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Décodage anthropologique de l'histoire contemporaine

Les poulets sacrés de la démocratie

Manuel de Diéguez


Manuel de Diéguez

Vendredi 11 avril 2014

1 - La postérité politique de Machiavel
2 - L'exemple américain
3 - L'avance politologique de M. Poutine
4 - Les saints de la raison

5 - Le sceptre de l'éthique du monde
6 - La raison simiohumaine est-elle une infirme ?
7 - Les lectisternes de la démocratie
8 - Les dichotomisés du cosmos
9 - Trois dieux-écrivains

10 - A la recherche d'un regard sommital
11 - Dans l'attente d'une mutation de la conscience chrétienne
12 - La réflexion anthropologique sur l'illusion

13 - Le grand orchestrateur des idéalités

 

1 - La postérité politique de Machiavel

L'un des secrets du déclin inexorable des Etats les plus illustres n'est autre que l'extinction rapide qui frappe la science de la politique dans les décadences. Cette maladie se déclare tout soudainement et contamine en quelques années jusqu'aux plus hautes classes dirigeantes. Un exemple frappant de la vassalisation subite des cerveaux vient d'être donné par le spectacle de la pauvreté intellectuelle de l'idéologie politique au nom de laquelle trois anciens chanceliers d'une Allemagne endormie, MM. Helmut Schmidt, Helmut Kohl et Gerhardt Schröder ont tenté de soutenir, mais seulement sur le plan d'une vulgate décérébrée, la magistrale stratégie de la reconquête de la Crimée par M. Vladimir Poutine.

On sait que Catherine II avait ouvert à la nation l'accès territorial à la mer Noire que méritait un empire maritime. Mais aucun des trois ex-chanceliers allemands censés sortir de l'Ecole de guerre qu'on appelle l'histoire ne semblait savoir d'expérience que la géopolitique des démocraties modernes se fonde sur la fécondation anthropologique de la politologie de Machiavel et que la question de la rationalité interne de la politique de la Russie se posait dans des termes étrangers à la scolastique des idéalités pseudo universelles de 1789. L'homme d'Etat sait que la conduite des grandes nations est un combat dans la jungle et que le seul instrument dont dispose un dirigeant d'envergure dans l'arène d'une aventure mondialisée s'appelle l'anthropologie politique. Il y rencontre tantôt un ami bienveillant, tantôt un adversaire retors: la sophistique de son temps. L'autorité inégalement universelle de cet acteur se révèle toujours inversement proportionnelle à l'étendue géographique des Etats censés faire entendre la voix de ce séraphin. Comment se colleter avec un ange mécanique dont l'éthique de confection localise diversement les verdicts?

2 - L'exemple américain

Le rossignol du droit international de notre temps ne dénonce ni les centaines de milliers d'enfants morts de faim en Irak, ni l'attaque de ce pays au canon sans que la bénédiction, officiellement proclamée contraignante des Nations-Unies eût été obtenue, ni la pénurie des médicaments vertueusement imposée à la population des deux sexes en Iran par le canal de sanctions économiques dévotement unilatérales, ni le pieux usage des drones contre des populations champêtres, ni l'assassinat de Ben Laden sur le territoire d'un Etat souverain, ni la violation des accords si gentiment conclus en 1989, disait-on, entre Washington et M. Gorbatchev à la suite de la chute du mur de Berlin - accords qui se fondaient sur l'engagement fallacieux de Etats-Unis de ne pas étendre jusqu'aux frontières de la Russie les forces militaires de ses vassaux, toutes placées sous la poigne de fer du seul commandement américain - ni l'extension et le renforcement de l'occupation militaire du Japon à Okinawa et de la Sicile à Sigonella, ni les milliards de dollars dépensés par le Département d'Etat aux fins de déclencher une séparation "spontanée", donc "démocratique" entre l'Ukraine de l'Ouest et la Russie, ni l'écoute des conversations téléphoniques de la population mondiale et des portables des chefs d'Etat censés alliés, ni l'engagement de mercenaires à Kiev, qui avaient reçu la consigne de tirer conjointement sur les policiers et sur la foule assemblée sur la place Maidan - il s'agissait de déclencher un tsunami artificiel au sein d'une population ignorante des véritables enjeux de ce complot démocratique.

Le génie politique de M.Vladimir Poutine a joué avec la morale internationale "moderne" et soi-disant universelle évoquée ci-dessus. Mais les démocraties d'hier étaient déjà fondées sur un droit international fluctuant et découpé par des territoires. Depuis Périclès, ce tartuffisme d'Etat ne s'est mondialisé qu'en apparence : ses idéaux se hissent sur les tréteaux d'un droit international pseudo christianisé, mais les adversaires contemporains de l'universel biaisé des démocraties n'ont pas besoin de tirer un seul coup de feu sur le devant de la scène, ce que j'ai explicité à propos de la Ligue de Délos, qui avait permis à Athènes de construire le Parthénon aux frais de ses prétendus alliés. Voir: La France parle à la Russie, 5 avril 2014).

Il est vrai que la Perse de l'époque présentait une menace militaire infiniment moins mythologique que celles de la Chine et de la Russie actuelles, ce qui démontre que l'imagination parareligieuse de l'humanité permet maintenant d'entraîner les peuples dans des croisades contre des nuages - Don Quichotte est passé par là. On voit l'avance cérébrale dont dispose M. Vladimir Poutine : l'Amérique n'est plus ni en mesure de faire la guerre sur le terrain en Ukraine, ni de soutenir un gouvernement de Kiev voué au naufrage économique - la victoire politique de Moscou s'inscrit entièrement dans la postérité politologique et anthropologique du grand Florentin.

3 - L'avance politologique de M. Poutine

Mais ce que ni M. Helmut Schmidt, ni M. Helmut Kohl, ni M. Gerhardt Schröder n'osaient regarder en face, c'était que l'infirmité de leur science des Etats résultait de la puissance que les empires dominants ont exercé de tous temps sur les esprits: que la Russie reconquît la Crimée ne concernait en rien l'équilibre des forces dans le monde. Et pourtant, les vassaux empressés de Washington levaient subitement les bras au ciel et poussaient des cris d'orfraie, parce que M. Vladimir Poutine était réputé suivre l'exemple de Hitler avec les Sudètes en 1938! Washington n'en a pas fini d'exploiter sa victoire de 1989 sur l'empire défunt de l'utopie marxiste. Mais l'inexpérience politique de la classe dirigeante des démocraties permet à l'indignation morale sélective des vaincus de forger les chaînes de leur propre vassalité. Le danger est grand que Washington mobilise ses vassaux européens contre les "ambitions impériales" de la Russie de Napoléon III. Un peuple lancé dans le messianisme démocratique retourne rarement à ses bivouacs.

C'est pourquoi le coucou mécanique de la sotériologie démocratique dont j'ai évoqué plus haut les ressorts et les rouages ne changera le registre de ses trilles qu'avec le départ des horlogers de cette gigantesque rédemption, à savoir la masse des troupes américaines stationnées en Europe et campées sur cinq cents bases militaires - il est déjà question d'en multiplier les régiments. Il ne reste à M. Lavrov que de débattre seul à seul avec M. Kerry à Paris et à l'Europe de s'étonner bêtement de se trouver mise hors jeu sur la scène internationale. Mais l'ignorance et la médiocrité des classes dirigeantes que sélectionne nécessairement un suffrage universel incompétent par nature et par définition, leur fait méconnaître la nature même de l'arène d'un monde eschatologisé par la démocratie et avec lequel les grands hommes d'Etat se collètent désormais.

4 - Les saints de la raison

Paris livré depuis trois quarts de siècle aux Homais de la politique internationale secrétés par la IVe et la Ve République n'ose tenter de secouer ni le joug de l'occupation militaire américaine sur l'Allemagne et sur l'Italie, ni celui de la domination parallèle du dollar, qui ne s'exerce pas seulement sur le Vieux Continent, mais sur la terre entière. Du reste, si une politique étrangère n'est pas soutenue par la carrure d'un homme d'Etat, non seulement elle échoue fatalement, mais on châtie durement l'effronterie du nain qui aura usurpé la stature d'un géant.

Tournons-nous donc vers la civilisation des saints russes de la littérature mondiale - les Soljenitsyne, les Tolstoï, les Dostoïevski. Ils détiennent les clés du seul renouveau spirituel, intellectuel et politique actuellement possible dans une Europe plus livrée que jamais à la "fête de l'insignifiance" d'un Milan Kundera. Il n'en demeure pas moins tragique que les retrouvailles de la pensée philosophique avec le génie des grands visionnaires de la condition simiohumaine rencontre l'obstacle insubmersible de la bancalité originelle de toutes les Eglises: depuis des siècles, toutes sont vouées à affronter les écueils de la légèreté d'esprit des peuples et des nations. Car le temporel se fige et se stratifie dans des rituels qui seuls permettent à la raison superficielle de l'humanité de se dorer au pâle soleil de ses théologies de la servitude et de s'éclairer des pauvres lumignons des vassalisateurs qu'on appelle des dogmes et des doctrines. Mais si les religions sont nécessairement menacées de périr sous le triste éclat de leurs cierges et de leurs prières - ou sous les poignards de leurs doctrines - la littérature mondiale est-elle de taille à substituer l'universalité de son regard sur le temporel à l'apostolat des saints endormis dans leurs confessions de foi obsolètes?

Le culte orthodoxe russe agonise dans les ors, la pourpre et la pompe de l'imagination religieuse devenue anachronique des Eglises d'aujourd'hui - mais précisément, une France purifiée des sorcelleries obsolètes et mise à l'écoute de la spiritualité des grands écrivains de la Russie voudrait redevenir l'inspiratrice mondiale des feux ascensionnels de la raison au sein de l'humanité et la source vive des âmes méditantes. (Voir - De Sotchi à Kiev , La postérité anthropologique de Machiavel et la politologie moderne , 5 avril 2014 )

Qu'en sera-t-il d'une France ressuscitative et qui demandera au génie de la Russie de Gogol de s'asseoir au chevet des "âmes mortes" de notre temps? Tentons de franchir quelques pas sur le chemin de la révolution intellectuelle qui permettrait a une universalité trans-liturgique de redevenir ascensionnelle et de remettre l'Europe à l'écoute de l'espérance la plus originelle des saints, celle avec laquelle Tolstoï avait rendez-vous à l'heure du "matin blême" où l'immortalité d'une grande âme a éternisé le fuyard sur le quai de gare de Iasnaia Polyana.

L'alliance du génie slave avec la France des feux de la raison servira-t-elle de cuirasse et d'armure de la vitalité politique retrouvée d'une Russie à nouveau guidée d'une main ferme? Les Uniates de Kiev voudraient faire main basse sur les richesses de l'Eglise orthodoxe de Kiev et précipiter ce trésor catholique dans l'escarcelle des vieilles dévotions romaines. Nous verrons bien si la Rome d'autrefois, celle des pieux larcins de la piété, est bel et bien trépassée à l'écoute du Poverello. Un Vatican qui, pour la première fois, sanctifie la pauvreté au point d'installer un miséreux sur le trône en or massif du Saint Siège scellera-t-il l'alliance des évangélistes russes avec la France des saints de la raison du monde?

5 - Le sceptre de l'éthique du monde

La rencontre piégée du 26 mars 2014 entre le pape François et M. Barack Obama au Vatican a roulé sur deux thèmes périlleux, donc focaux: primo, le saint Père n'a accepté son invitation officielle aux Etats-Unis qu'au Lampedusa du pays - on y a compté six mille cadavres - et secundo, sur les secrets diplomatiques de la guerre de Syrie, dont on sait qu'elle ne fut empêchée que par un accord secret entre la Russie d'esprit orthodoxe de M. Vladimir Poutine et le chef d'une Eglise catholique en cours d'émancipation de sa théologie de juristes du ciel. (Voir - De Sotchi à Kiev , La postérité anthropologique de Machiavel et la politologie moderne , 5 avril 2014 )

Mais Washington n'est pas près de comprendre l'enjeu le plus décisif: il s'agit de savoir quelles mains tiendront désormais le sceptre d'une éthique de la politique internationale supérieure à celle d'aujourd'hui. D'un côté, le pape américain de la démocratie verbale voit son évangile tomber en quenouille, de l'autre, l'Eglise romaine commence de se demander si sa morale politique héritée de la monarchie parviendra à dérouiller la cuirasse des cosmologies mythiques du Moyen-Age, qui ont vieilli dans les catéchismes, les missels et les bréviaires, mais dont les paroisses n'ont pas été cadenassées.

Comment départager les silhouettes des trois candidats à la succession du Jupiter des juifs, des chrétiens et des musulmans si, des siècles durant, les trois monothéismes se sont révélés coupables de légèreté politique, donc d'insignifiance catéchétique? La démocratie de la raison n'a pas su se changer en anthropologue des utopies délirantes et des cosmologies mythologiques, l'orthodoxie romaine n'a pas su arracher son ciel des mains d'un distributeur ridicule de sucreries posthumes et flanqué d'un administrateur des tortures éternelles sous la terre. Quant à l'Eglise orthodoxe, la mieux armée contre l'assaut des chanteries enfantines, elle n'a pas entendu le message de ses apôtres les plus dignes d'écoute, de ses visionnaires de génie de la condition humaine, de ses grands écrivains.

6 - La raison simiohumaine est-elle une infirme ?

Au XVIIIe siècle, l'Eglise romaine a perdu sa première vocation, celle d'exercer la fonction d'une boussole universelle de la conscience morale des évadés de la zoologie, tellement il était apparu que l'histoire et la politique réelles sont pilotées en secret par une philosophie des élévations de la conscience morale et de la raison confondues. Mais qu'y avait-il de plus immoral que d'interdire aux fuyards de la mort de connaître les lois qui régissent l'astronomie dans la cage de laquelle ils se trouvent enchaînés? Qu'y avait-il de plus immoral que de croire moraliser et discipliner une bête semi-cérébralisée à seulement la plonger davantage dans l'ignorance et la sottise? Qu'y avait-il de plus immoral que de précipiter aux genoux d'un tortionnaire infernal des animaux terrorisés par leur génocidaire? Des siècles durant, l'Eglise avait refusé l'héliocentrisme et l'évolutionnisme, parce que les dévotions payantes avaient besoin d'une cosmologie mythique et d'une domestication des cerveaux.

Mais maintenant, la raison, la conscience et le savoir des orphelins du système solaire relativement rassurant de Ptolémée se retournent subitement contre leur propre autonomie; et l'on voit les rescapés des forêts se livrer au naufrage d'un nouvel abêtissement au sein des civilisations pourtant expressément construites sur les prérogatives libératrices de leur récente responsabilité politique. Les fuyards du géocentrisme sont tombés dans le délire au point de mettre toute la respectabilité et la solennité de leurs institutions publiques rationnelles au service d'une légalisation démente de leur folie. Je sais que vous n'en croirez pas vos yeux et vos oreilles, mais je vous assure que les sodomites se marient tout soudainement entre eux et les lesbiennes entre elles et que ces couples se voient subitement autorisés par la loi à élever des poupons dès le biberon, selon un principe fort nouveau: je vous assure que les Etats les plus sérieux proclament maintenant une indistinction doctrinale des sexes plus fantasmée que le mythe de la Trinité, afin de tenter d'effacer des cervelles en bas âge et derechef catéchisées dès le berceau - mais par une biologie officialisée - la notion biblique d'un Adam et d'une Eve que le ciel, horribile dictu, avait dotés à tort, d'organes génitaux distincts. La question est donc de savoir si, faute d'installer de force quelque Jupiter barbare et stupide aux commandes des encéphales des détoisonnés des forêts, cette espèce en perd tellement et si subitement la tête qu'elle n'a plus d'autres ressources, la pauvresse, que de vagabonder au hasard sur la terre.

Alors on verra le sceptre de la morale universelle retomber dans les mains de l'Eglise du Moyen-Age - et toute la science historique y perdra la viabilité politique qu'elle semblait avoir acquise depuis Thucydide, parce que la croyance en une raison fiable et autorisée à diriger le monde à la place des dieux d'Homère y perd l'assise de sa crédibilité et de sa légitimité scientifique; et les peuples veufs de leurs Olympe et laissés tout soudainement abasourdis confient aussitôt et d'un seul élan la direction des affaires de la planète aux plus ignorants et aux plus sots de leurs doctrinaires. Comment éviter que la classe dirigeante des irréfutables du ciel de la démocratie ne sombre à nouveau dans les superstitions et dans les cosmologies mythiques des premiers hommes?

7 - Les lectisternes de la démocratie

L'entretien du 26 mars 2014 entre M. Barack Obama et le pape François a duré cinquante minutes, mais la superficialité d'esprit de l'hôte de la Maison Blanche a fait tourner court un entretien sur le fond que le pape François avait cru possible entre des interlocuteurs d'un si haut niveau de responsabilité. De plus, ni l'un, ni l'autre de ces acteurs de la morale du monde ne pouvaient encore se poser la seule question décisive, celle de savoir quel est le type de rationalité dont dispose de nos jours l'animal né semi-pensant, mais demeuré superficiel et que les Anciens avaient prématurément qualifié de rationale. S'il s'agissait effectivement d'une bête rendue sérieusement cogitante par un verdict aussi subit qu' irréfutable de la nature, il aurait fallu se demander, toutes affaires cessantes, quelle était l'apparence d'intelligence que sécrèterait nécessairement un traînard devenu soi-disant pensant sur l'enclume des millénaires, mais dont la raison trompée et trompeuse demeurerait aiguisée sur la seule meule de l'animalité spécifique de cet animal.

Une bête dont l'encéphale se laisse patiemment diriger par des poulets savants - tantôt ils sortent sans entrain de leur cage, ce qui présage de grands malheurs, tantôt ils ont bon appétit, ce qui est de bon augure pour l'avenir du pays - une bête à l'école des crêtes et des becs de ses poules, dis-je, est-elle d'ores et déjà devenue un homme au sens "rationnel", mais fâcheusement imprécis du terme, ou faut-il l'appeler, à titre provisoire, un primate en ce qu'il serait seulement devenu capable de se donner l'estomac de ses poulets pour boussole? Où faire passer la frontière entre le zoologique et l'humain si l'on ne sait pas quelles sont les caractéristiques propres à départager ces deux espèces ? Puisque vous n'avez pas encore appris à quel endroit précis vous ferez passer la barrière entre vous et la bête prosternée devant ses poulets, qui êtes-vous et de quel nom faut-il baptiser les gloussants sur leurs ergots?

8 - Les dichotomisés du cosmos

Les Romains offraient des banquets succulents aux portraits coloriés de leurs dieux installés sur des coussins brodés. Et pourtant, ils construisaient des aqueducs titanesques et des cirques qui ont étonné M. Barack Obama. On appelait leurs festins fantastiques des lectisternia. L'humanité théologisée par des poulets picorant des grains était donc une espèce demeurée cérébralement tout animale, mais rendue - et précisément à ce titre - capable de se procurer de puissants interlocuteurs gastronomiques et de les installer dans le vide d'une immensité festive, mais qui ignorait néanmoins que ces images cosmologiques d'elle-même n'étaient sécrétées que par leurs cellules grises. Et pourtant, cette conviction s'était tellement inscrite dans leurs gènes que ces animaux brûlaient dare-dare les impies qui doutaient de l'existence des personnages somptueux qu'ils exposaient sur les coussins de leur foi.

Mais le cerveau de ce primate se trouve scindé de naissance entre deux mondes. S'il ne se rendait pas coupable de formuler des hérésies bizarres, cet animal schizoïde n'en viendrait pas à douter quelquefois de l'existence objective de ses dieux et de la fiabilité des volatiles qui s'en révèlent les oracles ou s'en font les témoins. Comment peser la boîte osseuse bipolarisée d'un malheureux qui, d'un côté, s'agenouille humblement devant des gallinacés aux entrailles éloquentes et qui, de l'autre, se glorifie tout au contraire et au péril de sa vie de leur tourner le dos, mais toujours prudemment et au seul bénéfice de nouveaux volaillers suprêmes du cosmos? Vingt-trois siècles après Scipion l'Africain, plus d'un milliard d'animaux de ce type grouillent encore sur toute la surface de la terre et offrent sans relâche de la viande humaine rémunérée à manger et le sang d'une potence de la torture à boire à leur souverain imaginaire du cosmos.

9 - Trois dieux-écrivains

Le Président Barack Obama était un esprit superficiel. On lui avait enseigné à Harvard à la fois que Dieu protège l'Amérique et que toute question de fond sur les cultes et sur les croyances religieuses en général devait se trouver soigneusement exclue de l'enseignement universitaire officiel; mais, de son côté, le pape François ne savait pas encore comment faire observer à son hôte les poulets sacrés que l'Amérique faisait sortir tout pépiants de la cage de la démocratie mondiale et auxquels il jetait les sacs de grains propices ou maléfiques de la nation de la Liberté du monde. Car les poulets de l'idole picoraient maintenant leur nourriture sur le sol de l'Afghanistan, de l'Irak, de la Libye, de la Syrie - et il fallait se résigner, hélas, à ne lire que des présages funestes dans les verdicts de leurs becs.

Exemple: longtemps, l'animal à l'écoute de ses gallinacés s'était donné les divinités les plus fidèlement calquées sur son propre corps dénudé. Puis, il avait fait parler l'hébreu à une idole conçue et construite à l'usage du seul peuple qu'elle avait consenti à se choisir pour élève sur toute la surface de la terre. Puis, un second démiurge avait parlé le grec à l'intention d' un auditoire plus vaste que le précédent. Puis un troisième grammairien du cosmos avait parlé l'arabe - mais bientôt les écrits de ces trois géants des nues se sont révélés tellement inconciliables entre eux qu'il a bien fallu changer les coussins usés des lectisternes des ancêtres et en répartir d'autres en divers endroits du globe terrestre.

Depuis lors, l'existence, quelque part dans le cosmos, de ces trois écritoires d'âge différent et d'une valeur littéraire fort inégale a répondu à la progression de leur expansion territoriale et linguistique. Que faire d'un astéroïde de plus en plus décompartimenté et dont l'échine plie sous le faix de trois dieux de complexions distinctes? Si vous observez à la loupe l'animal dont la cervelle enfante patiemment des acteurs changeants du cosmos et qui les expédie dans la stratosphère afin de s'assurer de leurs services politiques et moraux en retour, vous apprendrez à connaître les rouages et les ressorts de l'espèce née la plume à la main. Sinon, gare à vous: si vous baissez un instant les bras, vous frapperez toutes vos sciences dites humaines d'un aveuglement sans remède, parce que la bête se changera en un bipède incompréhensible au bout de vos calames. Mais comment percer les secrets d'un animal qui ne se rend intelligible qu'à se précipiter dans des mondes délirants?

10 - A la recherche d'un regard sommital

Sachez que, le 26 mars 2014, non seulement le pape François et M. Barack Obama ne parlaient pas du même Dieu, mais que le Vatican était en gésine d'une divinité dont l'intelligence et la vie spirituelle écraserait le divinité nationale interdite d'audience dans les aulas de l'Université de Harvard. Certes, la Démocratie et le Saint-Siège jouaient des couleurs et des reflets d'un seul et même Olympe originel - mais à quelle hauteur le pape François plaçait-il le sien pour foudroyer du regard toute la panoplie des auréoles du dieu de l'Amérique?

Et puis, aucune langue de la terre ne peut égaler l'éclat et le rythme que seul le grec donne à ces vers d'Homère: "Chante, Déesse, la colère d'Achille , fils de Pelée, qui livra les Achéens à tant de souffrances et précipita à l'Hadès les âmes héroïques de tant de guerriers". Anatole France se moquait gentiment de Renan, qui dressait l'oreille à chaque mot suspect, tels que Déesse, Hadès et j'en passe. De quel Dieu le pape François et M. Obama parlaient-ils si l'âme du poète était plus divine que celle de la démocratie mondiale?

Décidément, il nous sera impossible d'enseigner l'histoire véritable de notre espèce à nos enfants en bas âge si, d'un côté, il faut nous rendre à l'évidence qu'il sera bien vain de leur raconter ce qui sera effectivement arrivé à telle tribu localisée à tel endroit et en tel siècle, tellement, une science transanecdotique du temps humain nous enfermera d'avance dans une connaissance toute magique et ensorcelée de nous-mêmes - celle dont s'obstineront à témoigner les fuyards du règne animal que nous sommes demeurés. Pourquoi les animaux dichotomisés par leurs poulets sacrés colloquent-ils leur fausse science d'eux-mêmes dans le cosmos et pourquoi le pape François regardait-il de haut les poulets sacrés de M. Barack Obama?

Exemple: M. Le Goff (1924-2014) a rédigé, des années durant, un savant ouvrage sur le Purgatoire, mais son récit demeure aussi aveugle à la signification anthropologique des méthodes de pensée dont usait son auteur que la théologie du Moyen-Age ignorait le sens de la logique interne qu'elle mettait en oeuvre. M. le Goff n'étudiait ni les finances de l'Eglise de l'époque - elle tirait des bons de caisse à la pelle de sa théologie des purge sacrées - ni les cellules grises d'une espèce docile à passer quelques années de son éternité posthume dans un sas imaginé entre l'enfer et le paradis par les docteurs de l'Eglise de son temps. Et pourtant, se disait le pape François, de Sophocle à Shakespeare, d'Aristophane à Swift, de Dostoïevski, de Gogol, de Soljenitsyne à Cervantès, c'est toujours l'histoire la plus profonde de l'humanité que les plus grandes génie de la littérature mondiale ont observée et tenté de comprendre - et si le génie russe surpasse celui des contemplatifs français et anglais, serait-ce que Les Possédés, Les Frères Karamazov , La Guerre et la Paix regardent l'humanité de plus haut et de plus loin que Molière ou Racine? Qu'est-ce donc, se disait le disciple du Poverello, qui fait du génie russe un regardant à la fois homérique et sommital de l'histoire du monde?

11 - Dans l'attente d'une mutation de la conscience chrétienne

On sait que ni un pape François en quête du vrai Dieu des chrétiens, ni un Barack Obama trop sûr du sien ne sont encore devenus des simianthropologues de haut vol, donc des connaisseurs d'une vie de l'humanité transportée dans les nues. Mais on observera que l'hôte de la Maison Blanche forgeait à tour de bras les armes verbifiques d'une divinité nationale vaniteuse et trompeusement vaporeuse et que les saintes forgeries d'une démocratie aux auréoles ensanglantées mettaient en vente sur le marché du langage le feu et la foudre d'une idole vénérée pour la qualité de ses poulets sur toute la terre habitée. Comment parler de morale si la bête des lectisternes ignore le fonctionnement de sa cervelle dans le sacré, comment parler de morale si la bête à l'écoute des oracles de ses poulets n'a jamais observé, ni sur le terrain, ni en laboratoire, l'oscillation éternelle de sa boîte osseuse entre la superstition et la corruption? Si vous redressez l'échine de cet animal à l'école de la panique d'entrailles que ses dieux et ses devins lui inspirent, il courra consulter ses poulaillers, mais si vous lui retirez cette médecine, il perdra pied dans le néant.

Et pourtant, la rencontre avortée du 26 mars entre le pape François et M. Barack Obama a placé un produit pharmaceutique prometteur entre les mains du vieux Chronos, et cela non point en raison d'une accélération subite et miraculeuse de l'évolution cérébrale de la bête, mais parce que la Démocratie moderne et sa chaste épouse, la Liberté, accompagnés de leurs deux enfants encore en bas âge, l'Egalité et la Fraternité, ont commencé de se promener dans le jardin des cultes défunts et de s'éclairer de la lumière de leur pharmacologie oubliée.

Certes, on savait depuis belle lurette que les détoisonnés du cosmos sont paniqués de se trouver jetés sans coussinets dans le sépulcre de l'immensité et du vide. Mais il est bestial en diable de se donner sa propre effigie pour soleil, il est bestial en diable de se donner un tortionnaire infatigable pour guide et pour protecteur dans une nuit sans voix. La théologie romaine, dit maintenant le pape François, était à la fois harnachée et barricadée dans l'enceinte sanglante des cités. L'agrippage de cette mythologie à sa propre sacralité élevait une hiérarchie ecclésiale auto-glorifiée au rang d'un Jupiter armé du couperet de la mort.

Et voici que la bête dentue et crochue dont l'armure masquait la fragilité se regarde dans le miroir de ses démocraties enténébrées. Décidément, le pape regarde le christianisme romain avec des yeux d'anthropologue et de pédagogue d'une démocratie casquée - et le Poverello, en promenade à ses côtés, visite le jardin des Hespérides des contrefaçons du dieu Liberté. La compassion franciscaine rapprocherait-elle l'école d'Antioche des découvertes les plus récentes de la paléontologie? (Voir - De Sotchi à Kiev , La postérité anthropologique de Machiavel et la politologie moderne , 5 avril 2014 )

12 - La réflexion anthropologique sur l'illusion

Depuis le XVIIIe siècle, l'animal terrorisé par le silence de l'univers n'a cessé de se rabougrir. L'étendue de son ignorance se révèle désormais aussi rapetissante qu'à l'âge de la pierre taillée. Mais plus ce pape solitaire et méditatif se découvre ratatiné, plus le mythe démocratique se minusculise, lui aussi. Le voici réduit à une rêverie à la gueule grande ouverte. Regardez avec les yeux de la mystique russe la denture de cette sotériologie verbale: ses mâchoires et ses crocs n'illustrent-ils pas une mythologie sanglante? Demandez-vous quelle était la distanciation à l'égard de l'histoire et de la politique qui a guidé en secret la théologie pacificatrice du Saint Siège en Syrie. Quel était l'anthropologue en apprentissage de la vie spirituelle de la Liberté qui voyait de haut et de loin germer une "guerre sainte" pour le salut démocratique du monde, quel était le mystique abyssal qui regardait avec les yeux de Tolstoï la cosmologie mythique des modernes s'enivrer des reflets de sa propre équipée? Voyez l'idole étalée sur les coussins de velours de sa sainteté, voyez l'idole inlassablement magnifiée et glorifiée sur le piédestal de ses idéalités sanguinaires. S'agirait-il du faux dieu des modernes? Le pape François voyait-il de haut ces frères jumeaux, le mythe chrétien et le mythe démocratique échanger leurs présents - les fioles d'un même parfum, celui de l'opium des peuples?

En vérité, le regard du Franciscain sur les auréoles verbales dont la bête s'était affublée donnait au pape argentin un siècle d'avance sur le futur décryptage anthropologique du narcissisme politique de type démocratique - et la bestialité théologique commençait de se dessiner sous des traits tellement précis que Rome se convertissait en douce aux sacrilèges de la sainteté. Le mythe biblique tombait tout entier dans la cage aux poulets aux yeux du Poverello. Il existait, disait-il, une manière d'écrire l'histoire ad usum Delphini - à l'usage du fils aîné du roi - qui glorifiait parallèlement l'histoire du christianisme et celle de la monarchie de droit divin. Et voici que le pape de la Liberté américaine apportait au monde l'histoire conjointe du mythe démocratique et de la gloire de sa nation!

Le pape François occupait la forteresse de l'anthropologie secrète à laquelle les saints russes se sont initiés. Comment son regard aurait-il porté sur l'histoire et la politique de l'humanité titubante du XXIe siècle s'il n'avait commencé de savoir non seulement comment l'ignorance de type spéculaire de la bête se construit, mais comment elle se bâtit nécessairement des savoirs en miroir, et d'autant plus assurés d'eux-mêmes que leurs erreurs de méthode et de parcours leur fournissent en retour les instruments les plus irréfutables à leurs yeux et les preuves les plus évidentes de la validité de leur vision du monde?

13 - Le grand orchestrateur des idéalités

C'est ainsi que l'Ukraine s'est révélée la première illustration planétaire de l'animalité théologique des ostensoirs de type démocratique que l'humanité ait mis en scène. La pièce semblait agencée d'avance dans les coulisses pour rendre spectaculaire le choc des idéalités vaniteuses, spectaculaire la mise en scène artificielle des héros retentissants de l'abstrait, spectaculaire l'étalage des subterfuges, des attrape-nigauds et des contrefaçons du concept de Liberté, spectaculaire l'exposition des ciboires d'une religion de pacotille: tout le monde voyait à l'œil nu les tireurs de ficelles qui faisaient, d'une histoire des simagrées du monde un mélange de grand guignol et de pièce de boulevard - mais le titanesque même de la dérision mettait en place un échiquier nouveau du monde. Le regard de haut que la Curie portait désormais sur les parfums de l'histoire et de la politique en faisait l'assise d'une nouvelle objectivité de la science historique.

Du coup, le grand orchestrateur des idéalités pseudo universelles de la démocratie mondiale s'est trouvé si soudainement démasqué que le génie du Poverello est devenu l'assiette nouvelle de la pensée rationnelle du monde et de l'anthropologie scientifique, tellement les cierges enfumés d'une fausse Justice et d'une fausse Liberté rendaient inutilisable la catéchèse démocratique et l'encens de M. Barack Obama. Mais la spécularité humaine, les Anciens l'appelaient l'illusion, du latin illudere, se jouer de quelqu'un, le tourner en dérision, rire et se moquer, ce qui démontre que la mystique renvoie à un approfondissement anthropologique du vocabulaire de tous les jours.

La semaine prochaine, j'observerai de plus près la condition humaine sur le théâtre de l'évolution cérébrale de cet animal.

Reçu de l'auteur pour publication

 

 

   

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Source : Manuel de Diéguez
http://www.dieguez-philosophe.com/

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