Algérie en phase
avec le mouvement du monde
Les mathématiques en deuil :
Maryam Mirzakhani est morte
Chems Eddine Chitour
Le Pr
Chems Eddine Chitour
Lundi 17 juillet 2017
«C'est un grand
honneur et je serai heureuse si cela
encourage de jeunes femmes scientifiques
et mathématiciennes. Je suis convaincue
que de nombreuses autres femmes
recevront ce type de récompense dans les
prochaines années.»
Maryam
Mirzakhani à l’annonce de la médaille
Fields (site de Stanford)
«Une triste nouvelle pour la plus élégante des sciences : les
mathématiques. Maryam Mirzakhani est
morte. Elle avait 40 ans et la vie
devant elle. Le destin en a décidé
autrement. Une lumière s'est éteinte
aujourd’hui. Cela me brise le cœur...,
partie bien trop tôt», a écrit Firouz
Michael Naderi, scientifique
américano-iranien et ancien de la Nasa,
sur Twitter et Instagram au petit matin
samedi. «Un génie ? Oui, mais aussi une
fille, une mère et une épouse.» «En 1994, écrit
Najafi, conseiller du président Rohani,
alors que j'étais responsable du
ministère de l'Éducation, à notre grande
surprise, Maryam a battu nos attentes,
en remportant une médaille d'or à
l'Olympiade internationale de
mathématiques en tant que première
étudiante iranienne à le faire.
Mirzakhani est un bijou pour toutes les
femmes iraniennes et pour toutes les
femmes du monde entier. Elle est un
modèle pour être humble et humain ainsi
que ses capacités intellectuelles et
académiques.» «Mais ce qui m'a
impressionné encore plus que son génie,
ce sont ses vertus qui l'ont fait un
être humain complet. Au cours des
années, elle a voyagé plusieurs fois en
Iran pour partager ses résultats de
recherche avec des mathématiciens
iraniens, elle aime son pays, perdre
cher Maryam à un si jeune âge apportera
un immense chagrin au monde des
mathématiques et à la communauté
scientifique iranienne, car elle peut
encore contribuer de manière inestimable
à la reconnaissance et à la
compréhension des sciences
mathématiques.»(1)
Qui est Maryam
Mirzakhani ?
Elle fut élève du
lycée Farzanegan de Téhéran, un lycée
pour jeunes filles surdouées dépendant
du Sampad, l'Organisation pour le
développement des talents exceptionnels.
Elle est lauréate des Olympiades
internationales de mathématiques en 1994
à Hong Kong et de celles de 1995 à
Toronto, où elle établit un score
parfait. Mirzakhani obtient un BSC en
mathématiques en 1999 de l'université de
technologie de Sharif à Téhéran, et un
doctorat de mathématiques de Harvard en
2004, sous la direction du lauréat de la
médaille Fields, Curtis McMullen. En
septembre 2008, elle est nommée, à l'âge
de 31 ans, professeur de mathématiques à
Stanford après avoir été maître de
conférences à l'université de Princeton.
Voici l'introduction et la conclusion
d'un document de l'Union mathématique
internationale consacré à la
mathématicienne à l'occasion de la
remise de la médaille Fields(2) :
«Maryam Mirzakhani
a apporté des contributions frappantes
et très originales à la géométrie et à
l'étude des systèmes dynamiques. Son
travail sur les surfaces de Riemann et
sur les espaces de modules met en
relation plusieurs disciplines
mathématiques — la géométrie
hyperbolique, l'analyse complexe, la
topologie et la dynamique — et les
influence à son tour. À cause de sa
complexité et de son inhomogénéité,
l'espace des modules a souvent semblé ne
pas être propice à une étude directe.
Mais pas aux yeux de Mirzakhani. Elle
est dotée d'une forte intuition
géométrique qui lui permet d'appréhender
directement la géométrie de l'espace de
modules. Familière avec une remarquable
diversité de techniques mathématiques et
de cultures mathématiques, elle incarne
un équilibre rare entre des performances
techniques superbes, une audacieuse
ambition, une vision qui porte loin et
une curiosité profonde. Mirzakhani est
destinée à rester à la pointe de cette
exploration qui continue.»
«Enfant, Maryam
Mirzakhani rêvait d'être écrivain mais
la fièvre des chiffres et des équations
la prend au collège, pour ne plus la
quitter. Ses récompenses furent
nombreuses. Notamment le prix Blumenthal
2009 pour l'avancement de la recherche
en mathématiques pures et le prix Satter
2013 de l’American Mathematical Society.
Maryam Mirzakhani était devenue, en
2014, la première femme lauréate de la
plus prestigieuse récompense en
mathématiques.»
Les olympiades de mathématiques:
creuset de l'élite
Les premières
Olympiades internationales de
mathématiques se sont déroulées en 1959
en Roumanie. Depuis, elles ont eu lieu
tous les ans, sauf en 1980, en raison de
dissensions internes. Actuellement,
plus de 100 pays des cinq continents y
participent, les élèves doivent avoir
moins de 20 ans et ne pas avoir commencé
leurs études supérieures, mais aucune
limite n'est imposée quant au nombre de
participations. L'épreuve consiste à
résoudre sur deux jours, en deux séances
de 4 heures et demie, deux séries de
trois problèmes issus de la géométrie
plane, de l'arithmétique, des inégalités
ou de la combinatoire. Leur résolution
fait appel plus au raisonnement qu'à des
connaissances sophistiquées : les
solutions sont souvent courtes et
élégantes.
Après avoir boudé
pendant une dizaine d’années ces
olympiades du fait de résultats
catastrophiques, l’Algérie a renoué
depuis quelques années avec les
concours. Ainsi elle participe aux
Olympiades internationales de
mathématiques qui se déroulent cette
année à Rio de Janeiro (Brésil), du 12
au 23 juillet, et est représentée à
cette prestigieuse compétition
intellectuelle et didactique par un
groupe des meilleurs élèves, composé de
six lycéens, dont une fille.
On se souvient que
le Premier ministre algérien Abdelmalek
Sellal avait honoré à Alger les
meilleurs élèves algériens ayant
participé à l'Olympiade internationale
de mathématiques qui s'est déroulée en
Thaïlande du 8 au 16 juillet 2015. Les
élèves algériens ont occupé des places
honorables à ce concours international
auquel ont pris part 104 pays. L'Algérie
a été classée pour la première fois à la
62e place à l'échelle mondiale grâce à
la performance des élèves Hamdi Yacine
(médaille d'argent) et Saadi Fayçal
(médaille de bronze). Ilyès Hamdi et
Souheïb Abdeldjalil Alout ont obtenu des
mentions honorables à cette
manifestation qui a propulsé l'Algérie à
la tête du classement au niveau
maghrébin, à la deuxième place sur le
continent africain et à la troisième
place au niveau arabe.
Et en Algérie : Le triste sort des
mathématiques et de la rationalité?
L’année de
la médaille Fields de Maryam Mirzakhani
avait correspondu en Algérie à un
événement attristant, celui d’un
mimétisme ravageur d’un Occident qui met
en œuvre une macdonalisation des
cultures. Il fallait singer l’Occident
non pas dans ses prouesses
technologiques mais dans ce qu’il a de
plus débilisant. Ainsi dans une de mes
contributions, j’avais étalé mon
désespoir suite à l’élection de Miss
Algérie 2014 au moment ou Maryam
Mirzakhani recevait la médaille Fields,
l’équivalent du prix Nobel de
mathématiques : «(…) Dans l'Algérie de
2014, plus que jamais, le peuple est
‘’accompagné’’ dans ce qu'il y a de plus
stérile en termes d'intelligence, de
créativité. Ainsi, rituellement, comme
au temps de l'Empire romain décadent, on
distrait la plèbe, la canaille, les
‘’sans-dents’’, dirait le président
Hollande, avec du pain et des jeux de
cirque : ‘‘Panem et circenses’’ (3).
On flatte toutes
les pulsions débilisantes avec les
émissions de type ‘‘Star'ac’’, encore un
autre mimétisme, avec des chanteurs
payés à prix d'or, sans compter
naturellement l'opium du peuple qui nous
coûte les yeux de la tête, le football
et le marécage de sa gestion avec, en
prime, un comportement de hooligans dans
les stades. La faute ne vient pas des
organisateurs lampistes lambda qui n’ont
fait que mettre en musique une ‘‘demande
sociale’’. Elle vient plus globalement
de l’errance, de l'état d'esprit qui
fait le manque de cap culturel, le
désarmement moral, le laisser-aller sans
stratégie d'ensemble qui font fait que
chacun se croit autorisé à faire ce que
bon lui semble, à être dans l'air du
temps, à singer ce que l’Occident a de
plus pervers, alors que le pays risque
de s'effriter identitairement et est en
passe de rater le train du progrès.»(3)
Avec une lucidité
remarquable l’universitaire Aissa
Hirèche fait avec humour, mais aussi
avec une rage contenue, le procès de
cette déchéance et de ce désarmement
culturel : «A force de regarder les
concours des miss ailleurs, les nôtres
ont d'abord cru que c'est une obligation
que d'en avoir chez nous. On fait appel
à quelqu'un de célèbre et on lui donne
l'image du pays entre les mains. On l'a
déjà fait avec Maradona, vous
souvenez-vous ? C'était pour lancer la
3G. Ah ! la fameuse 3G. Or, qui pourrait
rehausser le concours national de Miss
Algérie 2014, ce concours sans lequel
nos universités resteraient les
dernières au monde et nos hôpitaux
continueront à être des mouroirs ? (...)
( Nous sommes classés derniers partout,
dans tous les domaines et, au lieu
d'organiser des concours du meilleur
innovateur, de la meilleure entreprise,
et toutes ces choses qui font motiver
les gens au travail, tout heureux, nous
organisons des concours de miss que nous
veillons bien, ensuite, à gâcher.» (4)
De ce fait,
pendant que les Algériens s'occupent à
se divertir en empruntant la pente
dangereuse de la facilité — pour se
changer les idées —, le monde avance.
Les Algériennes et les Algériens
seraient bien inspirés de suivre des
personnes admirables qui sont des
exemples à suivre. Justement, une
information passée inaperçue, celle de
l'octroi de la médaille Fields,
l’équivalent du prix Nobel de
mathématiques, en août 2014, pour la
première fois, à une femme, une
musulmane de 37 ans ! Maryam Mirzakhani.
Coup double ! L’Iran n’est pas synonyme
de goulag, comme le martèle l’Occident !
En Iran : un
système éducatif élitiste et républicain
On ne s’arrêtera
pas de le dire, il n’y a que le savoir
qui doit passer ! Maryam Mirzakhani fut
élève au lycée Farzanegan de Téhéran,
qui dépend de l'Organisation pour le
développement des talents brillants,
dont le but est de repérer les élèves
surdoués ou en tout cas les meilleurs, à
travers des concours nationaux, au
collège et au lycée. Les lauréats font
alors leurs études dans des
établissements spécifiques avec un
programme beaucoup plus poussé que dans
la filière classique. «(...)
Contrairement aux idées reçues, en Iran,
les femmes sont bien plus présentes que
les hommes à l'université. (...) Par
ailleurs, en Iran, l'enseignement
secondaire a été libéralisé à outrance,
les établissements publics ont
aujourd'hui un niveau très médiocre
comparé à ceux du secteur privé qui
coûtent très cher. Et la concurrence est
rude entre les écoles privées qui
vantent leur nombre d'admis aux concours
d'entrée aux universités, un concours
ultrasélectif. Pour étudier à
l'université Sharif de Téhéran, il faut
ainsi finir parmi les cent premiers sur
environ un million de participants. Le
système éducatif iranien est donc devenu
au fil du temps ultraélitiste, basé sur
une compétition incessante, organisée
depuis le collège et jusqu'à
l'université. Selon le quotidien
Shargh, 76% des Iraniens médaillés dans
les olympiades internationales en
mathématiques, entre 1993 et 2013, se
trouvent actuellement dans les plus
grandes universités américaines (...)
Après avoir passé les premières années
universitaires à Sharif, elle choisit de
partir pour obtenir un doctorat à
Harvard, avant de traverser les
Etats-Unis pour enseigner à Stanford, en
Californie.»(5)
Il a fallu donc
attendre 78 ans avant que la médaille
Fields ne soit décernée à une femme.
L'annonce a été faite lors du Congrès
international des mathématiques qui
s'est tenu à Séoul, en Corée du Sud. Le
président iranien, Hassan Rohani, a
posté un tweet félicitant Maryam
Mirzakhani, lauréate de la médaille
Fields de mathématiques. «Félicitations
à celle qui devient la première femme à
remporter la médaille Fields et rend les
Iraniens très fiers», écrit le dirigeant
de la République islamique sur son fil
Twitter.
Les femmes dans la société iranienne
Loin des
clichés occidentaux qui présentent
l’Iran sous un jour couleur de soufre,
la réalité est tout autre ! Certes comme
tout pays réellement en développement,
il y a des problèmes mais il y a des
invariants qui font que ce pays
avance grâce à la science grâce àses
élites, notamment féminines Une
contribution intéressante nous permet de
situer la place de la femme iranienne
dans la société. On remarque que cette
place est de loin plus enviable que dans
les autres sociétés musulmanes, en tout
cas dans la dimension éducation et
conditions de travail. : «Derrière
chaque grand homme se trouve une femme
plus grande, comme le dit le célèbre
dicton. Si je peux ajouter humblement,
derrière chaque grande nation se trouve
une grande montagne d'hommes et de
femmes innovantes, résilientes et la
porte-parole de Mahan Business School,
Mme Ayda Mir-Elmasi, déclare que, dans
le domaine éducatif, plus de la moitié
du personnel sont des femmes.
L'un des
engagements les plus importants de la
Révolution islamique était de fournir
une éducation universelle aux Iraniens,
indépendamment du genre et de la classe
sociale. Aujourd’hui plus de 60% des
universitaires sont des femmes. Selon la
Banque mondiale, les femmes iraniennes
se répartissent uniformément dans les
secteurs économiques de l'éducation, de
l'agriculture, de l'administration et
des finances.»(5)
Les femmes
iraniennes ont occupé des postes
influents dans diverses disciplines,
allant des arts aux sciences humaines et
des sciences, et ont reçu des éloges et
des reconnaissements à l'échelle
nationale et internationale. Dans les
arts, Mme Rakhshan Bani-E'temad est une
célèbre réalisatrice et scénariste
iranienne internationalement connue.
Elle est souvent décrite comme la
«Première Dame du cinéma iranien», après
avoir reçu le meilleur prix du scénario
au 71e Festival international du film de
Venise. De plus, en sciences, tout
en rompant les frontières liées au
genre, la première femme musulmane et le
premier Iranien à se rendre à la station
spatiale internationale était Mme
Anousheh Ansari en 2006. De même,
Mme Maryam Mirzakhani a fait de
l'histoire en 2014 en tant que première
femme et la première Iranienne à être
honorée du prix le plus prestigieux en
mathématiques, la médaille Fields. Elle
est actuellement professeur de
mathématiques à l'Université de
Stanford.(6)
Est-ce étonnant
de la part des héritiers de l’empire
perse de Darius ?
Du point de
vue contribution au patrimoine de
l´humanité, on doit aux Perses la
diffusion de l’alphabet et l’écriture,
la Route de la soie, les contes des
Mille et Une Nuits. Pour l'histoire, la
Perse (Iran actuel) était le berceau
d’une civilisation aboutie . Elle
a toujours eu une grande contribution
aux progrès mathématiques et
scientifiques grâce aux grands hommes
comme al-Khawarizmi (l'inventeur de
l'algèbre), Omar Khayyam (résolution des
équations du 3e degré par la méthode
graphique...), Al Birouni, Avicenne,
Kashani, Nasserdine Attoussi Razi,dit Al
Razes (médecin et chimiste) et beaucoup
d'autres.(7) (8)
Beaucoup de
scientifiques de l’âge d’or musulman
étaient persans et musulmans ! Ils
n'étaient pas, il faut le souligner
uniquement , arabes ! Plus près de nous,
Ebay est une création de M. Omidyar, le
vice-président de Google est M. Omid
Kordestani, le maire de Beverly Hills
est Jamshid Delshad... Shirin Ebadi est
la seule femme musulmane à avoir reçu le
prix Nobel. Au niveau scientifique, ces
dernières années, on pourra retenir le
nom du Pr Ali Javan, l’inventeur du
laser à gaz (1960). En médecine, le cœur
artificiel a été inventé par le Dr Toffy
Musivand. La première greffe de rein est
iranienne (1967 à Chiraz) et de même la
première greffe de foie (1995).(7) (8)
De nos jours,
l’Iran est une puissance technologique
performante. Elle est à des
années-lumière des autres pays
musulmans. Elle fabrique ses chars, ses
avions et ses drones. Selon le Global
Security (organe du Pentagone), l’armée
de l’air iranienne est, quant à elle,
capable de construire des avions de
chasse type F4, des F5 et des F-17. Sa
marine compte six sous-marins type SSK
Kilo et serait en train d’en terminer
quatre autres. Ses missiles sont très
divers, de courte, moyenne et longue
portée. Par ailleurs, l'Iran a créé et
mis sur orbite son premier satellite.(8)
Dans un article
élogieux, publié le 18 août 2008, le
journal américain Newsweek, que l’on ne
peut pas soupçonner pourtant d’empathie
avec l’Iran, décrit le miracle : «On y
relève quelques éléments aussi
intéressants que... surprenants ! En
2003, surprise des responsables du
département d'Electronical Engineering
de l'Université de Stanford, qui
constatent que les meilleurs étudiants
aux difficiles épreuves d'admission à
leur cycle Ph.D. proviennent d'un même
pays et d'un même établissement : la Sharif
University of Science and Technology en
Iran. Sharif dispense, selon de nombreux
spécialistes, l'un des meilleurs
programmes ‘’undergraduate’’ (niveau
licence) du monde en electronical
engineering en compétition avec le MIT,
Caltech, Stanford, Tsinghua et
Cambridge » (9)
« Les parents
privilégient, s'agissant de
l'orientation scolaire de leurs enfants,
les formations d'ingénieurs et la
médecine aux autres disciplines. Une
sélection rigoureuse : chaque année 1
500 000 lycéens passent un examen
d'entrée à l'université, 10% d'entre eux
s'orientent vers les universités
publiques les plus prestigieuses et 1%
parmi les plus brillants, telles que
Sharif. Un excellent corps enseignant
scientifique. Priorité est donnée aux
sciences dans les programmes
scientifiques des lycées. Un succès
certes surprenant, mais qui — c'est
certain — ne doit rien au hasard.(9)
Enfin sans oublier
la Shirin Ebadi prix Nobel de
Littérature, on sait aussi qu’il y a
plusieurs commandants de bord femmes
dans la compagnie Iran Air. Cerise sur
le gâteau, c’est une femme qui vient
d’être nommée P-DG de la société ; en
effet : «Riche d’un parcours sans faute
qui parle pour elle et de compétences
remarquables qui l’ont imposée dans un
secteur industriel dominé par la gent
masculine, Farzaneh Sharafbafi est la
première femme iranienne à se voir
confier les commandes de Iran Air, la
compagnie aérienne nationale, installée
dans un prestigieux bureau dont elle
fera son cockpit pour bien la piloter et
lui assurer un nouvel envol. A 44 ans,
cette experte connue et reconnue de
tous, titulaire d’un doctorat en
aérospatiale, qui enseigna à
l’Université technologique Amir-Kebir,
puis à l’Université d’ingénierie
aéronautique Shahid Sattari, avant
d’être promue directrice du département
de recherche d’Iran Air, entre dans
l’histoire de son pays en pulvérisant
l’un des plafonds de verre les plus durs
qui soient. Nommée P-DG du fleuron de
l’aviation de la République islamique
d’Iran, créé en 1944, par le ministère
iranien du Logement et du Développement
urbain, Farzaneh Sharafbafi est
propulsée tout en haut d’une pyramide
qui, loin de lui donner le vertige, lui
donne plutôt des ailes.»(10)
Grigori Perelman : L'art pour l'art
des mathématiques pures
Dans le
même ordre de l'effort, il existe des
personnes non obnubilées par l'appât du
gain ou la célébrité à tout prix, même
si la morale est piétinée. Ainsi, le
mathématicien russe Grigori Perelman a
refusé la médaille Fields, considérée
comme le «Nobel des mathématiques»,
octroyée en août 2006 pour ses
recherches sur la «conjecture de
Poincaré», un casse-tête vieux de plus
de cent ans. Mieux encore, l'Institut de
mathématiques Clay lui a décerné le prix
du Millénaire le 18 mars 2010 doté de 1
million de dollars Gregori . Perelman
refuse le prix comme il refuse toutes
les distinctions. Il vit reclus avec sa
vieille mère dans un logement dénué de
tout confort au quartier populaire de
Saint-Pétersbourg. On comprend alors le
mépris qu’il eut quand on lui demanda
pourquoi il refusait 1 million de
dollars : «Je sais comment gouverner
l'Univers. Pourquoi devrais-je courir
après un million ?!»
Ce que je crois
Le système
éducatif algérien est malade du fait
d'une lente détérioration de l'acte
pédagogique et de la tentation de la
facilité et en faisant dans le
quantitatif ,nous avons autant de
candidats au baccalauréat que la France
ou l'Iran mais que valent ils ? Si la
massification de l'enseignement était
légitime à l'indépendance , du fait que
le système colonial n'a formé qu'un
millier de cadres en 132 ans d'oeuvre
positive, ceci ne peut plus être
invoqué. Nous devons regarder vers le
futur. Cependant, comment voulons nous
faire émerger les disciplines
scientifiques si on sait que les lycées
techniques creusets des bas les plus
durs ( Mathématiques techniques) ont été
carrément supprimés que les maths ne
représentent que 2 % du total des élèves
du secondaires, alors que ce chiffre est
de 35% en Allemagne ( Un étudiant sur 3
est en science et en technologie). Il
est de 25 % en Iran ; Comment voulons
nous développer le pays avec un ventre
mou de candidats aux bas à 40 % en
lettres , et 40% dans un bac sciences
qui n’a de sciences que le nom, tant il
est vrai que l’on peut réussir à ce bac
sans compter sur les maths, la physique-
chimie ou les sciences ! Cerise sur le
gâteau le laminage des matières
scientifiques est consacré dans les
études supérieures avec la disparition
des filières d’ingénieurs et de
techniciens ! C’est dire si le mal est
profond !
Il n’y a pas de
miracle car le laminage par le bas au
nom d’une hypothétique justice, achève
de faire disparaitre ce qui reste
d’articulé et de rationnel dans ce pays.
Il nous faut une élite ! certes des
conditions objectives doivent être mises
en œuvre pour que les meilleurs
réussissent indépendamment de la
naissance, du népotisme ou de la
corruption par l’argent. Tout un
tas de valeurs qui n’ont pas cours en
Algérie avec la mentalité de ma’aliche (
cela ne fait rien) Ce qui explique
l’échec de l’école et la corruption de
l’université où on apprend que
c’est une mode voire un sport national
que de faire que tout s’achète ;
Un examen, un jury d’examen, une thèse,
un examen de résidanat. Il suffit de
mettre le prix. C’est peut être cela et
avant tout le drame du système éducatif
algérien où les rares diplômés qui ont
un niveau se dépêchent de quitter le
pays qui les a formé –aidés en cela par
les pays qui ont fait de l’émigration
choisie la nouvelle façon de laminer
les pays vulnérables en leur aspirant
leurs élites-. C’est tout cela que nous
devons analyser dans le calme et la
sérénité pour repartir du bon pied
Les vrais défis du
pays sont d'avoir une vision pour le
futur, non pas celle de suivre cette
jeunesse dans l'air du temps, mais de
lui indiquer le devoir envers le pays,
par la contribution de chacun. A quoi
rime tout ce cirque qui consiste à
singer les autres, pas dans le travail,
la sueur, l'effort, la créativité et les
nuits blanches, mais dans celui de
l'amusement, de la drogue, de la Star’
ac, des «acteurs» que l'on fait venir à
coup de centaines de milliers de dollars
ou de chanteurs (es) qui ramassent en
une nuit ce que de besogneux gagnent en
une vie, ou encore des footballeurs
offshore qui nous donnent l’illusion du
bonheur alors que le vrai bonheur est
dans la conviction d’avoir été utile et
d’avoir contribué à l’édification du
vivre-ensemble et à la protection du
bien commun le plus cher celui qui est
la prunelle de nos yeux à savoir
l'éducation sans complaisance ni
approximation de nos enfants
Imaginons pour
rêver qu'il y ait en Algérien des
concours de performance en tout, en
sport, aux jeux d'échecs, en
mathématiques... Imaginons qu’à la place
des troubadours invités à prix d’or, on
invite des personnalités scientifiques
comme Gregori Perelman qui viendront
prêcher la bonne parole et susciter des
vocations. Ce sont les premiers pas vers
la rédemption. A ce propos le passage
–invité par l’ambassade de France- à
Alger du brillant mathématicien
français Cedric Villani à peine 44 ans
médaille Fields des mathématiques à
37ans , professeur à l'université
Claude-Bernard-Lyon-I, s’est passé dans
l’anonymat. Je suis sûr que ces
références universelles apporteront par
leur présence, leur aura, une dimension
formidable à la quête de la science dans
ce pays. Imaginons que l'on fasse des
Olympiades de la performance et qu'on
récompense les meilleurs.
De sursis en
sursis, la crise morale est toujours
là ! Comment la conjurer au-delà
du fait d’un consensus des partis
politiciens qui font de l’école et de
l’université une caisse de résonance. Il
nous faut un projet dans la durée !
Imaginons cette jeunesse -en panne
d’espérance- soit fascinée par l'avenir
elle serait prête à se défoncer pour le
pays, c'est aux hommes politiques de
leur donner du grain à moudre au lieu de
les habituer à la pente dangereuse de la
facilité, porteuse de tous les dangers.
La brillante performance de la jeune
iranienne ne doit rien au hasard, elle
est issue d'un creuset de l'élite, mot
encore tabou en Algérie. Jusqu'à quand
nous ne comprendrons pas qu'il faut
faire la place aux légitimités du
neurone ?
Mettons en place
comme en Iran et dans tous les pays qui
se respectent et respectent la science,
pour commencer, une organisation pour le
développement des talents brillants.
C’est un chantier difficile, mais les
générations futures seront
reconnaissantes de leur avoir indiqué la
seul vraie voie qui permet de projeter
l’Algérie dans la modernité.
La mort prématurée
de Maryam Mirzakani est une grande perte
pour la science, pour la condition de la
femme en terme d’icône . Puisse son
parcours susciter des vocations chez nos
jeunes en Algérie et enfin faire émerger
dans le pays des vocations mathématiques
qui ont disparu dans le pays La science
est la seule défense immunitaire du pays
dans un monde qui ne fait pas de place
aux faibles et aux incompétents.
Amen.
1 . http://www.tehrantimes.com/news/415087/Iranian-math-genius-Fields-Medal-winner-Mirzakhani-passes-away
2.Maryam Mirzakhani Encyclopédie
Wikipédia
3.Chems Eddine
Chitour http://www.mondialisation.ca/misere-morale-en-algerie-le-mimetisme-ravageur-dun-occident-pervers/5402123
4.Aissa Hirèche :
Concours de l'élection de miss Algérie
L'Expression du 8- 9-2014
5.http://libeteheran.blogs.liberation.fr/lettres_de_/2014/08/fields.html
6.. http://www.tehrantimes.com/news/246969/The-women-of-Islamic-Republic
7.Chems Eddine
Chitour septembre 7, 2011 http://www.mondialisation.ca/le-d-veloppement-technologique-de-l-iran-un-r-sistant-contre-le-nouvel-ordre-mondial/26435
8.Farsnews - Le 1er
vol de l´avion de combat, «la foudre»,
«made in Iran». 5 août 2007
9.Daniel Laurent.
Et si l'Iran nous donnait des leçons en
matière d'enseignement supérieur ?
Education/Recherche, jeudi 28 août
2008.
10.https://oumma.com/liran-nomme-premiere-femme-pdg-de-iran-air-compagnie-aerienne-nationale/?
Professeur Chems
Eddine Chitour
Ecole Polytechnique
Alger
Article de
référence :
http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2017/07/17/article.php?sid=216500&cid=41
Professeur Chems
Eddine Chitour
Ecole Polytechnique
Alger
Publié le 19 juillet 2017 avec l'aimable
autorisation de l'auteur
Le sommaire du Pr Chems Eddine Chitour
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