Syrie
Alep libérée ? La « bonne
nouvelle »
épouvantable
pour les dirigeants français
Bachar al-Jaafari [2ème
partie]
Lundi 5 décembre 2016
Pour
mémoire :
Intervention du délégué permanent de la
Syrie auprès des Nations Unies, lors de
la réunion du Conseil de sécurité, ce 30
novembre 2016, suite à la demande
urgente du ministre français des
Affaires étrangères [1] ; [NdT].
Merci
Monsieur le Président,
Si vous le
permettez, je ferai une remarque avant
de vous donner lecture de mon
communiqué.
Aujourd’hui,
les invités chargés de présenter leur
évaluation de ce qui se passe à Alep
sont intervenus depuis Genève, Londres
et Amman [MM. S. O’Brien, S. de Mistura,
G. Cappelaere ; NdT], sans qu’aucun
délégué ou représentant de l’ONU basé en
Syrie n’intervienne sur l’écran;
participation pourtant prouvée efficace
lors de la session précédente grâce à
Madame Elizabeth Hoff, représentante de
l’OMS résidant à Damas, qui nous a
fourni nombre d’explications [2].
Par
conséquent, c’est là une lacune
dangereuse et un spectacle étrange qui
en rappelle un autre, celui de trois
États membres de ce Conseil travaillant
sur un projet de résolution d’ordre
humanitaire sans consultation ou
coordination avec la délégation du
Gouvernement de la République arabe
syrienne. Ce qui nous donne à voir, ici
même, un deuxième spectacle surréaliste,
tel celui décrit dans le roman « 1984 »
de George Orwell, que vous connaissez
certainement.
Monsieur le
Président,
Une fois de
plus, les représentants et les
employeurs de l’organisation Front al-Nosra
et des groupes terroristes affiliés se
précipitent pour demander une réunion
d’urgence du Conseil de sécurité, avec
l’intention de leur porter secours en
leur offrant un soutien moral et
politique, suite aux victoires
remportées par l'Armée arabe syrienne et
ses alliés dans leur lutte contre le
terrorisme sévissant en Syrie, que ce
terrorisme soit modéré ou génétiquement
modifié en modéré.
Aussi, je
voudrais assurer à ces représentants,
ici présents, d'Abou Mohammad al-Joulani,
le demi-frère d’Abou Bakr al-Baghdadi,
chef de Daech, que leur obstination à
faire commerce du sang syrien et des
souffrances du peuple syrien, en
réduisant ce qui se passe en Syrie à un
problème strictement humanitaire, ne
saurait dissuader le Gouvernement de la
République arabe syrienne de remplir son
devoir constitutionnel et légitime
consistant à lutter contre le terrorisme
et à sauver les Syriens des agissements
calamiteux de ces groupes terroristes,
avec l’aide de ses alliés, dans le
respect du droit international et
conformément aux résolutions du Conseil
de sécurité relatives à ce sujet, comme
c’est le cas pour tout État membre et
souverain de cette organisation
internationale.
À ce propos,
j’aimerais rapporter à ceux-là qui font
commerce du sang syrien un extrait d’une
lettre rédigée par les enfants de Syrie
et remise, hier, à la représentante de
l’UNICEF à Damas, puisqu’il semble que
le Directeur régional de cette
organisation, toujours présent parmi
nous [par vidéoconférence ; NdT], n’en a
pas entendu parler. Une lettre de
protestation contre les attaques des
groupes terroristes par engins explosifs
et roquettes ciblant les écoles d’Alep.
Je cite :
« Nous
voulons nous rendre dans nos écoles sans
la crainte d’une voiture piégée. Nous
voulons jouer sans que les projectiles
et les bombes nous surprennent. Nous
voulons vivre en paix, en sécurité et
dans la joie. Le sang de nos camarades
tombés en martyrs n’aura pas coulé en
vain. Il est le phare de la victoire
proche sur les forces de la terreur et
de l’obscurité ».
Voici cette
lettre des enfants d’Alep à l’UNICEF. Je
la confie aux bons soins de M.
Cappelaere [Directeur régional basé à
Amman ; NdT].
Monsieur le
Président,
Les
représentants du Front al-Nosra à
l’intérieur et à l’extérieur du Conseil
de sécurité n’entendront pas les paroles
de ces enfants, comme ils n’entendront
pas les récits et témoignages
terrifiants de dizaines de milliers de
nos concitoyens sauvés ces derniers
jours par l’Armée arabe syrienne et ses
alliés, sur les pratiques du Front al-Nosra
et des groupes affiliés, à Alep, tout au
long des quatre années passées.
Des
souffrances et des tragédies
épouvantables et sans fin, allant de la
vente de l’aide humanitaire et du pain à
des prix hors de leurs moyens, à la
mobilisation armée de leurs enfants, à
la mise en captivité de leurs femmes, à
leur utilisation comme boucliers
humains. Des histoires vraies observées
par les opinions publiques du monde
entier, 24h sur 24, sans aucun rapport
avec les romans des « Mille et une
nuits » que certains se plaisent à
raconter dans les couloirs de ce
Conseil.
J’en profite
pour dire à ma collègue américaine que
Daech, le Front al-Nosra et tous ces
terroristes qui capturent les femmes,
les vendent au marché des esclaves à un
prix fixé par une liste établie en
fonction de leur âge. Dans une telle
situation, il semble que mes collègues
féminines au sein de ce Conseil
risquent, malheureusement, d’être
vendues pour seulement 40 dollars. Une
femme capturée par ceux-là est vendue 40
dollars seulement… 40 dollars !
La libération
de plus de 80 000 habitants d’Alep, dont
des dizaines de milliers d’enfants, n’a
jamais fait partie des plans des
ministères des Affaires étrangères
français, américain et britannique,
lesquels ont prétendu vouloir défendre
ces civils.
L’invitation
de leurs gouvernements à imposer des
sanctions à la Russie et à la Syrie
suite à la libération de nos concitoyens
prouve, encore une fois, que ces civils
syriens ont été utilisés par les
parrains du terrorisme pour protéger les
terroristes de toutes les couleurs et
exercer un chantage politique sordide.
Aujourd’hui
même, des dizaines de civils ayant tenté
de sortir de l’est vers l’ouest d’Alep,
c’est-à-dire, de fuir des régions
contrôlées par les terroristes vers
celles contrôlées par l’Armée syrienne,
ont été abattus par des terroristes
qualifiés d’opposants modérés ou
génétiquement modifiés en modérés,
chéris par les délégations des
États-Unis, de la Grande Bretagne et de
la France.
Monsieur le
Président,
Un éléphant
est présent dans la salle et personne ne
veut le voir. MM. De Mistura et O’Brien
ont dit que des « groupes armés non
étatiques » -ils n’ont pas prononcé le
mot « terroristes » préférant parler de
groupes armés non étatiques- ont empêché
les civils de sortir de l’est d’Alep.
Ils sont là, devant nous. Demandez-leur
si j’ai mal compris.
Ils ont dit
que des « groupes armés non étatiques »
[2] ont empêché les civils de
sortir de l’est d’Alep, ce qui signifie
que ces groupes terroristes prennent les
civils comme boucliers humains !
Le théâtre de
l’absurde, joué aujourd’hui par certains
devant ce Conseil à travers des
déclarations trompeuses compatibles avec
le chantage et les pratiques
destructrices adoptés par leurs
gouvernements, ne saurait occulter la
lumière du soleil et le fait que nos
concitoyens de certains quartiers est
d’Alep ont repris espoir dans la vie
depuis leur libération par l’Armée
syrienne et ses alliés qui leur ont
offert tous les moyens d’une subsistance
décente en leur assurant abris,
nourritures, soins médicaux, d’où un
sentiment de sécurité et de stabilité
après des souffrances endurées depuis
plus de quatre années.
Ce théâtre de
l’absurde, avec ses héros parmi les
représentants du Front al-Nosra au sein
de ce conseil, n’a pas réussi à
défigurer la victoire militaire ayant
abouti à la libération des civils d’Alep
du terrorisme, tout comme il n’a pas
réussi à ternir l'image du comportement
humain du Gouvernement syrien et de
l’aide humanitaire apportée par la Syrie
à ces civils arrachés à leurs griffes,
en coopération avec les alliés et les
amis.
Dans ce but,
le Gouvernement syrien a demandé
aujourd'hui au bureau du Représentant
des Nations Unies, basé à Damas, de
contribuer aux efforts de secours
déployés par le gouvernement syrien afin
d’atténuer les souffrances de dizaines
de milliers d’Alepins, en mettant à
profit le contenu des entrepôts de l’ONU
à Alep et toute autre assistance
susceptible de répondre aux besoins
essentiels des citoyens. J’ajoute que
les autorités syriennes ont autorisé le
Représentant de L’ONU à se rendre à
Alep. Il y sera ce jeudi. Nous verrons
ce que l’OCHA [Office for the
Coordination of Humanitarian Affairs]
pourra accomplir.
À ce sujet,
je loue les efforts et les réalisations
de la Russie fédérale dont le soutien ne
se limite pas à aider la Syrie dans la
guerre contre le terrorisme, mais
s’étend de manière significative aux
divers domaines du travail humanitaire
et de secours avec, récemment, des
instructions données par le Président
Poutine aux ministères russes de la
Défense et des Situations d’urgence afin
de déployer des hôpitaux mobiles en
Syrie et fournir des soins médicaux aux
habitants d’Alep et de ses environs.
Je confirme
qu'il s’agit de véritables hôpitaux de
campagne, non de studios fabriquant des
épopées héroïques pour les terroristes
des dénommés « Casques blancs », groupe
fondé par l'officier du renseignement
britannique, James le Mesurier, dont le
patronyme suggère une origine française,
tel qu’il en est de l’identité de ceux
qui ont invité à la tenue de cette
séance.
Il est temps
que ce théâtre de l'absurde mette fin à
ces pratiques ayant mené à la
propagation du danger terroriste comme
jamais auparavant, et à une panique
planétaire depuis qu’il s’est propagé
partout dans le monde.
Les États
responsables feraient mieux de réaliser
qu’il ne leur sera pas possible
d’utiliser le terrorisme comme outil de
transformation d’Alep en une autre
« Kandahar », ce qu’ils ne verront
jamais, même pas dans leurs rêves ou
leurs cauchemars.
Monsieur le
Président,
Il est
regrettable que cette légèreté politique
ne se limite pas aux seuls gouvernements
des pays membres de l'ONU, mais se
trouve également pratiquée par les hauts
fonctionnaires du Secrétariat général,
lesquels ont décrit le destin des
dizaines de milliers de civils, sauvés
par l'Armée syrienne et ses alliés des
griffes du terrorisme, de « destin
inconnu et insécure », comme s’ils
appelaient à donner un coup de main aux
terroristes et leur envoyaient un
message après l’autre : « Continuez,
nous nous chargeons de vous blanchir au
Conseil de sécurité ! ».
Monsieur le
Président,
C’est
désormais une réalité et un danger que
certains ont abandonné leurs
responsabilités dans la lutte contre le
terrorisme et le maintien de la paix et
de la sécurité internationales, jusqu’à
transformer ce Conseil en une tribune de
chantage et de polarisation politique
quant à la gestion de la guerre
terroriste imposée à la Syrie, au point
qu’ils ont bloqué l’inscription
d’organisations terroristes sur la liste
spécialement établie à cet effet ; le
blocage le plus récent , comme vous le
savez, étant dû au refus des États-Unis,
de la France et de la Grande-Bretagne,
d’inscrire ladite « Armée de Mohammad »
et « Ahrar al-Cham » sur cette liste.
Un abandon
des responsabilités qu’ils ont poussé
jusqu’à la non application des
résolutions du Conseil de sécurité,
notamment la résolution 2253 (2015)
[censée asphyxier le terrorisme, NdT] en
fermant les yeux sur les agissements des
États qui soutiennent le terrorisme
financièrement et médiatiquement sans
aucune limite, prononcent des « fatwas »
takfiristes-jihadistes-wahhabites,
accordent des facilités logistiques et
ouvrent leurs frontières aux armes et
aux combattants terroristes étrangers.
Autant
d’offres accordées par le régime des Al-Saoud,
père spirituel du terrorisme
international ; le régime d’Erdogan,
vrai parrain de l'organisation
terroriste mondiale « Frères
Musulmans », lequel s’imagine toujours
en Sultan de son temps ; le régime
qatari des Al-Thani, financier et
parrain principal du Front al-Nosra et
dont le ministre des Affaires étrangères
a assuré avant-hier à l’Agence Reuters
que le Qatar continuerait à soutenir les
terroristes en Syrie, même si la future
administration américaine cessait de les
soutenir.
Nous
terminerons évidemment par le régime de
« Hasballah XIV ». Celui qui saura qui
je désigne ainsi, aura une récompense.
Monsieur le
Président,
Entre dans ce
contexte le rôle destructeur joué par
Israël de par le soutien accordé aux
organisations terroristes,
particulièrement au Front al-Nosra, dans
la zone de désengagement et autour de la
ville de Daraa. Ici, je fais référence à
l’agression israélienne d’hier, tard
dans la nuit. Agression qu’aucun des
présentateurs de la situation en Syrie
n’a évoquée aujourd’hui.
Une agression
israélienne tard dans la nuit d’hier sur
Al-Saboura, située dans la banlieue
ouest de Damas, par deux missiles
air-sol lancés à partir de l’espace
aérien libanais. Une tentative
désespérée de la part de l’entité
occupante israélienne dans le but de
relever le moral des organisations
terroristes takfiristes, effondrées pour
avoir subi de lourdes pertes dans
plusieurs régions, notamment dans la
région ouest de Damas.
Je renouvelle
mon appel aux cœurs tendres de ce
Conseil, qui s’apitoient sur les
terroristes modérés ou génétiquement
modifiés en modérés, pour qu’ils
ramènent leurs déchets ensauvagés
expédiés chez nous ces cinq dernières
années, afin qu’ils en prennent soin et,
s’ils le souhaitent, qu’ils leur
réservent des « zones d’administration
autonome » dans leurs villes, en Europe,
aux États-Unis ou ailleurs.
Si vous tenez
tant au Front al-Nosra, emmenez ses
éléments chez vous. Donnez-leur des
permis d’entrée et de séjour. Ils seront
de bons terroristes dans vos pays !
Pour
conclure, Monsieur le Président,
Le
Gouvernement syrien demeure engagé dans
sa politique reposant, à la fois, sur la
priorité de la lutte contre le
terrorisme étant donné qu’il est la
principale menace pour la sécurité et la
stabilité de différentes régions du
pays, et sur la recherche d’une solution
politique fondée sur le dialogue entre
Syriens, sous direction syrienne, sans
ingérences étrangères, sans conditions
préalables.
Par
conséquent, le Gouvernement syrien est
toujours dans l’attente d’une invitation
de l’envoyé spécial du Secrétaire
général de l’ONU, pour la reprise du
dialogue qu’il a interrompu depuis mai
2016.
Merci,
Monsieur le Président
Dr Bachar
al-Jaafari
30/11/2016
Délégué permanent de la Syrie auprès des
Nations Unies
Source :
web.tv.un.org ; version originale en
arabe.
https://www.youtube.com/watch?v=65NFLRkgIik
Transcription et traduction par Mouna
Alno-Nakhal
Notes :
[1] Alep
libérée ? La « bonne nouvelle »
épouvantable pour les dirigeants
français [1ère partie]
http://www.palestine-solidarite.org/analyses.mouna_alno-nakhal.021216.htm
[2] M.
Rosselli, représentant de l’Uruguay, à propos des « groupes
armés non étatiques » : Conseil de
sécurité 7817, séance du 21 novembre
2016
http://www.un.org/fr/documents/view_doc.asp?symbol=S/PV.7817
Extrait [page
10] :
« Nous sommes
pareillement horrifiés par les
observations de M.O’Brien, qui nous a
parlé de groupes armés non étatiques qui
bombardent aveuglément et de la même
manière écoles et zones résidentielles.
Peut-être, durant la prochaine réunion
d’informations, M.O’Brien voudra-t-il
bien les appeler autrement.
Un groupe
armé non étatique qui bombarde des
écoles et des quartiers résidentiels
n’est pas un groupe armé non étatique,
mais un groupe terroriste, et c’est
ainsi qu’il faut l’identifier, car la
barbarie ne fait aucune distinction qui
mérite le pardon. Ceux qui commettent de
tels actes sont aussi des terroristes ».
09.12.2016 :
Rectification d’une erreur : l’extrait
présenté en fin de texte [*] est à
mettre au crédit de M. Rosselli,
représentant de l’Uruguay, non à celui
de Mme Elisabeth Hoff, [Mouna Alno-Nakhal].
Le sommaire de Mouna Alno-Nakhal
Le
dossier Syrie
Les dernières mises à jour
|