LUC MICHEL’S
GEOPOLITICAL DAILY
Syrie d'une guerre à l'autre (V) :
Israël grand perdant
de la guerre qui se termine en Syrie
Luc Michel
Jeudi 18 janvier 2018
LUC MICHEL (ЛЮК
МИШЕЛЬ) & EODE/
Luc MICHEL pour
EODE/
Quotidien
géopolitique – Geopolitical Daily/
2018 01 16/ Un mot tout d’abord
à mes lecteurs :
Plusieurs d’entre
vous me demandent pourquoi je consacre
tant de place à la guerre de Syrie. La
Syrie – qui passe en ce moment d’une
guerre civile internationalisée à une
seconde guerre entre les blocs
géopolitiques – est l’épicentre de la «
nouvelle Guerre froide 2.0 », celles où
le Bloc américano-occidental est
directement face au Bloc de Shanghai
(Moscou, Pékin, Téhéran). Ce qui se
passe en Syrie a et aura des
conséquences géopolitiques directes,
régionales et mondiales. Il y a
notamment une diagonale stratégique
Sébastopol-Tartous, vitale pour la
Russie … depuis Catherine la Grande
(l’Est ukrainien étant le deuxième point
chaud de la Guerre froide 2.0, où les
USA préparent en ce moment une nouvelle
confrontation avec les russes). Il y a
une seconde diagonale stratégique, celle
qui va de l’Iran au Liban (« l’Axe de la
résistance ») et a des projections vers
le Golfe, la Mer rouge et le Yémen. La
Syrie est donc le dossier (ou le front)
central de la géopolitique actuelle …
I-
LE HEZBOLLAH ET
L’ARMEE ARABE SYRIENNE : LES CRAINTES
D’ISRAEL
Le journal panarabe
‘Rai al-Youm’, cité par l’agence de
presse ‘Mizan’, rapporte ce 11 janvier
que « les frappes aériennes de
l’aviation israélienne en Syrie
ciblaient les convois d’armes destinés
au Hezbollah, mouvement qui suscite la
peur et la hantise cauchemardesque du
régime de Tel-Aviv ».
Les autorités
militaires israéliennes redoutent une
montée en puissance de l’armée syrienne
et du Hezbollah, d’où les frappes
aériennes dévastatrices contre la ville
de Quneitra, sur le Golan syrien, dans
la banlieue profonde de Damas. Le
cabinet de Benyamin Netanyahu n’a pas
reconnu officiellement la responsabilité
de ces raids. Par contre, il a publié un
communiqué affirmant « sa détermination
à prendre toutes les mesures nécessaires
pour empêcher tout transfert d’armes au
Hezbollah via le territoire syrien ».
Le cauchemar
d’Israël ce sont en effet les armes
sophistiquées du Hezbollah ! La vraie
obsession des Israéliens est que le
Hezbollah accède à des armes avancées et
prenne le dessus. L’arsenal du mouvement
est musclé : « outre des missiles
balistiques, il comporte des navires de
guerre furtifs, indétectables par les
radars, et des sous-marins capables de
cibler les ressources gazières du régime
israélien, tous construits dans les
bases du Hezbollah au Liban ».
L’INANITE DES
MENACES DE NETANYAHU CONTRE LE HEZBOLLAH
Le Premier ministre
israélien profère des menaces et n’a
recours qu’aux frappes aériennes,
lesquelles n’ont pas pu faire avancer
ses ambitions. Il a dernièrement menacé
de « contrecarrer le déploiement des
forces de l’armée syrienne et des unités
du Hezbollah sur les frontières de
l’Est, au sud de la Syrie ». Néanmoins,
l’armée syrienne domine fortement la
Ghouta occidentale (banlieue de Damas)
et a atteint Quneitra et les frontières
du Golan occupé.
LES DERNIERS JOURS
DE LA GUERRE EN SYRIE
Le triangle composé
de la Syrie, de l’Iran et du Liban
représente encore la principale menace
pour Israel. Surtout que la guerre en
Syrie touche à sa fin et que l’Axe de la
Résistance, soutenu par Moscou et Pékin,
accumule les victoires aussi bien en
Syrie qu’en Irak (1).
L’HOSTILITE
FONDAMENTALE DES USA ET D’ISRAËL CONTRE
LA SYRIE
Les frappes
israéliennes en Syrie sous prétexte «
d’anéantir les convois d’armes destinés
au Hezbollah », et ce, dans une
conjoncture où les pays arabes du golfe
Persique font des pieds et des mains
pour normaliser leurs relations avec
Tel-Aviv, montrent bien que la «
boussole » syrienne n’a pas changé de
direction et pointe toujours vers son
véritable ennemi.
LES MISES EN GARDE
DU HEZBOLLAH
Le secrétaire
général du Hezbollah Hassan Nasrallah a,
lors d’une interview accordée le
mercredi 10 janvier à la chaîne
libanaise ‘Al-Mayadeen’, révélé que «
l’Axe de la Résistance se prépare pour
une guerre majeure contre Israël » et
que « Trump a placé la région face à
l’alternative suivante : soit accepter
les diktats américains, soit subir une
guerre ». « Notre projet n’est pas celui
de la guerre mais de la résistance.
Trump et Netanyahu pourraient entraîner
la région dans une guerre. Les forces de
la résistance doivent se préparer à une
éventuelle guerre », a-t-il dit.
ISRAËL, LE GRAND
PERDANT DE LA GUERRE
Le gouvernement de
Damas et le Hezbollah savent que ceux
qui sabotent le processus de paix via la
décision de l’Administration Trump sur
la modification du statut de Jérusalem
cherchent en effet la guerre. « Mais
cette guerre, tout comme les complots
fomentés au cours de ces sept dernières
années, échouera et le grand perdant en
sera le régime d’Israël. La donne a
changé et la force aérienne n’est plus
un atout comme par le passé », conclut
‘Rai al-Youm’.
II-
LES CHANGEMENTS
POROFONDS DU CONTEXTE INTERNATIONAL
Le contexte
international qui influe sur Israël
s’est profondément modifié au cours de
cette dernière année de la Guerre
syrienne, dans deux directions
essentielles. Tout d’abord, Moscou est
sortie de sa neutralité bienveillante de
jadis envers Tel-Aviv (2). Deuxièmement,
dans le cadre du nouvel Axe Washington –
Riyad – Tel-Aviv mis en place par Trump
et le Likoud (3), Israël s’est rapproché
publiquement des monarchies du Golfe,
levant le grand tabou occulté du
Proche-Orient : l’alliance stratégique
entre Israël et les régimes
conservateurs arabes.
MOSCOU CONDAMNE LA
COLONISATION ISRAELIENNE EN PALESTINE
Signe des nouvelles
relations entre Moscou et Tel-Aviv, qui
se sont rapidement dégradées depuis
quelques mois. Moscou vient de déclarer
que « la colonisation enraye les
négociations israélo-palestiniennes » …
Au moment où « un feu vert a été donné à
plus de 1 100 nouveaux logements de
colons en Cisjordanie, territoire
palestinien occupé par l’armée
israélienne ».
Moscou réagit donc
sèchement à la poursuite de la
colonisation des territoires
palestiniens en Cisjordanie par Israël.
Le Ministère russe des Affaires
étrangères estime que « la colonisation
israélienne ne contribue pas à la
reprise des négociations directes entre
les parties concernées ». « Moscou
réaffirme sa position de principe sur
l’illégalité des activités de
colonisation israéliennes dans les
territoires palestiniens, y compris à
Qods-Est. Nous estimons que cette
politique ne contribue pas à créer les
conditions propices au lancement de
négociations directes entre Israéliens
et Palestiniens », lit-on sur le site du
ministère. La poursuite de la
colonisation par le régime israélien
sape les perspectives de la « solution à
deux États » au Proche-Orient et
minimise la possibilité de parvenir à
une paix « juste et durable » dans la
région.
Rappelons que le 10
janvier, « Tel-Aviv a donné son feu vert
à plus de 1 100 nouveaux logements de
colons en Cisjordanie », a indiqué jeudi
l’organisation anti-colonisation ‘la
Paix maintenant’. « Les 1.122 unités
d’habitation approuvées mercredi sont à
différents stades dans la procédure :
352 ont reçu un feu vert final, ce qui
signifie peu ou prou que les travaux
peuvent commencer, alors que 770 autres
ont été validées pour la première fois
», rapporte aussi l’AFP.
La colonisation,
autrement dit la construction
d’habitations civiles dans les
territoires palestiniens occupés ou
annexés par Israël depuis 1967, est
illégale au regard du Droit
international.
GRANDES MANŒUVRES
STRATEGIQUES ISRAELIENNES :
« NORMALISATION
ECONOMIQUE MAJEURE ENTRE ISRAËL ET LE
GOLFE » (AL MONITOR)
Derrière les
projets économiques avec les régimes du
Golfe, les israéliens visent avant tout
des objectifs stratégiques …
Le 13 décembre, le
ministre israélien du Renseignement et
des Transports, Yisrael Katz, a annoncé
« l’intention d’Israël de relancer le
projet ferroviaire du Hejaz reliant le
port israélien de Haïfa aux États du
Golfe ». « Ce projet inquiète au plus
haut point l’Egypte, car il pourrait se
révéler être un concurrent au canal de
Suez, avec à terme une baisse des
revenus économiques de l’Egypte »,
commente la presse israélienne.
Un rappel
historique :
Le chemin de fer du
Hejaz a été construit en 1908 pour
relier Damas à Médine en traversant la
région de Hejaz en Arabie Saoudite. Il
était censé s’étendre jusqu’à la Mecque,
pour faciliter le pèlerinage dans la
ville sainte. Une branche avait été
ajoutée à ce chemin de fer qui allait
jusqu’à Haïfa pour rejoindre la mer
Méditerranée. On était là au cœur du «
Grand Jeu » oriental (le premier du XIXe
siècle), où le IIe Reich du kaiser
Guillaume II faisait irruption dans la
rivalité géopolitique entre Moscou et
Londres. Mais quand la Première Guerre
mondiale a éclaté, le chemin de fer et
ses lignes annexes ont été partiellement
détruites et les autres fermées.
Dans son interview
avec ‘Elaph’ le 13 décembre 2017, le
ministre Katz a expliqué quel était ce
projet de « construction d’un chemin de
fer qui serait parallèle à la côte de la
mer Rouge et au canal de Suez ». « Nous
allons prolonger la voie qui relie Haifa
et Beit Shean au pont King Hussein; les
Jordaniens l’étendront aussi de leur
côté pour se relier aux chemins de fer
saoudiens », a-t-il dit. Katz a souligné
que « les études du projet sont achevées
et que son concept et ses plans sont
prêts. La construction devrait commencer
dans un an ou deux après approbation par
la Jordanie et les États du Golfe ». Il
a confirmé que « ces pays avaient déjà
la proposition du projet en main », mais
n’a pas expliqué comment il leur avait
été présenté.
« Il convient de
noter que si le traité de paix
israélo-jordanien régit les relations
diplomatiques entre Israël et la
Jordanie, l’Arabie saoudite n’a pas de
relations diplomatiques avec Israël »,
rappelle la presse israélienne.
Dans l’interview,
Katz a indiqué que « 25% des
exportations de la Turquie vers le Golfe
passent par le port de Haïfa et passent
par la Jordanie ». Il a expliqué que «
cette ligne de chemin de fer contribuera
à réduire les frais de transport de
l’Europe vers les pays du Golfe ».
Dans son émission
télévisée du 18 décembre “Al-Tabaa
al-Oula” sur ‘Dream TV’, l’ancien
conseiller présidentiel aux médias Ahmed
al-Meslemani a prévenu: « Ce chemin de
fer sera une alternative au canal de
Suez. Il affectera les revenus futurs du
Canal d’autant plus qu’il sera plus sûr
que le canal pour le cas où le conflit
avec Yémen s’intensifierait et si les
Houthis et la marine iranienne prenaient
le contrôle du détroit de Bab al-Mandab
».
S’exprimant lors de
la conférence « Calcalist 2018 sur les
prévisions économiques », et qui a réuni
de grands investisseurs et des hommes
d’affaires le 25 décembre à Tel Aviv,
Katz a décrit le chemin de fer du Hejaz
comme « un projet historique ». « Je le
pousse en avant. J’ai rencontré
plusieurs fois des représentants et des
organismes américains pour discuter de
ce projet. Nous n’avons besoin que de
200 kilomètres pour relier les premiers
rails de l’Arabie Saoudite à Israël via
la Jordanie », a-t-il dit, ajoutant que
« ce projet marquerait l’arrivée et le
transit de la force économique de Riyad
en Israël » !
LES CONSEQUENCES DE
LA NORMALISATION ENTRE LES SAOUDS ET
ISRAËL SUR L’ECONOMIE EGYPTIENNE
« Bien que l’impact
direct du chemin de fer sur les revenus
du canal de Suez puisse être discutable,
ce projet de liaison terrestre entre
Israël et l’Arabie Saoudite soulève des
questions sur les conséquences de la
normalisation entre le royaume saoudien
et Israël sur l’économie égyptienne »,
commente la presse israélienne.
Un autre projet
inquiète aussi l’Egypte. De nombreux
experts et observateurs, dont l’ancien
Premier ministre égyptien et candidat
possible aux élections de 2018 Ahmed
Shafiq et l’éminent journaliste égyptien
Abdullah al-Sanawi, ont mis en garde «
contre un accord potentiel entre Israël
et l’Arabie Saoudite pour établir une
alternative israélo-saoudienne au Canal
de Suez, avec un canal alternatif
reliant le port d’Eilat en Israël aux
côtes israéliennes sur la mer
Méditerranée ». Les navires empruntant
ce canal passeraient par le détroit de
Tiran, que l’Egypte a remis à l’Arabie
Saoudite en vertu de l’accord de
démarcation de la frontière maritime
connu sous le nom d’ « Accord de Tiran
et Sanafir ».
Kamal Amer, le
président du Comité de la défense
nationale et de la sécurité du Parlement
égyptien, a déclaré à ‘al-Monitor’ : «
En vertu de l’accord de Camp David, le
détroit de Tiran est un cours d’eau
international ouvert à toutes les
nations. L’Egypte ne peut pas empêcher
la navigation dans ce détroit pour le
cas où Israël déciderait de creuser un
canal reliant Eilat à la mer
Méditerranée pour concurrencer le canal
de Suez ». Il a poursuivi: « A ce jour
Israël n’a pas encore été capable de
mettre en œuvre un tel projet de canal,
car son sol à cet endroit est très dur
et il ne serait pas facile de creuser un
couloir de navigation comme le canal de
Suez. Mais s’il était construit l’Egypte
ne pourrait pas entraver la navigation
des navires qui souhaiteraient transiter
par le canal israélien ».
« Pour l’heure,
aucune alternative au canal de Suez ne
devrait affecter les revenus du canal de
sitôt ». Pourtant, la normalisation
entre Israël et les pays du Golfe, en
particulier l’Arabie saoudite, pourrait
à un moment donné ou à un autre, «
briser le monopole de Suez sur le
commerce entre l’Est et l’Ouest ».
NOTES :
(1) Cfr. sur
PCN-TV/ PRESSTV (IRAN) DEBAT AVEC LUC
MICHEL:
L’ÉQUILIBRE DES
FORCES AU MOYEN-ORIENT A CHANGÉ. VERS LA
SECONDE GUERRE DE SYRIE
sur
https://vimeo.com/25088550
Et :
Sur LUC MICHEL’S
GEOPOLITICAL DAILY/
SYRIE D’UNE GUERRE
A L’AUTRE (II): LA BATAILLE POUR IDLIB
OU LE PASSAGE D’UN CONFLIT A L’AUTRE
sur
http://www.lucmichel.net/2018/01/12/luc-michels-geopolitical-daily-syrie-dune-guerre-a-lautre-ii-la-bataille-pour-idlib-ou-le-passage-dun-conflit-a-lautre/
(2) Cfr. LUC
MICHEL’S GEOPOLITICAL DAILY/
GRAND JEU AU
PROCHE-ORIENT: POUTINE ‘NOUVEAU TSAR’ DE
L’ORIENT (III). LA FIN DE LA NEUTRALITE
BIENVEILLANTE AVEC ISRAEL
sur
http://www.lucmichel.net/2017/12/20/luc-michels-geopolitical-daily-grand-jeu-au-proche-orient-poutine-nouveau-tsar-de-lorient-iii-la-fin-de-la-neutralite-bienveillante-avec-israel/
(3) Cfr. LUC
MICHEL’S GEOPOLITICAL DAILY/
AXE WASHINGTON –
RIYAD – TEL-AVIV : LA VIEILLE ALLIANCE
HONTEUSE ENTRE SAOUDS ET ISRAELIENS NE
SE DISSIMULE PLUS !
sur
http://www.lucmichel.net/2017/11/17/luc-michels-geopolitical-daily-axe-washington-riyad-tel-aviv-la-vieille-alliance-honteuse-entre-saouds-et-israeliens-ne-se-dissimule-plus/
Et :
L’AXE WASHINGTON –
RIYAD, LES REVIREMENTS DE TRUMP SUR LA
POLITIQUE MOYEN-ORIENTALE DES USA ET LA
VISION STRATEGIQUE DES ‘CINQ MERS’
sur
http://www.lucmichel.net/2017/11/27/luc-michels-geopolitical-daily-laxe-washington-riyad-les-revirements-de-trump-sur-la-politique-moyen-orientale-des-usa-et-la-vision-strategique-des-cinq-mers/
Photo :
La capacité
militaire du Hezbollah aurait septuplé
depuis la deuxième guerre du régime
israélien contre le Liban en 2006.
(Source : Rai al-Youm’
– Fars – al Monitor - EODE Think-Tank)
LUC MICHEL (ЛЮК
МИШЕЛЬ) & EODE
* PAGE SPECIALE Luc
MICHEL’s Geopolitical Daily
https://www.facebook.com/LucMICHELgeopoliticalDaily/
* Luc MICHEL (Люк
МИШЕЛЬ) :
WEBSITE
http://www.lucmichel.net/
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https://www.facebook.com/Pcn.luc.Michel.3.Geopolitique/
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https://twitter.com/LucMichelPCN
* EODE :
EODE-TV
https://vimeo.com/eodetv
WEBSITE
http://www.eode.org/
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