Opinion
Poutine, Clinton et César
Israël Adam Shamir
Israël
Adam Shamir
Mercredi 14 septembre 2016
Le mauvais danseur s´en prend au
plancher qui n´est pas droit, mais on ne
s´attendait pas à ce que Mme Clinton se
révèle aussi mauvaise dans les
compétitions pour la présidence face au
nouveau patron excentrique qui mène la
danse a New York. On s´ attendait à ce
qu´elle s incline gracieusement dans la
défaite comme dans le triomphe, comme il
sied à une ex- première dame, mais c´est
un boulet, et elle voudrait que ce soit
la faute du pauvre Poutine.
C´est vrai
qu´il fait peur; au musée Altes de
Berlin, on fait la queue pour constater
personnellement son ahurissante
ressemblance avec le buste de César en
marbre. C´est si frappant qu´ on ne peut
pas en vouloir à la Clinton de
soupçonner le KGB d´avoir subtilisé en
douce l`original du premier siècle pour
le remplacer par un faux, russe bien
entendu. Chacun sait que Poutine était
en poste à Berlin dans sa prime
jeunesse.
César était
célèbre pour sa facilité à accomplir
plusieurs tâches a la fois. Il était
capable de dicter jusqu´a sept lettres
en même temps, rapporte Pline. Mais même
sa copie conforme l´empereur des
Russes ne saurait jouer le rôle concocté
pour lui par la Clinton et quelques
autres cerveaux occidentaux du même
calibre, celui de coupable de toutes ses
balourdises à elle.
La semaine
dernière, frau Merkel a perdu des
élections dans son fief natal de
Meckenburg au profit d´un nouveau parti
nationaliste. Un politicien honnête - si
tant est qu´il en existe -
reconnaîtrait qu´en invitant des hordes
de réfugiés dans son pays (au profit de
qui?) et en assujettissant la
souveraineté allemande aux lois occultes
du TTIP, elle avait doublement claqué la
porte au nez des ouvriers allemands, ce
qui les a amenés à voter contre elle;
elle a préféré rendre Poutine
responsable de sa déconfiture.
Même chose,
c´est la faute à Poutine, les
retentissants échecs clintoniens. Si
elle était honnête, elle admettrait
qu´elle est impopulaire, même dans
son milieu propre. Les scandales autour
de la Fondation reptilienne,
pardon, clintonienne, loin de s´apaiser,
se multiplient, parce qu´il semble bien
que le couple aux dents longues se
faisait payer pour chaque meeting et
chaque contrat gouvernemental.
C´est Poutine
qui lui avait demandé de solliciter
quelques millions de dollars auprès du
sioniste milliardaire Haim Saban, ou de
Wal Mart, le brigand en chef des
compagnies de marchands? C´est Poutine
qui lui a suggéré de faire mauvais usage
de sa boîte mail privée, et de mélanger
ses affaires privées et celles de son
ministère?
C´est Poutine qui l´a forcée à jurer
qu´elle détruirait les mines de charbon
si elle était élue? C´est encore lui qui
l´a convaincue d´annoncer qu´elle
ouvrirait les portes à un million
et demi de musulmans?
C´est Poutine
qui a falsifié le résultat des primaires
démocrates pour voler la victoire à Sanders?
Et c´est lui aussi qui a rédigé les
furieux discours de Sanders démasquant
son alliance avec le calamar géant, le
vampire tentaculaire Goldman Sachs, qui
a payé des centaines de milliers de
dollars pour ses conférences?
C´est Poutine
qui gère son emploi du temps en sorte
que, comme le dit le New York Times,
elle passe tout son temps en période
préélectorale avec les ultra riches, au
lieu de s´adresser à ses électeurs?
Quand elle se déplace là où on est prêt
à payer 250 000 dollars pour la
rencontrer, c´est encore sur injonction
de Poutine?
Il lui aurait
suggéré de qualifier les gens
susceptibles de voter pour Trump de
racistes et de demeurés, ce qui était
censé les effrayer, alors que cela les
insupporte franchement?
Eh non, il
est très fort, mais tout ça c´est au
dessus de ses moyens; elle devrait se
méfier du peuple américain qui refuse de
faire confiance à sa chutzpah, à son
amour du gain, à ses bravades.
Apparemment elle n´est pas rassurée du
tout, et c´est pour cela qu´elle veut
faire porter le chapeau à Poutine pour
tous faux pas.
Dans son
camp, ses larbins des services secrets
et les sénateurs dissent qu´ils
redoutent que Poutine se mêle de leurs
affaires électorales et sème la méfiance
chez les électeurs. Mais aucun besoin
des Russes pour cela; si c´est cela que
veulent les Russes, la Clinton et ses
supporteurs s´en chargent parfaitement.
Comment
pourraient-ils faire confiance à celle
qui, étant secrétaire d´État, a
sollicité le Qatar pour des
contributions privées, et a ensuite
autorisé des livraisons d´armes
américaines pour les clients terroristes
du Qatar? Comment feraient-ils confiance
à Sanders qui avait condamné la
Fondation Clinton comme antre de la
corruption, et maintenant soutient la
Clinton et crée sa propre fondation sur
le même modèle?
Des histoires
de piratages obscurs, dans l´Illinois et
l´Arizona, justifieraient l´idée que
Poutine voudrait interférer dans les
résultats électoraux. Pas la moindre
preuve de quoi que ce soit, encore moins
du côté de la Russie, mais “il y a
débat”. Je parie que l´establishment
prépare le terrain pour faire annuler ou
falsifier les résultats en cas de
victoire probable de Trump. S´il gagne,
le gang de la Clinton va hurler “c´est
Poutine!”. Puis ils refileront la chose
– bricolée - à la Cour suprême ou Ruth
Bader Ginsburg et ses collègues
proclameront la victoire de Clinton.
“Personne n´a
jamais interféré dans les élections US,
jusqu´à l´arrivée de Poutine”. Voilà une
protestation du gang vociférée dans les
médias et les milieux du renseignement,
aussi crédible qu´ une revendication de
virginité chez une professionnelle du
trottoir. Poutine n´a ni les moyens ni
l´occasion d´interférer, quand bien même
il le voudrait. Julian Assange l´a bien
expliqué, quand on lui a demandé
pourquoi il n´attaquait pas les US. La
Russie de Poutine a le GDP de l´Italie,
elle ne peut pas jouer contre les
équipes des US et de la Chine, ce qui
est au demeurant bien douloureux pour
les Russes qui se souviennent de la
grandeur de l´Union soviétique.
Les Russes
n´interfèrent pas dans les élections US
et Poutine a fait de son mieux en disant
dans son entretien tendu avec
Micklethwait de Bloomberg. « Nous sommes
prêts à travailler avec le prochain
président choisi par le peuple
américain, quel qu´il soit, dans la
mesure, bien sûr, où la prochaine
administration s´y prêtera ; bienvenu,
celui qui voudra travailler avec la
Russie. Et celui qui voudrait se
débarrasser de la Russie doit s´attendre
à une approche bien différente,
évidemment. »
Non,
vraiment, Poutine ne veut pas se mêler
de ce qu´il considère comme relevant des
affaires internes de chaque pays, il est
trop bien élevé pour ça ; Il n´a rien
fait en février 2014 alors qu´il aurait
pu avoir toute l´Ukraine, s´il avait
apporté son soutien au président
Yanoukovitch chassé de son poste. Il n´a
pas interféré en Géorgie en 2008, alors
que ses troupes stationnaient aux portes
de Tbilissi ; il le ferait encore bien
moins s´agissant des US.
Ce sont les
US qui ont coutume de se mêler des
élections chez les autres et faisant la
promotion des politiciens proaméricains,
et souvent avec succès. En Europe, de la
Suède à l´Italie, au Japon et en Corée
du Sud, en Israël et en Arabie saoudite,
ce sont les proaméricains qui tiennent
les partis au gouvernement, et les
partis d´opposition aussi. Seuls
échappent à cette emprise les nouveaux
partis d´extrême droite, et c´est là la
clef de leurs succès.
Ce que l ´on
sait moins, c´est que l´élection ou la
sélection de Mikhail Gorbatchev au poste
de secrétaire général du Parti
communiste en 1985 est le résultat de
l´ingérence britannique et US. L´avion
de son principal concurrent Grigory
Romanov avait été retardé jusqu´à
l´intronisation de Gorbatchev, tandis
que la visite de celui-ci à Londres
était présentée comme le signe d´une
approbation universelle.
Les US sont
intervenus dans les élections russes en
2011, lorsque le vice-président Joe
Biden a appelé le candidat Poutine à se
retirer de la course à la présidence, et
que l´ambassadeur Mc Faul avait
rencontré l´opposition, tandis que
Clinton encourageait les troubles dans
les rues de Moscou.
Il va sans
dire que la Russie moderne n´aurait
aucune chance de succès si elle voulait
interférer dans le processus électoral
américain.
Des pirates
russes auraient fourni de la matière à
Wikileaks : mais cela ne tient pas
debout, puisque nous savons maintenant
que c´est un membre de la direction du
DNC, feu Mr. Seth Rich, qui a fait
fuiter la correspondance du DNC,
ce pourquoi il a prestement été
assassiné par des inconnus. Je ne peux
pas croire à l´histoire des
fonctionnaires russes faisant du
piratage, pour deux raisons : les Russes
sont intraitables sur certaines règles,
et ils sont constamment surveillés par
la NSA, comme nous l´avons appris par
les révélations de Mr. Snowden.
En tout état
de cause, rien de plus ordinaire que
l´ingérence. Israël s´interpose dans
chaque élection US : il y a quelques
mois à peine, les candidats se battaient
pour être les premiers à lécher les
bottes de l´AIPAC, ou ce qu´elle leur
aurait demandé, et c´est Hillary qui a
gagné, de peu. Vous pouvez lire la
fascinante histoire rapportée par Unz
sur ce qui s´est passé en 1940, quand
des agents britanniques se sont ingérés
pour faire en sorte que Roosevelt soit
réélu président, ce qui leur a permis de
forcer les US rétifs à entrer en guerre.
Ajoutez à cela l´ingérence judéo
américaine dans la politique britannique
en faveur de Churchill le va-t-en
guerre.
Entre Clinton
et Trump, au début de la campagne, le
Kremlin n´avait pas de préférence. Bien
des dirigeants préféraient la Clinton,
une tête familière, Trump faisant figure
d´outsider voire de mauvais cheval. Le
camp pro-occidental derrière les murs du
Kremlin - qui existe bel et bien, et qui
est puissant - tentait d´établir des
ponts pour rallier la campagne de
la Clinton, par l´intermédiaire de
la représentante de la BBC Elizaveta
Osetinskaia comme leur émissaire à
Washington.
Cependant la
violente campagne de propagande
anti-russe menée personnellement par la
Clinton allait faire changer l´humeur
moscovite. Une hystérie de ces
dimensions contre la Russie, c´était du
jamais vu, même au plus fort de la
Guerre froide, à l´époque de Reagan et
de Barry Goldwater, surtout chez les
républicains. La campagne actuelle
contre la Russie de Poutine ressemble à
s´y méprendre à la campagne contre
l´Irak de Saddam Hussein, et on ne
saurait oublier que la campagne des
colonnes de tanks a pris le relai de
celle des colonnes de la presse.
Maintenant
les journaux et les sites dominants
publient des philippiques furibondes
contre la Russie. Selon Newsweek, le
« président » Vladimir Poutine est
l´Hitler du vingt et unième siècle, et
on devrait se méfier. Forbes écume, fou
de rage, et précise : « j´ai mis
« président » entre guillemets, parce
qu´en 2012 il n´avait pas été élu
librement et honnêtement ; il ne mérite
donc pas le respect dû á sa fonction. »
Qu´est-ce que
vous feriez, si vous étiez le président
russe? D´un autre côté, les agents de la
Clinton ont fait passer un message
rassurant au Kremlin : ne vous en faites
pas, c´est juste un argument de
campagne. Mais Poutine a toutes les
raisons du monde de se faire du souci.
Il y a
des néo-cons à l´ancienne, et aussi
quelques généraux, qui croient qu´ils
peuvent pulvériser les missiles russes
s´ils déclenchent des frappes nucléaires
subites. Ils appellent cela « frappe
préventive », mais ce qu´elle est censée
prévenir, c´est de l`ordre du fantasme.
Les Russes
doivent comprendre que la campagne
médiatique peut relever de la
préparation psychologique, pour que les
foules US soient prêtes à applaudir une
telle attaque. Le président Obama en est
conscient, et c´est la raison pour
laquelle il veut mettre en place une
déclaration contre une initiative
nucléaire ; mais son cabinet et leurs
alliés ont coupé court au projet, selon
WSF.
Le mois
dernier, les militaires russes ont
observé des alertes de niveau élevé, des
manœuvres et des inspections. Les forces
du district Sud, une partie des forces
des districts occidental et central, la
flotte du Nord, le haut commandement
des forces aérospatiales, le
commandement des troupes au sol, toutes
étaient prêtes pour le combat.
Il y a un
sentiment général que la guerre mondiale
est possible, voire imminente. Le
président Poutine a les nerfs solides,
mais il n´y a pas de système absolument
infaillible contre un coup de folie.
Peut-être que la campagne contre
la Russie ne vise que l´électorat US ;
mais les propos rassurants pourraient
aussi rendre plus aisée une attaque
nucléaire dévastatrice contre un pays
qui n´y serait pas préparé.
Ce que nous
ressentons comme un écho de la
situation en 1939 peut être en fait plus
proche de 1941, quand l´Allemagne a
soudainement attaqué la Russie, malgré
le traité de non-intervention qu´ils
avaient signé ensemble. En 1941,
l´attaque avait été précédée par de
multiples messages rassurants de la part
de Berlin. Un dirigeant russe doit tenir
compte de tout cela, parce que les
campagnes de haine ont leur dynamique
propre.
Original
publié sur Unz.com
Traduction :
Maria Poumier
Pour joindre
l´auteur, adam@israelshamir.net
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