Conférence de presse de Lavrov :
la Russie, facteur de stabilité face à
l'atlantisme
Karine Bechet-Golovko
Mercredi 16 janvier 2019
Si le retour sur la scène internationale
de la Russie s'est fait dans les années
2014-2015, lorsqu'elle s'est reconnue le
droit non seulement d'avoir des intérêts
stratégiques, mais aussi de les
défendre, face aux poussées
impérialistes des Etats-Unis, elle est
aujourd'hui devenue un facteur de
stabilisation, de limitation de
l'hégémonie américaine. Même si les
forces ne sont pas égales et le combat
très loin d'être gagné. Retour sur la
conférence de presse du ministre russe
des Affaires étrangère, Sergueï Lavrov.
En écoutant la
conférence de presse du ministre russe
des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov,
l'on a l'agréable sensation de renouer
avec la diplomatie classique de hautes
voltiges, celle qui faisait partie des
traditions européennes ... avant. A
l'époque où l'Europe avait une culture
politique profonde et complexe, celle
d'ailleurs dont Lavrov appelle de ses
vœux le retour.
Pour une
présentation détaillée de la conférence
de presse en français,
voir ici sur RT France.
D'une manière
générale, cette année 2018 ancre le
retour de la Russie sur la scène
internationale, son intervention ou son
soutien étant devenu nécessaire dans
tous les grands dossiers. C'est
d'ailleurs ce renforcement qui explique
l'aggravation parallèle et
proportionnelle des tensions entre le
clan atlantiste et la Russie,
l'hégémonie ne se partage pas. Toute
remise en cause fragilise le globalisme,
qui par définition, doit être global.
L'on voit donc continuer
l'intervention atlantiste dans le monde.
Et ce, de différentes manières.
La question
linguistique est une arme utilisée
contre la Russie, pour fractionner le
monde russe. Si la situation est bien
connue en Ukraine, dont la
constitutionnalité des réformes
scolaires et linguistiques a même été
remise en cause par la Commission de
Venise, ce combat est également très
sensible dans les pays baltes et
notamment en Estonie, où
l'intégration linguistique forcée veut
être réalisée par des écoles mixtes
estonnienne/russe d'enseignement
uniquement en estonien. La langue n'est
pas une question anodine, elle va pour
beaucoup déterminer l'appartenance
culturelle, déterminer finalement le
lien à la nation. Le monde russe,
c'est la nation russe au-delà des
frontières étatiques. Si les
Etats ont tout intérêt en général à
n'avoir qu'une langue étatique, afin de
protéger la consolidation de la société,
cette démarche devient dangereuse si
l'on ne tient pas compte des situations
ethniques et historiques propres à
chaque société. Dans ces cas, les
modèles belge ou suisse semblent plus
appropriés aux réalités
socio-historiques.
La remise en
cause des règles internationales est
également une arme de choix pour
déstabiliser les relations
internationales et rebattre les cartes.
Que ce soit dans les Balkans, où
les leaders atlantistes incitent les
forces politiques en jeu à contourner la
résolution de l'ONU sur la procédure de
dénomination de la Macédoine, posant la
question de la légitimité de la décision
prise. La Russie ici, comme ailleurs,
appelle surtout à revenir dans le cadre
du droit international. Mais Lavrov
souligne également l'intervention
américaine en Amérique du Sud,
perpétuant ainsi la bonne vieille
tradition de déstabilisation des régimes
jugés non suffisamment favorables aux
intérêts américains. De son côté, le
nouveau Président brésilien a déclaré
vouloir continuer l'intégration dans les
BRICS.
En Ukraine,
la situation continue à se radicaliser.
Comme le rappelle Lavrov, lors de sa
campagne électorale, Poroshenko
déclarait alors vouloir être le candidat
de la paix, finalement, il ne parle que
de guerre. Et le combat est mené à
l'intérieur de son pays, contre son
propre peuple, contre la presse. Le
pouvoir s'éloignant de plus en plus des
engagements pris à l'international,
s'éloignant des obligations posées à
l'Etat par sa propre constitution. En ce
sens, imaginer un échange du journaliste
Vychinsky, arrêté pour ses opinions et
dont la parodie de procès n'en finit
pas, ne permettrait pas de régler le
problème systémique de la liberté
d'expression en Ukraine. Bien au
contraire, cela pourrait inciter ce
régime à continuer en ce sens.
D'une manière
générale, Lavrov s'est prononcé, que ce
soit pour la Syrie, pour les Balkans, à
respecter autant que possible les
frontières des Etats, afin de ne pas
déstabiliser la situation encore plus
qu'elle ne l'est. Cette question des
frontières est également présente dans
les relations avec le Japon, même
si elle a été mise de manière plus que
contestable à l'ordre du jour. Il est
important ici de ne pas confondre les
causes et les conséquences : ce n'est
pas parce qu'il n'y a pas de traité de
paix entre le Japon et la Russie, que,
comme le souligne le ministre des
Affaires étrangères, le Japon ne
soutient pas la Russie sur la scène
internationale (adopte des sanctions, ne
vote pas particulièrement en faveur des
résolutions russes à l'ONU), mais bien
parce qu'il existe un différend, devenu
politique, entre le Japon - sous
gouvernance américaine - et la Russie
qu'il ne peut y avoir aujourd'hui de
traité de paix entre ces deux pays.
Pour plus de
détails sur ces questions et quelques
autres, je vous propose de regarder mon
intervention pour RT France :
Abonnement newsletter:
Quotidienne -
Hebdomadaire
Les avis reproduits dans les textes
contenus sur le site n'engagent que leurs auteurs.
Si un passage hors la loi à échappé à la vigilance
du webmaster merci de le lui signaler. webmaster@palestine-solidarite.org