Al-Manar
Le pourquoi et le comment de la campagne
contre le général Suleimani
Leila Mazboudi
Photo:
Al-Manar
Mardi 24 mars 2015
Le charismatique général iranien des
Gardiens de la Révolution Qassem
Suleimani fait beaucoup parler de lui.
Et pour cause, sa présence en
Irak inquiète. Elle est perspicace et
permet des avancées de l’armée irakienne
et de ses supplétifs face à la milice
wahhabite takfiriste Daesh (Etat
Islamique). Ces derniers se trouvent aux
portes de Tikrit pour le moment.
On attribue aussi à ce chef de la
célèbre unité al-Quds un rôle essentiel
dans le sud de la Syrie, où les forces
gouvernementales syriennes ont réalisé
des avancées importantes contre le bras
d’Al-Qaïda en Syrie, et le front al-Nosra
et Cie.
En Iran, il est la personnalité de
l’année pour la majeure partie de ses
compatriotes, comme le révèle un
sondage.
Mais dans les medias des pays arabes,
tous les moyens sont bons pour le
saquer, sous prétexte qu’il constitue «
le symbole de l’interventionnisme
iranien en Irak et en Syrie ». Termes
empruntés à la lettre au site en ligne
de la chaine de télévision qatarie al-Jazeera
Sachant que l’aide logistique
apportée par l’Iran à l’Irak et la Syrie
s’est faite à la demande des
gouvernements des deux pays, et
s’inscrit dans le cadre des accords de
collaboration militaire bilatérale.
Ce que ces mêmes pays arabes ne se
ménagent pas de faire. Comme l’a fait
l’Arabie saoudite lorsqu’elle a
intervenu auprès du régime des Khalifa
au Bahreïn, pour réprimer la révolution
pacifique du peuple bahreïni qui
réclamaient des réformes politiques.
Nul besoin d’expliquer pourquoi ces
pays arabes à la politique d’affinité
avec l’ennemi sioniste reprochent tout
le temps à l’Iran ce qu’ils se
permettent de faire. Mais le plus fort
de leur manipulation s’illustre dans
leurs tentatives effrénées de déformer
la portée des actions entreprises par la
République islamique auprès de ses
voisins et de soulever les doutes sur
leur intention.
Ainsi, toute aide, collaboration ou
coordination est présentée dans le cadre
de soi-disant efforts de Téhéran
d’étendre son influence pour édifier un
empire perse dans la région.
Les Occidentaux ont joué un rôle
primordial pour alimenter ces
allégations. C’est une constante de
l'impérialisme occidental que d’accuser
des liens étroits entre les pays membres
d'une région, lorsqu’ils se font en
dehors de son consentement.
Et les
Occidentaux continuent de le faire.
« L’Iran déploie ses efforts pour
consacrer son hégémonie en Irak », vient
de dire le numéro un de la CIA, John
Brennan, ce lundi. « Mais la présence de
Suleimani et de ses conseillers ne veut
pas dire que l’hégémonie de l’Iran va
prendre de l’ampleur dans ce pays. Nous
n’allons pas leur permettre de jouer ce
rôle», a-t-il menacé.
Signe que le rôle de Suleimani en
Irak est non seulement dans le
collimateur des Américains, mais très
mal vu.
Il « complique la mission des
Etats-Unis dans la lutte contre le
terrorisme », affiche Brennan. Une
plainte qui ne saurait dissimuler
derrière elle la volonté américaine de
s’accaparer le règlement de la crise en
Irak et de décider qui est apte à y
participer de ce qui ne l’est pas. Comme
c’est le cas partout.
Oui à ce state, Suleimani ne peut
qu’être gênant.
Il « contribue à ébranler la
stabilité dans la région », car il
soutient des groupuscules pro iraniens,
continue Brennan, d’après The
Guardian. Selon ce dernier, le général
américain a employé un langage très
violent à l’encontre du général iranien,
le qualifiant de « général mystérieux et
très agressif », avant de conclure : «
Je ne considère pas l’Iran comme une
puissance alliée en Irak ». Il est vrai
certes que l’Iran ne s’est jamais targué
d’être un allié des Etats-Unis dans la
région.
Ces reproches étant l’expression de
l’exaspération des Américains, face à
l’efficacité de l’aide que Téhéran
procure via Suleimani. Une efficacité
qui dévoile leur inefficacité, ou
l’absence de volonté de régler la
question une fois pour toute. Une
efficacité qui devrait donner aux
Iraniens une bonne réputation dans ce
pays. Chose qu’il faut a tout prix
entraver. Raison pour laquelle il faut à
tout prix ternir leur image.
Les
Américains ne voient pas les sunnites
Force est de constater que les propos
de Brennan avaient été précédés la
semaine passée par ceux du chef de
l’état-major américain, Martin Dempsey
qui s’était lui aussi déployé pour
soulever un rideau de doutes sur
l’action de Suleimani en Irak. Il a dit
: « les Etats-Unis appréhendent
sérieusement que les combattants chiites
qui jouissent d’un soutien iranien ne
combattent les Irakiens sunnites et
kurdes en fin de compte, ce qui aboutira
à creuser le clivage confessionnel dans
ce pays ».
Signe indéfectible de la mauvaise foi de
Dempsey : il a omis de signaler que
parmi les combattants volontaires qui
luttent aux côtés de l’armée irakienne
figurent des combattants sunnites !
Cette omission qui n’a rien de fortuit
n’est pas seulement un prétexte
d’ingérence américaine, mais aussi
un mot d’ordre aux répercussions
pratiques.
Rumeurs dans
les médias arabes
Avant les propos de Brennan, il y a
eu la rumeur lancéece week-end par les
médias arabes.
Sur Suleimani auss, en lui attribuant
des propos qu’il n’a jamais dits. Comme
quoi par exemple que « son pays est
présent au Liban et en Irak. Ces deux
pays sont soumis d’une façon ou d’une
autre à la volonté de Téhéran et à ses
idées », selon le site du journal
jordanien « Al-Sawsana ».
« L’Iran peut manipuler les révolutions
dans ces pays pour les diriger contre
l’ennemi, comme en Jordanie », attribue
aussi le journal à Suleimani.
Sur la Syrie, on lui fait dire que «
le peuple syrien est totalement pour le
gouvernement, et les supports de
l’opposition n’ont jamais pu organiser
aucun rassemblement millionnaire ».
On lui colle aussi des déclarations
comme quoi "les révolutions arabes
prennent progressivement un caractère
islamique et se cristallise avec le
temps pour ressembler à la révolution
islamique en Iran".
Et pour paraitre plus crédible, le
journal prétend que ces soi-disant
propos du général iranien ont été
publiés sur l’agence iranienne Isna. Où
aucune trace de cette déclaration n'est
visible.
Impact
négatif sur l'opinion public
Pour sa part, le corps des Gardiens
de la révolution a démenti
catégoriquement ces propos. « Tout
ce qui a été rapporté comme analyses et
propos attribués au général Suleimani
sur la situation dans la région ou en
Jordanie n’est que pure mensonge »,
a-t-il assuré dans un communiqué.
Selon les gardiens de la révolution,
ces information fabriquées de toutes
pièces ont toutefois un impact négatif
sur l’opinion publique en Iran et à
l’extérieur ». « Ce qui nous octroie le
droit d’entamer des poursuite
judiciaires », a aussi mis en garde le
texte.
Reste à savoir pourquoi c’est la
Jordanie qui figure dans la rumeur
attribuée à Suleimani, comme pays où la
supposée révolution pouvait être déviée
contre l’ennemi.
Ce pays qui a conclu un accord avec
Israël se trouve aux confins avec le sud
syrien, où la présence de Suleimani
s’est manifestée. Elle renferme une
cellule qui supervise et dirige les
attentats des terroristes contre l'armée
israélienne, en coopération avec les
Etats-Unis, le Qatar, l’Arabie, la
France. Et en collaboration avec
l'entité sioniste.
Des rumeurs sur des supposées
velléités iraniennes de déstabiliser ce
pays ont pour but d'hypnotiser son
opinion publique et permettent à ses
dirigeants les pires exactions.
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