Algérie en phase
avec le mouvement du monde
Déclin de l’occidentalo-centrisme : chaos global ou avènement
de nouvelles civilisations ?
Chems Eddine Chitour
Le Pr
Chems Eddine Chitour
Jeudi 24 août 2017
«Le but de la civilisation, c’est la
culture et le luxe. Une fois ce but
atteint, la civilisation se gâte et
décline, suivant en cela l’exemple des
êtres vivants.»
(Ibn Khaldoun)
Mon attention a été attirée par le
dernier ouvrage de Régis Debray sur
l’américanisation de l’Europe. J’ai
voulu savoir le déclin des
civilisations, seules garantes de la
pérennité de l’humanité est inéluctable.
En préambule de cette réflexion , la
Nasa nous informe que le risque de la
disparation de la civilisation terrestre
au sens large est avérée au vu de la
boulimie multiforme actuelle qui épuise
la Terre, sans compter naturellement
l’exacerbation des conflits dont le plus
prenant est le feuilleton de cet effet
avec les docteurs Folamour-Trump et Kim
Jong-Un.
Mais qu’est ce que
la civilisation ? Une civilisation est
l'ensemble des caractéristiques
spécifiques à une société, une région,
un peuple, une nation, dans tous les
domaines : sociaux, religieux, moraux,
politiques, artistiques, intellectuels,
scientifiques, techniques... Les
composantes de la civilisation sont
transmises de génération en génération
par l'éducation. Dans cette approche de
l'histoire de l'humanité, il n'est pas
porté de jugements de valeur :
civilisations sumérienne, égyptienne,
babylonienne, maya, khmer, grecque,
romaine, viking, arabe, occidentale...
Souvenons nous
donc d’un critère fondamental
l’éducation et la culture seules
garantes de la pérennité des
civilisations ne prémunit pas une
civilisation contre le déclin qui peut
paraitre brutal ou être un long
délitement comme ce sera le cas pour la
civilisation musulmane qui périclite
dans une fin de règne sans gloire sous
le coup de boutoir d’un Occident armé
religieusement par la papauté mais
aussi par l’effritement des marges
de l’empire , la corruption des pouvoirs
et le retard scientifique et
technologique qui fait qu’à titre
d’exemple l’Empire ottoman «
l’homme malade de l’Europe » commença sa
descente aux enfers agressés de toutes
part par les impérialismes britanniques
et français, joints à une gouvernance
désastreuse et un repliement religieux
qui déclara la science « kofr »
(blasphème) pour terminer son agonie en
1924 avec la mort du califat
Qu’est-ce que
l’Occident ?
Il n’est
pas aisé de donner une définition
définitive selon l’angle d’attaque
considéré. L'Occident, ou monde
occidental, est un concept géopolitique
qui s'appuie généralement sur l'idée
d'une civilisation commune, héritière de
la civilisation gréco-romaine dont est
issue la société occidentale moderne. Au
début du XXIe siècle, on admet que
l'«Occident» regroupe l'Europe
occidentale (l'Union européenne) et le
Canada, les États-Unis l'Australie, la
Nouvelle-Zélande. Soit 950 millions de
personnes ou 1,6 milliard de personnes
si l’on inclut l'Amérique latine. Pour
le philosophe et écrivain Roger Pol
Droit, «l'Occident est à peu près dans
l'ordre, une région géographique
(l'Europe de l'Ouest), une unité
historique (l'Occident chrétien du Moyen
Âge), un ensemble économique et
politique (puissances européennes,
Etats-Unis, Canada) et un monde
économique aux très vastes frontières
(tous les pays riches, même ceux
d'Asie). Il s'agit, en fait, d'une
«représentation. Entrent dans sa
composition des ingrédients de la Grèce
(philosophie, démocratie, théâtre,
exigence scientifique) et de la Rome
(génie et droit) antiques, un héritage
juif (règles morales universelles),
repris et répandu par le christianisme,
et un esprit moderne (sciences et
techniques, économie libérale) qui, sans
renier ses racines, cultive le doute et
l'esprit critique. Le développement de
la critique et de l'analyse, explique
Roger-Pol Droit, permet l'accroissement
des sciences, et inversement, le progrès
scientifique intensifie l'examen
rationnel des traditions, des croyances,
des mœurs.»(1)
Nous retiendrons au passage «l’oubli» de
la part de la civilisation musulmane
apportée à la civilisation occidentale.
Même appréciation de Paul Valery, la
civilisation européenne était un
appendice de la civilisation grecque,
nulle part de l’acculturation
intermédiaire de la civilisation
musulmane, projection de l’Europe.
En visite à
Varsovie, le 6 juillet 2017, le
président américain Donald Trump a
réaffirmé son attachement aux «valeurs»,
il appelle l'Occident à défendre ses
traditions. «L'avenir de l'Occident,
déclare-t-il, est menacé si ses nations
et ses citoyens manquent de
détermination. La défense de l'Occident
repose en dernier ressort non seulement
sur les moyens, mais aussi sur la
volonté de ses habitants de l'emporter
(…). La question fondamentale de notre
époque est celle de savoir si l'Occident
a la volonté de survivre. Nous devons
travailler ensemble pour nous opposer
aux forces, qu'elles viennent de
l'intérieur ou de l'extérieur, du Sud ou
de l'Est, qui menacent à terme de saper
ces valeurs et d'effacer les liens de la
culture, de la foi et de la tradition
qui font de nous ce que nous sommes.»
Quelles sont ses
valeurs et comment s’est bâtie la
suprématie occidentale ?
Qu’entendons nous
par valeurs ? Si l’on croit
l’Encyclopédie Libre Wikipédia :
« Les valeurs sociales font référence à
des attributs et des perceptions qu'une
personne partage avec des membres de son
groupe social ; ces valeurs sont dites parfaites et
rendent désirables ainsi
qu'estimables les êtres ou les
comportements auxquelles elles sont
attribuées. Elles peuvent orienter les
actions des individus dans
une société en
fixant des buts et
des idéaux.
Elles constituent une « morale »
qui donne aux individus les
moyens de juger leurs actes et de se
construire une éthique personnelle ».
Quelles sont les
«valeurs» de l’Occident d’essence
chrétienne ? Tout est parti, dit- on,
des grandes découvertes. Nous sommes à
la fin du XVe siècle, là, le choc
islam-chrétienté se solidifie de deux
façons : Constantinople qui tombe aux
mains de l’Empire ottoman en 1453 et
la Reconquista s’achève par la
chute de Grenade en 1492. Les grandes
découvertes vers le nouveau monde avec
son avatar : le pouvoir colonial :
l’histoire du pays colonisé est niée et
rasée au profit d’une nouvelle histoire,
une nouvelle identité, voire une
nouvelle religion. Il est courant
d’admettre que pendant que la
civilisation musulmane entame son déclin
commencé trois siècles plus tôt,
l’Occident entamait son envol.
En fait, il serait
plus indiqué de remonter dans le temps
pour s’apercevoir que l’hégémonie
occidentale a débuté après ce qu’on
appelle dans la doxa occidentale «les
grandes découvertes». Prenant la relève
d’un Orient et d’une civilisation
islamique sur le déclin, et au nom de la
règle des trois C
(christianisation-commerce-colonisation),
L’Occident qui se limitait à la
vieille Europe- pour reprendre
l’expression de Donald Rumsfeld ancien
secrétaire d’état à la défense
américain- profita de son avance
technologique pour aller à la conquête
du monde et mettre des peuples en
esclavage. Il procéda à un dépeçage des
territoires au gré de ses humeurs sans
tenir compte des équilibres
sociologiques que les sociétés
subjuguées ont mis des siècles à
sédimenter.
L’Occident s’est
affirmé après la première révolution
industrielle par la production de
l’acier qui lui permit de mettre en
place une industrie de la guerre en
construisant des canons qui lui
permirent de guerroyer avec réussite sur
tous les territoires d’ opération
surtout après le traité de Vienne où les
puissances européennes après avoir
vaincu Napoléon en l’envoyant à
Saint Hélène, décidèrent de porter leurs
forces en direction des pays faibles en
dehors de l’Europe. Mieux encore la
conférence de Berlin fut consacré au
dépeçage de l’Afrique et chaque pays
prit sa part. Le roi des Belges
s’octroya à titre personnel le
Congo. !
En fait pendant
cinq siècles, au nom de ses «droits de
l’homme», l’Occident dicte la norme,
série, punit, récompense, met au ban des
territoires qui ne rentre pas dans la
norme. Ainsi, par le fer et par le feu,
les richesses du Sud épuisés furent
spoliées par les pays du Nord. Bien plus
tard et après l’implosion de l’empire
soviétique, ce fut la fin de l’histoire,
selon le mot de Fukuyama avec une pax
americana qui paraissait durer mille
ans.
Dans le même
ordre, parmi les nombreuses
falsifications de l’histoire, le récit
de l’Empire ânonné par les vassaux qui
se persuadent et persuadent leurs
peuples européens que la victoire contre
Hitler était due principalement aux
Etats-Unis. Pourtant, les statistiques
des pertes militaires connues indiquent
53% pour l'Armée rouge, 1,4% pour
l'armée américaine. 405 000 tués
américains, presque tous militaires, 27
millions de morts soviétiques, moitié
civils, moitié militaires. Aussi, en
Europe, on trouve normal que le 70e
anniversaire du département soit fêté
avec faste, même M. Poutine y assista.
Par contre aucun vassal européen n’est
allé à Moscou pour assister au défilé
du 70e anniversaire de la victoire sur
le nazisme.
L'Occident s'est américanisé : les
larmoiements des Debray, Zemmour
Finkielkraut
Nous sommes
au début du XXIe siècle Peut-on
dire que la «mondialisation» est une
«occidentalisation» du monde» ? En
devenant communs à presque tous les pays
du monde, des objets techniques comme
l'ordinateur, l'automobile, la
télévision et le téléphone imposent une
forme d'organisation rationnelle de
l'existence quotidienne. En plus de ce
monde technique, écrit Roger Pol Droit,
l'occidentalisation entraîne aussi un
mode de vie dans lequel sont promues des
valeurs comme les libertés
individuelles, l'égalité des sexes, la
séparation du politique et du religieux
et l'esprit critique. S'agit-il de
valeurs universelles ou simplement de
valeurs occidentales, c'est-à-dire
inapplicables dans d'autres sociétés ?
Est-ce que pour
autant la civilisation américanisée peut
perdurer ? Kissinger était hanté,
dit-on, par la chute de l’Empire romain.
La naissance du Pnac ( Program
for New American Century) était
vue comme une tentative de maintenir l’american
way of life au besoin en créant un chaos
réorganisateur selon le mot de Candy
Rice ancienne secrétaire d’Etat de
Georges Bush. La sociologue française
Simone Weil s’interrogeait déjà en 1943
sur la réalité de l’aide américaine à
l’Europe !!! A contre-courant, elle
redoutait, à l’inverse, voyant beaucoup
plus loin, une «américanisation» de nos
sociétés occidentales. Et, en effet,
« nous sommes passés du diktat aryen au
diktat occidentalo-US, l’avatar vert
kaki du vert de gris ».
De fait,
l’hégémonie anglo-saxonne- car le
Royaume Uni a joué le rôle du
cheval de Troie de l’infiltration
irrésistible de l’Oncle Sam- a su jouer
très fin : Disney pour séduire nos
gamins grandissant à l’ombre de Mickey
et Donald, Elvis, le rocker blanc, ado
révolté, décoiffant la jeunesse cassant
les fauteuils de l’ordre bourgeois. Ah
l’arnaque... D’une guerre à l’autre,
d’un putsch à l’autre, rockers en tête,
les Etats-Unis ont envahi, au prétexte
de leur démocratie, quasiment la terre
entière. Ils stationnent aujourd’hui aux
portes de la Russie, du Moyen-Orient,
s’appuyant sur les fanatiques. En Syrie,
en Libye, en Corée, au Vietnam, en Irak
? Combien de dictateurs ont-ils
installés au pouvoir sur tous les
continents ? Combien de millions de
personnes ont-ils exterminées ?
Au moment où le
monde est en passe de changer de projet
civilisationnel, le médiologue Regis
Debray, dans son ouvrage sur l’américanisation
de l’Europe, se lamente, sur le
tard, -alors que le vers est dans le
fruit depuis bien longtemps ; du bonheur
perdu et du bon temps «d’avant». Faisant
l’apologie de l’ouvrage pourtant tardif
sur le naufrage pluridimensionnel de
l’Europe, Bernard Gensane explicite la
pensée de Debray . Pour lui, la
civilisation européenne, qui a dominé le
monde pendant deux ou trois siècles,
s’efface sous nos yeux, confite dans un
amer sentiment de déclin. L’Amérique,
définitivement, l’a remplacée. Plus de
Français, d’Allemands, de Polonais,
d’Européens au total. il n’y a que des
Yankees de second collège et contents de
l’être par servilité » (2)
Bernard Gensane
poursuit : «une civilisation construit
des routes avec un gros bâton (celui de
la Big Stick Policy), une flotte, des
armées, aujourd’hui des drones. Depuis
qu’il a raflé le Texas, l’empire
américain n’a gagné en surface que
quelques centaines de milliers de
kilomètres carrés. Alaska y compris.
Mais les 2 000 implantations militaires
sur les cinq continents ne seraient rien
sans les 35 000 McDo. Et vice-versa (…).
La civilisation zunienne avait gagné
chez Balzac : Au XVIe siècle, le paysan
d’Amboise, voisin de Léonard de Vinci,
ne parlait pas un mot d’italien.
Aujourd’hui, il écoute Beyoncé dans son
tracteur climatisé. C’est un véritable
catalogue des pertes que Debray recense
minutieusement Quand, demande Debray,
l’Europe a-t-elle cessé de ‘‘faire
civilisation’’ ? En 1919, au congrès de
Versailles, les Etats-Unis n’ont pas
alors pleinement conscience qu’ils vont
devenir la première puissance mondiale.
Mais le Président exige que le traité
soit également rédigé en anglais. (…)
L’Etat français, les pouvoirs publics
ont plié le cou devant les méthodes
uniennes. On nous obligea à aimer le
modèle des primaires et les candidats à
la présidentielle nous proposèrent des
offres. A Sciences-Po, «réformée» par un
chairman of the board plus ricain que
ricain 60% des cours sont dispensés en
anglais. Ne dites plus ‘‘prolétaires”
mais “milieux défavorisées” “bannissez”
(sic) “clochards”, “SDF’’ étant beaucoup
plus indolores. Ne dites plus “santé
gratuite pour tous” mais care, “avion
présidentiel” mais “Sarko One” (…).»(2)
Avec sa lucidité
coutumière, Pierre Bourdieu, sociologue
professeur au Collège de France, avait,
avec Loïc Wacquant, professeur à
l'Université de Californie à Berkeley,
pressenti bien après Simone Weil et bien
en avance des intellectuels formatés à
l’américaine comme les Young Leader,
les dangers d’une dissolution de la
langue française première étape d’une
dissolution le croyons nous pour notre
part d’une dissolution identitaire :
«Dans tous les pays avancés, patrons et
hauts fonctionnaires internationaux,
intellectuels médiatiques et
journalistes de haute volée se sont mis
de concert à parler une étrange
novlangue dont le vocabulaire,
apparemment surgi de nulle part, est
dans toutes les bouches :
“mondialisation” et ”flexibilité” ;
“gouvernance” et “employabilité” ; “underclass”
et “exclusion” ; “nouvelle économie” et
“tolérance zéro” ; “communautarisme”,
“multiculturalisme” et leurs cousins “post-modernes”,
“ethnicité”, “minorité”, “identité”,
“fragmentation”, etc. La diffusion de
cette nouvelle vulgate planétaire — dont
sont remarquablement absents
capitalisme, classe, exploitation,
domination, inégalité, autant de
vocables péremptoirement révoqués sous
prétexte d'obsolescence ou
d'impertinence présumées — est le
produit d'un impérialisme proprement
symbolique. (…) Comme les dominations de
genre ou d'ethnie, l'impérialisme
culturel est une violence symbolique qui
s'appuie sur une relation de
communication contrainte pour extorquer
la soumission et dont la particularité
consiste ici en ce qu'elle universalise
les particularismes liés à une
expérience historique singulière en les
faisant méconnaître comme tels et
reconnaître comme universels (….). En
imposant au reste du monde des
catégories de perception homologues de
ses structures sociales, les Etats-Unis
refaçonnent le monde à leur image : la
colonisation mentale qui s'opère à
travers la diffusion de ces vrais-faux
concepts ne peut conduire qu'à une sorte
de “Washington consensus” généralisé et
même spontané, comme on peut l'observer
aujourd'hui en matière d'économie, de
philanthropie ou d'enseignement de la
gestion.»(3)
En fait, même si
c'est un combat d'arrière garde, peu de
choses sont faites en France- exception
faite de la francophonie qui a des
relents de post-colonialisme et
l'Académie française qui "produit"
quelques mots par an pendant que la
vulgate planétaire en invente des
centaines- pour lutter efficacement
contre le rouleau compresseur inexorable
de l’anglais. Au lieu de se lamenter
comme les nostalgiques du bon temps, les
canadiens prennent, eux leur destin en
main et font preuve d’une
étonnante résilience. Ainsi ce pays se
caractérise par une joie de vivre et la
simplicité des gens. Il est quand même
extraordinaire de trouver des locuteurs
occidentaux de la langue française qui
ne se prennent pas pour le nombril du
monde qui ne prennent pas les gens de
haut et qui ne tentent de dicter la
norme d’une doxa dont ils seraient les
seuls détenteurs. Ce qui m’a plus aussi
c’est le maintien d’anciennes
expressions françaises qui sont
abandonnées en France.
Contrairement,
justement à certains intellectuels
et hommes de lettres qui pour certains
se contentent de se lamenter de la perte
de la spécificité française voire
européenne à l’instar d’Eric Zemmour
avec sa nostalgie et Régis Debray
avec son dernier ouvrage sur l’américanisation
de l’Europe, les Canadiens se
souviennent qu’ils ont été
traité par Louis XV lors du Traité de
Paris en 1765 : ils furent en effet
cédés à la perfide Albion non sans
avoir lutté héroïquement lors de la
fameuse bataille de Montréal. Ils sont
toujours en lutte – c’est comme cela
qu’ils comprennent la francophonie-
contre l’invasion inexorable de
l’anglais. Ainsi, on parle encore de
sous pas de centimes et même la
résilience vis à vis de la langue
anglaise - la vulgate planétaire dont
s’était plaint à juste titre
Pierre Bourdieu- est une invention
de mots adoptés et adaptés. On dit par
exemple, courriel à la place de mail
(mot subi ou consenti en France) On dit
aussi remue méninge à la place de brain
storming .. Pour toutes ces raisons le
Canada propose un art de vivre : Le
Canadian Way of Life fait d’empathie
de sérieux et de réserve
La mort de
l’Europe par le grand remplacement
islamiste ?
Cherchant les
autres causes du déclin de l’Europe en
tant que civilisation et prenant
l’exemple de la France, Bernard
Plouvier, essayiste, en propose trois.
Il s’en prend d’abord aux dirigeants
coupables de faire perdre son âme
chrétienne à l’Europe. Pour lui, c’est
Giscard qui a amené le verre dans le
fruit en permettant le regroupement
familial : «Toute société antique fut
fondée sur le racisme matrimonial
scannant l’histoire, il explique la
chute de l’Empire romain par la
citoyenneté octroyée aux indigènes de
l’empire : lorsqu’en 212, Caracalla
octroie le bénéfice de la prestigieuse
appellation et de ses privilèges, ce
n’est évidemment pas par l’effet d’une
bonté d’âme – qui lui fut toujours
étrangère —, mais pour des raisons
fiscales : 10% de la valeur des
successions de citoyens romains
revenaient automatiquement au Trésor
impérial. En 1976, par leur ignoble
décret 76-383 du 29 avril, paru au JO du
2 mai, portant sur le “regroupement
familial” des travailleurs immigrés –
une décision prise, bien sûr, sans avoir
consulté le peuple souverain, Giscard et
Chirac ont voulu relancer une
consommation intérieure défaillante pour
cause de dénatalité autochtone et de
premier choc pétrolier (…) On
introduisait dans l’Etat des individus
issus d’autres cultures que celles des
hommes qui avaient créé l’Etat… De nos
jours, plus de mille cités de non-droit
égaient la France et des rejetons de
l’immigration musulmane font parler
d’eux d’une curieuse façon… » (4) «
La seconde cause de la décadence romaine
antique (et de la nôtre) fut et demeure
une extraordinaire flambée de bien-être
: le confort de vie et la sûreté n’ont
jamais été plus grands dans l’Empire
qu’à son apogée des Ier et IIe siècles.
Trop de bien-être amollit, physiquement
et mentalement : jamais les “bobos” (qui
sont de toutes les époques) n’ont été
aussi mous et aussi naïvement
“humanitaires” que de nos jours ! La
troisième cause fut le christianisme.
Une religion d’essence féminine, qui
prêche l’agapè (l’amour du Dieu créateur
& père éminent des humains et la
pratique de la charité – soit un don
total, sans espoir de réciprocité.»(4)
Les réelles
inquiétudes de l’Empire : Un monde
multipolaire
Dans toutes
ces tempêtes dans un verre d’eau de ces
intellectuels européens inquiets du
délitement civilisationnel de
l’Occident, L’empire américain n’en a
cure des états d’âme de ses vassaux qui
gémissent de la perte de leurs
spécificités. Pour eux, le monde
européen est absorbé par la civilisation
américaine. Le peuple américain va de
l’avant parce que c’est le peuple élu
(la destinée manifeste) et pense que
c’est définitif à en croire que c’est la
fin de l’histoire. Une seule
puissance pour régir le monde.
On peut donner
crédit à cette croyance du fait
que la grande victoire des Américains
est d'avoir réduit l'homme à une simple
dimension de producteur-consommateur. En
résumé, un homo economicus addict aux
loisirs et tourné vers la satisfaction
de ses désirs les plus primaires.
L’Empire se veut le seul architecte d’un
monde unipolaire, une hyper-puissance
pour reprendre le mot d’Hubert Védrine,
ancien ministre des Affaires étrangères
de la France. L’empire s’essouffle
économiquement et s’attaque à tous ceux
qui lui tiennent tête. Le Pentagone ne
s’est jamais aussi bien porté. 700 bases
autour du monde. Ce que ne peut pas
faire comme avant le soft power, de
l’american way of life, de la patrie
d’Armstrong, le hard power de la
patrie de Bush Jr prêt à le faire avec
la démocratie aéroportée pour s’assurer
de l’accès aux réserves pétrolières et
gazières.
Il n’est que
de voir le calvaire du Vénézuela coincé
entre un pouvoir légitime mais sans
envergure, gangréné par la corruption et
subissant à la fois les changements
climatiques et une baisse
drastique de la rente pétrolière, met un
voisin qui- sous couvert d’aide à la
démocratie- est en train de mettre
en place par ses menaces , une option
d’intervention militaire qui est pour le
moment sur la table.. En fait
après avoir laminé les pays faibles et
s’être assuré des sources d’énergie,
l’Empire s’aperçoit que la concurrence
est rude avec les nouveaux pays
émergents que les Occidentaux désignent
par Brics (Brésil, Russie, Inde , Chine
Afrique du Sud) et qui prônent un
monde multipolaire et mettent en
œuvre les mécanismes de sortie de
l’accord de Bretton Woods (
monnaies nouvelles, routes de la soie,
retour à l’or)
Le casse tête
pour l'empire de la Russie
Un Empêcheur de
mater en rond les peuples faibles: La
Russie, même si ce n'est pas une
puissance économique, c'est une
puissance militaire aussi puissante que
les Etats Unis, mais qui ne possède pas
de base à l'extérieur, ni même qui
dirige un équivalent de l'OTAN- qui
devait en principe disparaître avec la
disparition du Pacte de Varsovie- En
fait le nouvel ordre mondial qui
doit régir le mouvement du monde et la
coexistence pacifique des Etats voire
des civilisation accouche dans la
douleur. Vladimir Poutine a, avec
succès, fait revenir la Russie dans le
concert des nations après le naufrage d’Elstine
qui a pris la succession d’une Union
Soviétique qui a implosé grâce aux Etats
Unis, même dit on au Pape Jean Paul II
avec son fameux « N’ayez pas
peur ! » qui a donné des ailes à Solidarnosc en
Pologne premier domino de l’effritement
, mais aussi grâce à Mikhaïl Gorbatchev
avec sa perestroïka qui détricota
l’empire soviétique.
Sans revenir au
faste de la grande Catherine, Poutine a
redonné de la dignité aux Russes. Il a
pu imposer uen vision du monde notamment
en se mettant du côté du droit
international en Syrie. Vladimir Poutine
résiste aux sanctions- représailles
et à l’embargo de l’Empire et de ses
vassaux coupable de ne pas être rentré
dans le rang en permettant une base de
l’Otan à sa frontière (Révolution orange
de l’Ukraine téléguidée à partir des
Etats Unis) et surtout d’avoir
récupéré la Crimée.
La tentation
d’empire a un certain degré est
même décelable en Russie mais rien à
voir avec l'hubris américain . Nous
lisons cette contribution de Vladimir
Gromov : « L’ère de la domination
occidentale dans les relations
internationales cède la place à un
nouvel ordre polycentrique, et c’est le
Président russe Poutine qui influence
largement le changement de
l’organisation. Le poids de l’influence
des centres politiques US et européens
faiblit considérablement et la formation
de nouvelles forces et normes politiques
prend rapidement de l’ampleur. L’agenda
international aujourd’hui se forme
souvent avec la participation directe de
la Fédération de Russie et de Vladimir
Poutine en personne. La montée de
l’influence de pays tels que la Chine,
le Brésil, l’Inde et l’Afrique du Sud,
serait impossible sans l’action de la
Russie. La confrontation diplomatique
actuelle entre la Fédération de Russie
et les USA n’a pas encore atteint le
point critique, mais la position de
Vladimir Poutine à ce sujet devient
toujours plus inflexible ; il est sûr
que la Russie répondra aux USA en
conformité avec une stratégie bien
adaptée et pragmatique, qui insiste sur
la formation d’un nouvel ordre mondial.
(…) Le génie de Poutine réside dans sa
capacité à s’emparer du leadership des
politiciens occidentaux et à faire en
sorte que les élites économiques russes
travaillent dans l’intérêt de la
Russie ». (5)
La détestation
et la crainte de la Chine, civilisation
atemporelle
Parmi les autres
pays qui « posent problème économique »
aux Etats Unis : La Chine. Beaucoup
d’analystes occidentaux fondent l’espoir
que la civilisation chinoise
s’effondrera Tout est fait pour
diaboliser la Chine, accusée de touts
les maux notamment le dumping. «China
Bashing», est le terme utilisé par
le Washington Post. Même Nouriel
Roubini, directeur général de l’AIE,
avait prévu qu’une grave dépression
économique devrait affecter ce pays en
2013. Nous sommes en 2017 et la Chine
est plus rayonnante que jamais.
Avec des taux de
croissance respectables de 6 à 7 %
( à une époque ce taux frisait les 10 %)
La Chine, rattrape son retard dans tous
les domaines, c’est l’atelier du monde,
la ferme du monde, et le leader
incontesté dans les énergies
renouvelables . De ce fait, on est en
droit de se demander comment la
civilisation chinoise a traversé le
temps, les époques troubles, des régimes
différents mais en gardant ses
fondamentaux. En effet, depuis 5 000
ans, la Chine imprègne toute la culture
de l'Asie de l'Est, aussi bien au niveau
religieux que linguistique.
Pour le sinologue
Cyrille Javary, interviewé par Atlantico.fr :
«Le premier élément de cette
particularité est que de toutes les
civilisations nées sur le continent
eurasien, la civilisation chinoise est
la seule qui a toujours habité le même
territoire. (…) Ensuite, la culture
chinoise a créé un système d’écriture
unique au monde qui fonctionne autour de
la représentation d’idées ou de
situations et non pas de sonorités comme
dans tous les autres systèmes graphiques
du continent eurasien. Cela sert de base
à une pérennité unique dont l’exemple le
plus frappant est que les Chinois n’ont
pas changé de système politique depuis 3
000 ans (…). Ce système de méritocratie
qui avait ébloui Voltaire permettait à
n’importe quel Chinois de s’y présenter
autant de fois qu’il le souhaitait. Ce
système permettait aux lettrés de
disposer en permanence des meilleurs
cerveaux du pays à la différence du
système féodal français (…). Pour les
Chinois, la durée est signe
d’efficacité.» (…) Les habitants
de ces provinces n’ont pas les mêmes
traditions, la même cuisine, la même
histoire ou encore la même langue mais
ce qui les unit, c’est qu’ils ont la
même écriture. C’est ce qui cimente le
pays dans l’espace et dans le temps (…).
Le rapport entre le visible et
l’invisible constitue également l’un des
piliers de la longévité chinoise. Les
autres cultures eurasiennes rejettent le
rapport à l’invisible, soit du côté de
l’irrationnel, soit du côté du
religieux.»(6)
L’obsession de
semer le chaos Le refus du déclin
L’Empire américain dispose de 700 bases
à l’extérieur des Etats Unis, il dispose
d’un budget militaire de 650 milliards
de dollars, équivalent à celui de tous
les autres pays. Rien ne semble arrêter
l’Etat profond américain qui dirige le
monde mais on peut qu’il fera tout pour
la destruction de tout ceux qui lui
résistent culturellement, cultuellement,
militairement. Ce sera une
macdonalisation du monde qui fera la
gloire d’un n »o-libéralisme sans état
d’âme. Pourtant, Les pays
occidentaux reculent dans plusieurs
domaines notamment économiques et sont
endettés. A titre d’exemple, la dette
américaine est de l’ordre de 10.000
milliards de dollars ! Celle de la
France est de 2000 milliards de dollars
soit 95% du PIB ! De plus les
ressources planétaires commencent à
manquer et des stratégies
d’accaparement se font sentir. Nous
vivons assurément une période très
dangereuse : le désordre est total. Les
peuples faibles, surtout ceux qui ont le
malheur de disposer encore de ressources
énergétiques ou minières, seront les
premiers touchés. Assurément,
l’Afrique après le Moyen-Orient, dont
toutes les frontières ne sont plus
intangibles comme le proclamait la
Charte des Nations unies à San Francisco
au sortir de la Seconde Guerre mondiale,
est le champ de bataille. Même la France
avec sa Françafrique est en train de
recoloniser ses anciennes colonies. :
« Le chaos actuel, les morts n’empêchent
pas le commerce des armes d’être
florissant, il n’empêche pas aussi le
pompage des ressources pétrolières et
gazières et même de toutes les
ressources minières. Boko Haram ou
pas…(7)
Pour la situation
de chaos actuel, Pepe Escobar nous
explique pourquoi l’Empire est contre
toutes les coalitions si ce n’est pas
lui qui les dirige : «‘‘La
politique’’ de l’Empire du chaos,
écrit-il, est claire et multiforme :
diversifier le ‘‘pivot vers l’Asie’’ en
établissant une tête de pont en Ukraine
afin de saboter les échanges commerciaux
entre l’Europe et la Russie ; étendre
l’organisation du traité de l’Atlantique
Nord à l’Ukraine ; briser le partenariat
stratégique entre la Russie et la Chine
; empêcher par tous les moyens
l’intégration commerciale et économique
de l’Eurasie, du partenariat
germano-russe aux nouvelles routes de la
soie convergeant de la Chine à la région
de la Ruhr ; et maintenir l’Europe sous
l’hégémonie des États-Unis. (…) M.
Wallerstein soutient que si l’Empire du
chaos est devenu si dangereux, c’est
parce qu’il n’accepte tout simplement
pas sa décadence géopolitique. La
restauration de son hégémonie mondiale
est devenue son obsession suprême,
unique obsession, c’est de forcer les
Européens à sanctionner la Russie à
mort. En d’autres termes, stopper
l’intégration commerciale et
géopolitique entre l’Europe et la Russie
(…)»(8)
Assiste-t-on à
la chute inexorable de la civilisation
occidentale ?
Les civilisations,
dit-on, sont mortelles. Bien avant
Spengler, le père de la sociologie Ibn
Khaldoun, dans son œuvre magistrale La
Muqqadima, avait pointé du doigt
l’évolution des civilisations qui
passent par trois stades, l’avènement,
l’apogée et le déclin. Ce qui a dû se
passer pour l’Empire perse, l’Empire
romain et plus tard l’Empire ottoman.
Une étude du Pnac (Programme for New
American Century) recommandait de
chercher un motif pour relancer
l’hégémonie américaine d’une façon
définitive. L’arrivée du 11 Septembre
fut du pain bénit. Le Satan de rechange
tombait du ciel, l’Islam. Ainsi, furent
organisées les expéditions punitives que
l’on sait un peu partout, semant le
chaos, la destruction et la mort,
estimant que les Etats-Unis devront
s’allier avec l’Europe pour dominer
l’Eurasie.
Les signes d’un
craquement de l’hégémonie occidentale
commencèrent à poindre à l’horizon. Des
voix inquiètes commençaient à douter de
la pérennité du magister occidental.
Pourtant et malgré cela, «l’Empire» ne
se laisse pas faire. La transition de
l’humanité vers un «empire global», un
ordre mondial polarisé autour d’une
seule puissance : les Etats-Unis.
Beaucoup d’études ont été faites sur
les causes du déclin des civilisations «Le
Déclin de l’Occident est un essai
d’Oswald Spengler. Il y développe une
synthèse historique qui rassemble tout à
la fois, l’économie politique et la
politique, les sciences et les
mathématiques, les arts plastiques et la
musique. Il fut traduit en français par
son ami le philosophe algérien Mohand
Tazerout en 1948. Cette œuvre analyse
l’histoire en distinguant des grandes
cultures historiques qui, semblables à
des êtres biologiques, naissent,
croissent, déclinent et meurent. Il
développe une vision cyclique ou
“sphérique” de l’Histoire. Chaque
culture est déterminée par son héritage,
ses valeurs et son sentiment du
destin.»(9)
Pendant longtemps
et pratiquement depuis la fin de la
seconde guerre mondiale, il était de bon
ton pour les Européens de s’arrimer à l’alma
mater du monde libre : les Etats-
Unis d’Amérique. Cependant, des
craquements se font entendre et des
états d’âme «européens» se font entendre
quant à la perte de l’identité de
l’Europe composée de vassaux qui se
découvrent sur le tard une spécificité.
L’analyse lumineuse de l’ambassadeur
singapourien Kishore Mahbubani décrit le
déclin occidental : recul démographique,
récession économique, et perte de ses
propres valeurs. Il observe les signes
d’un basculement du centre du monde de
l’Occident vers l’Orient. (Citant
l’ouvrage de l’historien britannique
Victor Kiernan. «La plupart du temps,
cependant, les colonialistes étaient des
gens médiocres mais en raison de leur
position et, surtout, de leur couleur de
peau, ils étaient en mesure de se
comporter comme les maîtres de la
création. Même si la politique coloniale
européenne touchait à sa fin, l’attitude
colonialiste des Européens subsisterait
probablement encore longtemps.»(9)
«En fait, poursuit
Kishore Mahbubani, celle-ci reste très
vive en ce début de XXIe siècle.
Souvent, on est étonné et outré lors de
rencontres internationales, quand un
représentant européen entonne, plein de
superbe, à peu près le refrain suivant :
“Ce que les Chinois [ou les Indiens, les
Indonésiens ou qui que ce soit] doivent
comprendre est que…”, Mahbubani reproche
à l’Europe sa myopie, son
autosatisfaction et son égocentrisme.
Pour lui, “le moment est venu de
restructurer l’ordre mondial”, que “nous
devrions le faire maintenant”».
L’Occident est dans l’incapacité à
maintenir, à respecter et encore plus à
renforcer les institutions qu’il a
créées. Et l’amoralité avec laquelle il
se comporte sape davantage les
structures et l’esprit de la gouvernance
mondiale.
Comment
l’Algérie appréhende-t-elle le
monde ?
Nous venons de
tracer à grands traits les convulsions
du monde, nous ne pouvons pas conclure
sans décrire ce qui nous arrive et, pire
encore, où nous allons ? Il est connu
qu’une civilisation est avant tout une
élévation culturelle de la société qui
fait des habitants d’un pays des
citoyens responsables où la civilité
n’est pas un vain mot. Sans remonter
loin dans l’Histoire en passant par le
déclin des royaumes maghrébins qui ont
tous disparu les un après les autres,
absorbés par des peuples plus forts et
plus organisés comme l’Espagne et
l’Empire ottoman, qu’il nous suffise de
remarquer et sans verser dans une
nostalgie déplacée que nous avons perdu
en cohérence d’ensemble.
Sous les coups de
boutoir de la modernité, le peu de
cohérence pour le vivre- ensemble que
nous avions à l’indépendance a été
laminé en cinquante ans d’errance. La
gestion de la cité, le fonctionnement
étatique que nous avions hérité, a volé
en éclats du fait de sa substitution par
des règles de gouvernance approximatives
et à géométrie variable qui font que les
citoyens ne sont pas protégés. Nous
sommes aussi par mimétisme ravageur en
décadence sans avoir rien produit, sinon
copier outrageusement les travers d’un
Occident ravageur du sens qui nous lisse
dans le sens du dépenser sans penser. La
décadence en Algérie, ce sont les
dépenses inutiles. C’est la corruption
devenue sport national, C’est le passe
droit, l’incurie à tous les étage. C’est
un renversement des valeurs qui
font que des joueurs payés à prix d’or
gagent en une saison ce que gagne un
professeur d’université en une
carrière ! . La décadence, ce sont les
fabuleux profits mal acquis pendant que
les besogneux sont en apnée.
De ce fait,
l’Algérie vit en marge du monde. Son
problème est celui de survivre, pas de
projection sur l’ avenir sur la
nécessité de rentrer dans le monde. Nous
reculons dans tous les domaines, et plus
personne ne s’intéresse à l’Algérie
comme partenaire ; l’Europe a besoin de
l’Algérie comme bassin de rétention de
l’émigration et accessoirement de son
approvisionnement marginal en gaz, une
rente immanente qui n’est pas le fruit
de l’effort. Elle pompe ce qui a de
rentable, les rares diplômés dans les
disciplines technologiques et offre la
nationalité à plus de 500 000 Algériens
dont on peut à coup sûr que ce sont des
personnes instruites, surtout de niveau
universitaire. En Algérie, la civilité a
disparu et la science qui va avec un
lycée qui affiche 0% de reçu au bac ne
fait pas l’objet d’un débat au
gouvernement.
Conclusion : la civilisation a besoin
de «spiritualité»
On dit que «La
plus grande caractéristique de la
civilisation orientale est de connaître
le contentement, alors que celle de
l’Occident est de ne pas le connaître.»
Cette maxime de Hu Shih résume, à elle
seule, «la boulimie sans retenue de la
civilisation du toujours plus» qui
amènera la planète au chaos. Ce n’est
pas simplement l’Occident qui va
décliner, ce sont tous les peuples qui
vont le suivre dans une descente aux
abîmes. Assurément, la planète est en
pleine tourmente, la recomposition du
monde fera disparaître des Etats dans un
nouveau Yalta.
Peut-on dire
qu’une civilisation meure quand elle a
épuisé ses récits de légitimité à la
fois temporelle et atemporelle ? C’est
en tout cas l’avis de Jean-François
Léotard qui parle du déclin des grands
récits de légitimité comme le
socialisme, le communisme, l’hitlérisme,
le fascisme, le récit religieux. mais
aussi le libéralisme sauvage. Ce dernier
serait responsable indirectement de
l’anomie du monde et du déclin de
l'Occident. A l'heure du chacun
pour soi, le sentiment d'appartenance à
un projet qui transcende les
individualités s'est évaporé. Marcel
Gauchet parle de désenchantement du
monde. Dans cette vue désolée d'une
incommensurabilité des humains entre
eux, que reste-t-il ? L'espace commun se
délite, les religions n'ont plus rien à
se dire.
Les sociétés n'ont
plus de ‘‘Grands Récits’’. Ainsi le rêve
américain qui a été inculqué à coups de
récits sur la Destinée Manifeste, l’americain
way of life ne fait plus recette
même aux Etats-Unis. La post-modernité
se traduit par l’adage de la guerre
contre tous l’agressivité, le
libéralisme triomphant fait peser sur
l'être-soi et sur l'être-ensemble une
lourde menace. Il y a une fascination
pour l'ultraviolence : séries TV
américaines avec scènes violentes
(tortures, viols, serial-killers)
Sans vouloir jouer
les pythies, il est admis que le monde
dans sa version actuelle irait à sa
perte La solution serait dans un
ressourcement et un vivre-ensemble lié à
une transcendance. La vie des hommes,
lit-on, dans la contribution suivante,
s'organise grâce à la civilisation. La
civilisation actuelle répond-elle aux
besoins de l'homme ? «Toute civilisation
est inspirée par Dieu. Mais la
civilisation actuelle ne respecte plus
l'homme, trop de gens souffrent et sont
menacés. Une nouvelle civilisation,
meilleure pour l'homme, doit émerger de
la prise de conscience de chacun. Une
civilisation organise la société
humaine. La première grande civilisation
sur Terre fut celle des Égyptiens. Cette
civilisation était intimement liée au
divin. (…) Cette inspiration divine
permit à la civilisation égyptienne de
rayonner et dominer pendant trois mille
ans. (…) L'humanité a besoin d'une
nouvelle civilisation respectueuse de
l'homme et des lois de Dieu. Ce projet
de société doit réunir tous les hommes
en un même peuple pour que la vie
continue harmonieusement sur Terre. (…)
L'environnement naturel est pillé,
pollué ou dévasté, à cause de la
négligence ou de la cupidité des hommes.
Alors que la préservation de cet
environnement est la condition de notre
survie future. Chacun de nous a une part
de responsabilité. Chacun de nous doit
ouvrir les yeux sur la situation du
monde, choisir de changer son attitude
et exiger la moralité de ses
dirigeants.»(10)
L’Occident
s’arroge le droit de construire
l’universel tout seul. Le philosophe
Abdennour Bedar prône pour sa part, un
universel commun Il cite le
philosophe Paul Ricœur, le philosophe
Ibn El Arabi parlait de l’égalité des
religions et des cultures. Il ajoute
qu’il ne croit pas que les civilisations
soient autosuffisantes, mais se
complètent. Il parle de confluence des
religions. Abdennour Bedar, lui, parle
de convivialité des religions pour un
apaisement de la condition humaine qui
doit s’inventer une nouvelle manière de
vivre.
Enfin, pour Claude
Levi-Strauss : «(…) il n’y a pas, il ne
peut y avoir, une civilisation mondiale
au sens absolu que l’on donne souvent à
ce terme, puisque la civilisation
implique la coexistence de cultures
offrant elles le maximum de diversité et
consiste même en cette coexistence. La
civilisation mondiale ne saurait être
autre chose que la coalition, à
l’échelle mondiale, de cultures
préservant chacune son originalité.»
Tout est dit .
« Puissent tous les
hommes se souvenir qu’ils sont frères !
Qu’ils aient en horreur la tyrannie
exercée sur les âmes, comme ils ont en
exécration le brigandage qui ravit par
la force le fruit du travail et de
l’industrie paisible ! Si les fléaux de
la guerre sont inévitables, ne nous
haïssons pas, ne nous déchirons pas les
uns les autres dans le sein de la paix,
et employons l’instant de notre
existence à bénir également en mille
langages divers, depuis Siam jusqu'à la
Californie, ta bonté qui nous a donné
cet instant. disait Voltaire dans
son traité sur la tolérance. Si nous
voulons perdurer en tant que
civilisation terrestre, il est de
la plus haute importance de prôner une
parole désarmée. Nous devons accepter un
monde multipolaire où chaque peuple aura
droit à s’épanouir. Amen !
1.http://www.ledevoir.com/culture/livres/196521/qu-est-ce-que-l-occident
2. Bernard Gensane
https://www.legrandsoir.info/regis-debray-civilisation-comment-nous-sommes-devenus-americains.html
3. P. Bourdieu, L. Wacquant.
http://www.monde-diplomatique.fr/2000/05/BOURDIEU/2269
4.
https://metamag.fr/2017/08/07/la-mort-dune-grande-civilisation-chute-de-lempire-romain-et-declin-de-leurope/
5. Vladimir Gromov www.pravdareport.com/russia/politics/21-08-2017/138469-russia_putin-0/ Traduction Petrus
Lombard
6.http://www.atlantico.fr/decryptage/chine-1ere-puissance-mondiale-2016-5000-ans-civilisation-quels-sont-secrets-longevite-cyrille-javary-541522.html
7.
http://www.mondialisation.ca/la-doxa-occidentale-un-magister-moral-en-miette/5394216
8 C.E. Chitour
http://www.mondialisation.ca/declin-ou-chute-de-loccident-pourquoi/5313390
9. K.ishore Mahbubani:
The Irresistible Shift of Global Power
to the East, septembre 2008
10. http://www.opc-connaissance.com/mieux_vivre/nouvelle_civilisation_pour_humanite
.html
Article de
réference : http://www.lesoirdalgerie.com/pdf/2017/08/21082017.pdf
Professeur émérite
Chems Eddine Chitour
Ecole Polytechnique
Alger
Publié le 27 août 2017 avec l'aimable
autorisation de l'auteur
Le sommaire du Pr Chems Eddine Chitour
Le dossier
Monde
Les dernières mises à jour
|