Syrie
ONU/Syrie : Les discours prétendument
humanistes
ne réussiront pas à dissimuler les
crimes de guerre
contre le peuple syrien…
Bachar al-Jaafari
Samedi 19 septembre 2020
Suite à l’intervention du Dr
Bachar al-Jaafari devant le Conseil de
sécurité réuni par visioconférence le 10
septembre courant [1], nous nous
étions demandé pour quelle raison la
Turquie retenait l’attention de la
presse onusienne en langue française, au
point que ses paroles étaient citées en
premier et en dernier, alors que celles
du premier concerné, en l’occurrence le
délégué permanent de la Syrie auprès des
Nations Unies, étaient totalement
occultées.
Qu’est-ce qui fait que la
Turquie a bénéficié de ce privilège
inhabituel, alors qu’elle ne fait pas
partie des membres permanents ou non
permanents du Conseil de sécurité ?
Qu’est-ce qui fait que son représentant
est depuis ce 15 septembre le président
de la 75ème session annuelle
de l’Assemblée générale des Nations
Unies [2] ? Et comment se peut-il
que la priorité de la Turquie soit
« l’examen de la stratégie
antiterroriste mondiale des Nations
Unies », vu les méfaits du terrorisme de
son président, Erdogan, sur son propre
peuple et son soutien incontestable au
terrorisme sans frontières sévissant en
Syrie, comme nous le rappelle le Dr
Bachar al-Jaafari en ce 16 septembre,
devant le Conseil de sécurité réuni une
énième fois pour prétendument discuter
de la situation humanitaire en Syrie [3] ?
Il ne nous
appartient pas de répondre à ces
questions, mais il n’est peut-être pas
inutile de les poser. [NdT].
Monsieur le
Président,
Soixante-quinze ans après la victoire de
la Seconde Guerre mondiale et la
fondation des Nations Unies, la
méthodologie de l’École du ministre
allemand nazi de la Propagande, Joseph
Goebbels, reposant sur l’idée qui dit :
« Si vous dites un mensonge assez gros
et que vous le répétez, les gens
finiront par y croire » est,
malheureusement, toujours appliquée par
nombre de représentants de pays
occidentaux au sein du Conseil de
sécurité.
Une
idée dont les aspects principaux et les
plus sombres se manifestent par les
allégations qu’ils promeuvent en
prétendant que les mesures coercitives
unilatérales qu’ils imposent à mon pays,
illégalement et illégitimement, ne
visent pas le peuple syrien, qu'ils
déploient de grands efforts pour nantir
ces mesures de dérogations humanitaires
et médicales, et fournir une assistance
aux Syriens ; le « régime » syrien
interdisant le traitement à ses citoyens
souffrant de l'épidémie de la Covid-19.
C’est ce qu’ils se plaisent à prétendre
et ce que j’ai entendu dire, il y a peu,
par la déléguée des États-Unis et le
délégué de l’Allemagne.
Or, la
littérature du mensonge est une
spécialité de la culture occidentale.
Ici, nous citerons, pour exemple, [l’un
des héros les plus populaires de la
littérature allemande], le célèbre Baron
menteur de Münchhausen. Bien que le
terme de littérature ne convienne pas au
mensonge, nous nous devons de faire
remarquer
que les représentants des pays
occidentaux, au sein de ce Conseil, ont
travaillé à institutionnaliser le
mensonge et à en faire une méthode
d’induction en erreur au service de
leurs politiques destructrices.
Je dis en
toute franchise, Monsieur le Président,
que notre pratique de la diplomatie et
notre foi en l’ouverture et le dialogue
font que nous ne pouvons en dire plus
pour décrire de tels mensonges qui ne
trompent personne. Et ce, alors que
chaque citoyen syrien est atteint, à
chaque seconde de chaque jour et de
chaque mois, par les effets désastreux
de vos mesures coercitives inhumaines
qui le ciblent dans les moindres détails
de sa vie quotidienne, tout en limitant
la capacité des institutions de l'État
syrien et de ses partenaires, dans le
domaine humanitaire, à assurer ses
besoins fondamentaux et à améliorer sa
situation et ses conditions de vie.
Monsieur le
Président,
Cibler le
peuple syrien par le biais du terrorisme
économique n'est pas nouveau. Il résulte
du fait que les administrations
américaines successives gardent une
vision étroite fondée exclusivement sur
le parrainage et la protection des
intérêts israéliens, aux dépens de la
stabilité et de la sécurité de toute
notre région et du sang de ses peuples.
En effet,
depuis 1978, les administrations
américaines successives n’ont cessé
d’imposer des mesures coercitives à
l'économie syrienne et à ses secteurs
vitaux, tels ceux de l’aviation civile,
du pétrole, de l’énergie, des
télécommunications, de la technologie,
des banques, de l’importation et de
l’exportation, y compris l’importation
de produits entrant dans la fabrication
d’aliments, de médicaments et de
matériels médicaux de base. Le tout afin
de nous obliger à modifier nos prises de
position contre les politiques de
domination et d'occupation, en faisant
fi des documents et des décisions
pertinentes des Nations Unies,
lesquelles affirment l'illégalité de ces
mesures, leur violation du droit
international, de la Charte des Nations
Unies et des droits de l'homme. Des
violations commises et malheureusement
enterrées à Bagdad, à Tripoli la
libyenne et en Syrie.
Ces mesures
coercitives unilatérales imposées à la
Syrie ont été renforcées ces dernières
années, notamment sous l'actuelle
administration américaine ayant abouti à
ladite «loi César» dans le but
d'affaiblir l'État syrien, de saper ses
options nationales et d’obtenir ce que
les gouvernements des pays hostiles ont
été incapables d’obtenir politiquement
et militairement, via l’exploitation du
terrorisme et les agressions tantôt
bilatérales, tantôt trilatérales. Ce que
confirment les déclarations répétées de
l’émissaire américain James Jeffrey, en
personne.
Et hier, nous
avons entendu le Président Trump
reconnaître que son administration avait
planifié l’assassinat du Président
Bachar al-Assad [4][5]. Ce
qui ne fait que confirmer le niveau de
décadence atteint par la pensée et la
politique absurde pratiquée par cette
administration.
Aujourd’hui,
tous les Syriens endurent un large
éventail de mesures coercitives qui les
entourent de toutes parts, tandis que
l’Organisation des Nations Unies et le
Bureau de la coordination des affaires
humanitaires [OCHA] ignorent les
demandes répétées que j’ai moi-même
confirmées, au nom du gouvernement de
mon pays, par une plainte adressée au
Secrétaire général et au Président du
Conseil de sécurité le 31 mai 2020.
Une lettre
officielle par laquelle j’ai demandé au
Secrétariat général de traduire ses
paroles en actes et de présenter un
rapport sur les effets désastreux de ces
mesures sur la vie des Syriens. Requête
à laquelle la Syrie n'a toujours pas
reçu de réponse, malgré ses lettres de
rappel et les demandes formulées par
nombre d'États membres ayant tenté
d’aborder ce sujet au cours des
consultations précédant l’adoption de la
résolution 2533 (2020) [6]. États
auxquels nous adressons nos
remerciements avec toute notre
reconnaissance.
Monsieur le
Président,
L’OCHA a soumis au Conseil de sécurité
68 rapports écrits et des centaines
d’exposés sur la situation humanitaire
en Syrie. Rapports dans lesquels, ni M.
Mark Lowcock [Secrétaire général adjoint
aux affaires humanitaires], ni ses
prédécesseurs M. Stephen O'Brien et Mme
Valérie Amos, comme par hasard tous les
trois de nationalité britannique, n'ont
osé parler clairement et explicitement
de la nécessité de mettre fin aux
mesures coercitives imposées à la Syrie.
Et,
même lorsque le Secrétaire général et
son envoyé spécial en Syrie, M. Geir
Pedersen, ont appelé à la levée de ces
mesures dans le cadre des efforts visant
à lutter contre la pandémie du
coronavirus, les représentants de l’OCHA
ne leur ont fait écho que timidement et
faiblement, tandis que les pays
occidentaux tentaient de dissimuler
leurs appels et d’en détourner
l'attention. Comportements tangibles
lors des consultations concernant
plusieurs projets de résolution rejetés
aussi bien par le Conseil de sécurité
que par l'Assemblée générale, en raison
des prises de position occidentales.
Ainsi, hier, lors de la clôture de la 74ème
session annuelle de l’Assemblée générale
suivie de l’ouverture de la 75ème,
le Secrétaire général et son nouveau
président ont parlé des 70 résolutions
adoptées l’année dernière, notamment
celles concernant la solidarité face au
coronavirus ! 70 consultations au cours
desquelles nous n’avons cessé de
négocier avec les États occidentaux et
ceux qui gravitent autour, pour qu’ils
acceptent de juste reconnaître
l’illégalité des mesures coercitives
unilatérales et d’exécuter les
recommandations du Secrétaire général !
70 résolutions sans que les Occidentaux
ne daignent tenir compte des
recommandations du Secrétaire général de
l’ONU, de son envoyé spécial en Syrie et
des représentants du Conseil des droits
de l’Homme !
Mais les tentatives des pays occidentaux
cherchant à dissimuler les conséquences
de leur terrorisme économique ne
réussiront pas, car la réalité telle
qu’elle est n'a pas besoin de
satellites, de télescopes, de
microscopes ou même d’équipes
d'enquêteurs pour inspection ou
vérification.
En
effet, combien
d'enfants syriens ont été privés de
chauffage à la maison ou à l'école du
fait des sanctions unilatérales
associées au pillage du pétrole
et du gaz syriens
par l'occupant américain et les milices
séparatistes collaborant avec lui,
pillage suivi par des
actes de piraterie et d'interception de
navires menés par certains gouvernements
sans l'approbation du Conseil de
sécurité, afin de nous empêcher
d'importer du carburant ? N’est-ce pas
là un terrorisme économique inhumain
Monsieur le
Secrétaire général adjoint aux affaires
humanitaires, Mark Lowcock ?
Et
combien de patients ou de
nouveau-nés ont pâti ou sont
décédés suite aux coupures de courant
dans les incubateurs ou les salles
d'opération de certains hôpitaux et
centres de santé, ou suite à
l'interdiction d'importer des matériels
de base, tels que des fils pour sutures
chirurgicales, des anticoagulants, des
poches pour le recueil et la
conservation du sang et de ses dérivés,
en plus des équipements nécessaires aux
examens paramédicaux, tels que la
radiographie classique, l’IRM, le
Scanner, etc. ?
Autant de
situations nécessitant que les criminels
qui imposent de telles mesures
coercitives unilatérales au peuple
syrien comparaissent devant un tribunal
international pour « crimes de guerre »,
un tribunal indépendant de
l’Organisation des Nations Unies,
laquelle ne représente malheureusement
plus la légalité internationale.
Les
discours répétés de certains quant à
leur prétendue préoccupation humanitaire
et à l’octroi de dérogations
humanitaires et médicales aux mesures
coercitives ne cachera pas la réalité de
leurs crimes visant à étrangler le
citoyen syrien, à exercer encore plus de
pression sur le gouvernement syrien, à
entraver le processus de reconstruction
et à empêcher le retour des déplacés,
comme nous venons de l’entendre de
représentants de certains États
occidentaux.
Naturellement, nombre de représentants
de l'administration américaine se
sentiront heureux devant les
conséquences de leurs sanctions
inhumaines. Ils y verront leur succès,
vu qu’ils sont habitués à de tels
crimes. Leurs mesures coercitives ont
bien tué environ un million d’enfants
irakiens dans les années 90 du siècle
dernier, leur crime étant resté impuni,
sans constitution d’un quelconque comité
d’enquête ou de mécanismes
interrogatoires, en dépit des aveux
publics reconnaissant ces crimes dans
les « Mémoires » de certains de leurs
responsables.
Monsieur le Président,
Mon
pays réaffirme la nécessité de mettre
fin à l'occupation turque des terres
syriennes du nord et du nord-ouest de la
Syrie, ainsi que la nécessité de mettre
fin aux crimes du régime d'Erdogan
souteneur du terrorisme. Lesquels crimes
ont eu le plus grand impact sur la
détérioration de la situation
humanitaire des Syriens, vu qu’ils ont
accumulé meurtres, pillages,
destructions, déplacements de
populations, changements démographiques,
exploitation de la souffrance et trafic
des réfugiés, vol de pétrole,
d'antiquités, d'usines et de récoltes
agricoles, trafic d’organes et
utilisation de l'eau comme arme de
guerre contre les civils. Et ce, en plus
de nourrir, de réanimer et de fournir
tout un arsenal d'armes et de munitions
aux organisations des « terroristes sans
frontières » ordinairement qualifiées de
terrorisme international.
Il est tout
aussi nécessaire de mettre fin à
l'occupation américaine des terres
syriennes du nord-est et de la région
d’Al-Tanf au sud du pays, vu que les
Américains, leurs alliés, les milices
séparatistes et les groupes terroristes
qui leur sont inféodés sont responsables
de la prolongation des souffrances dans
les camps d'Al-Hol et d’Al-Roukbane. Une
occupation qui a empêché et empêche
toujours le démantèlement du camp d’Al-Roukbane
et le retour des déplacés chez eux,
alors que certains gouvernements
européens refusent de rapatrier leurs
« terroristes sans frontières » et leurs
familles du camp d'Al-Hol.
Pour
conclure, Monsieur le Président,
J'attire
l'attention des membres du Conseil de
sécurité sur un rapport récemment publié
par le quotidien britannique « The
Guardian ». Fondé sur les données de
centres de recherche américains, il
rapporte que depuis 2001 et au titre de
« la lutte contre le terrorisme », les
États-Unis ont provoqué le déplacement
de 37 millions de personnes de pays
comme l'Irak, l'Afghanistan, la Syrie,
la Libye, le Yémen, etc. [7]. 37
millions de personnes Monsieur Lowcock !
Partant de
là, les questions deviennent : Qui
fabrique les crises ? Comment ce conseil
pourrait-il préserver la paix et la
sécurité internationales, alors que ses
membres occidentaux permanents et non
permanents se posent en adversaires et
arbitres à la fois ? Comment se peut-il
que quelqu’un puisse se poser en pompier
et en pyromane en même temps ?
Merci,
Monsieur le Président
Dr Bachar
al-Jaafari
Envoyé permanent de la
Syrie auprès des Nation Unies
16/09/2020
Traduction
de l’arabe par Mouna Alno-Nakhal
Source :
Vidéo /
The Syrian Mission to the United Nations
https://www.youtube.com/watch?v=tCSoFb1tyUw
Notes :
[1][ONU
/ Syrie: Faute de mieux, recours en
fanfare au «dossier chimique»…]
[2][L'Assemblée
générale ouvre sa nouvelle session
annuelle sur fond de pandémie]
[3][Conseil
de sécurité: le Coordonnateur des
secours d’urgence se dit confiant dans
les capacités de gestion de l’ONU de
l’aide humanitaire transfrontalière vers
le Nord-Ouest syrien]
[4][Trump
says he had 'a shot' to take out Syria's
Assad, but ex-Defense chief Mattis
opposed it]
[5][Trump
: Un gangster à la tête d’un « état
voyou »]
[6][Résoution
2533 (2020)]
[7][Conflicts
since start of US 'war on terror' have
displaced 37m people – report]
Le sommaire de Mouna Alno-Nakhal
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Syrie
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