Algérie
La victoire
posthume de Ait Ahmed
Lahouari Addi
Mardi 24 décembre 2019
En ce mardi 24 décembre, les
étudiants ont manifesté en masse, dans
les principales villes du pays, donnant
une indication claire de ce que sera le
Vendredi 45. La dynamique du 22 février
est aussi forte qu'au début et elle ne
s'arrêtera qu'avec la transition vers un
Etat respectueux de l'autonomie de la
justice, de l'alternance électorale et
de la liberté de la presse. Ces
revendications sont celles de Hocine Ait
Ahmed dès 1962 à qui les étudiants ont
rendu un vibrant hommage en ce jour
anniversaire de sa mort. Ils ont vu en
lui le démocrate, mais aussi le
fondateur de l'ALN en sa qualité de chef
national de l'OS. L'OS a eu trois chefs
nationaux: Belouizdad, Ait Ahmed et Ben
Bella. Et c'est Ait Ahmed qui avait
préconisé sa création lors du congrès
clandestin de Zeddine pour préparer la
révolution armée.Il avait à peine 21
ans, l'âge de ces étudiants qui criaient
son nom à Alger, Oran et Constantine
avec un profond respect. Ils ont ignoré
Gaid Salah qui, sans la télévision
publique, aurait été enterré dans
l'anonymat. On est un grand homme
politique seulement quand on sert son
peuple.
On ne peut comprendre le mouvement du 22
février si on ne le relie pas à l'idéal
du 1er Novembre 54. Car pour Ait Ahmed
et ses compagnons, l'indépendance
n'était que le moyen pour construire la
modernité que l'ordre colonial avait
refusée aux Algériens traités comme des
indigènes indignes de la citoyenneté. A
l'indépendance, les officiers qui ont
pris le pouvoir par la force se sont
posés comme les tuteurs de ce peuple en
lui interdisant de choisir ses
représentants. Ait Ahmed est entré en
rébellion en 1963 pour s'opposer au
principe du parti unique. Par les
cooptations claniques et clientélistes,
par la répression et l'anathème, le
pouvoir l'a obligé à l'exil après
l'avoir détenu en prison d'où il s'était
évadé. Mais jamais la propagande
officielle n'est arrivée à effacer la
mémoire que les étudiants ressuscitent
en ce mardi 24 décembre 2019. Ils n'ont
pas connu les tumultes de 1962, 1963,
1964... mais ils sont porteurs d'une
mémoire d'où ils puisent leur énergie,
leur attachement à l'unité nationale et
leur volonté inébranlable d'achever le
projet de politique de Ait Ahmed et ses
compagnons de combat: un Etat civil
moderne fondé sur la légitimité
électorale protégée par la liberté de la
presse et l'autonomie de la justice. Le
prochain vendredi, le dernier de l'année
2019, verra une mobilisation massive,
puissante qui mettra fin aux illusions
d'un pouvoir ayant rompu les attaches
avec son peuple et perdu tout contact
avec la réalité. Dors en paix si
L'Hocine, les étudiants à Alger, Oran,
Constantine... criaient : Ya si
l'Hocine, ma zalna moudjahidine, mazalna
mou'aridine.
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