L'art de la guerre
La nouvelle sainte croisade
Manlio Dinucci
Vendredi 9 janvier 2015
De véritables commandos, dans leur façon
de bouger, de tirer. Pas en rafales pour
ne pas gaspiller de cartouches, mais
avec un ou deux coups sur chaque
victime, comme sur le policier blessé
qui est achevé avec un seul coup par le
killer qui continue à marcher, rejoint
la voiture et, avant de monter, ramasse
calmement une chaussure tombée (qui
aurait pu constituer une preuve à
l’examen ADN). Mais quand les deux, avec
une préparation de forces spéciales,
changent de voiture, ils « oublient »
(selon la version de la police) une de
leurs cartes d’identité sur la première
voiture. Et signent ainsi officiellement
l’attentat. Quelques heures plus tard on
connaît dans le monde entier leurs noms
et leurs biographies : « deux petits
délinquants radicalisés, connus par la
police et les services
de renseignement français ».
On ne peut pas ne pas repenser,
dans ce qui est défini comme « le 11
septembre de la France », au 11
septembre des Etats-Unis : quand,
quelques heures à peine après l’attentat
des Tours Jumelles, circulaient déjà les
noms et les biographies de ceux qui
étaient désignés comme les auteurs
membres d’Al Qaeda. Ou l’assassinat de
Kennedy, dont on trouve immédiatement le
présumé auteur. Même chose, en Italie,
avec le massacre de Piazza Fontana.
Légitime, donc, le soupçon que derrière
l’attentat en France, se trouvent de
longue main les services secrets.
Les deux présumés auteurs (si
leurs biographies sont vraies)
appartiennent à ce monde souterrain créé
par les services secrets occidentaux, y
compris français, qui ont financé, armé
et entraîné en Libye en 2011 des groupes
islamistes jusque peu de temps
auparavant qualifiés de terroristes,
parmi lesquels les premiers noyaux du
futur Etat Islamique ; qui les ont
approvisionnés en armes à travers un
réseau organisé par la Cia (selon une enquête du
New York Times en mars 2013) quand,
après avoir contribué à renverser
Kadhafi, ils sont passés en Syrie pour
renverser Assad et attaquer ensuite
l’Irak (au moment où le gouvernement al-Maliki
s’éloignait de l’Occident, et se
rapprochait de Pékin et de Moscou).
L’EI, né en 2013, reçoit des
financements et des voies de transit par
Arabie Saoudite, Qatar, Koweït, Turquie
et Jordanie, alliés étroits des
Etats-Unis et des autres puissances
occidentales, dont
la France. Cela
ne signifie pas que la masse des
activistes des groupes islamistes,
provenant aussi de différents pays
occidentaux, en soit consciente. Reste
cependant le fait que derrière leurs
masques se cachent certainement des
agents secrets occidentaux et arabes
spécialement formés pour de telles
opérations.
Dans l’attente d’autres éléments
qui puissent éclaircir la véritable
matrice de l’attentat en France, il est
logique de se demander : à qui cela
profite-t-il ? La réponse se trouve dans
ce qu’a déclaré Nicolas Sarkozy, qui,
quand il était président de
la France, a été un des
principaux auteurs du soutien aux
groupes islamistes dans la guerre
d’agression contre la Libye : il a qualifié
l’attentat en France de « guerre
déclarée contre la civilisation, qui a
la responsabilité de se défendre ». On
veut de cette façon convaincre l’opinion
publique que l’Occident est désormais en
guerre contre ceux qui cherchent à
détruire
la « civilisation », qu’il
incarne, et doit donc « se défende » en
potentialisant ses forces militaires et
en les projetant partout dans le monde
où surgit cette « menace ».
On essaie ainsi de transformer le
sentiment de masse pour les victimes du
massacre en mobilisation pour la guerre.
Le David, qui à Florence a été voilé de
noir, est appelé maintenant à empoigner
l’épée de la nouvelle sainte croisade.
Edition de vendredi 9 janvier 2015 de
il manifesto
Article paru sous le titre « La
signature des killers, connus par la
police et les services secrets »
http://ilmanifesto.info/la-firma-dei-killer-noti-alla-polizia-e-ai-servizi-segreti/
Traduit de l’italien par Marie-Ange
Patrizio
Le sommaire de Manlio Dinucci
Les dernières mises à jour
|