Tendances de
l'Orient
Samir Geagea perd encore une fois son
pari
Ghaleb Kandil
Lundi 7 avril 2014
La candidature de Samir Geagea à
l'élection présidentielle libanaise,
annoncée le vendredi 4 avril, a été
envisagée il y a trois ans. Il
s'agissait d'une décision très sérieuse,
convenue par l'ancien Premier ministre
Saad Hariri et le diplomate américain
Jeffrey Feltman, dans la perspective de
la destruction de l'Etat syrien.
L'enthousiasme de M. Hariri pour ce plan
avait atteint son apogée lorsqu'il a
déclaré qu'il ne rentrerait à Beyrouth
que par l'aéroport de Damas.
Premièrement: Ce pari reposait sur la
chute de la Syrie, la destruction de son
Etat et de son armée et son intégration
au camp occidental, ce qui aurait permis
d'établir de nouvelles équations
régionales. Le plan de Feltman
consistait à prendre la Résistance
libanaise en étau: à l'intérieur du
Liban, grâce à une guerre lancée par les
milices du Courant du futur et des
Forces libanaises, appuyées par les
groupes terroristes à l'œuvre en Syrie,
qui ont exprimé leur intention d'entrer
au Liban pour combattre le Hezbollah
bien avant la participation de ce parti
aux combats en Syrie; et à travers les
frontières méridionales du Liban, grâce
à une invasion israélienne, qui devait
permettre à l'Etat hébreu de venger sa
défaite de juillet-août 2006, qui a
brisé les rêves de Tel-Aviv, de
l'Occident et de tous leurs alliés
arabes et Libanais, lesquels ont jeté
toutes leurs forces dans la balance pour
anéantir la Résistance libanaise.
C'est dans ce contexte que Saad Hariri
avait annoncé son soutien à la
candidature de Samir Geagea et souhaité
son élection à la présidence, en pariant
sur la chute rapide de l'Etat syrien.
Deuxièmement: La guerre contre la Syrie
est dans une impasse. L'alliance
composée des Etats-Unis, d'Israël, de
l'Occident, de la Turquie et de leurs
alliés arabes, s'efforce, à ce stade, de
limiter les dégâts pour atténuer les
conséquences de sa défaite. Avec le
changement des rapports de force sur le
terrain en Syrie en faveur de l'axe de
la Résistance, les Américains ne cachent
plus la réalité des faits. Le pari sur
l'étau de Feltman n'est plus que
chimère.
A chaque développement sur le champ de
bataille, il apparait, de plus en plus
clairement, que le pari d'anéantir la
Résistance n'est qu'une illusion. L'Etat
syrien et ses forces armées enregistrent
des victoires successives, et c'est lui
qui détient désormais l'initiative
militaire et politique, bien qu'hommes,
argent et armes continuent d'affluer
pour les groupes terroristes.
Le tournant enregistré dans la guerre
syrienne dissipe tous les paris des
parties libanaises qui se sont
impliquées dans les différents épisodes
de ce conflit universel. Les changements
sur le terrain syrien vont naturellement
profiter à la Résistance libanaise et à
ses alliés. Ce qui signifie que les
leaders libanais, notamment chrétiens,
qui ont appuyé la Résistance et misé sur
la force de l'Etat syrien, vont profiter
politiquement des nouvelles réalités. De
ce fait, Samir Geagea, auteur du slogan
"que les Frères musulmans règnent", va
encore une fois perdre tous ses paris.
Le chef des Forces libanaises sait très
bien que les chances de son élection à
la présidence de la République au Liban
sont quasi-nulles.
Troisièmement: La candidature de Samir
Geagea intervient au dernier quart
d'heure du conflit syrien, à un moment
où Saad Hariri a été contraint de faire
marche arrière et de retirer sa
couverture politique aux groupes
terroristes-takfiristes qu'il a couvé
pendant trois ans à Tripoli, à Ersal et
ailleurs au Liban, à la demande expresse
des Américains.
Samir Geagea a pour principal objectif
de barrer la voie à l'élection du
général Michel Aoun à la présidence. Sa
candidature servirait à neutraliser
celle du leader du Courant patriotique
libre et à privilégier l'élection d'une
personnalité "consensuelle", dont la
principale mission serait de gérer la
situation actuelle, sans être en mesure
de proposer des solutions radicales aux
crises qui secouent le Liban.
Dans les circonstances actuelles, tous
les indices montrent que le vide à la
présidence de la République, pour une
période relativement longue, reste le
scénario le plus probable. La seule
solution est le vote d'une nouvelle loi
électorale, basée sur la
proportionnelle, qui permettrait
l'élection d'un Parlement réellement
représentatif, qui élirait à son tour un
nouveau président, capable d'incarner
les aspirations des générations futures.
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