Décodage
anthropologique de l'histoire
contemporaine
Esquisse d'une anthropologie de la
servitude idéalisée
I
Regards sur la vassalisation de la
France
Manuel de Diéguez
Manuel de
Diéguez
Jeudi 27 août 2015
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1 - La laisse et le collier
de l'Alliance atlantique
2 - L'insuffisance du bagage
culturel du chef de l'Etat
3 - La psychophysiologie des
Etats
4 - La putrescibilité des Etats
5 - La faiblesse parlementaire
et la faiblesse de César
6 - Comment élire un vrai chef
d'Etat ?
7 - Molière et la démocratie
mondiale
8 - Le sein d'Elvire
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1 - La laisse et
le collier de l'Alliance atlantique
Mes très modestes
analyses d'anthropologue de l'agonie de
l'Europe et de psychogénéticien du
naufrage d'une civilisation mémorable
portaient, depuis plusieurs semaines,
sur un scannage de la classe dirigeante
des Etats-vassaux. Au cours de la pause
rédactionnelle de l'été, ce thème s'est
tellement placé au cœur de l'actualité
mondiale que, même aux Etats-Unis, des
plumes prestigieuses commencent
d'évoquer le triste sort les "serfs
européens" et s'étonnent de ce que
les derniers Etats encore vivantsdu
Vieux Monde aient cessé à leur tour de
défendre leurs intérêts pour défendre
exclusivement - et à leur cruel
détriment - ceux d'un empire étranger;
car ce dernier se trouve, pour la seule
défense de son hégémonie planétaire, en
rivalité avec deux puissances
ascensionnelles, la Russie et la Chine.
Dans ce contexte hallucinant, la
vassalité de la France et
l'asservissement de la Ve République à
un Titan déclinant vont de pair: le
spectre de l'Europe a rendez-vous avec
Hamlet sur la terrasse d'Elseneur où
Shakespeare écrit plus que jamais
l'histoire véritable des nations.
Mais on doit bien
davantage à l'été finissant que d'avoir
fait progresser à vive allure la
question de l'avenir d'un monde en
mutation accélérée et aux contours de
plus en plus précis: pour la première
fois, la démonstration du degré de
vassalisation de la France face à
Washington est devenue tellement
spectaculaire qu'elle permet aux
anthropologues des personnages qu'on
appelle des nations à la dérive de
cerner la question de la spécificité de
l'asservissement que l'Alliance
atlantique aura réussi à mettre en place
en quelques années. Alors même que
l'ambassadrice des Etats-Unis
téléphonait deux fois par jour au
Président de la République française
pour lui demander de se plier sans
rechigner plus longtemps aux injonctions
impérieuses des Etats-Unis, la question
de fond mûrissait dans l'ombre, celle de
savoir quels sont exactement la nature
et la dose de la subordination des chefs
d'Etat européens actuels au souverain à
la fois temporel et doctrinal qui les
tient en laisse.
2 - L'insuffisance
du bagage culturel du chef de l'Etat
Mais ce n'est pas
tout: pour la première fois depuis la
chute de la monarchie et l'avènement du
régime démocratique en Europe, la France
républicaine apparaît sur la scène
internationale sous les traits d'un Etat
rendu bicéphale par l'évolution de sa
propre constitution.
Sous les Mazarin et
les Richelieu la royauté avait illustré
ce travers, mais parce qu'il répondait
aux deux conceptions de l'Etat qui
divisaient momentanément les
consciences. Mais, cette fois-ci, une
démocratie se divisait entre ses propres
organes, une République se scindait
entre deux institutions en rivalité dans
son sein: tout l'échiquier se fissurait
au chapitre, d'un côté, de la
souveraineté de l'Assemblée nationale et
celle de l'Elysée, de l'autre. En
vérité, depuis 1958, l'Etat s'était
progressivement dédoublé entre des
souverainetés parallèles et pourtant
incompatibles avec la cohérence
nécessaire aux décisions d'un Etat
unifié - et cette scission illustrait
l'incohérence viscérale de la politique
étrangère d'une nation en cours de
divorce avec ses institutions et sa
Constitution.
Car, avant même que
le chef de l'Etat capitulât en rase
campagne devant les Etats-Unis
d'Amérique, avant même, dis-je, que la
débâcle diplomatique consécutive au
refus de livrer les Mistral à Moscou se
fût déclenchée et n'eût commencé
d'étendre ses ravages, au cœur de
l'identité nationale, le conflit était
devenu public sur le partage de la
souveraineté de la France entre les
députés de droite, d'une part, et la
Présidence de gauche de la République,
d'autre part. Cette séparation de corps,
j'y insiste, avait fait ses premiers pas
trois mois auparavant: quelques députés
lucides de la minorité se proclamaient
haut et fort les élus de la nation
- donc les représentants de la seule
souveraineté effective, celle du
suffrage universel - donc du peuple
souverain - face à un exécutif
arbitrairement renforcé, depuis 1958,
mais devenu chancelant et de moins en
moins en mesure de défendre avec
l'autorité requise la dignité et
l'honneur d'un Etat. Celui-ci demeurait,
certes, officiellement souverain sur la
scène internationale, mais en fait, il
était devenu de plus en plus formel.
MM. Myard, Mariani,
Pozzo di Borgo et une dizaine de députés
du parti des Républicains s'étaient
rendus en Syrie, à Moscou et enfin en
Crimée, donc au cœur de la plaie, aux
fins de rappeler rudement à un Président
de la République titubant sur la scène
du monde et enserré dans le double
corset de l'Alliance atlantique et de
l'OTAN, de lui rappeler, dis-je, que la
conquête d'un débouché sur les eaux
internationales est un droit légitime et
multi séculaire de tous les grands Etats
et que le port de Sébastopol appartient
à la Russie à la suite d'un processus
inauguré au XVIIIe siècle par Pierre le
Grand. C'était rappeler à un Président
de la République insuffisamment informé
de la nature même de l'histoire du globe
terrestre et sous-instruit en politique
internationale qu'on ne dirige pas un
grand Etat sans avoir reçu dès l'enfance
une éducation appropriée à l'exercice
plénier de la fonction politique
sommitale sur le théâtre du monde. M.
Hollande n'a pas lu ses classiques,
sinon il aurait trouvé tout cela écrit
noir sur blanc à l'usage des enfants des
écoles dans la République de Platon et
copié des écrits de ce philosophe par
tous les politologues depuis vingt-cinq
siècles.
3 - La
psychophysiologie des Etats
Dans le même temps,
le parti des Républicains de M. Sarkozy
demandait l'ouverture, de toute urgence,
d'une enquête parlementaire qui
braverait la canicule afin de tenter d'y
voir plus clair sur les carences dont
souffre la formation professionnelle du
chef de l'Etat et sur les moyens d'y
porter remède: quelles étaient les
circonstances scolaires et médicales de
la capitulation hâtive de la France sous
la double pression de l'Alliance
atlantique et de son glaive américain
l'OTAN? Puis toute la droite, pourtant
tombée en léthargie depuis 2012,
s'unifiait subitement, puisque le Front
national s'associait aussitôt et
résolument à une demande d'explication
de cette pathologsous la forme d'une
commission d'enquête parlementaire. De
plus, une puissante jacquerie
s'apprêtait à emie porter le régime: si
l'affaire des Mistral étranglait la
souveraineté militaire de l'Etat, les
sanctions économiques imposées à la
Russie par la vassalité française
tuaient tout le commerce de la viande
des Gaulois.
Mais, dès les
premiers pas d'une tentative de
clarification des pouvoirs
constitutionnels respectifs de
l'Assemblée nationale et de l'Elysée au
chapitre de la "défense et
illustration" de la souveraineté
nationale, il devenait de plus en plus
évident que le débat médical demeurerait
embryonnaire et hésitant, tellement la
lumière de la vérité devenait
aveuglante: tout le monde voyait que
l'Assemblée nationale de droite n'osait
soulever franchement et crûment la
question de fond, celle de la
subordination de fait de tous les pays
européens à la plus rude des tutelles,
celle de l'étranger. Quel spectacle que
celui d'un affairement qui revenait
seulement à se défausser sur une
question secondaire et étrangère par
nature et par définition au droit
international, celle de savoir si le
Trésor Public avait fait une bonne
affaire ou s'il s'était fait gruger à
rembourser les Mistrals pestiférés à
Moscou et, de surcroît, pour une somme
mal élucidée et non officiellement
chiffrée: à ce niveau, le débat minable
sur le montant de la facture avait
débarqué dans la presse, mais non le
débat de fond sur l'hérésie ou sur la
légitimité doctrinale d'un ostracisme
idéologique. Les vassaux ne pensent pas,
ils obéissent.
4 - La
putrescibilité des Etats
Harpagon
brandissait hardiment sa bourse bien
remplie, mais en aval, ce qui permettait
à l'Etat de demeurer motus et bouche
cousue en amont sur sa vassalité la plus
spectaculaire. En première ligne,
l'accord tacite des conjurés du silence
était tellement unanime et portait
tellement sur l'opportunité d'occulter
le vrai débat que le Premier Ministre
s'était aussitôt abrité sous ce précieux
camouflage d'une honte nationale:
l'escarcelle de la France,
proclamait-il, avait été remplie à ras
bords - et si un gousset était à
plaindre dans cet heureux marché
financier, c'était celui de la Russie.
Et pourtant, la
question trans-benête pointait déjà le
bout de l'oreille, parce que la demande
insistante d'une enquête parlementaire
sur une question seulement annexe et de
trésorerie ne parvenait plus à interdire
à la vraie question de monter sur les
planches. Que subsistait-il, après un
tel camouflet, de la souveraineté en
miettes des Etats européens? On se
répandait maintenant en lamentations et
en jérémiades sur le naufrage de la
considération de la France sur la
scène du monde, comme si la notion
timide et craintive de
déconsidération était un terme en
usage dans les relations diplomatiques
entre les Etats, alors qu'aucune nation
n'est en quête de sa respectabilité
bourgeoise face à ses interlocuteurs,
ses partenaires ou ses collègues de bon
aloi. Sur le théâtre de Clio, la notion
de souveraineté est d'origine
théologique, donc du ressort de
l'anthropologie critique; et, à ce
titre, elle s'enracine dans le type de
majesté, d'infaillibilité et de grandeur
empruntées par les Etats du monde entier
au droit canon, donc à la politique de
Jupiter.
Un Etat amputé de
sa sacralité devient un cadavre
politique du seul fait que l'existence
mythique des nations est un gage de leur
immortalité, donc de leur statut
cosmologique et para religieux. Mais on
n'apprend pas cela rue Saint Guillaume:
la connaissance de la putrescibilité et
de l'imputrescibilité des Etats est
aussi innée chez les hommes d'Etat que
la science des couleurs chez les
peintres-nés.
5 - La faiblesse
parlementaire et la faiblesse de César
Mais la percée au
scalpel de l'abcès dont souffre une
nation dont la souveraineté s'est
putréfiée dans l'ignorance et la sottise
présente un second avantage encore, non
moins chirurgical que le premier, celui
de contraindre l'anthropologue des
souverainetés gangrenées à remonter aux
origines de la bicéphalie et de la
bancalité diplomatique de la France
actuelle. Car seul un bref rappel des
avatars constitutionnels qui ont
endolori le pays de 1940 à nos jours
permet à l'historien de l'encéphale
républicain de la France d'expliquer la
nature d'une plaie cérébrale qui ne
cessera de s'envenimer et qui
contraindra une nation scindée entre la
souveraineté de l'Assemblée nationale et
celle du chef de l'Etat à remettre un
exécutif défaillant sur le droit chemin
de la cicatrisation de sa souveraineté
blessée.
Lorsque, le 10
juillet 1940, les députés de la IIIe
République ont remis les rênes de l'Etat
et les loques de sa souveraineté entre
les mains du soldat le plus illustre du
pays, aucun des représentants d'une
nation atterrée par sa défaite sur le
champ de bataille n'avait songé un seul
instant que le vieillard auréolé d'une
gloire militaire ineffaçable ternirait
ses lauriers de vainqueur de Verdun à se
montrer malléable ou que la faiblesse du
grand âge le rendrait complaisant face à
l'Allemagne de Hitler, ou encore que le
héros se laisserait déborder par son
Premier Ministre, Pierre Laval, qui
avait ouvertement souhaité la victoire
du nazisme en Europe.
Et pourtant, en
1945, tout le monde avait compris, à
suivre, jour après jour, les audiences
lamentables du procès en haute cour du
Maréchal Pétain, né en 1856, qu'il est
dangereux de confier à un vieillard,
même prestigieux, la défense de
l'honneur et de la dignité de la France.
Néanmoins, dix-huit ans plus tard, le
Général de Gaulle, sûr, lui aussi de
l'échine bien droite des Gaulois,
décidait de donner à ses successeurs, le
titre de chef des armées et la double
souveraineté de concevoir et de mettre à
exécution la politique extérieure d'une
France digne de Rocroi et de Valmy.
6 - Comment élire
un vrai chef d'Etat ?
Et aujourd'hui, qui
est le thérapeute en chef de la
souveraineté de la France et qui se rend
coupable de haute trahison si la
République se trouve jetée dans le fossé
par l'impéritie de tous ses chirurgiens?
Car si l'Assemblée nationale et le chef
de l'Etat se trouvent intronisés dans le
même temple par la voix du peuple
souverain, comment se fait-il que le
Général de Gaulle n'ait pas prévu que la
médiocrité naturelle et inévitable des
notables de province conduirait
nécessairement un suffrage universel
privé de sa vocation idéale à hisser à
la tête de l'Etat un Président de la
République microscopique : sa tournure
d'esprit et son passé dans des querelles
de village le placeraient à mille lieues
du théâtre fracassant dont la scène
internationale présente de siècle en
siècle le spectacle. Et si, en 1945, un
vieillard de quatre-vingt dix ans
méritait de subir l'infamie d'une
vulgaire accusation de traître à la
patrie, inculpation réservée aux
espions, comment accuser de trahison un
cancre qui n'a pas fait ses classes et
dont l'ignorance confond des navires de
guerre avec une ferraillerie
industrielle?
Dès le début du
quinquennat, à la suite d'une rencontre
grotesque des chefs d'Etat de l'Europe
vassalisée autour d'un Barack Obama en
manches de chemise à la mairie de
Chicago, le 21 mai 2012, j'écrivais que,
de toute évidence, M. Hollande n'avait
pas la stature d'un chef d'Etat.
Voir sur ce site:
Honte à une Europe quadrillée de
missiles américains L'Europe et la
France à la croisée des chemins
, 24 juin 2012
Caligula et son cheval à Chicago Le
messianisme démocratique , 20
mai 2012
L'animateur et le
gestionnaire d'une faction d'un parti
qui aura passé quarante ans de sa vie à
rapetasser les conflits ridicules et au
jour le jour qui déchirent un parti ne
changera pas subitement de charpente aux
approches frissonnantes de la
soixantaine. M. Hollande a seulement
l'habileté de choisir la meilleure
occasion de réparer en coulisses des
écussons et des blasons minuscules.
Mais, tous les
historiens et les politologues du monde
savent que gouverner, ce n'est pas
arbitrer entre des courants verbifiques,
c'est prévoir et que l'on n'a jamais
conquis les galons d'un chef d'Etat sur
le champ de bataille de l'Histoire qu'à
précéder les évènements dont on sait, de
science certaine, qu'ils vont fatalement
se déclencher. M. Hollande attend qu'un
dossier "mûrisse" sur l'étagère
pour rédiger une "synthèse"
confiturière. Mais sur le cadran du
monde, la "synthèse" des
marmitons d'une scolastique n'est jamais
qu'un fruit blet.
Et voici que
l'heure approche où le tragique et la
grandeur de la pendule du monde qu'on
appelle l'Histoire vont débarquer
nouveaux frais sur l'établi des petits
horlogers, parce que la Commission
d'enquête sur l'abaissement d'une France
tombée aux mains d'un petit naufrageur
débouchera fatalement sur la question de
l'inconstitutionnalité de l'Alliance
atlantique, de l'inconstitutionnalité de
l'OTAN et de l'inconstitutionnalité du
Traité de Lisbonne.
Un Etat qui n'a pas
de philosophie de la République
ignore que, jusqu'à leur mise à la casse
sous un pavillon étranger, ces navires
de guerre illustreront l'abaissement et
la honte de la France de M. Hollande. Un
Etat qui n'a pas de philosophie de la
nation ignore que, de génération en
génération, les historiens rappelleront
la flétrissure du drapeau de la France
sous la présidence d'un M. Hollande.
Voilà l'horizon
ouvert par l'atelier des Mistral: ces
jouets-là ne sont pas des ferrailles,
mais des acteurs de l'histoire du blason
de la France, des armoiries nationales,
des drapeaux flottants ou en berne.
7 - Molière et la
démocratie mondiale
Dans Molière, un
Orgon de bonne volonté et de bonne foi,
mais dupe d'un faux dévot en raison de
sa simplesse, consent néanmoins à se
cacher sous la table du salon afin de
permettre à Elvire, son épouse, de lui
ouvrir les yeux sur les pièges
enveloppés de piété d'un gredin de la
foi. Mais l'Europe d'aujourd'hui ne
connaît que des Orgon têtus et qui
refusent tout net à Elvire de se cacher
sous la table afin de démasquer les
filous du mythe de la Liberté. Et les
perruquiers de la démocratie mondiale de
s'agiter autour des Orgon de l'Europe.
M. Hollande
croit-il sincèrement, et par simplicité
d'esprit, que M. Poutine serait un
Tamerlan? M. Hollande croit-il qu'il
s'agit d'un Gengis Khan imaginaire et
que le Tartuffe de la démocratie
mondiale l'a tiré de son chapeau? M.
Hollande est-il un Orgon de Molière
auquel Elvire ne parviendra jamais à
ouvrir les yeux? M. Hollande croit-il
vraiment que M. Poutine menace Paris,
Berlin, Rome et Madrid de ses régiments
cuirassés? M. Hollande croit-il vraiment
que si cinq cents forteresses
américaines occupent l'Europe et si les
armées du Continent se trouvent placées
sous la poigne de fer de l'Amérique,
c'est pour les beaux yeux de l'Europe?
Si M. Hollande est effectivement un
Orgon de ce type et s'il refuse tout net
de se cacher sous la table, parce qu'il
ne comprend goutte aux affaires du
monde, faut-il le placer dans un asile
d'aliénés ou le faire comparaître en
haute cour? Est-il plus coupable que le
vieux Maréchal de 1946?
8 - Le sein
d'Elvire
Pourquoi ni M.
Guéant, ni M. Fillon, ni M. Sarkozy ne
veulent-ils plus se cacher sous la table
afin que l'anthropologie critique leur
écarquille les yeux? La tartufferie
démocratique est aussi puissante et
aussi mondialisée de nos jours que la
tartufferie religieuse du XVIIe siècle.
Mais les historiens
futurs, devenus prospectifs, disposeront
du recul nécessaire à la pesée comparée
de la trahison de Vichy et de la
trahison morale des principaux
dirigeants européens qui auront présidé
sans lever le petit doigt à la
vassalisation patiente de l'Europe sous
le joug du césarisme démocratique de
l'empire du Nouveau Monde. D'un coté un
nonagénaire accablé par la défaite
militaire de son pays et qui le voit
occupé par l'armée du vainqueur, de
l'autre, des chefs d'Etat qui, en pleine
paix, non seulement n'auront pas bronché
pendant soixante-quinze ans au spectacle
de l'occupation de toute l'Europe par
cinq cents places fortes du vainqueur de
1945 mais applaudi, de surcroît, le
rassemblement perpétuel de toutes les
armées du Vieux Monde sous le
commandement d'un général américain.
Par bonheur, le
génie de Molière place l'Histoire de la
France et du monde sur les planches d'un
théâtre permanent, celui où un Tartuffe
nouveau de la piété démocratique des
modernes voudrait conduire l'Europe à
l'assaut d'un ennemi imaginaire, la
Russie. "Cachez donc ce sein que je
ne saurais voir" disait le Tartuffe
d'il y a quatre siècles. Par boheur,
Elvire monte de plus en plus
effrontément sur la scène du monde.
Voyez dans quel abîme vous êtes tombés,
voyez dans quel sépulcre vous êtes
descendus, dit la France d'Elvire à tous
les Orgon de la démocratie. Puisse
Elvire montrer au monde entier le sein
nu de la Liberté de la France.
Mais les évènements
de l'été ont également contribué à
mettre en évidence la difficulté
d'articuler mes analyses philosophiques,
anthropologiques et historiques avec les
commentaires conjoncturels et localisés
de la politologie classique. C'est ainsi
que MM. Myard et Mariani, qui avaient
commencé de faire bouger les lignes à
l'échelle mondiale, n'ont en rien
explicité le contexte planétaire de
leurs initiatives de précurseurs. Or, il
ne sera plus possible de scinder la
géopolitique entre le contingent et le
panoramique, parce qu'à partir
d'aujourd'hui, ou bien l'Europe
continuera de se ruer dans la
satellisation atlantiste, ou bien elle
tentera de se désengluer et de s'ouvrir
au grand large - mais avec le handicap
qu'il sera impossible de retirer à la
classe dirigeante actuelle le bandeau
qu'elle s'est mis sur les yeux.
La semaine
prochaine, je tenterai donc de donner un
visage à la France appelée à s'embarquer
pour le monde de demain et à la France
attachée au quai. Les Grecs appelaient
prosopopée le discours qui donnait un
visage au récit des acteurs mentaux de
la politique.
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