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Zcommunications
Surprise d'octobre : panique mondiale
Stephen Lendman * on zcommunications.org, 14
octobre 2008
http://www.zcommunications.org/znet/viewArticle/19125
Depuis les attentats du 11 septembre
(2001), la notion d’une surprise d’octobre est dans l’air.
L’idée est, en gros, celle-ci : une autre attaque terroriste,
réelle, ou bidonnée. Les médias dominants suscitent la peur.
L’opinion, encore une fois, est traumatisée. L’administration
Bush prend toutes les mesures possibles et imaginables pour
protéger la sécurité nationale. Elle s’arroge les pleins
pouvoirs. Elle suspend la constitution et promulgue la loi
martiale. Des emprisonnements en masse s’ensuivent. A commencer
par les contestataires et les éléments de la population
considérés « dangereux ».
Cela pourrait bien se produire, avec le
retour aux Etats-Unis, vers le début octobre, de la troisième
brigade de combat du Troisième régiment d’infanterie. D’après la
revue Army Times, ce retour vise, pour le gouvernement fédéral,
à « être en mesure de faire face à des situations d’urgence et
de catastrophe, incluant des attentats terroristes ».
D’après un récent article de Wayne Madsen
intitulé « Des sources de la Federal Emergency Management Agency
[FEMA] confirment l’imminence de la promulgation de la loi
martiale », les choses empirent. Il cite des sources «bien
informées » de la FEMA, selon lesquelles « l’administration Bush
est en train de mettre les touches finales à un plan visant à
déclarer la loi martiale aux Etats-Unis, divers scénarios étant
anticipés, susceptibles de représenter des prétextes. »
Effondrement économique. Désordres sociaux de grande ampleur.
Faillites de banques. Protestations de rue. Violences, en
réaction, et, rebelote : une nouvelle élection volée…
Mais au début du mois, c’est une nouvelle
surprise d’octobre qui est arrivée. Pas celle que d’aucuns
attendaient. Pas encore, en tous les cas…Le Wall Street Journal
la relate comme suit : « L’indice Dow Jones Industrial Average
(DJIA) a couronné la pire semaine de toute son histoire, longue
de cent-douze ans, avec la journée la plus volatile qu’il ait
jamais connue, tandis que des espoirs d’un énorme plan
international de sauvetage des banques étaient submergés, en fin
de journée, par une nouvelle vague de ventes (d’actifs) ».
Au cours des huit sessions boursières
passées, le DJIA a plongé de 22%. Des investisseurs se disaient
« sous le choc de l’explosion ». Beaucoup d’entre eux ont passé
leur vendredi à « tenter de se protéger contre de futures
pertes. La chute de 18% enregistrée la semaine passée (entre le
6 et le 10 octobre), et le redressement de 1018.77 points,
vendredi, furent les plus spectaculaires, depuis la création de
l’indice Dow, en 1896. » L’indice mesurant les inquiétudes sur
les marchés, le VIX, a atteint 69.95. C’est, de très loin, son
plus haut niveau jamais encore relevé, et certains investisseurs
pensent que cet indice pourrait tutoyer les 100% dans le climat
actuel des affaires. Jusqu’ici, la pire semaine, pour le Dow
Jones, avait été enregistrée en 1933. Mentionnons que le volume
des transactions, avec 11.16 milliards d’actions échangés, a,
lui aussi, battu un record.
« L’effondrement des marchés secoue le
monde », a titré en Une le Financial Times (FT). Trauma massif,
peur et incertitude ont envoyé leurs ondes de choc dans
l’ensemble des régions du monde, et personne ne sait si le
fameux vendredi de « reprise » a mis un terme au vent de
panique. Peut-être, au contraire, n’a-t-il fait qu’en signaler
le début. En effet, en premier, ce sont les marchés, qui
craquent. Ensuite, ce sont les économies réelles, et, enfin,
c’est l’inévitable catastrophe humaine. Affectant des dizaines
de millions de personnes, partout dans le monde. Des innocents,
qui paieront un prix exorbitant…
Les titres des journaux du matin parlent
d’eux-mêmes. Et ils deviennent de plus en plus sombres. Le 10
octobre, le Wall Street Journal clamait : « La déroute (une
semaine entière) des marchés laissent les Etats-Unis groggy. Les
marchés boursiers connaissent un crash au ralenti… Après une
année de déclin, les investisseurs ont perdu 8.4 trillions de
richesse ». Plus inquiétant, encore : ce qui nous attend, et
qu’est-ce que la plupart des gens pourront (ou voudront bien)
tolérer ?
Dans sa manchette, le Financial Times était
non moins lugubre : « Les actions mondiales plongent… Le Japon
prend la tête de la Berezina des marchés asiatiques. La plus
importante chute de Wall Street depuis le crash de 1987. »
General Motors, naguère première entreprise du pays, est
désormais confrontée à la banqueroute. Le 10 octobre, son action
a chuté à son niveau de 1950, et sa capitalisation boursière
n’atteint plus que les 2.6 milliards de dollars. Cette situation
calamiteuse a été résumée dans ce titre-choc : « La General
Motors perd ses roues ! ». Vous pouvez y ajouter le moteur. Et
puis aussi, tiens, tant qu’à faire, le châssis !
Ford Motor ne se porte guère moins mal. La
valeur de son action est au plus bas depuis des décennies, et un
analyste financier a averti que « l’accélération de la
détérioration des fondamentaux de l’industrie représenteront un
sérieux défi pour les liquidités (pour les deux firmes citées,
ainsi que pour Chrysler) tout au long de l’année 2009. » Le
cabinet JD Power and Associates a été encore plus pessimiste,
disant que le marché mondial de l’automobile risque de connaître
un « effondrement total » en 2009. Et nous ne parlons, là, que
des seules automobiles…
Mais regardez les banques et le monde de la
finance. La source de la crise actuelle, et la raison pour
laquelle des économies mondiales sont en train de plonger. Hier,
des économistes comme Nouriel Roubini étaient l’objet des
risées. Plus aujourd’hui. Il a averti, depuis des mois, que « le
risque d’un effondrement systémique total est actuellement plus
élevé que jamais depuis que l’effondrement du crédit grippe
également les banques européennes » et ce risque se répand dans
le monde entier. Affectant les banques solides autant que les
banques vermoulues. Jetant le bébé avec l’eau du bain. Gommant
les économies de dizaines de millions de personnes, partout dans
le monde. Y compris celles de seniors qui n’auront probablement
jamais le temps de se refaire.
La crise n’a pas fait irruption comme la
souris Ratatouille. Elle couvait depuis des années et, en
juillet 2006, l’historien Gilbert Kolko avait avertit qu’elle
pouvait éclater d’un jour à l’autre, dans un article intitulé :
« Les banquiers redoutent un effondrement économique mondial. »
Il relevait de quelle manière « c’est toute
la nature-même du système financier global qui a changé
radicalement, d’une manière qui n’a strictement rien à voir avec
des politiques économiques nationales « vertueuses »… Les
managers spécialisés dans l’investissement dans les fonds en
actions et les grandes banques ont évincé les banques
nationales… en étendant leurs activités bien au-delà des
structures réglementaires… Des traders ont repris les activités
des banquiers traditionnels, l’achat et la vente d’actions,
d’obligations, de produits dérivés, etc. génère aujourd’hui les
plus importants profits, et il est désormais de règle de prendre
plus de risques, et des risques majeurs… Ils parient souvent
avec l’argent de leur boîte (et) jouent sur les taux intérêts
bas… on les laisse faire des choses qui, naguère, étaient
considérées d’une audace totalement folle. »
Ajoutez à cela le développement irrationnel
de la finance mondialisée, la libéralisation et la disparition
des régulations. La frénésie de jouer vite et n’importe quoi, et
de parier sur l’avenir. Les gains potentiels sont énormes, et il
en va de même des risques d’une crise financière de grande
ampleur. Un effondrement. Aujourd’hui, nous en avons un, auquel
les institutions mondialisées sont « parfaitement incapables »
de faire face.
Kolko avait averti alors que « la totalité
de la structure financière est en train de devenir
incontrôlable… la libéralisation financière a produit un
monstre… les contradictions mitent le système financier
mondial : c’est à la fois générateur de crise et parfaitement
immoral. Nous pourrions fort bien être à la veille de crises
extrêmement sérieuses. » Maintenant, ça y est : nous l’avons,
notre crise, et nous sommes dans de beaux draps…
Tout ça, parce qu’une « classe
cleptocratique a pris le contrôle de l’économie », dit
l’économiste Michael Hudson. Il s’agit d’éléments criminels, qui
parient sur des bénéfices extrêmement élevés, qu’ils entendent
engranger à travers une sorte de roulette russe informatisée »
et, quand ce sont de mauvais paris qui sont faits, des rachats
gouvernementaux sont décidés, qui ne sont que des renvois
d’ascenseurs pour leurs contributions financières aux campagnes
électorales ». Il s’agit tout aussi bien de rétributions dues au
fait qu’ils ont des amis haut placés.
La crise actuelle n’a rien d’accidentel ni
de fortuit. Elle a été planifiée, dit l’économiste critique F.
William Engdahl, dans un récent article intitulé : « Derrière la
panique » [Behind the Panic]. Le jeu consiste à « remodeler le
devenir du système bancaire mondial » au travers d’une
destruction créative. Cette panique est induite par une
« stratégie à long-terme » extrêmement bien ficelée. Afin de
« changer le visage du système bancaire européen ». Affaiblissez
celui-ci avec des « junk bonds » toxiques. Avec des obligations
gagées sur des actions. Poussez-en suffisamment à la liquidation
ou faites-en suffisamment baisser le prix pour pouvoir les
racheter à des prix bradés. L’idée étant de « créer trois géants
colossaux de la finance globalisée : Citigroup, JP Morgan Chase
et Goldman Sachs ». Ajoutez-y la Banque d’Amérique : ça en fera
quatre (elles pourront faire une belote…). Ensuite, utilisez
leurs « muscles afin de ravager les banques européennes ». Même
si cela ravage en même temps les économies américaine et
mondiale. Ressuscitez-les, afin qu’elles soient en mesure « de
promouvoir leur agenda global au cours des années à venir ». De
dominer la finance mondiale et d’augmenter l’hégémonie des
Etats-Unis en ce nouveau siècle commençant…
C’est l’idée, et Engdahl appelle ça « un
combat pour la survie du Siècle [qui ne saurait être qu’]
américain [the American Century]. Bâti sur « les piliers jumeaux
de la domination financière et de la domination militaire
américaines », mais le jeu est loin d’être terminé. « Les lignes
de bataille sont tracées ». Les nations de l’Union européenne
ont leurs propres idées. Une stabilisation, et puis des plans de
rétablissement, du temps qu’on y est, qui diffèrent fortement de
ceux de Washington, et qui ont l’air beaucoup plus réfléchis.
Reste à voir où tout cela finira, et si les nations en
compétition pourront travailler ensemble, et le faire de manière
efficace. Il ne leur reste guère de temps…
Les
efforts de Washington pour modeler le siècle dernier
Engdahl en a passé en revue certains, dans
son important ouvrage sur la guerre, la géopolitique, le pétrole
et la finance « A Century of War » [Un siècle de conflits]. Il a
expliqué la manière dont Washington a créé « le plus grand jeu
de confiance » jamais créé jusqu’ici. Une « hégémonie d’un genre
spécial », afin :
- d’imprimer des quantités de dollars
illimitées ;
- d’accumuler d’énormes déficits du
commerce extérieur ;
- de faire perdre au dollar sa valeur par
une inflation défiant l’imagination ;
- de faire en sorte que le gouvernement
paie des intérêts aux banquiers sur son propre fric et, enfin,
- de créer une dette publique et privée
sans précédent, afin d’enrichir une infime minorité, aux dépens
de l’immense majorité…
Jusqu’ici,
ça a marché. Arrangez-vous pour que l’Amérique dirige le monde
entier. Prenez le contrôle de son énergie et de sa finance.
Evitez les concurrents sérieux, et écrasez les concurrents
potentiels.
A partir des premières années du siècle
dernier, les roulements de mécanique des Etats-Unis prirent
plusieurs formes. Des conflits au contrôle des ressources
mondiales, en passant par les conflits et par la guerre
financière. La JP Morgan et autres notables de Wall Street
étaient des experts en ce dernier domaine. Ils excellaient à
créer de la panique afin d’accroître leur pouvoir. Comme
aujourd’hui. Dans les mêmes buts.
En 1969, Richard Nixon avait son propre
projet, le pays étant en récession. Les taux d’intérêt furent
rabaissés. Les dollars s’enfuirent à l’étranger. La création de
monnaie fut renforcée et, en mai 1971, l’Amérique enregistra son
premier déficit commercial mensuel. Cela déclencha une panique.
Une débandade du dollar américain. A l’époque, cette devise
était gagée sur l’or. Les réserves correspondaient à un quart
des liquidités officielles, et, le 15 août, Nixon imposa
unilatéralement un gel des salaires et des prix pour une durée
de trois mois. Ainsi qu’une surtaxe de 10% sur les importations,
et qu’une dévaluation du dollar de 8%, et il mit fin à la parité
avec l’or. Il suspendit la convertibilité du dollar en ce métal,
et il mit fin au respect de la provision incessible prévue par
les accords de Bretton Woods. Il retira la prise des économies
mondiales. Cela les choqua terriblement et, le 12 février 1973,
il repiqua au truc. Avec à nouveau 10% supplémentaires de
dévaluation du dollar, qui créèrent la pire instabilité mondiale
depuis les années 1930. Que se cache-t-il, derrière ces
méfaits ?
La volonté de gagner du temps, avant un
nouveau « tournant paradigmatique » monétaire, d’une audace
inouïe. De revivre un dollar fort et une hégémonie des
Etats-Unis. Grâce à un « assaut colossal » sur la croissance
industrielle mondiale. Au travers d’un embargo pétrolier
totalement artificiel. Et une augmentation de 400% des prix du
pétrole. Un flux de pétrodollars à recycler en investissements
et en achats d’actions aux Etats-Unis. Des profits énormes, pour
Big Oil et pour les plus grandes banques, au prix d’une crise
économique. La pire depuis celle de 1929. Provoquant des
faillites, du chômage et la stagflation.
En 1979, sous Jimmy Carter, le secrétaire
de la Fed, Paul Volker, mit en œuvre sa propre politique
monétaire au motif de combattre une inflation élevée. C’était là
un autre plan de Washington visant à préserver l’hégémonie du
dollar. De le pérenniser en tant que devise de réserve mondiale,
et de le faire en écrasant la croissance industrielle afin de
laisser le pouvoir politique et financier soutenir, seuls, la
force du dollar.
Cela a marché, en faisant passer les taux
d’intérêt de 10 à 16%, puis à 20%, en l’espace de quelques
semaines. Les économies américaine et mondiale plongèrent dans
de profondes récessions, et le dollar entama une longue
ascension continue, qui se poursuivit pendant cinq ans.
Dans les années 1980, sous Ronald Reagan,
le président mexicain Jose Lopez Portillo voulait utiliser ses
revenus pétroliers pour moderniser et industrialiser son pays.
Pour le rendre plus fort et davantage indépendant. Cette
perspective était anathème, pour Washington, qui réagit
vivement. Par un schéma consistant à exiger du gouvernement
mexicain qu’il rembourse sa dette à échéances draconiennes, et à
un taux d’intérêt exorbitant…
En 1981, cela commença par une attaque
concertée contre le peso. On fit circuler des histoires au sujet
d’une dévaluation imminente et de fuites de capitaux. Portillo
décréta un plan d’austérité, et son gouvernement s’effondra,
sous la pression. Le peso fut dévalué de 30%. L’industrie
mexicaine fut dévastée. La production industrielle s’arrêta
littéralement. Les faillites s’enchaînèrent. Des millions de
Mexicains souffrirent terriblement. Le pays devint effectivement
insolvable. Il fut contraint d’accepter l’ « aide » du FMI. Il
dut énormément s’endetter et les grandes banques réalisèrent des
profits scandaleux de leur coopération avec le gouvernement
mexicain et avec le FMI. Socialisant la dette. La collant sur le
dos des contribuables et privatisant les gains au travers d’un
pillage appelé « ajustement structurel ». Il en alla de même
dans de nombreux pays. Cela causa une dette croissante. En
imposant des taux d’intérêts exorbitants, et en engrangeant des
profits énormes en intérêts sur des avances de centaines de
milliards de dollars…
La déréglementation de l’ère Reagan causa
la crise des S & L
[Savings and Loans : Epargne et prêts]. Un avant-goût de la
crise actuelle, en moins grave. En laissant les banques investir
dans l’immobilier spéculatif. En s’engageant dans des fraudes
massives. Et en s’arrangeant pour que l’Institut Cato
(particulièrement droitier) dise : « Si le Congrès avait
cherché, en 1980, de créer un environnement de nature à leurrer
tous les escrocs et tous les fraudeurs de ce pays à pratiquer
une unique industrie, il y en aurait eu peu qui eussent convenu
davantage que celui-ci ». « Il fut particulièrement facile de
trouver des détenteurs de S & L qui fussent désireux de les
revendre pour un prix raisonnable, et une fois que vous aviez
une charte des L & S, les opportunités abondèrent. »
Cela se termina par la faillite de
centaines de banques. Cela fit rétrécir ce secteur, qui passa de
4 500 établissements en 1979 à environ 2200 en 1991 et on ne les
comptait plus qu’en centaines, quelques années plus tard. Cela
coûta aussi aux contribuables environ 200 milliards de dollars.
De l’argent de poche, comparés aux trillions à payer pour la
crise actuelle.
Dans les années 1980, le Japon fut le pays
qui sut dire « non ». A la fin de la décennie, ce pays était le
leader économique et financier. Parce qu’une spéculation
insensée avait plongé les banques américaines dans une profonde
crise. Le Japon, quant à lui, opérait beaucoup plus prudemment.
Il prospérait, et il défiait la domination américaine.
Washington redoutait que d’anciens pays communistes
n’adoptassent le modèle japonais. C’était absolument anathème.
Cela aurait pu entraîner la faillite de certaines firmes
américaines. Cela démontrait que la manière de faire des
Japonais était supérieure : il fallait donc que cela cesse !
L’accord du Plazza, en 1985, allait s’en
charger. Il visait à contraindre le Japon à prendre des mesures
monétaires et fiscales afin d’encourager sa demande intérieure
et de réduire les surplus extérieurs du pays. En même temps, la
Banque du Japon maintint ses taux d’intérêt à 2,5 % de 1987 à
1989. Afin de stimuler les achats de produits américains. En
échange, de la monnaie de singe vint s’investir dans les actions
et l’immobilier japonais. Cela généra deux bulles colossales. Il
s’ensuivit une décennie perdue, et l’économie japonaise est
encore en train de se remettre péniblement de cette période de
marasme (de plus, elle sera confrontée, comme les autres, aux
conséquences de la panique actuelle).
La crise asiatique des années 1990, elle
aussi, a été « faite maison ». Elle a frappé durant l’été 1987.
Pour nulle autre raison apparente que des rumeurs que la monnaie
thaïlandaise, le bhat, était en difficulté, et que la Thaïlande
ne détenait pas assez de dollar pour la soutenir. Voilà que la
« Contagion asiatique » était lancée. De l’argent frais avait
afflué, peu avant. Mais elle avait été exfiltrée,
électroniquement. A travers un schéma concocté à Washington, au
motif que le modèle économique thaïlandais coiffait au poteau
celui de l’Amérique, et même le « menaçait »…
Les pays Jeunes Tigres Asiatiques ont connu
une forte croissance en protégeant leur marché et en empêchant
les firmes étrangères de posséder chez eux des terres et des
entreprises nationales. Ils ont aussi restreint les importations
de l’Occident et du Japon afin de faire croître leur propre
économie et leurs industries nationales. Là encore : anathème.
Il fallait que cela cesse !
Ces pays furent soumis au marteau-pilon.
Contraints à dévaluer leur monnaie et à solliciter l’aide du
FMI. Avec des conditions draconiennes. Comme l’acceptation
d’obligations pour couvrir leur dette, celle d’ouvrir leurs
marchés, l’ajustement structurel, les privatisations, les coupes
budgétaires, les licenciements massifs et le blocage des
salaires et des bénéfices. Bref : tout le paquet toxique, en
échange de la soi-disant « aide ». Le tribut payé par cette
région du monde fut dévastateur. Près de 24 millions d’emplois
perdus. Une classe moyenne détruite. Un trou noir de misère
affreuse pour près de vingt millions de personnes, contraintes à
faire tout et n’importe quoi afin de survivre. On a écrasé le
miracle asiatique afin que les marques occidentales supplantent
les marques locales. Les chasseurs d’opportunités ont fait des
affaires en or, à des prix dérisoires. Le New York Times a
appelé ça « le plus grand supermarché mondial des entreprises en
faillite. » La région est à nouveau soumise au marteau-pilon,
par la crise actuelle. Pas besoin de se demander où cette crise
a été fabriquée. Personne ne peut dire comment elle se
terminera, si elle prend fin un jour. Des millions de personnes
en proie au doute vivent dans la douleur et dans la peur.
La liste des autres exemples notables est
infinie. Deux cas se distinguent particulièrement. Ceux, dans
les années 1990, de la Russie postsoviétique et de l’Afrique du
Sud. Dans ces deux cas, la « thérapie de choc » néolibérale
s’est avérée particulièrement dévastatrice. Elle mit au pouvoir
une classe oligarchique, en Russie. Laissons-les piller et saper
la richesse du pays et l’expédier clandestinement vers des
paradis fiscaux. Des dizaines de millions de personnes réduites
à la misère. Près de 80 % des paysans en faillite. Un chômage
massif artificiellement provoqué. Cela a créé un
sous-prolétariat permanent. Ainsi qu’une diminution annuelle de
la population de l’ordre de 700 000 personnes, voire bien
davantage…
L’Afrique du Sud n’a pas connu un meilleur
sort. En dépit de l’exhortation de Nelson Mandela à soutenir
l’accession à la dignité économique de la population noire. En
tant que président du pays, Mandela s’est soumis au capital. Les
conséquences furent horrifiantes. La situation devint bien pire
que sous l’apartheid. Doublement du taux de chômage et du nombre
de personnes survivant dans le dénuement absolu. Des millions de
Noirs pauvres sans domicile fixe. Un autre million évincé des
fermes. Un quart de la population sans eau courante, ni
électricité. Près de 60 % des habitants dépourvus
d’installations sanitaires élémentaires. Une chute de treize
années dans l’espérance de vie, depuis le niveau atteint en
1990. Un désastre humain, très comparable à celui qui s’est
produit en Russie, et en bien d’autres pays. Pourquoi ? Pour
donner le pouvoir au capital, au détriment du peuple. On lui
promet l’Amérique, et en une semaine, il se retrouve sans rien.
L’horreur se répand, absolument partout. Le
2 octobre, c’en est assez pour que le New York Times lui-même
affirme que les dirigeants latino-américains sont passés de la
« schadenfreude à la peur ». Hugo Chavez a séché la séance
d’ouverture de l’Assemblée Générale de l’Onu pour se rendre en
Chine, et déclarer que Pékin était autrement important que New
York. Le Venezuela et la Bolivie expulsent leur ambassadeur
américain, et le président brésilien Lula da Silva proteste
contre la présence navale américaine dans la région, disant que
ses bateaux de guerre doivent être mis en état d’alerte, afin
d’y répondre. Il est furieux, aussi, contre Wall Street et
Washington, responsables de la crise, et dit : « Nous avons fait
ce que nous étions supposés devoir faire afin de faire le ménage
chez nous. Ils nous ont bassinés pendant des années, nous disant
ce que nous devions faire. Et eux, pendant-ce temps, ils ne le
faisaient pas eux-mêmes… »
La présidente argentine Christina Fernandez
de Kirchner fut tout aussi amère dans ses déclarations : « Nous
assistons à un Premier Monde, qui avait été dépeint, fut un
temps, comme une Mecque vers laquelle nous devions nous efforcer
de nous tourner, en train d’éclater comme une bulle. » Et le
Chicago Tribune de citer un dialogue du dialogue interaméricain,
disant que « quelque grande qu’ait pu être la crédibilité des
Etats-Unis, dans la région, en matière de management économique,
ils ont manifestement perdu cette aura. »
Quarante spécialistes mondiaux, venus de
vingt pays, ont assisté à la Conférence Internationale
d’Economie politique de Caracas, au Venezuela, du 8 au 11
octobre, visant à analyser et à proposer des solutions
alternatives, basées sur les pays du Sud, à la crise financière
mondiale. Le ministre vénézuélien de la Planification et du
Développement, Haiman el-Troudi, a souligné la force relative de
son pays, ainsi que sa croissance économique impressionnante
(6%, sur les six premiers mois de l’année 2008). Il a recommandé
aux Vénézuéliens de rapatrier leurs investissements aux
Etats-Unis, étant donné le climat actuel. Afin de les protéger
contre des banques américaines particulièrement peu sûres.
Avec le président Chavez, ils ont fustigé
le FMI, et ils l’ont appelé à s’auto-dissoudre : « Dissous-toi…
Tue-toi !! » Ils furent très durs envers la Banque mondiale,
également. Chavez ajouta : « Nous sommes en train de nous
détacher du wagon de la mort. » El Troudi déclara quant à lui
que nous sommes en train d’assister à la fin de l’hégémonie du
néolibéralisme. D’autres furent d’avis qu’un nouveau modèle est
indispensable. L’ancien ayant manifestement échoué.
La
panique et l’effondrement actuels
Aujourd’hui, le crédit est gelé. A cause
d’une crise due à la dette ; il ne s’agit absolument pas d’une
crise de liquidités. Résultat : les marchés s’effondrent. Ils
s’écrasent, en chute libre, sous l’effet d’un stress financier
gravissime. Cela, à partir d’un niveau d’actifs encore jamais
atteint et de bulles du crédit. Multiples. Faisant explosion. A
commencer par l’immobilier. Provoquant des défauts de
remboursements de prêts immobiliers et la perte d’énormes
institutions financières. Avec des avoirs atteignant des
milliards de dollars en danger. Ajoutez à cela des banques
réticentes à prêter de l’argent. De crainte de ne pas être
remboursées. Les prix chutent. La confiance est érodée. Les
pertes sont amplifiées par des de-leveragings destructeurs. Les
prêts immobiliers, les stocks, les valeurs, les obligations, le
crédit, les hedge funds implosent encore plus intensément que
lors de la Grande Dépression (de 1929).
Cela met des entreprises déboussolées le
dos au mur. Chacune d’entre elles en met d’autres en difficulté.
Certaines sont trop grosses pour s’effondrer, mais elles
s’effondrent bel et bien. Cela amène les investisseurs à
rechercher toutes les issues possibles. Ils vendent les bons
placements pour couvrir les déficits des mauvais. Gelant les
marchés monétaires. Faisant des placements à court-terme leur
seule ceinture de sécurité. Obtenant des gouvernements du monde
entier qu’ils s’agitent, à la recherche frénétique de solutions.
Déjà plongées dans la récession et ne recevant que des nouvelles
de plus en plus mauvaises. Redoutant une crise financière
amplifiée, un effondrement systémique. Qui transformerait une
récession en train de s’approfondir en une véritable dépression
économique mondiale. Un désastre que seules des actions
urgentes, bien préparées et coordonnées pourraient empêcher.
Mais rien ne garantit que quoi que ce soit puisse marcher, aux
dernières nouvelles…
Voici ce que Nouriel Roubini et d’autres
économistes recommandent. L’exact opposé d’EESA, qui ferait plus
de mal que de bien (si on suivait ce dernier) :
- des réductions de taux rapides et
générales ; d’au moins 1% aux Etats-Unis ; encore bien plus
importantes dans l’Union européenne, en Asie et dans le reste du
monde ;
- la garantie de tous les dépôts bancaires,
au moins jusqu’à ce que la stabilité soit rétablie ;
- la nationalisation partielle des banques
en difficulté ; leur recapitalisation au moyen de fonds
publics ; sous une forme qui ressemble, désormais, à un plan [de
relance], d’après le New York Times, dans un article du 11
octobre, sous le titre : « La Maison-Blanche met au point un
plan de sauvetage » ; « du capital devrait être injecté dans les
banques en achetant des actions sans droit de vote ; ce que l’on
en connaît, c’est une déclaration d’Henry Paulson, le 10
octobre, selon qui « nous pourrons utiliser l’argent du
contribuable d’une manière plus efficace… en développant un
programme standardisé permettant d’acheter des parts des
institutions financières » ; reste à voir ce qui, en réalité, se
passera ; Paulson représente Wall Street, pas l’opinion
publique, ni les intérêts nationaux ou mondiaux…
- Il n’est pas favorable à la
réinstauration d’une régulation responsable afin de mettre un
terme aux dérives du marché ; ce que des économistes dans le
genre de Roubini recommandent, c’est ce qui suit :
- geler toutes les mises en faillites
nationales ; créer une Société des Détenteurs Américains de
Prêts (immobiliers) [HOLC : Home Owners’ Loan Corporation], afin
de refinancer l’immobilier et de prévenir les faillites ;
permettre aux propriétaires victimes d’une saisie de conserver
leur bien en payant un loyer abordable ;
- rééchelonner les dettes des foyers
sinistrés ; imposer une limite aux cartes de crédit et aux
autres crédits à la consommation aux taux d’intérêts
exorbitants, à des niveaux bien inférieurs ; mettre du cash
entre les mains des gens ; des tas de cash ; au moins plusieurs
centaines de milliards de dollars, en apéritif ; plus, si
nécessaire ; autant qu’il en faudra ;
- fournir aux institutions financières
solvables autant de liquidités qu’elles en ont besoin ; même
chose en ce qui concerne les sociétés, y compris les petites et
moyennes entreprises ;
- sauver les entreprises solvables ; mettre
en liquidation judiciaires celles qui sont trop dans le rouge ;
- financer un stimulus massif permettant de
réanimer l’économie ; dans le domaine des travaux publics, des
infrastructures, de l’éducation, des énergies alternatives, des
indemnités de chômage, de la formation professionnelle, des
réductions d’impôts aux personnes en difficulté et aux Etats et
aux collectivités locales prises à la gorge et n’ayant plus de
liquidités. Cet argent doit être consacré aux besoins les plus
pressants, et là où il peut apporter le maximum d’efficacité et
de soulagement ;
- faire en sorte que les pays les plus
solides et les plus solvables aident les pays les plus faibles,
les plus endettés ; et
- s’atteler à ces politiques très
rapidement ; il reste fort peu de temps aux gouvernements
mondiaux pour se tirer d’affaire ; rien ne garantit qu’ils y
réussiront ; et ces mesures ne s’attaquent en rien à notre
keynésianisme militaire destructeur, à notre guerre économique
permanente, ni au besoin de ré-aiguiller ces fonds à des fins
internes constructives ; il faut faire l’exact contraire de ce
qu’un document du Pentagone récent recommanderait, à savoir 450
milliards de dollars de budget [militaire] supplémentaire au
cours des cinq années à venir.
Le
passage inopiné d’une réponse politique à une autre
Tout d’abord, il y eut l’EESA, The
Emergency Economic Stabilization Act. Consistant à récompenser
les fraudeurs, et non pas à s’attaquer aux véritables racines de
la crise financière. Ni à aider des millions de foyers dans
l’angoisse : propriétaires confrontés aux saisies, d’autres en
étant menacés. Une opinion publiques traumatisée par la pire
crise économique depuis celle des années 1930.
Les Européens, quant à eux, ont arrêté
leurs propres plans. Différents de ceux de Washington. Le 10
octobre, les ministres des Finances des pays du G-7 se sont
rencontrés pour décider d’une politique. Tôt dans l’après-midi,
ils ont présenté un plan d’action. Riche en promesses. Un peu
court sur les mesures précises. Le New York Times a rapporté
que « de nombreux investisseurs espéraient que les ministres
proposeraient des mesures plus concrètes », citant le
vice-directeur du Peterson Institute of International Economics,
Adam Posen : « C’est insuffisant. » Mais il ne baissait pas
totalement les bras ; il ne disait pas que ce que les ministres
avaient derrière la tête ou ce qu’ils décideraient
ultérieurement ne fonctionnerait pas…
Ces ministres des Finances sont tombés
d’accord sur la nécessité :
- d’agir de manière énergique en recourant
à tous les outils disponibles afin de soutenir les institutions
financières et d’en prévenir la faillite ;
- geler les marchés du crédit et les
marchés monétaires ; s’assurer que les banques et les autres
institutions financières « ont un large accès aux liquidités et
aux financements » ;
- s’assurer
que les banques et les organismes d’intermédiation financière
sont « en mesure de lever un capital (suffisant) de la part du
public et de sources privées », afin de rebâtir la confiance et
de leur redonner la possibilité d’assurer des prêts aux foyers
et aux entreprises ;
- garantir les dépôts bancaires d’une
manière solide, afin que les gens aient confiance dans la
stabilité de leurs comptes, et
- prendre les mesures appropriées « afin de
relancer les seconds marchés des prêts immobiliers et d’autres
fonds sécurisés » ; assurer des évaluations précises et la
transparence, en conformité avec des « standards de comptabilité
de haute qualité ».
En plus du fait que le Trésor américain
envisageait d’ « acheter des parts dans des institutions
financières », l’Associated Press indiquait, le 12 octobre, que
les 15 pays de la zone Euro « garantiraient temporairement les
futures dettes bancaires afin d’encourager le prêt… durant une
période intérimaire et dans les conditions appropriées » pour
une période pouvant aller jusqu’à cinq ans. La recapitalisation
des banques fait partie de ce plan. Ce qui est espéré, c’est un
dégel du crédit et le recouvrement, par les marchés, d’un
fonctionnement normal.
D’après le New York Times du 12 octobre,
« chaque pays annoncera un chiffrage précis des mesures qu’ils
envisagent de prendre individuellement ». Le ministre belge des
Finances, Didier Reynders, a déclaré qu’il « n’était pas
question de mettre sur pied un fonds européen ». Une proposition
financière sera présentée au sommet plénier de l’Union
européenne à 27, avant la fin de la semaine, qui sera soumise
aux suffrages des parlements nationaux des Etats membres.
Voici la clé, permettant de comprendre ce
qui apparaîtra plus en détail, ou n’importe quelle information
nouvelle à venir : les gouvernements du monde vont piller leur
trésor afin de sauver de puissants intérêts capitalistes. En
dépit de déclarations audacieuses, nous pouvons nous attendre à
toujours davantage de ce que nous avons énuméré : pratiquement
rien ne sera fait en faveur des dizaines de millions de
personnes, dans le monde entier, qui sont dans un besoin énorme
d’être secourus. Tout au mieux, pour eux, il y aura… des
miettes !
Au cours des jours et des semaines à venir,
nous allons voir ces déclarations devenir des politiques, et
nous allons voir aussi comment réagissent les marchés mondiaux.
Etant donné l’immensité de la crise, personne n’est assuré que
quoi que ce soit puisse fonctionner. Il n’est pas rassurant, non
plus, d’entendre George Bush nous dire de rester calmes. Nous
n’avons plus aucun contrôle sur rien. Le 10 octobre, le Dow
Jones a chuté de 300 points, exactement au moment où Doubiah
parlait…
Dans une interview de Barron, le 13
octobre, il demandait au célèbre manager financier Jeremy
Grantham (âgé de soixante-dix ans) s’il pensait que nous ayons
appris quoi que ce fût de la crise actuelle ? Voici sa réponse :
« Nous avons appris énormément de choses, en très peu de temps,
beaucoup de choses à moyen-terme, et absolument rien du tout, en
ce qui concerne le long-terme… »
Il avait été confiant, depuis l’année
dernière, mais il ajouta que « les fondamentaux sont en train de
s’avérer pires que ce qu’il escomptait ». La chose terrible –
après tous ces efforts – c’est que le marché des valeurs
américain n’est même pas devenu abordable… » Il était tellement
élevé en 2000 qu’il n’a jamais retrouvé une tendance normale,
mais il s’en est rapproché. Toutefois, la nouvelle réellement
mauvaise, c’est que les grandes « bulles », à travers
l’histoire, se corrigent toujours avec outrance. » Il pense que
la juste valeur du S&P 500 (un indice boursier) est autour de
1025, à comparer à 899,22, le 10 octobre, à la fermeture. Mais
« typiquement, les bulles se sur-corrigent, d’un montant non
négligeable, qui peut atteindre les 20%. C’est parfaitement
décourageant », aussi ne se précipite-t-il pas pour acheter,
mais il redoute encore d’agir trop tôt. Il prédit un « bas » du
marché en 2010.
On lui a demandé également vers quoi il
voyait s’orienter les choses ? Il est très respecté, en tant
qu’expert, et pourtant, il a souligné « à quel point il ne
comprenait que très peu toutes les interactions emmêlées du
système financier global. Il espère que quelqu’un y entrave
quelque chose, par ce qu’en ce qui le concerne, ça n’est pas le
cas. Et il n’a vraiment aucune idée quant à la façon dont tout
ça va se terminer… C’est tellement compliqué que tout ce qu’il
peut conclure, instinctivement, en excipant de son expérience
historique, c’est que la crise sera plus longue, plus dure et
plus compliquée que tout ce que nous pouvons imaginer… » C’est
vraiment là une déclaration importante, venant de quelqu’un que
l’on appelle « le roi philosophe de Wall Street » !!
Le
coût humain d’une crise entièrement fabriquée
Ce sont les gens ordinaires qui sont le
plus durement frappés. Des millions de personnes vont souffrir
gravement, des années durant, à cause de cette crise totalement
évitable. Les fraudeurs qui l’ont causée, quant à eux, en sont
récompensés. D’honnêtes propriétaires de leur domicile, des
foyers, et des travailleurs sont punis. Impitoyablement.
Résultat des courses :
- des milliards de dollars perdus,
vraisemblablement plusieurs trillions de dollars seront perdus à
l’avenir ;
- des millions de familles ont perdu leur
maison, les propriétaires étant incapables de rembourser leurs
prêts, ou étant menacés de saisie, dans la pire crise du
logement depuis la Grande Dépression de 1929 ; en fin de
parcours, les estimations allant jusqu’à dix millions de saisies
avant le retour de la stabilité et la reconstruction seront sans
doute dépassées ;
- Il y aura vraisemblablement plus d’un
million de faillites personnelles en 2008 et un nombre encore
bien plus important en 2009, à comparer à 800 000 en 2007 et à
573 000 en 2006 ; ces chiffres étant inférieurs aux moyennes de
1,5 million, sur la période 2000 – 2005, enregistrées avant
l’adoption, en 20058, du Bankruptcy Abuse Prevention and
Consumer Protection Act ; d’après Samuel Gerdano, le responsable
de l’American Bankruptcy Institute, le surendettement des
consommateurs, « rendu pire par la crise des prêts immobiliers »
est le principal problème ; ce problème ne diminuera sans doute
pas, ni à moyen, ni a fortiori à court termes.
- la montée du chômage ; il ne s’agira plus
du timoré 6,1% incluant les travailleurs découragés et les gens
à temps partiel qui veulent des emplois à plein temps (mais n’en
trouvent aucun) ; l’économiste John Williams situe le chiffre
réel à plus de 12 %, et celui-ci ne cesse d’augmenter.
- le surendettement des consommateurs ;
perclus de crédits, mais ayant toujours besoin de davantage de
crédit pour survivre, et qui se voient imposer des taux
d’intérêts usuraires, pour les obtenir ;
- le déclin des salaires et des bénéfices,
face à des dépenses exponentielles, rendant de plus en plus
difficile de simplement s’en sortir ;
- des banques alimentaires et des abris
pour sans-domicile fixe exigeant plus de moyens, mais contraints
à renvoyer des gens en raison de leur manque de ressources ; et
- les choses, de manière générale,
empirent ; jusqu’à nous amener au bord du précipice, selon
certains ; même les plus optimistes redoutent l’avenir ;
personne n’ose afficher la moindre complaisance.
Quelles que soient les nouvelles politiques
qui émergeront. Quelles que soient les formes qu’elles
prendront. A moins qu’elle ne s’attaque à la dimension humaine
du problème, elles n’apporteront strictement aucun soulagement à
ceux qui en auraient le plus grand besoin. C’est-à-dire à des
millions et des millions de citoyens frappés par la crise, de
plus en plus nombreux. Désespérés et désemparés. Le problème
n’est pas qu’économique : c’est un problème moral, éthique. La
déclaration du G-7 ne traite ni l’un, ni l’autre aspect. Elle ne
visait qu’un seul objectif : sauver Wall Street. Le capitalisme
industriel. Une autre idée serait de les laisser crever et de
les remplacer par un nouvel ordre mondial. Un ordre mondial
praticable. Un ordre mondial qui respecte les gens, et non pas
le capital.
Traduit de l'anglais par Marcel
Charbonnier
[* Stephen Lendman vit à Chicago, on peut
le joindre à son adresse mél :
lendmanstephen@sbcglobal.net
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