Monde
Non, il n’y aura pas de base russe en
Iran
Moon of Alabama

Samedi 10 août 2019 Par
Moon of Alabama – Le 8 août 2019
Un rapport
quelque peu bizarre publié sur
Oilprice.com affirme que la Russie
va stationner des troupes, des navires
et des avions de combat en Iran. L’article intitulé
La Russie s’impose dans le golfe
Persique, a été repris par
Yahoo.com et
Zerohedge alors qu’il est évident
qu’il est farfelu.
Dans une escalade
potentiellement catastrophique des
tensions dans le golfe Persique, la
Russie prévoit d'utiliser les ports
iraniens de Bandar-e-Bushehr et de
Chabahar comme bases militaires avancées
pour des navires de guerre et des
sous-marins nucléaires, gardés par des
centaines de troupes des forces
spéciales -
Spetsnaz - se faisant
passer pour des
"conseillers
militaires", et une base aérienne
près de Bandar-e-Bushehr où seraient
basés 35 avions de combat Sukhoi Su-57,
selon des renseignements donnés par des
sources importantes proches du régime
iranien, en exclusivité à
OilPrice.com. La prochaine série
d'exercices militaires conjoints dans
l'océan Indien et le détroit d'Ormuz
marquera le début de cette expansion
militaire in situ en Iran, puisque les
navires russes concernés seront
autorisés par l'Iran à utiliser les
installations de Bandar-e-Bushehr et
Chabahar. En fonction de la force des
réactions nationales et internationales,
ces navires et
Spetsnaz resteront
en place et seront augmentés en nombre
au cours des 50 prochaines années.
Par où commencer ?
1. Le golfe
Persique est un lac dont la profondeur
moyenne
est inférieure à 50 mètres. C’est un
endroit où l’on peut utiliser de
petits sous-marins très maniables.
Mais personne n’y fera naviguer de
sous-marins nucléaires.
2. Les avions de
combat Sukhoi Su-57 n’ont pas encore été
construits en série. Ceux qui volent
actuellement sont des avions d’essai qui
n’ont toujours pas les nouveaux moteurs
nécessaires. La Russie a récemment
commandé le premier lot de Su-57, mais
les premières livraisons n’auront lieu
qu’en 2022-24. 35 de ces avions
pourraient être disponibles dans une
dizaine d’années. Quand ils le seront,
ils protégeront la mère Patrie russe de
l’OTAN et non quelques puits de pétrole
iraniens.
3. Les Spetsnaz
sont des forces spéciales formées à
grands frais. Elles ne servent pas à
garder des bases.
4. La
constitution iranienne (pdf)
n’autorise pas le stationnement de
troupes étrangères. L’article 146 est
assez clair à ce sujet :
L'installation de
tout type de base militaire étrangère en
Iran, même à des fins pacifiques, est
interdite.
En août 2016, les
militaires russes et iraniens ont
convenu
d’établir une base logistique à
Hamedan, en Iran, pour les bombardiers
Su-22M3 utilisés au-dessus de la Syrie.
Quelques jours après que le déploiement
a été rendu public, l’accord a
été rejeté :
Le 22 août, Téhéran
a mis fin à la coopération militaire et
interdit aux Russes d'utiliser ses
bases. L'une des raisons de cette
tournure surprenante des événements est
la lutte politique domestique en Iran,
où le ministre de la Défense, le général
de brigade Hossein Dehghan, a été accusé
de "manque de respect envers le
Parlement" et de violation de la
constitution du pays.
5. La
« prochaine série d’exercices militaires
conjoints » entre l’Iran et la
Russie dans l’océan Indien et le détroit
d’Ormuz sera la toute première. Il a
fallu une entente spéciale. C’est pour
cela qu’elle fait
les manchettes :
MOSCOU, 5 août.
/TASS/. Téhéran prévoit de tenir des
exercices navals conjoints avec la
Russie cette année et les préparatifs
pour les manœuvres commenceront bientôt,
a déclaré lundi le contre-amiral Hossein
Khanzadi, commandant de la marine
iranienne.
"Tout à l’heure,
nous avons signé un accord [sur des
exercices conjoints] avec les forces
armées russes et le commandement de la
flotte russe. Bientôt, les préparatifs
et la planification des manœuvres vont
commencer et celles-ci se dérouleront
cette année", a déclaré Khanzadi,
cité par l'agence de presse Fars. ...
Fin juillet, le
commandant de la marine iranienne s'est
rendu en Russie. Il a déclaré à l'agence
de presse IRNA que des exercices
russo-iraniens pourraient bientôt avoir
lieu dans le nord de l'océan Indien, y
compris dans le détroit d'Ormuz.
Un
« expert des relations Iran-Russie »
a fait
remarquer :
Ariane Tabatabai @ArianeTabatabai
-
21:34 UTC - 5 août 2019
Les médias iraniens
rapportent que l'Iran et la Russie ont
signé un accord de coopération
militaire.
Les détails de
l'accord ne sont pas publics, mais c'est
la première fois qu'un tel accord est
conclu entre les deux pays.
Dire que c’est la
« première fois qu’un tel accord » est
signé, c’est ignorer l’accord
de coopération militaire conjoint entre
la Russie et l’Iran signé en janvier
2015 ainsi que celui
conclu en août 2017. Le nouvel
accord n’est que le premier en ce qu’il
envisage des exercices conjoints.
Il semble que les
« experts » travaillant pour des
think tanks occidentaux et d’obscurs
journalistes ayant de mystérieuses
« sources proches du régime iranien »
ne sont pas les mieux informés lorsqu’il
s’agit de l’Iran.
Chacun des cinq
points ci-dessus démontre que le rapport
est absurde et que son auteur n’est pas
très familier avec les questions
militaires et stratégiques. Il n’est
donc pas étonnant que le reste de
l’article sur le prix du pétrole soit
d’aussi piètre qualité que son premier
paragraphe. Des sources mystérieuses
donnant de fausses informations sur
l’Iran, une méconnaissance des faits, et
des interprétations spéculatives ne font
pas une histoire fiable.
L’Iran et la Russie
ont parfois eu des relations difficiles.
En 2010, le président Medvedev a signé
les sanctions du Conseil de sécurité de
l’ONU contre l’Iran. Les relations se
sont refroidies après ça. L’intense
coopération militaire entre les deux
pays pendant la guerre contre la Syrie
les a ravivées. Mais les relations ne
sont certainement pas assez profondes
pour permettre la présence d’une base
russe en Iran.
L’Iran a besoin
d’armes et la Russie cherche à en
vendre. C’est à peu près tout. Il peut y
avoir des manœuvres communes, mais elles
sont symboliques et ne constituent pas
une alliance. L’Iran est très fier de
son indépendance et son parlement n’en
accepterait pas une. De plus, la Russie
n’est pas intéressée à trop s’étendre
militairement. Seule une attaque
américaine contre l’Iran pourrait
changer la donne.
Il est facile
d’envisager correctement les choses. Il
suffit de se poser la question : une
base russe dans le golfe Persique ? Pour
quoi faire ?
Moon of Alabama
Traduit par Wayan,
relu par Jj pour le Saker Francophone
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