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Opinion
Les installations
israéliennes et l'attitude du 14 mars...
Soraya Hélou
Mardi 28 décembre 2010
Etrange pays que le Liban. Une partie de sa classe politique
semble avoir honte de l’autre et des réalisations des services
sécuritaires officiels. La récente découverte (ainsi que le
démantèlement) par les services de l’armée de dispositifs de
surveillance et d’écoute sophistiqués placés par les Israéliens
sur les cimes libanaises de Sannine est ainsi passée presque
inaperçue. N’étaient les déclarations d’appui et d’hommage de la
part de l’opposition à l’armée et à sa remarquable performance,
les Libanais n’auraient probablement pas pu mesurer son
importance. Le camp du 14 mars n’a en effet pas jugé nécessaire
d’en parler et lorsqu’il se sent obligé de l’évoquer, en réponse
à une déclaration de l’opposition, il la minimise comme s’il
s’agissait d’une réalisation secondaire et banale. Pourtant,
l’armée libanaise, alertée par la résistance, a réussi une
grande mission à la fois sécuritaire et souverainiste, puisqu’il
s’agit d’empêcher l’ennemi de surveiller et d’écouter l’ensemble
du pays, sans parler de la performance technologique qui
consiste à neutraliser un dispositif ultrasophistiqué.
Même si l’opposition a décidé depuis longtemps de ne pas relever
les attitudes suspectes du camp du 14 mars, cette fois, les
observateurs ne peuvent que se poser des questions : pourquoi
cette volonté délibérée et systématique de ne pas prendre au
sérieux les activités d’espionnage israélien au Liban ainsi que
les performances de l’armée pour démanteler leurs réseaux et
leurs installations? Une première réponse pourrait consister à
dire que les piliers du 14 mars n’ont aucune connaissance en
matière d’espionnage et d’équipements techniques et ils
préfèrent donc ne pas parler d’un sujet qu’ils ne maîtrisent
pas. Dans ce cas, pourquoi se sont-ils empressés de dénigrer la
fameuse conférence de presse du président de la commission
parlementaire des télécommunications et du ministre Charbel
Nahas, sur l’infiltration et le contrôle par les Israéliens du
secteur des télécoms au Liban ?
Une seconde réponse pourrait consister à dire que les piliers du
14 mars estiment que l’installation par Israël de dispositifs de
surveillance au Liban n’est pas un fait nouveau et en fin de
compte, l’armée ne fait que son travail, la résistance aussi.
C’est vrai, mais cela ne fait-il pas non plus partie du devoir
de la classe politique de saluer une performance libanaise, face
à un ennemi aussi déterminé et influent ?
Sans vouloir lancer des accusations graves, on ne peut que faire
un lien entre l’insistance du 14 mars, ou de certains
représentants de ce camp, pendant des années à garder le
contrôle du secteur des télécommunications, via la nomination
d’un des leurs à la tête du ministère. En toute bonne foi,
l’opposition avait alors cru que cette revendication était
essentiellement due au fait que ce secteur rapporte beaucoup
d’argent. Mais avec toutes les découvertes sur l’infiltration
israélienne de ce secteur, il est légitime de se poser des
questions. Tout comme on ne peut que se rappeler le tollé de
certaines parties, chrétiennes notamment, du 14 mars au sujet
d’une présence d’éléments de la résistance sur les cimes de
Sannine. Pendant plusieurs mois, il y a plus d’un an, une
véritable campagne avait été menée contre cette présence qui
accusait la résistance de vouloir contrôler tout le Liban et en
particulier les régions chrétiennes, et qui appelait à un
retrait des éléments de la résistance de ces lieux pour les
laisser à l’armée libanaise. Pourtant, de l’aveu même de
l’armée, c’est la résistance qui a alerté les services libanais
sur la présence des installations israéliennes sur les cimes de
Sannine. En critiquant violemment la présence de la résistance
sur les cimes de Sannine, qui constituent un lieu stratégique
face à Israël, les parties chrétiennes cherchaient-elles à
protéger les installations israéliennes ? Bien sûr, elles
s’empresseront de crier à l’injustice, brandissant haut et clair
un attachement à la souveraineté et accusant le Hezbollah de
vouloir exclure tous ceux qui ne sont pas de son avis. Mais tout
ce tapage médiatique ne modifiera pas le fond de la question :
pourquoi chaque fois qu’Israël est mis en cause, certaines
parties cherchent à faire diversion en soulevant d’autres
questions ou en cherchant à minimiser les découvertes nationales
? Certes, rien ne décourage l’armée et la résistance et ne les
détourne de leur mission, mais en politique, il y a quand même
rarement des coïncidences aussi nombreuses…
Article publié sur Résistance islamique au Liban
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