Russie politics
Syrie: qui attaque réellement
l'armée
régulière et les forces russes?
Karine Bechet-Golovko
Lundi 28 mai 2018
Deir ez-Zor est une
zone stratégique qui fut l'objet de
nombreux combats. Tenue par les forces
américaines, les tentatives de l'armée
syrienne de reprendre le contrôle de ce
territoire au sous-sol particulièrement
riche se sont toujours terminées par une
attaque frontale de la "coalition"
américaine. Il y a quelques jours
encore, l'armée régulière syrienne,
aidée par la Russie, s'est faite
attaquée. Quatre militaires russes sont
morts. Il semblerait pourtant que Daesh
ait bon dos, certains parlent de
l'implication de "l'opposition modérée",
celle formée par les Etats-Unis. Au-delà
des discours sur les plateformes
internationales parlant d'un règlement
commun du conflit en Syrie, il est
évident que les intérêts en présence
sont trop divergents. Deir ez-Zor est
l'objet de combats récurrents, à
l'occasion desquels l'armée américaine
et leurs alliés de ''l'opposition
démocratique" (démocratique puisque
d'opposition, logique) attaquent l'armée
syrienne, pourtant armée d'Etat
combattant sur son territoire (voir
notre texte ici). Ce qui finalement
correspond plus au mode d'action d'un
pays instaurant un régime d'occupation
d'un territoire étranger, que de
mécanismes de lutte contre le
terrorisme.
Il semblerait
pourtant que les attaques soient
également dirigées contre la Russie, en
tant qu'elle soutienne l'armée syrienne
et empêche ainsi la victoire des
"terroristes modérés", soutenus par
l'Occident. Terroristes formés et armés
par eux. Notamment sur la base
américaine, non autorisée par le
gouvernement syrien, qui se trouve à
al-Tanf. Cette base militaire,
aménagée par le Pentagone en 2014, qui
sert notamment à l'entraînement des
groupes radicaux. La Russie a plusieurs
fois demandé la fermeture de cette base,
illégale, qui bloque aussi l'accès de
l'aide humanitaire au camp de réfugiés
qui avait été installé dans la région et
compte plus de 50 000 personnes, femmes
et enfants, placés sous le joug de
groupes extrémistes, qui l'ont divisé en
plusieurs secteurs. Sans que cela ne
dérange nullement la très démocratique
coalition américaine, ni que la presse
ne s'indigne.
C'est dans ce
contexte qu'il faut comprendre l'attaque
subie par les forces syriennes la
semaine dernière. Dès le
21 mai, une nouvelle, la troisième,
attaque de drones militaires sur la base
russe de Lattakié est repoussée. Cela se
passe sur fond de libération totale de
Damas des groupes extrémistes. Donc de
défaite des groupes pro-américains,
soutenus par la coalition.
Dimanche, le
ministère russe de la défense annonce
qu'une attaque a été perpétrée contre
l'armée syrienne dans la région de Deir
ez-Zor, en résultat de quoi 4 militaires
russes sont morts, dont deux conseillers
en artillerie, et trois sont blessés. Si
les regards sont évidemment tournés vers
les groupes extrémistes de l'état
islamique, le journal libéral
Kommersant avance la possibilité
d'une autre voie examinée par la Russie,
à savoir celle de la participation de
cette incontournable "opposition
modérée" pro-américaine.
Selon une source
militaire, les combats ont eu lieu en
milieu de semaine dernière. Quelques
jours auparavant, des militaires russes
sont arrivés dans la région pour
coordonner l'artillerie syrienne et
former les Syriens à leur utilisation.
Dans la nuit du 23 mai, une attaque
violente, par des forces extrêmement
bien formées, a duré plus d'une heure.
43 extrémistes ont été tués et plusieurs
véhicules militaires détruits. La Russie
enquête pour savoir ce qui s'est passé
et qui est intervenu. En dehors de
l'état islamique, il semblerait que des
membres de l'Armée libre syrienne (dont
les accointances avec
Al Nosra sont depuis longtemps
révélées) soient présents sur la base
américaine d'al-Tanf et formés avec
d'autres groupes de "l'opposition
modérée" par la coalition américaine.
Sauf que ces groupes "d'opposition"
ne se battent manifestement pas contre
les groupes radicaux, mais avec les
groupes radicaux contre l'armée syrienne
régulière et ceux qui la soutiennent. Nous
sommes assez loin de la lutte contre le
terrorisme.
S'il s'agit bien de
défendre bec et ongles une région riche
et stratégique, que les Etats-Unis n'ont
absolument ni l'intention, ni l'intérêt
de rendre à la Syrie, cette attaque
montre que finalement cette "coalition
démocratique" est prête à aller très
loin, voire attaquer les militaires
russes sur place, soit directement, soit
en lançant des groupes plus ou moins
officiellement radicalisés.
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