Chronique
L’envers du statut de « sans-papiers »
Ahmed Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Samedi 15 août 2015
Il fut un temps où les services français
de renseignement, et la machine
médiatique, étaient friands des
« désertions » de l’armée algérienne ou
de « témoignages » qui l’incriminent
dans les actes de violence qui
l’opposaient aux groupes armés
islamistes. La chose avait fait le
bonheur d’un certain nombre d’Algériens,
qui ont sauté sur l’aubaine et qui ont
pu franchir tous les obstacles dressés
devant les candidats à l’émigration. Ils
l’ont fait de surcroît avec les
honneurs. Ils ont eu droit à la
médiatisation et, parfois, à des
retraites dorées. Ce fut le cas, par
exemple, de tel officier, promu écrivain
et de tels « témoins » judiciaires qui
gagnèrent une grande notoriété, fut-elle
éphémère. L’essentiel, pour eux, était
d’avoir pu s’installer, sans
difficultés, en France et de ne pas
subir aujourd’hui le calvaire des
« sans-papiers ». Il semble que la
situation a bien changé et qu’il en faut
bien plus pour réussir dans ce type
d’opération. Même si l’on s’inscrit dans
une affaire qui fait encore la une de la
presse et qui suscite l’agitation des
milieux judiciaires de l’Hexagone. Même
si on a été entendu par le juge
antiterroriste Marc Trédivic, ce
magistrat qui ne démord pas de dénicher
la « vérité » sur l’assassinat, en 1996,
des moines trappistes de Tibéhirine.
C’est ce qu’est en train de constater un
certain Mourad.B, demandeur d’asile, en
tant que « ex-agent services secrets
algériens » qui serait « menacé de
mort » s’il rentrait en Algérie. On ne
sait pas les détails de ce qu’il a pu
raconter, en termes de preuves, sur sa
carrière mais cela n’a pas convaincu
l'Office français de protection des
réfugiés et apatrides (Ofpra), qui le
12 août a apposé une fin de non-recevoir
à sa demande. Pas plus, en conclusion,
qu’il n’a pu être retenu par le juge en
tant que témoin. « L’intéressé n’a
pas été en mesure de produire des
explications convaincantes de nature à
établir la réalité » et « il
n'apporte aucune précisions de nature à
indiquer qu'il connait des
éléments autres que ceux à caractère
général ou accessibles par des sources
publiques » a été le verdict de
l’OFPRA. Ce qui est fort plausible, car
ce que rapporte les médias de ses
déclarations pousse à la même Dure
désillusion en soi, sans préjudice des
conséquences de cette tentative de
compromission s’il y a expulsion vers le
pays. Tout le drame d’une émigration
refusée qui pousse les « harraguas » aux
pires extrémités et, par-dessus tout, la
conséquence des manipulations qui ont
servi lors des tentatives de faire
accréditer la thèse « kitukiste », lors
de la guerre propagandiste occidentale
menée contre l’armée algérienne, seule
force organisée durant les années 1990.
Peut-être fourvoyé malgré lui par des
« conseillers », le jeune Mourad y a cru
dans un « pourquoi pas moi ? » à la fois
naïf et désastreux, ignorant qu’il est
des arcanes de la stratégie algérienne
de la France et de l’évolution des
relations entre les deux pays. Il a
aussi fait peu de cas du développement
de la xénophobie et de l’offensive, en
cours, contre l’immigration et les
minorités « musulmanes ».
Ahmed.Halfaoui
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