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Schenker au Liban après Macron : le
mauvais flic
laisse faire le bon flic. Revers et
messages US
Leila Mazboudi

Vendredi 4 septembre 2020
La visite du vice-secrétaire d’état
américain pour le Proche-Orient,
David Schenker s’est faite sous le signe
de la discrétion cette fois-ci. Un
effort d’effacement dicté sans doute par
les revers que son administration a
subis dans ses tentatives d’affaiblir le
Hezbollah… et de laisser place à
l’initiative française.
Mais les quelques rencontres qu’il a
eues et celles qu’il n’a pas eues
illustrent bien les messages pernicieux
qu’il voudrait faire passer.
Arrivé à Beyrouth
le mercredi 2 août, il n’a rencontré
aucun dirigeant libanais : ni chef de
l’Etat, ni chef du Parlement, ni le
Premier ministre démissionnaire.
Il s’est contenté d’une rencontre avec
le nouveau Premier ministre désigné
Moustafa Adib. Preuve que les Américains
mise sur lui.
Il a eu aussi une réunion avec le
commandant de l’armée le général Joseph
Aoun, en catimini, sans passer par le
ministre de la Défense.
C’est la seule institution étatique qui
vaille pour les Américains en ce moment,
en concluent des observateurs pour le
journal libanais al-Akhbar.
Le gros de son
temps, il l’a passé avec des
représentants de la société civile,
manifestement sous les ordres de
Washington.
En l’occurrence Waddah al-Sadek et Samir
Saliba de l’ONG « Je suis la ligne rouge
», Laury Hatayan du parti « Progrès »,
Hussein al-Achi du groupe « Disséminés
», et Aline Germani du groupe « Liban à
nouveau ».
Une conclusion
inéluctable : les Etats-Unis seraient
donc à la recherche de nouveaux alliés
au pays du cèdre alors que leurs alliés
traditionnels sont accusés d’avoir
trempé avec le Hezbollah, bête noire de
Washington et de Tel Aviv.
Non sans revers,
semble-t-il. La prestance de ces
nouveaux alliés était plutôt décevante.
Et il n’a pas manqué le le leur faire
parvenir. Son discours devant ces
nouveaux alliés a été plutôt grincheux,
empli de reproches voire même déprimant,
rapportent des sources informées de sa
teneur, vu que « ces groupes ne sont pas
parvenus à produire des leaders qui
puissent s’entendre sur un minimum de
sujets».
« Chacun de vous
entretient des liens avec Washington
pour son propre compte. Vous vous êtes
distraits en vous mouchardant les uns
les autres. Vous avez en conséquence
perdu de votre crédibilité », leur
a-t-il lancé non sans déception, selon
al-Akhbar.
« Vous n’avez pas
fait vos preuves. Vous avez échoué
d’organiser une manifestation d’un
million de participants. Nous avons été
surpris que la manifestation qui s’est
déroulée au lendemain de l’explosion
n’ait réuni qu’à peine 10.000 personnes.
C’est un chiffre que n’importe quel
parti politique peut mobiliser », les
aurait-il sermonnés, selon un autre
média libanais, le site web libanais al-Ahwal.
A en croire les
observateurs, ces réprimandes seraient
sans doute destinées à les inciter à
faire davantage d’efforts, pour
enflammer la rue libanaise durant les
semaines à venir.
En outre, et parmi
toute la classe politique du 14 mars,
traditionnellement alliée de Washington,
Schenker n’a rencontré que les députés
qui ont démissionné au lendemain de
l’explosion du port de Beyrouth : Sami
et Nadim Gemayel et Elias Hankach des
Kataeb, Paula Yaakoubiane du parti 7,
Marwane Hémadé et Henry Hélou du PSP de
Walid Joumblatt, et Nehmé Afram, un ex
du Courant patriotique libre qui a fait
défection.
Ils avaient tenté
d’exploiter le choc provoqué par le
drame qui a fait plus de 190 morts et de
6.500 blessés et détruit plusieurs
quartiers de Beyrouth, pour dissoudre le
parlement et provoquer de nouvelles
législatives. Mais eux aussi n’étaient
pas à la hauteur des attentes
américaines. Ont-ils eu droit aux
reproches de Schenker, ou à ses
consolations?
Leur tentative
s’est soldée par un échec. Le Hezbollah
ayant assuré qu’il n’est pas question
d’aller vers de nouvelles élections
quand bien même le parlement serait
dissout. Et les autres députés du 14
mars s’étant abstenus de démissionner.
Justement
l’émissaire américain n’a toutefois pas
oublié les autres acteurs libanais qu’il
a dénigré de rencontrer. Serait-ce pour
que ses menaces parviennent entièrement
à leurs oreilles.
Il les a proférées
lors de son interview avec la télévision
libanaise MTV des Forces libanaises.
Lorsqu’il a brandi que la loi Magnitski
serait appliquée contre des
personnalités libanaises.
Adoptée
initialement par le congrès américain en
2012 contre des responsables russes dans
l’affaire de de la mort de l’opposant
russe Serguei Magnitski, cet acte est
désormais utilisé par extension contre
tous les hommes politiques qui
soi-disant « violent les droits de
l’homme et sont accusés de corruption».
Partout dans le monde. Des accusations «
droit de l’hommiste » qui se veulent
surtout couvrir les vraies motivations
des Américains : sanctionner tous ceux
qui refusent de se plier à leur diktat.
Alors qu’il est
question selon le Figaro d’une mise en
garde similaire qui aurait été proférée
par le président français Emmanuel
Macron, l’une et l’autre devraient tenir
cette classe politique en laisse pour
garantir sa docilité.
Concernant cette
initiative, Schenker a tenu à indiquer
qu’elle était coordonnée avec son
administration. Celle-ci lui aurait
accordé un délai de 6 mois, laquelle
correspond à la période des
présidentielles américaines, rapporte
al-Akhbar.
Entre temps, le
mauvais flic laisse faire le bon flic.
Un mauvais flic qui semble être à court
de tours dans son sac.
Source:
Divers
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