Le Saker
La manipulation par l’OIAC de son
rapport
sur la Douma nécessite un nouveau regard
sur le cas Skripal/Novichok
Moon of Alabama
Mardi 3 décembre 2019
Par
Moon of Alabama – Le 30 novembre
2019
Étant données
les révélations relatives à la
manipulation par la direction de l’OIAC
[Organisation pour l’Interdiction des
Armes Chimiques] des rapports
établis par son personnel, l’ancien
inspecteur en désarmement de l’ONU,
Scott Ritter, fait
valoir un point très intéressant :
Selon une note
interne explosive, il n'y aurait aucune
raison de croire les affirmations de
l'opposition syrienne selon lesquelles
le gouvernement du président Bachar al-Assad
aurait utilisé des armes chimiques
contre des civils innocents à Douma, en
avril dernier. C'est un scénario que je
remets en question depuis le début.
Cela remet également en question toutes
les autres conclusions et rapports de
l’OIAC, qui avait été chargée en
2014 "d'établir les faits entourant
les allégations d'utilisation de
produits chimiques toxiques, apparemment
du chlore, à des fins hostiles en
République arabe syrienne".
Outre ses activités
autour d’un incident « chimique »
douteux en Syrie, il y a un autre cas
assez célèbre dans lequel l’OIAC fut
impliquée : l’attaque présumée au « Novichok »
contre Sergei et Julia Skripal à
Salisbury, en Grande-Bretagne.
Nous avions déjà
discuté de la participation de l’OIAC
dans l’affaire Skirpal, dans notre
article du 15 avril 2018 : les
Skripals ont-ils été drogués, «novichokés»
ou ni l’un ni l’autre ?
Le ministre des
Affaires étrangères de la Fédération de
Russie, Sergey Lavrov, a lancé une bombe
contre les déclarations britanniques
affirmant que le malaise de l'agent
secret britannique Sergej Skripal et de
sa fille Yulia, le 4 mars à Salisbury,
avait été causé par l’agent neurotoxique
'Novichok', d’un genre développé
par la Russie.
* L'empoisonnement
des Skripal a eu lieu le 4 mars.
* Des témoins
oculaires ont décrit les Skripals comme
étant désorientés et probablement soumis
à des hallucinations. Le personnel
d'urgence soupçonnait une intoxication
au Fentanyl.
* Quelques jours
plus tard, le gouvernement britannique
prétendait que les Skripals avaient été
affectés par un agent chimique du genre
'Novichok' provenant de Russie.
Il insinuait que les Skripals pourraient
mourir bientôt.
Un médecin du
centre d'urgence de l'hôpital du
district de Salisbury a affirmé
publiquement qu'aucun de ses patients
n'avait été victime d'un "agent
neurotoxique".
* Le 14 mars, après
de nombreuses pressions de la part de la
Russie, la Grande-Bretagne a finalement
invité l'Organisation pour
l'interdiction des armes chimiques
(OIAC) à analyser le sang des victimes
et à prélever des échantillons
environnementaux.
* L'OIAC est
arrivée le 19 mars et a prélevé un
échantillon les jours suivants. Elle a
également reçu une partie des
échantillons prélevés précédemment par
le laboratoire britannique d'armes
chimiques de Porton Down, qui n'est qu'à
une dizaine de kilomètres de Salisbury.
* L'OIAC a réparti
les divers échantillons qu'elle avait
entre un laboratoire certifié aux
Pays-Bas et plusieurs autres
laboratoires certifiés pour analyse.
L'un de ces
laboratoires était le très réputé
Laboratoire Spiez en Suisse, qui fait
partie de l'Office fédéral de la
protection de la population et est
totalement certifié.
* Le 12 avril,
l'OIAC
a publié une version publique du
résultat des analyses qu'elle avait
reçues de ces laboratoires.
* Une version
confidentielle plus complète a été
remise aux États membres qui composent
l'OIAC.
Lors d'un discours
public, hier, M. Lavrov a déclaré au
sujet du rapport de l'OIAC :"Une
version confidentielle détaillée et
assez substantielle a été distribuée aux
membres de l'OIAC uniquement. Dans ce
rapport, conformément au mode de
conduite de l'OIAC, la composition
chimique de l'agent présenté par les
Britanniques a été confirmée et
l'analyse des échantillons, comme
l'indique le rapport, a été effectuée
par les experts de l'OIAC eux-mêmes.
Il ne contient aucune désignation,
Novichok ou autre. Le rapport ne donne
que la formule chimique qui, selon nos
experts, désigne un agent qui a été
développé dans de nombreux pays et qui
ne présente aucun secret particulier."
Après avoir reçu ce
rapport, la Russie a été informée par le
laboratoire Spiez, ou par quelqu'un
d'autre, que le rapport de l'OIAC ne
contenait pas les résultats complets des
analyses.
Selon Lavrov, voilà
ce que le laboratoire Spiez a
initialement envoyé à l'OIAC : "Suite
à notre analyse, les échantillons
montrent des traces du produit chimique
toxique BZ et de son précurseur, qui
sont des armes chimiques de deuxième
catégorie. Le BZ est un agent
neurotoxique qui inhibe temporairement
une personne. L'effet psychotrope est
obtenu dans les 30 à 60 minutes qui
suivent son utilisation et dure jusqu'à
quatre jours. Ce produit est en service
opérationnel dans les armées des
États-Unis, du Royaume-Uni et d'autres
pays de l'OTAN. L'Union soviétique et la
Russie n'ont ni conçu ni stocké ces
agents chimiques. De plus, les
échantillons indiquent la présence d'un
agent neurotoxique de type A-234 à
l'état vierge ainsi que les produits de
sa dégradation."
La "présence
d'un agent neurotoxique de type A-234",
un agent de la série dite "Novichok",
dans son "état vierge" ou, comme
l'OIAC l'a déclaré, de "haute pureté",
montre qu’il a été ajouté
ultérieurement dans l'échantillon.
Les agents 'Novichok' ne sont pas
stables. Ils ont tendance à se dégrader
rapidement. Leur présence à l'"état
vierge" dans un échantillon prélevé
15 jours après l'incident Skripal est
inexplicable. Un scientifique de
l'ancien programme russe d'armes
chimiques qui a travaillé avec des
agents similaires, Leonid Rink, dit que
si les Skripals avaient vraiment été
exposés à un agent neurotoxique A-234
d'une telle pureté, ils seraient morts.
L'ensemble du cas,
les symptômes montrés par les Skripals
et la manière dont ils se sont rétablis,
montre qu’ils ont plutôt été
"drogués", c'est-à-dire empoisonnés
par l'agent hallucinogène BZ, que "novichokés"
avec un agent hautement neurotoxique.
L’OIAC avait envoyé
des échantillons de sang des Skripals au
laboratoire Spiez, en Suisse, qui a
tracé du BZ, un psychotrope 25 fois plus
puissant que le LSD. L’OIAC a caché ce
fait dans ses rapports.
Une attaque au BZ
contre les Skripals correspondrait aux
symptômes observés et décrits par les
témoins de la scène. Les Skripals
hallucinaient effectivement et se
comportaient de manière très étrange,
Sergei Skipal levant les bras vers le
ciel alors qu’il était assis sur un
banc. L’exposition au BZ expliquerait
aussi la survie des Skripals.
L’OIAC a expliqué
la découverte de BZ en affirmant qu’elle
en avait inséré au milieu des
échantillons pour tester le laboratoire.
Quelque chose que l’organisation déclare
faire régulièrement. À l’époque, je
croyais encore en l’OIAC et j’ai trouvé
cette explication
raisonnable :
L'OIAC a répondu à
la question russe concernant le BZ et le
taux élevé de A-234 rapporté par le
laboratoire Spiez.L'OIAC a déclaré
aujourd'hui qu'il s'agissait d'un test
de contrôle du laboratoire. Ces tests
sont régulièrement glissés dans les
échantillons réels pour s'assurer que
les laboratoires utilisés par l'OIAC
sont en mesure de faire leur travail et
ne manipulent pas leurs résultats.
Cette explication
est raisonnable.
Je suppose que nous
pouvons arrêter les théories sur le BZ
et revenir à l'empoisonnement
alimentaire comme cause la plus probable
de la maladie des Skripal.
Compte tenu de la
manipulation ou de la suppression par la
direction de l’OIAC des rapports de ses
propres spécialistes dans le but
d’attribuer l’incident de Douma au
gouvernement syrien, je dois changer
d’avis. Par la présente, je rétracte mon
acceptation antérieure de l’explication
de l’OIAC dans l’affaire Skripal.
Comme nous savons
maintenant que la direction de l’OIAC
manipule les rapports à volonté, nous ne
pouvons plus accepter l’excuse du
« test de contrôle » sans
explications ni preuves supplémentaires.
Voici ce qui semble
s’être passé.
L’OIAC n’a pas
envoyé d’échantillon de contrôle à Spiez
pour tester le laboratoire. Il a envoyé
les échantillons originaux des Skripals.
Spiez a trouvé du BZ et l’a rapporté à
l’OIAC. L’OIAC a supprimé les résultats
de Spiez dans ses propres rapports.
D’une manière ou d’une autre, la Russie
a eu vent des résultats de Spiez et a
exposé la manipulation.
Prendre conscience
du fait que les Skripals ont été
« drogués » et non « novichokés »
est important pour l’affaire Skripal.
Cela rend beaucoup plus plausible que
l’affaire Skripal soit une opération
britannique visant à empêcher le retour
de Sergei Skripal en Russie.
Moon of Alabama
Traduit par Wayan,
relu par Hervé pour le Saker Francophone
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