue
moral que vous ne le feriez pas. Comme
je viens de le dire, vous ne tueriez pas
votre propre peuple. Vous n'utiliseriez
pas d'armes de destruction massive
contre votre propre peuple.
Troisièmement, ce qui est plus important
encore est qu’en 2013, nous avons signé
le traité d'interdiction des armes
chimiques et renoncé à notre arsenal.
Depuis 2013, nous ne disposons plus
d’armes chimiques.
En fait, ce
sont les terroristes qui ont utilisé ce
type d'armement, une première fois, en
2013. Et, au printemps 2013, nous avons
demandé aux Nations Unies d'envoyer une
délégation pour enquête, mais les
Américains l’ont bloquée parce qu’ils
savaient que si la délégation venait en
Syrie, elle trouverait la preuve
concrète que les terroristes ont utilisé
du chlore gazeux contre nos soldats.
Aussi, je nierai absolument ce discours
qui reflète le récit occidental et fait
partie de la diabolisation du
gouvernement syrien et de l'Armée
syrienne.
Question 8 : Il
y a des millions de réfugiés, de
personnes déplacées dont des enfants en
bas âge, et des centaines de milliers de
morts. Comment voyez-vous votre
responsabilité en tant que président ?
Le
président Al-Assad :
Quand vous parlez des réfugiés, vous
parlez d’une tragédie, surtout lorsqu’il
s’agit des enfants, des jeunes et des
moins jeunes, qui n'ont rien à voir avec
cette guerre. Ils n’ont aucune
affiliation et sont innocents, mais ce
sont eux qui paient le prix avant tous
les autres. Vous parlez donc d'une
tragédie que nous vivons au quotidien ;
ce qui, en tant que gouvernement, nous
incite à faire de notre mieux pour nous
débarrasser des terroristes qui ont créé
ce problème et ramener la paix et la
stabilité en Syrie.
C'est la
question que posent les Syriens au
Président. Mais bien que vous
compatissiez aux souffrances de tous les
Syriens du fait de cette guerre, leur
question n’a pas de rapport avec ce que
vous ressentez, mais avec ce que vous
allez faire. Quand allez-vous vous
débarrasser de ces terroristes ?
Et l'aspect
le plus important que beaucoup ignorent,
en Occident et dans le monde, est qu'une
partie du problème des réfugiés n'est
pas seulement liée aux terroristes
eux-mêmes. Il est lié à l'embargo
infligé au peuple syrien par l'Occident
et ses alliés. Il n’a pas eu d’effet sur
le gouvernement, il a affecté la vie de
chaque citoyen syrien. D’où les réfugiés
qui se retrouvent à l’étranger, non
seulement à cause de la menace des
terroristes, mais aussi parce que les
besoins fondamentaux d’une vie normale
ne sont plus disponibles, qu’il s’agisse
de nourriture, d’éducation, de soins
médicaux et de n’importe quoi d’autre.
Ils ont dû quitter pour trouver, quelque
part ailleurs, le minimum vital que tout
un chacun recherche.
Question 9 :
Dans ce cas et dans le cadre du
processus de rétablissement de la paix,
considéreriez-vous votre démission comme
une option, si vous pensez qu’elle est
nécessaire à la réconciliation ?
Le
président Al-Assad : La
démission ou le maintien du Président
est une question nationale qui concerne
chaque Syrien, car en Syrie il est élu
au suffrage universel direct. Ce n'est
donc pas un droit du gouvernement ou de
l'opposition, c’est le droit de chaque
Syrien.
Quiconque
veut que le Président quitte le pouvoir,
peut s’exprimer par la voie des urnes.
Donc, non, ce n'est pas un sujet dont
nous discutons avec l'opposition ou un
pays étranger. Il s'agit d'une question
syrienne liée à la Constitution. Des
élections à la date prévue ou anticipées
–qui ne sont pas sur la table
actuellement- sont la seule manière de
dire si je dois partir ou non.
Encore une
fois, je ne suis pas la raison du
problème. En tant que Président, je dois
aider mon pays pendant cette crise, non
fuir et m’échapper en laissant les gens
se débrouiller. Non, ce n'est pas la
solution. En période de crise, le
Président doit tenir la barre. Une fois
la crise terminée, il ferait savoir s’il
souhaite rester ou partir. Et c’est là
que le peuple syrien lui répondrait par
un oui ou par un non : vous devez
partir, nous ne voulons plus de vous.
Question 10 :
Qu’attendez-vous du Japon ? Quel rôle
espérez-vous qu’il joue pour la
restauration de la paix et la
reconstruction de la Syrie ?
Le
président Al-Assad :
Permettez-moi d'être franc avec un hôte
japonais en Syrie. Depuis notre
indépendance et le début des relations
entre nos deux pays il y a des
décennies, le Japon a joué un rôle vital
et très important dans le développement
de différents pays, y compris la Syrie,
en soutenant les infrastructures, etc.
Il est toujours resté impartial quant
aux différentes questions du
Moyen-Orient et a toujours respecté le
droit international, jusqu'au début de
cette crise.
Pour la
première fois, le Japon a rompu avec
cette politique en déclarant que le
président syrien devrait partir. La
question est : cette déclaration,
est-elle fondée sur les valeurs et la
morale du peuple japonais ? Certainement
pas. La moralité rigoureuse des citoyens
japonais en la matière est de notoriété
publique. Est-elle fondée sur le droit
international ? Non, nous sommes un pays
souverain, nous sommes un pays
indépendant, personne au monde n'a le
droit de nous dire qui devrait rester et
qui devrait partir. Malheureusement,
cette déclaration s’alignait sur la
politique américaine et occidentale.
Et puis, le
Japon a rejoint l'embargo sur la Syrie
alors qu’il aidait le peuple syrien.
L'embargo sur le peuple syrien est-il
lié à quoi que ce soit concernant les
intérêts du peuple japonais, ses
valeurs, ses lois, sa Constitution ou
quoi que ce soit d'autre ? Je ne le
pense pas.
Par
conséquent, comment le Japon pourrait-il
jouer ce rôle alors qu'il n'a même pas
d'ambassade en Syrie et ne sait même pas
ce qui s’y passe. En fait,
politiquement, les Japonais sont
aveugles comme tant de pays occidentaux
qui n'ont plus aucune relation avec
notre gouvernement ou notre pays. Ils ne
peuvent donc jouer aucun rôle parce
qu’ils ne sont pas au courant de ce qui
se passe et que leurs informations
viennent des pays occidentaux, ce qui
nous paraît absurde.
Reconstruction de la Syrie ? Vous ne
pouvez pas parler de reconstruction
alors que vous imposez un embargo. Vous
ne pouvez pas me donner la nourriture
d’une main et la reprendre de l’autre.
Il s’agit de politiques. Les Japonais
doivent revenir au droit international,
nous sommes un pays souverain. Ils ont
toujours respecté la Syrie et nous
attendons d’eux qu’ils reviennent vers
la ligne qui a distingué le Japon de la
plupart des pays du monde.
C'est là que
le Japon peut certainement aider les
Syriens, jouer un rôle important en ce
qui concerne la paix, l’arrêt de
l’hémorragie et la reconstruction de la
Syrie. La plupart des réfugiés n'ont pas
besoin de quelqu'un qui leur dise « vous
êtes les bienvenus » en Allemagne, en
France ou ailleurs. Ils veulent
retourner dans leur pays. Ils ne veulent
pas que vous les aidiez là-bas, ils
veulent que vous les aidiez ici. C'est
ainsi que nous voyons le rôle du Japon à
l'avenir. Nous espérons qu’il
redeviendra le Japon que nous avons
connu par le passé.
Le
journaliste :
Comme vous le savez, le Japon a de
l’expérience en matière d’urbanisme et a
joué un rôle dans la construction de la
nation il y a soixante-dix ans. Il
pourrait vous conseiller pour sa
reconstruction.
Le
président Al-Assad :
Certainement. Nous espérons.
Question 11 :
Comme vous le savez, le journaliste
japonais Jumpei Yasuda, un journaliste
compétent qui est aussi mon ami, a été
capturé en Syrie en juin 2015. Avez-vous
des informations sur sa situation ?
Le
président Al-Assad :
Jusqu'ici, non, nous n'avons aucune
information à son sujet. Nous en sommes
désolés. En tant que Syriens, nous
sommes ceux qui peuvent comprendre les
sentiments de sa famille. Nous avons
tant de disparus par la faute de cette
guerre. Si j’ai la moindre information,
je vous la communiquerai.
Le
journaliste : Il
a été pris en otage par le Front al-Nosra.
Le
président Al-Assad : Je
pense que ceux qui pourraient aider en
matière d’informations sont les Turcs,
parce qu'ils sont les superviseurs du
Front al-Nosra et doivent avoir toutes
les informations en sa possession, par
le biais de leurs services de
renseignement et de leur gouvernement.
Le
journaliste : Le
gouvernement japonais a-t-il contacté
votre gouvernement ?
Le
président Al-Assad :
Malheureusement, non. Il n'y a eu aucun
contact entre nos deux gouvernements et
sur aucun sujet, y compris ce
journaliste, qui est finalement un
citoyen japonais.
Question 12 :
Vous avez défini le rôle japonais à
travers son rôle de membre de la
Coalition des États-Unis. Vous le
pensez ?
Le
président Al-Assad : En
Syrie ?
Le
journaliste :
Oui.
Le
président Al-Assad : La
question est : qu’est ce que cette
Coalition a pu accomplir ? En réalité :
rien ! L’EIIL était en expansion depuis
le début de ses frappes aériennes, qui
ont été plutôt cosmétiques. En toute
franchise, ce n’est que lorsque les
Russes sont intervenus fin septembre
2015, que l’EIIL a commencé à rétrécir.
Cette coalition n'a rien accompli, sinon
tuer des soldats syriens qui
combattaient l’EIIL, détruire les
infrastructures que les Syriens ont
construit depuis l’indépendance, ces
soixante-dix dernières années. Et ceci
quel que soit le secteur : champs
pétrolifères, raffineries, ponts,
écoles… Tout a été détruit par cette
Coalition. C'est sa seule réalisation,
malheureusement.
Question 13 :
Combien de temps vous faudra-t-il pour
reconstruire le pays ? Quel est votre
calendrier ?
Le
président Al-Assad :
Nous n’avons pas attendu la fin de la
crise. Nous avons travaillé les plans et
nous avons commencé par les banlieues
détruites autour de Damas et maintenant
nous planifions pour Alep et d'autres
villes, afin de les reconstruire d’une
manière moderne. Nous n’avons pas
attendu et nous n’allons pas attendre.
Nous pouvons commencer de suite, car le
peuple syrien est déterminé à
reconstruire le pays.
Nous avons
bâti la Syrie. La Syrie n’a pas été
bâtie par des étrangers. Nous l’avons
fait avec nos ingénieurs, notre labeur,
nos ressources et l’aide technique, mais
non financière, de quelques amis. Nous
pouvons donc la reconstruire. Cela
prendra du temps parce qu’il faudra
beaucoup d'argent. Chaque Syrien
reconstruira sa maison selon ses moyens,
même limités. Puis, il y a les réfugiés
et les expatriés, dont certains aisés
qui veulent revenir. Il y a le soutien
de nos amis en Russie, en Chine, en
Iran. D'autres pays ont commencé à en
discuter et nous proposent leur aide
financière.
Des
ressources existent et il faudra du
temps, mais le plus important est que
vous ayez la capacité de reconstruire
votre pays. Nous ne sommes pas inquiets
à ce sujet. Ce qui nous préoccupe, c'est
comment reconstruire l'esprit des gens
qui ont été sous le contrôle de l’EIIL
et d’Al-Nosra pendant de nombreuses
années.
Comment
reconstruire les esprits pollués par
instillation de l’idéologie wahhabite ou
haineuse, comme je vous l’ai décrite.
Des gens qui ont vu la mort et les
meurtres, des meurtres commis parfois
par de jeunes enfants sur des adultes
innocents. Comment reconstruire et
réhabiliter ces esprits ? C’est notre
plus grande préoccupation de
l’après-crise.
Journaliste :
Merci. Merci beaucoup.
Le
président Al-Assad :
Merci à vous.
Dr Bachar
Al-Assad
Président de la
République arabe syrienne
20/01/2017
Source :
SANA [ Syrian Arab News Agency]
Texte original en anglais
http://sana.sy/en/?p=98592
Vidéo
https://www.youtube.com/watch?v=pieZO1jRc5w
Traduit
par Mouna Alno-Nakhal
Le sommaire de Mouna Alno-Nakhal
Le
dossier Syrie
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