Opinion
"Vous pénétrez dans le secteur
américain"
Israël Adam Shamir
Israël
Adam Shamir
Samedi 20 janvier 2018
(deux histoires pour le prix d’une)
-
Vers la
partition de la Syrie ?
La Russie avait
évité le bourbier syrien en dépit des
prédictions les plus sinistres. Poutine
a réduit son empreinte au minimum, sa
guerre est pratiquement terminée, Daesch
est en déroute. Trump pourrait également
s’écrier : "Mssion accomplie!", et
rentrer chez lui. Mais il semble qu’il
veuille se précipiter là où même les
anges ont peur de mettre les
pieds. Trump n’a même pas peur de faire
pour le Premier ministre israélien ce
que ses prédécesseurs, tant démocrates
que républicains refusaient,
concrètement livrer la guerre des
israéliens en prolongeant indéfiniment
l’occupation illégale et hostile de la
Syrie.
Il aurait dû
comprendre que la politique étrangère
n’est pas son fort. Ses opposants
libéraux à demeure neutralisent de fait
chacune de ses initiatives. Qui plus
est, ses initiatives sont
contreproductives. Il réussirait bien
mieux s’il décidait d’oublier le monde
pour un bon moment, et laissait le monde
l’oublier en retour.
Prenons par
exemple, ces fameuses manifestations en
Iran. Cela avait l’air tellement
dangereux pour le régime, quand les
foules appelaient à la résurrection du
Shah et au retrait de Syrie. Cela aurait
pu devenir sérieux, mais tout s’est
dissipé grâce à l’opportune intervention
du président Trump, dès qu’il a exprimé
son soutien aux manifestants.
Même les secteurs
les plus pro-américains de l’entité
politique européenne ont compris que le
véritable establishment US n’est
jamais d’accord avec le vrai Trump, et
ils ont refusé d’embrayer sur la
rhétorique des droits de l’homme pour
condamner l’Iran. Nous pouvons applaudir
en douce l’odieuse Nikki Haley, qui est
arrivée à consterner la communauté
internationale pendant le vote sur
Jérusalem, si bien que ses efforts
actuels pour appeler aux armes le
Conseil de sécurité se retournent contre
elle.
Les Russes et les
Turcs se sont alignés sur les points de
repère fournis par Trump, et ont dénoncé
une intervention américaine (qui
autrement n’avait guère d’existence)
tandis que les Européens restaient à
bonne distance. Les protestataires
iraniens ont vite compris qui allait se
réjouir si les émeutes continuaient, et
sont rentrés chez eux, pour refuser à
Trump ce plaisir.
Excellente issue
pour les Russes qui auraient pu se
retrouver en mauvaise posture en Syrie
sans les troupes au sol iraniennes.
En Palestine, le
génie de l’entêtement de Trump a réussi
l’exploit quasi impossible de forcer la
direction palestinienne à se retirer des
accords d’Oslo. Ces misérables accords,
qui avaient la bénédiction des US et de
l’UE et qui avaient été condamnés par le
grand et regretté Edward Saïd, avaient
été le socle de la perpétuation de
l’apartheid en Israël Palestine. Tant
qu’ils étaient préservés, on ne pouvait
pas s’attendre à de grands changements ;
c’était ça, le dôme de fer de la
politique israélienne, a fait remarquer
un témoin israélien sur Ha’Aretz.
Les voilà périmés, et de nouvelles
règles vont s’implanter, avec la
participation de la Russie, on peut le
présumer.
Le bras de fer avec
la Corée du Nord avait l’air périlleux,
et la guerre nucléaire paraissait
imminente. Mais l’évident dérangement
mental de Trump a ramené le bon sens
dans la tête du président sud-Coréen
Moon. Il a compris qu’il pouvait se
retrouver président d’une capitale
incinérée, et a fait signe à son
homologue nord-coréen pour un échange
amical. Les deux dirigeants coréens ont
échangé quelques cigares virtuels et se
sont mis d’accord pour présenter une
équipe unique aux Jeux olympiques, grave
déception pour Trump le va-t-en guerre.
Ce bol d’air a si bien vivifié les
Russes et les Chinois qu’ils ont refusé
de participer au rassemblement de
Vancouver ; et sans eux, la rencontre
n’avait plus aucun sens, au demeurant.
En Syrie, les
Russes se sont trouvés visés par une
attaque des drones, qui a coïncidé avec
l’offensive de l’armée gouvernementale
dans la province d’Idlib, contrôlée par
les rebelles. Les drones venaient aussi
d’Idlib, où se joue le dernier acte de
la guerre civile en ce moment. La
Turquie est censée maintenir la paix à
Idlib, et les Turcs ont été indignés par
l’offensive. Ils ont dit que les
négociations de paix avec les rebelles
seraient la seule façon de rétablir
l’ordre ; cela convient aux Russes
qui préfèrent généralement négocier
plutôt se battre. Mais Damas ne croit
pas aux négociations avec les radicaux
islamistes ; ces radicaux, une nouvelle
réincarnation d’al Qaida, ont des
exigences insoutenables du genre « Assad
doit partir », et ils mettent à profit
le temps passé en négociations pour se
renforcer. La confrontation entre les
Turcs et « leurs » rebelles d’un côté,
les Russes et « leurs » Syriens de
l’autre, autour d’Idlib, était
imminente, menaçant d’éclater.
Les choses auraient
pu devenir déstabilisantes pour les
Russes, mais encore une fois, les US ont
donné un coup de main en déclarant
qu’ils étaient en train d’armer et
d’entraîner une nouvelle armée rebelle
au Kurdistan syrien. Rien de tel pour
pousser les Turcs à l’action qu’un
tressaillement du côté des Kurdes. Tout
récemment, ils ont réussi à déjouer la
tentative de Barzani pour créer un
Kurdistan indépendant en Irak, et
maintenant avec un Kurdistan bis,
certains voudraient remettre le couvert,
cette fois-ci en Syrie. Erdogan a promis
de noyer la nouvelle armée kurde sous
commandement américain dans des fleuves
de sang, et a commencé à rassembler des
troupes à la frontière d’Afrin, la
petite enclave tenue par les Kurdes.
Même Erdogan ne
commettrait pas l’imprudence de faire
face à la Russie et aux US à la fois, et
il a consolidé son alliance avec
Poutine. L’assaut des drones fut
réattribué, non plus aux rebelles
soutenus par les Turcs mais à ceux qui
étaient soutenus par les US, dès lors
qu’un patrouilleur Poseidon de la Navy
P-8A US avait été observé dans les
airs au bon moment. Voilà comment un
grand moment de tension entre la Russie
et la Turquie a été détourné, tandis que
l’inimitié Turco-US se ravivait
immédiatement.
Ce serait vraiment
le moment de rentrer chez eux pour les
Américains, tant qu’ils le peuvent. La
Turquie est bien plus importante pour
les US que la Syrie ne pourrait jamais
l’être ; pour Israël c’est juste le
contraire, c’est la Syrie qui compte.
C’était le moment où le président Trump
devait choisir : qu’est-ce qui lui tient
le plus à cœur, les US ou Israël ? La
réponse, c’est le discours de Rex
Tillerson qui l’a fournie, à
l’Institution Hoover.
Si jusqu’à présent
la position officielle US était qu’ils
étaient venus en Syrie pour battre
Daesch, puis feraient demi-tour dès leur
mission accomplie, maintenant nous voilà
désabusés. Les Américains ne vont s’en
aller nulle part, ils vont rester là
pour toujours, ou jusqu’à ce qu’on les
mette à la porte ; et ils occuperont un
autre morceau de la Syrie, à côté des
hauteurs du Golan.
« Les US vont
garder une présence militaire en Syrie…
Nous n’allons pas refaire l’erreur de
2011, quand nous nous sommes
retirés d’Irak. Nous allons tout faire
pour réduire l’influence iranienne,
l’arc [chiite] au nord leur sera retiré,
et les voisins de la Syrie [comprenez
l’Israël] seront en sécurité. [Nous
resterons jusqu’à ce que la Syrie soit]
... débarrassée de ses armes de
destruction massive…. Les US ne vont pas
se retirer tant qu’Assad ne sera pas
parti. »
Par conséquent,
l’affirmation de Sergueï Lavrov la
semaine dernière, selon laquelle les US
cherchent à démembrer la Syrie, se
trouve confirmée. Un processus de
partition de la Syrie s’engage, disait
le ministre des Affaires étrangères
russe. Et cette prédiction est en cours
de réalisation.
A part ça, quoi de
neuf? Les Américains ne s’en vont jamais
de leur plein gré. Partout où ils
débarquent, c’est pour tenter de
s’installer définitivement. Ils ont
débarqué aux Philippines en 1898, et ils
y sont toujours, malgré tous ceux qui
ont réclamé leur départ. Ils ont
débarqué à Cuba en 1898, et ils y sont
toujours, malgré moult promesses de
lâcher Guantanamo, leur base gorgée de
sang. En 1945, ils ont occupé
l’Allemagne et le Japon, et ils y sont
toujours, seuls leurs marionnettes
changent. Ils ont débarqué en Corée du
sud, et ils y sont toujours. Ils ont
conquis l’Afghanistan, et ils y sont
toujours.
Parmi bien des
puissances coloniales, les US sont
l’exception par leur entêtement collant.
Il est plus facile de se débarrasser
d’un chewing gum collé à sa semelle que
de la présence américaine.
C’est
difficile, mais pas impossible. Les
Vietnamiens l’ont fait. Cela leur a pris
plusieurs années, ça leur a coûté cinq
millions de morts, cinquante mille
soldats US y ont laissé leur peau, ils
ont connu la ruine de leur économie, la
destruction des forêts, des villes
bombardées, My Lai brûlée et violée,
mais ils ont réussi à renvoyer les
Yankees dans leurs pénates.
Les Libanais l’ont
fait. Un conducteur suicide seul, qui
avait franchi la porte du camp de
Marines, avait tué plus de deux cents
Marines. Les fusiliers marins US
bombardèrent les villages libanais sans
protection dans les montagnes, puis les
Yankees ont viré de bord et sont
repartis.
Les Somaliens l’ont
fait. Ils ont coulé deux hélicoptères
Black Hawk et en une journée de combat,
ils ont descendu deux douzaines des
meilleurs combattants ennemis. Après
quoi, les Américains ont plié bagages.
La question, c’est
maintenant combien de cadavres
faudra-t-il à Trump pour comprendre
qu’on n’est jamais mieux que chez soi,
et que la présence US en Syrie n’est pas
la bienvenue? Les Israéliens seront
outrés si les Yankees font leurs
valises. Rien ne vaut une présence
militaire US en Syrie, à leurs portes,
du point de vue israélien. Mais le
président Trump a été élu par les
Américains, et il va falloir qu’il fasse
le bon choix, au plus tôt.
-
Ben Cardin et le
butin qu'il convoite
Si après m’avoir
suivi jusqu’ici, chers lecteurs
américains, vous êtes tentés de
regretter d’avoir voté pour Trump, voici
une autre histoire qui devrait vous
réconforter.
Ben Cardin, membre
important du lobby juif, un sénateur
démocrate qui entendait déjà tinter pour
lui les trompettes de la renommée en
tant qu’auteur d’un projet de loi qui
aurait fait du soutien au boycott des
produits israéliens une trahison, Ben
Cardin donc, vient de franchir un grand
pas. Il a produit un long rapport
accusant Poutine d’interférence avec le
monde et de subversion de la démocratie.
On peut
l’interpréter comme un avertissement
pré-électoral au président russe
pourtant bien élevé. D’un autre côté,
c’est un appel du pied pour que Trump
déclare la guerre à la Russie, pour
l’isoler et la sanctionner à mort.
Pourquoi est-ce que
cet éminent dirigeant juif a tellement
envie d’attaquer la Russie ? Poutine et
Netanyahou ont l’air d’être copains
comme cochons, et les juifs sont heureux
en Russie. Mais ces gens-là ne
connaissent pas la gratitude.
Dans un article
récent, l’éditorialiste en chef de
The Russia Insider Charles Bausman
s’est vanté de ce que la Juiverie soit
en première ligne dans la campagne
anti-russe. Ce long article (5000 mots)
a embarrassé bien des gens, en a
encouragés encore plus, tandis que
certains juifs américains s’en prenaient
à Poutine pour... sa silhouette.
Mais c’est plus compliqué que ça.
Certes, il y a
beaucoup de juifs férocement anti-russes
et anti-Poutine (telle Masha Gessen,
outre Ben Cardin), mais en généeral ce
sont des libéraux, haïsseurs de la
virilité et anti-Trump, à la botte de
Max Boot. Les juifs pro-Trump sont
assez indifférents envers la Russie, ni
pour ni contre. Tout ce qu’ils veulent,
c’est que Trump livre des guerres pour
Israël au Moyen Orient. Si vous trouvez
un juif américain non sioniste et bien
disposé envers la Russie, vous aurez
trouvé la perle rare, mais il n’est
probablement pas membre du Congrès. La
simple pensée que Mr Cardin et ses pairs
auraient pu gouverner les US à la place
de Trump (en cas de victoire de Mrs
Clinton) devrait vous guérir de vos
regrets.
Or Cardin est
encore plus stupide que Trump, en
plus. Les accusations de Cardin sont
bêtes et triviales. Les Russes
essaieraient de peser sur l’opinion
publique US : et alors ? Toute personne
ayant une opinion personnelle essaie
d’en influencer d’autres, et ces
influences passent aisément les
frontières. Les Russes influencent les
Américains, tandis que les Américains
influencent les Russes. Les US exercent
une influence bien plus forte en Russie
(et partout ailleurs, de fait) que la
réciproque.
L’Union soviétique
de jadis ne pesait guère dans l’opinion
occidentale (en dehors du milieu étroit
de l’extrême gauche) mais la Russie
moderne exerce bien moins d’influence
que l’URSS ne l’a jamais fait, parce que
la Russie n’est pas si différente, et
n’offre pas d’alternative véritable à
grande échelle. La Russie a ses propres
milliardaires, ses propres immigrés du
Sud global, les Russes ont arrêté de
fumer et les vendeuses jadis revêches
sourient maintenant aux clients. Le
battage anti-russe ne repose sur rien.
Que font les
Russes? Ils essaient de compenser et de
contrecarrer la vicieuse campagne
antirusse conduite aux US par le gang de
Cardin, c’est sûr. C’est raisonnable et
prévisible. Mais répandent-ils des idées
qu’ils abhorrent pour miner l’Occident ?
C’est ce que j’appellerais une
propagande pour affûter les armes, et
c’est ce que faisaient les US pendant la
Première Guerre froide, quand avec La
Voix de l’Amérique et Radio
Liberty ils encourageaient les
dissensions internes, le nationalisme
ethnique en Ukraine ou en Transcaucasie,
et ce tout en prônant l’antiracisme chez
eux.
Les Russes ne le
font pas. Ils sont sincères. Ils font la
promotion de ce qu’ils aiment. Les
Russes ont des points de vue
conservateurs. Dans leur interaction
avec l’Occident, les Russes expriment
ces points de vue. Ils sont contre
l’Union européenne, et par conséquent
favorables au Brexit et à la
dissolution de l’UE. Pour les Russes,
les US sont trop libéraux, et de toute
façon, l’UE refuse l’étreinte russe
(alors que les Russes auraient voulu la
rejoindre). Pour ce qui est des US, les
Russes soutiennent les facteurs
conservateurs, les facteurs
traditionnels et les éléments
anti-mondialistes, chauvins, qui ont
contribué à l’ascension de Trump. Leur
soutien à Trump n’a pas pour but de le
manipuler, c’est une attitude sincère.
Chez les Russes, le
politiquement correct n’a pas de prise.
Ils disent Juif comme vous diriez
Polonais ou Cherokee. Ils n’aiment pas
les immigrations de masse. Ils n’aiment
pas les Grecs et les Géorgiens, les
Arabes et les Arméniens, ni les Tajiks,
d’ailleurs, en tout cas pas en Russie,
ni en grandes quantités, et ils
expriment cette pensée - interdite selon
vos critères - sans la moindre
hésitation. Les Russes sont des
racistes, pour un libéral new-yorkais,
mais ils se marient et fraternisent
facilement sans souci des barrières
ethniques ou raciales. Aussi, quand les
Russes expriment leur horreur devant
l’intrusion d’étrangers basanés en
Europe, ils ne cherchent pas à semer la
pagaille, mais se bornent à dire ce
qu’ils ressentent. Les Russes
désapprouvent la confusion des sexes
autant que votre père jadis. Ils
apprécient les hommes virils et les
femmes féminines, et n’ont pas honte de
l’admettre.
Les voilà, les
transgressions des Russes, telles que
les a découvertes Ben Cardin dans son
rapport. Mais pourquoi est-ce que ça
ennuie Cardin et sa clique au point de
menacer la Russie de guerre et de
sanctions ?
Le sénateur qui a
trempé toute sa vie, depuis l’âge de
vingt-quatre ans, dans la politique est
un archétype du juif haut placé, l’un de
ces acteurs de l’Etat profond qui font
la loi aux US de fait, sinon en titre.
Autrefois, ces juifs puissants avaient
quelques non juifs formatés à
l’identique avec qui jouer en équipe et
qu’il pouvaient envoyer au front pour
eux. C’est bien fini. Les vrais
Américains de cet acabit n’existent
plus, ou on ne peut plus leur faire
confiance.
Voilà pourquoi le
lobby juif veut élire une femme noire au
sommet de la Maison blanche, que ce soit
Oprah ou Michelle ou même Condolezza,
peu importe. Elles peuvent toutes être
téléguidées par Ben Cardin ou ses
semblables en coulisse, dans le rôle du
Magicien d’Oz. Car maintenant les
démocrates n’arrivent pas à trouver un
homme normal, qui fasse l'affaire, même
pour les derniers échelons du pouvoir.
Ben Cardin veut se
présenter au Sénat encore une fois; il
va devoir affronter [un autre démocrate,
dans le même Etat du Maryland] Bradley
Manning (“Chelsea”), l’homme qui a passé
les câbles diplomatiques du
Département d’Etat à Wikileaks. Béni
soit-il d’avoir fait connaître ces
câbles : les gens ont le droit de savoir
les sales secrets qui se mijotent dans
l’Etat profond.
Je sympathise aussi
avec lui pour ses souffrances. Après des
mois de torture, il a été forcé de se
prêter à une castration pour pouvoir
sortir de prison. Ceci étant, c’est une
bonne pâte, ce n’est pas quelqu’un qui
puisse tenir une position d’autorité
avec une volonté inflexible. Il s’était
mis dans de beaux draps parce qu’il ne
savait pas tenir sa langue. Il a fallu
qu'il se vante de son exploit, et s’est
rapidement retrouvé sous les verrous.
Son prédécesseur « Gorge Profonde »
avait su garder son identité secrète
jusqu’à son dernier jour.
Le problème assez
cocasse c’est que les opposants à Ben
Cardin sont aussi horribles que
lui. Glenn Greenwald écrit dans The
Intercept : « Les centristes
démocrates lancent une campagne de
dénigrement contre une jeune femme
transgenre, juste pour garder un
vieux macho blanc au pouvoir ». Chaque
terme dans cette phrase est accablant.
Manning n’est pas une femme, parce
qu’une femme n’est pas un homme castré
(vous pouvez vous renseigner auprès de
Germaine Greer, si mon opinion ne
vous convainc pas).
Qualifier Cardin
de vieux macho blanc est un parfait
exemple de racisme, de sexisme et
d’âgisme: c’est une attaque ad
hominem de la pire espèce, mais ces
types-là n’hésitent pas à donner aux
autres des aperçus de la délicatesse
qu’ils détestent chez les autres. Je
déteste Cardin non en tant que « vieux
macho blanc » car cette définition
conviendrait à Lincoln et à Tolstoï,
mais parce que c’est un va-t-en-guerre,
un laquais du lobby et un ennemi des
travailleurs américains.
Je déteste tout
autant Greenwald, non pas parce qu’il
s’agit d’un jeune juif de couleur et
queer, mais parce qu’il a privatisé
l’inestimable mine d’informations, le
trésor qu’il avait reçu de Snowden et en
a fait une source d’enrichissement
personnel au lieu d’en partager le
contenu avec le peuple, comme le lui
avait ordonné Edward Snowden. Je le
déteste, Greenwald, parce qu’il a
balancé les précieuses données aux
agences d’espionnage pour qu’elles
mettent leur nez dedans et en
laissent filtrer seulement ce qui leur
paraîtrait servir leurs intérêts. Mais
surtout je le déteste pour son soutien à
la politique communautariste, pour ses
efforts afin que les Américains
ordinaires trouvent étranges et
étrangères nos positions en faveur de la
liberté et contre les fauteurs de
guerre.
Greenwald et
Cardin, ce sont les deux faces d’une
même médaille. Ils sont tout à fait
semblables : pas seulement par leur
judéité, mais par leur refus de
permettre aux Américains hommes et
normaux (ceux qui sont chrétiens,
blancs, et machos, dans leur patois) de
décider de leur sort. Pour Greenwald
comme pour Cardin, les positions faisant
autorité devraient être réservées aux
travestis, aux queer, aux femmes et aux
personnes de couleur, ou encore aux
juifs qui, apparemment, n’ont ni race,
ni âge, ni sexe.
Nous observons le
même phénomène en Israël, où les
libéraux utilisent le pronom «on » pour
ne pas faire le choix sexiste de dire
« il » ou « elle », où ils
acclament en héros une personne
autiste, métisse, indéfinie
sexuellement, insistent pour garder les
immigrants illégaux africains, mais sont
incapables d’autoriser leurs
compatriotes non juifs palestiniens à
jouir des libertés élémentaires pour se
déplacer, pour travailler ou pour voter.
Il y a une même explication : les
réfugiés, les autistes ou les dissidents
sexuels ne vont pas faire obstacle à
ceux qui jouissent actuellement du
pouvoir, alors que les Palestiniens ne
s’en priveraient pas. Ne quittez pas la
balle des yeux, souvenez-vous que toutes
ces tergiversations délicates n’ont
qu’un enjeu : le pouvoir.
Traduction:
Maria Poumier
Israel Shamir
can be reached at adam@israelshamir.net
This article was
first published at The
Unz Review.
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