Le Saker
US-Russie : nouveau traité nucléaire
Moon of Alabama

Jeudi 22 octobre 2020 Les États-Unis
déplacent à nouveau les poteaux de but
dans les négociations pour la
prolongation du traité nucléaire
Par
Moon of Alabama − Le 20 octobre 2020
L’administration
Trump veut abandonner tous les traités
sur les armes nucléaires avec la Russie.
Elle a déjà
quitté le Traité sur les forces
nucléaires à portée intermédiaire qui
restreignait certaines classes d’armes
nucléaires à plus courte portée. Elle a
quitté le traité Open Sky qui permettait
des vols de vérification. Elle laisse
maintenant
expirer le traité New-START avec la
Russie.
New-START limite le
nombre d’armes stratégiques déployées et
d’ogives nucléaires pouvant être
utilisées pour des attaques
intercontinentales. Il s’agit notamment
des bombardiers à longue portée, des
missiles nucléaires basés dans des silos
et des missiles nucléaires lancés depuis
les sous-marins. Le traité ne limite pas
le nombre d’armes nucléaires à courte
portée ni le nombre d’ogives nucléaires
qui ne sont pas déployées mais stockées
en réserve.
Le traité actuel
prendra fin le 5 février 2021, à moins
que la Russie et les États-Unis ne
conviennent de le prolonger de 5 ans
comme le prévoit le traité.
L’administration Trump a déclaré qu’elle
souhaitait un nouvel accord avant les
prochaines élections. Il ne reste plus
que deux semaines pour négocier une
prolongation.
Alors que
l’administration Trump veut abandonner
New-START, elle ne veut pas en prendre
la responsabilité. Elle a d’abord essayé
d’inclure la Chine, qui possède beaucoup
moins d’armes que les États-Unis, et la
Russie, dans le traité. La Chine ne
voulait pas faire partie du traité alors
même que les États-Unis pratiquaient
un jeu diplomatique puéril pour
« faire honte » à la Chine dans les
négociations.
Les pourparlers
n’allaient nulle part car les États-Unis
rejetaient la prolongation de cinq ans
souhaitée par la Russie et exigeaient
que d’autres armes russes, non couvertes
par le traité actuel, soient également
incluses. Le 16 octobre, le président
russe Poutine a tenu une réunion avec
son cabinet de sécurité nationale. Ils
ont
discuté des négociations du traité :
Le Président de
la Russie Vladimir Poutine :Avant d’aborder le
point principal de l’ordre du jour
d’aujourd’hui, je voudrais demander au
Ministre des affaires étrangères Sergueï
Lavrov s’il y a eu des progrès dans le
dialogue avec les États-Unis pour
étendre l’un des documents centraux en
matière de sécurité internationale et de
contrôle des armements. Je fais
référence au nouveau START, le Traité
sur les mesures visant à réduire et à
limiter davantage les armes stratégiques
offensives.
Où en sommes-nous
dans les discussions avec les
Américains?
Le Ministre des
affaires étrangères Sergueï Lavrov :
Monsieur le
Président,
Conformément à vos
instructions, nous restons assez
proactifs dans nos contacts avec nos
collègues américains sur les questions
de stabilité stratégique sous tous leurs
aspects, notamment en soulignant notre
initiative de prendre sans tarder la
décision de prolonger le START, qui
expirera en février 2021, pour un
nouveau mandat de cinq ans sans aucune
condition préalable. Cette initiative
reste sur la table. ...
Vladimir Poutine
: Ce serait extrêmement triste si ce
traité cessait d'exister et n'était pas
remplacé par un autre document
fondamental de ce genre. Au cours de
toutes les années précédentes, le START
a fonctionné et fonctionne correctement,
remplissant son rôle fondamental de
contrainte limitant la course aux
armements et d’outil de maîtrise des
armements. Il est clair que nous avons
de nouveaux systèmes d'armes qui
manquent à la partie américaine, du
moins pour le moment. Mais nous ne
refusons pas de discuter également de
cet aspect de la question.
À cet égard,
j'ai une proposition, à savoir, proroger
le traité désormais en vigueur sans
conditions pendant au moins un an afin
d'avoir une chance de tenir des
discussions de fond sur tous les
paramètres des problèmes qui sont régis
par des traités de ce type, faute de
voir nos pays, et toutes les nations du
monde, dans l'obligation de maintenir un
intérêt direct dans la stabilité
stratégique sans un document aussi
fondamental que le Traité de limitation
des armements offensifs stratégiques.
Veuillez formuler
notre position auprès des partenaires
américains et essayer d’obtenir au
moins une réponse compréhensible de leur
part dès que possible.
Sergueï Lavrov:
Nous le ferons dès que possible,
Monsieur le Président.
Vladimir Poutine:
Merci.
Les États-Unis
ont rejeté l’offre.
La Russie a proposé
vendredi de prolonger d'un an un traité
sur les armes nucléaires qui arriverait
bientôt à expiration sans aucun
changement, une décision perçue à
Washington comme une tactique pour
retarder l'action sur le traité jusqu'à
la fin de l'élection présidentielle
américaine. ...L'offre a attiré un
accueil glacial à Washington. En
quelques heures, l'administration Trump
a publié une déclaration de Robert C.
O'Brien, le conseiller à la sécurité
nationale, rejetant l'offre du président
russe.
«La réponse du
président Poutine aujourd’hui pour
prolonger le traité START sans geler les
ogives nucléaires est un échec», a
déclaré M. O'Brien. «Les États-Unis
prennent au sérieux la maîtrise des
armements qui assurera la sécurité du
monde entier. Nous espérons que la
Russie réévaluera sa position avant
qu'une course aux armements coûteuse ne
se produise.»
M. O’Brien a
réitéré la proposition de
l’administration de prolonger d’un an le
programme START, "en échange du
plafonnement de toutes les têtes
nucléaires par la Russie et les
États-Unis pendant cette période".
La proposition
de plafonner toutes les ogives
nucléaires étendrait New START au-delà
des armes stratégiques, son objectif
actuel, pour couvrir également les
ogives nucléaires tactiques.
Le gros problème
avec la proposition américaine est qu’il
n’y a pas d’accord, ni même
l’infrastructure, qui permettrait de
vérifier le nombre de toutes les ogives
nucléaires. Comment ces charges
seraient-elles comptabilisées et comment
le démantèlement ou la rénovation de ces
ogives seraient-ils gérés ? Y aurait-il
des inspecteurs russes dans les dépôts
et installations de fabrication d’ogives
nucléaires américaines et des
inspecteurs américains dans les dépôts
russes ? Négocier les processus requis
pour permettre cela prendrait
probablement des années. Le Pentagone et
le Sénat s’opposeraient certainement à
tout programme d’inspection.
Mais Poutine est
sérieux en voulant garder le traité.
Aujourd’hui, il a fait un
autre pas vers la position
américaine :
Moscou est prêt à
offrir à Washington un gel mutuel d’un
an sur les arsenaux nucléaires des deux
parties, si le START (Traité de
réduction des armes stratégiques) est
prolongé pour la même période, a déclaré
le ministère russe des Affaires
étrangères."La Russie propose
de prolonger le START d'un an, et elle
est prête à assumer, avec les
États-Unis, l'obligation politique de
geler la quantité de ses ogives
nucléaires pendant cette période.
Cette position peut être mise en œuvre
strictement à condition que le gel des
ogives ne soit accompagné d'aucune
demande supplémentaire de la part des
États-Unis", a noté le ministère.
Cette offre
concerne un gentlemen’s agreement
invérifiable pour geler le nombre
d’ogives nucléaires. Tout programme de
vérification serait trop compliqué pour
être négocié dans les quelques semaines
qui restent au traité.
James Acton @
james_acton32 -
14:52 UTC · 20 octobre 2020Question
importante. Totalement différent. Le
nouveau START ne limite pas les ogives
non déployées.
Graham W. Jenkins
@grahamwjenkins
En réponse à @
james_acton32
En quoi la
surveillance et la vérification
différeraient-elles du régime START
actuel?
Daryl G Kimball
@DarylGKimball
En réponse à @
james_acton32
Le nouveau START ne
limite pas non plus les ogives non
stratégiques déployées ou non déployées.
Ainsi, un accord sur un "gel" vérifiable
du total des stocks exigerait un accord
sur les règles de comptage, la taille et
la composition des stocks et les
méthodes de contrôle / vérification. Ce
ne sont pas de petits détails.
Les États-Unis ont
réagi rapidement à la nouvelle offre
russe en
émettant des demandes
supplémentaires :
Nous apprécions la
volonté de la Fédération de Russie de
progresser sur la question de la
maîtrise des armements nucléaires.
Les États-Unis sont
prêts à se réunir immédiatement pour
finaliser un accord vérifiable.
Nous attendons de la Russie qu'elle
donne à ses diplomates les moyens de
faire de même.
Il est impossible
de négocier un « accord vérifiable » sur
un gel du nombre de toutes les ogives
nucléaires – stratégiques et tactiques,
déployées et non déployées – dans les 14
jours :
James Acton @
james_acton32 - 14:47 UTC · 20 octobre
2020 Un accord est
possible, mais on ne sait pas s'il est
proche. Un désaccord sur la nécessité
d'une vérification est assez important.
Si les États-Unis veulent un accord
avant l'élection, alors (i) les
États-Unis devront reculer et n'accepter
aucune vérification;
Ou (ii) les
États-Unis devront accepter une promesse
de la Russie de négocier des
arrangements de vérification, car il
n’est pas possible de le faire en deux
semaines. Les deux sont des
possibilités; les deux sont loin d'être
assurés.
Pour commencer, il
faudrait des années pour vérifier le
nombre d’ogives de chaque côté.
La position des
États-Unis pour obtenir un « accord
vérifiable » dans les deux semaines est
absurde. C’est simplement un stratagème
pour blâmer la Russie lorsque le temps
de prolonger le traité sera épuisé.
Le processus de
négociation prouve à nouveau que les
États-Unis ne sont plus « capables [de
s’engager] dans un accord ».
Moon of Alabama
Traduit par jj,
relu par Wayan pour le Saker Francophone
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