Opinion
La Havane d'Eusebio
Leal Spengler : une utopie en
résurrection ?
Salim
Lamrani
Salim
Lamrani
Mercredi 15 juin
2011
Journée d’études
organisée par
Gradiva - Créations au féminin, « Le
féminin : une utopie ? », Université
Paris-Sorbonne, Institut d’Etudes
Ibériques et Hispano-américaines, 4 juin
2011.
http://gradiva.univ-pau.fr/live/manifestations/manifestations_2011
Alejo Carpentier, dans un vibrant
hommage à sa ville natale, la surnommait
« La Ciudad de las columnas », en raison
de la magie de ses innombrables piliers
et colonnes d’essence baroque qui font
de La Havane un lieu unique en Amérique
latine. Avec son destin si singulier
dans l’histoire du continent, la ville
natale de José Martí est un espace
mythique qui ne peut laisser
indifférente l’âme humaine en vertu de
son extraordinaire pouvoir
d’enchantement. Fruit du mélange de
styles architecturaux divers d’origine
maure, espagnole, française, italienne,
grecque et romaine, la capitale cubaine
se définit avant tout par son
syncrétisme si particulier[1].
L’excellence du baroque cubain se trouve
dans la Plaza de la Catedral, le style
néoclassique dans le Palacio de Aldama,
le néogothique dans la Iglesia de Reina,
l’Art nouveau dans la Gare centrale,
l’Université de La Havane ou le
Capitolio, l’Art Déco dans l’édifice
Bacardí, une combinaison d’essence
coloniale et soviétique dans le Palacio
de Convenciones, la présence du
modernisme dans l’impressionnant édifice
Focsa ou l’influence byzantine dans la
Cathédrale Orthodoxe.
A ce sujet, Carpentier écrivait :
« La vieille ville, jadis appelée
intramuros, ville en ombre, faite
pour l’exploitation des ombres, ombre,
elle-même, lorsqu’on l’imagine en
contraste avec tout ce qui, au fil du
temps, a germé, poussé, vers l’ouest,
depuis le début de ce siècle, où la
superposition de styles, l’innovation de
styles, bons et mauvais, davantage
mauvais que bons, ont créé à La Havane
ce
style sans style qui à la fin, par
processus de symbiose, s’amalgame,
s’érige dans un baroquisme particulier
qui fait fonction de style, en
s’inscrivant dans l’histoire des
comportements urbanistiques. Parce que,
peu à peu, de l’aspect bigarré,
entremêlé, emboité entre des réalités
distinctes, ont surgi peu à peu les
constantes d’une allure générale qui
distingue La Havane des autres villes du
continent[2]. »
Un peu d’histoire
Fondée le 16 novembre 1519 par le
conquistador espagnol Diego Velásquez de
Cuéllar, La Havane, traversée notamment
par les fleuves Almendares, Martín
Pérez, Quibú, Cojímar et Bacuranao,
s’étend aujourd’hui sur plus de 720
kilomètres carrés, que se partagent deux
millions d’âmes. Elle est divisée en
quinze municipalités. La figure de San
Cristóbal, patron de la ville, veille
sur la plus grande métropole de
l’archipel, qui abrite également le
principal port national et constitue le
centre politique, économique et culturel
de Cuba[3].
D’après les historiens, le cacique taino
Habaguanex donna son nom à la capitale
cubaine, qui est aussi la sixième ville
fondée par la Couronne espagnole dans
l’île. Sur la Plaza de Armas, centre
politique de l’époque coloniale, le
monument
El Templete célèbre la fondation de
la ville. On peut lire sur sa colonne
commémorative érigée par le gouverneur
Francisco Cajigal de la Vega en 1754 une
inscription en latin que l’on peut
traduire comme suit :
« Retiens ton pas, marcheur, orne ce
site d’un arbre, d’un fromager, je dirai
plutôt signe mémorable de la prudence et
ancienne religion de la jeune ville, car
certainement sous son ombre fut immolé
solennellement dans cette ville l’auteur
de la santé. La réunion des prudents
conseillers eut lieu pour la première
fois il y a plus de deux siècles : il
était conservé par une tradition
perpétuelle : cependant, il céda au
temps. Tu verras une image gravée
aujourd’hui dans la pierre, c’est-à-dire
le dernier jour de novembre de l’année
1754[4]. »
Contre vents et marées, La Havane
sut préserver son authenticité, en dépit
des attaques de pirates et corsaires
français qui la réduisirent en cendres à
maintes reprises durant la première
moitié du XVIème siècle, plus
précisément en 1538 et 1555. En 1556,
grâce à la création du système de
flottes pour le commerce entre la
Péninsule ibérique et l’Amérique latine,
La Havane devint le premier port du
continent. En 1561, la Couronne
espagnole décida de faire de la ville le
centre du Nouveau Monde en y concentrant
les navires chargés d’or, de laine,
d’émeraude, de cuirs, d’épices et de
matières premières alimentaires, en
provenance des colonies américaines et à
destination de la péninsule. Pour
protéger ces fabuleuses richesses, des
défenses militaires furent édifiées à
l’entrée de la Baie de La Havane à des
emplacements stratégiques, avec la
construction des majestueux châteaux de
la Real Fuerza, la Punta
et los Tres Reyes del Morro. La
Havane devint ainsi la ville la mieux
protégée du continent, « la Clé du
Nouveau Monde et rempart des Indes
Occidentales[5] ».
Lors Philippe II conféra à La
Havane le titre de ville le 20 décembre
1592, plusieurs églises et couvents
avaient été édifiés donnant un aspect
citadin à la future capitale. Le
gouverneur de Cuba y avait déjà établi
sa résidence officielle depuis près de
trente ans, délaissant Santiago de Cuba,
siège historique du gouvernement de
l’île. Conscient de son importance
stratégique, les différents rois
d’Espagne n’eurent de cesse de la
fortifier tout au long du XVIIe pour
dissuader les puissances étrangères de
s’en emparer. Enfin, en 1607, La Havane
fut désignée capitale de l’île par un
Ordre Royal qui divisa également le pays
en deux gouvernements : un à La Havane
et l’autre à Santiago, le second étant
subordonné au premier[6].
Au même moment, la ville fut
édifiée en utilisant le bois, matériau
disponible en abondance dans l’île,
lequel fut mélangé aux différents styles
importés d’Espagne et plus précisément
des îles Canaries, créant ainsi un
syncrétisme architectural d’une
exceptionnelle richesse et d’une rare
beauté, qui serait la marque de fabrique
de la capitale cubaine.
Lorsqu’en 1649, une épidémie de
peste en provenance de Cartagena de
Indias en Colombie extermina un tiers de
sa population, La Havane, tel un phœnix
sut faire face à cette tragédie et
renaitre de ses cendres. Elle put de
nouveau arborer son blason – qui fut
officialisé le 30 novembre 1665 par la
reine Marie-Anne d’Autriche, veuve de
Philippe IV –, ayant pour emblèmes
héraldiques les trois premiers châteaux
forts de la ville,
La Real Fuerza,
los Tres Santos et
San Salvador de la Punta en forme de
trois tours d’argent sur un fond bleu,
et une clé d’or symbolisant la porte du
Nouveau Monde[7].
Au XVIIe siècle, La Havane
étendit son territoire avec la
construction de nombreux édifices
civils, militaires et religieux tels que
l’Hôpital San Lázaro, le château El
Morro et le couvent San Agustín, sans
oublier la fontaine de la Dorotea de la
Luna en La Chorrera, le monastère Santa
Teresa, le couvent San Felipe Neri ou
l’ermitage del Humilladero.
Lorsque le 6 juin 1762, La Havane
fut attaquée par l’impressionnante armée
navale britannique de George Pocock avec
ses cinquante navires de guerre et ses
14 000 soldats, les habitants de la
ville lui opposèrent une résistance
héroïque durant deux mois d’âpres
combats. Mais face à la supériorité
militaire de l’Angleterre, La Havane
tomba entre les mains de la couronne
anglaise qui l’occupa pendant onze mois.
En 1763, une négociation entre Madrid et
Londres déboucha sur la libération de la
ville en échange de La Floride. Cette
année là, juste après le départ des
Britanniques, débuta la construction de
la forteresse San Carlos de la Cabaña –
la plus importante jamais édifiée par
l’Espagne en Amérique – qui durerait
onze ans, afin de préserver la ville des
futures attaques et de faire de la baie
de La Havane un bastion imprenable[8].
Au XIX siècle, la ville se
modernisa avec la création du premier
chemin de fer en 1837 entre La Havane et
Güines, de 51 kilomètres, construit
principalement par la laborieuse et
discrète communauté chinoise qui compte
aujourd’hui près de 100 000 âmes. Cuba
devint ainsi le cinquième pays du monde
à disposer d’un chemin de fer et le
premier de l’aire hispanophone.
L’édification de multiples centres
culturels tels que le Théâtre Tacón, le
théâtre Coliseo ou le Liceo Artístico y
Literario transforma la ville en l’une
des références artistiques et
intellectuelles du continent. Le
développement de l’industrie sucrière et
du tabac fit de La Havane un lieu
extrêmement prospère, au point qu’en
1863, les murailles de la ville furent
détruites afin d’étendre sa superficie
et de construire de nouveaux édifices en
tous genres. Ce fut à cette période, en
1854 exactement que fut érigé le
cimetière Colón, musée à ciel ouvert
d’une richesse architecturale unique, et
plus grande nécropole du monde après le
cimetière Staglieno de Gênes[9].
En 1898, les Etats-Unis
profitèrent de l’explosion du cuirassé
Maine dans la baie de La Havane pour
intervenir dans la Seconde Guerre
d’indépendance de Cuba et frustrer les
rêves d’émancipation de l’île. Ils
l’occupèrent jusqu’en 1902 et la
transformèrent en un protectorat en y
installant à la tête de la nation Tomás
Estrada Palma, citoyen étasunien et
annexionniste convaincu qui accepta
l’infâme amendement Platt[10].
Durant la période républicaine,
et plus précisément dans les années
1930, d’innombrables constructions
émergèrent à La Havane, avec
l’apparition de somptueux hôtels de
luxe, de casinos flamboyants et des
clubs nocturnes plus rutilants les uns
que les autres, tous contrôlés par la
mafia de Meyer Lansky et de Lucky
Luciano avec la bénédiction du dictateur
Fulgencio Batista. Il suffit de
mentionner l’Hôtel National de Cuba,
joyau architectural édifié en 1930 en
plein quartier du Vedado, à quelques pas
du légendaire Malecón, qui donne à La
Havane sa silhouette si féminine.
Monument national, il est l’un des
symboles de l’histoire, de la culture et
de l’identité cubaine. Le Focsa et
l’hôtel Habana libre sont également des
vestiges de l’époque où La Havane était
la capitale continentale du plaisir et
de l’oisiveté, fréquentée par les grands
du monde, de Winston Churchill à Frank
Sinatra[11].
Depuis le triomphe de la
Révolution en 1959, Cuba a subi la plus
importante transformation politique,
économique et sociale de l’histoire de
l’Amérique latine. Néanmoins, au niveau
topographique et architectural, peu de
changements eurent lieu si ce n’est la
construction d’édifices publics tels que
l’imposant Hôpital Ameijeiras dans le
centre de la ville, et d’hôtels tels que
le Meliá Cohiba à partir des années 1990
avec la revitalisation de l’industrie
touristique.
L’œuvre d’Eusebio Leal Spengler et la
« Période spéciale »
Eusebio Leal Spengler, historien de La
Havane, personnage d’une exceptionnelle
culture et d’un optimisme à toute
épreuve, auteur prolifique, lauréat des
plus hautes distinctions dans le monde
entier, a toujours eu une foi
inébranlable en l’être humain, en son
peuple et en sa capacité à réaliser les
utopies les plus folles. Né en 1942 dans
la « Ville des colonnes », ce docteur ès
Sciences historiques de l’Université de
La Havane est un spécialiste des
sciences archéologiques. Disciple du
fondateur du Bureau de l’Historien de la
ville de La Havane, le légendaire Emilio
Roig de Leushenring, il a pris la
direction de cette institution en 1967.
Sa mission consiste à contribuer à la
diffusion de l’histoire et de la culture
cubaines à travers « la préservation des
symboles et expressions matérielles et
spirituelles de la nationalité […] et de
la mémoire historico-culturelle de la
ville et plus particulièrement de son
Centre historique [12]»,
le plus grand centre colonial d’Amérique
latine.
Également Président de la Commission
nationale des monuments, ambassadeur de
Bonne Volonté des Nations unies et
député du Parlement unicaméral cubain,
Eusebio Leal est un citoyen engagé qui a
fait sienne la devise de José Martí :
« A la Patria no se le ha de servir por
el beneficio que se pueda sacar de ella,
sea de gloria o de cualquier otro
interés, sino por el placer
desinteresado de serle útil[13] ».
Il partage également cette autre
conviction d’essence martinienne que
« sans culture il n’y a pas de liberté
possible[14] ».
Eusebio Leal avait inauguré les
premières salles d’exposition du Musée
de la Ville en 1968 dans l’ancien Palais
des Capitaines Généraux. En 1981, il
entreprit l’œuvre de restauration du
Centre Historique, monument national
depuis 1976 et Patrimoine de l’Humanité
depuis 1982, avec la création d’un
Département de l’Architecture. De 1981 à
1990, huit édifices avaient été
totalement restaurés grâce à
l’ingéniosité de Eusebio Leal et de ses
collaborateurs et à la relation spéciale
avec l’Union Soviétique qui assurait une
certaine stabilité économique, portant
ainsi à douze le nombre des dépendances
culturelles du Bureau de l’Historien. Le
Musée de la Ville s’articula autour d’un
système particulier de galeries, centres
culturels de formation artistique et de
recherche pour toutes les catégories de
la population[15].
L’effondrement de l’Union
soviétique en 1991 eut un impact
dramatique sur l’économie cubaine, qui
perdit son principal partenaire
commercial. De 1989 à 1993, le PIB chuta
de 33% et Cuba fut confrontée à la plus
grave crise de son histoire. Près de 85%
du commerce international de Cuba était
réalisé avec l’Union Soviétique. Les
importations passèrent de 8,1 milliards
de dollars à 1,2 milliards de dollars et
les exportations baissèrent de 75%. La
consommation totale diminua de 27% et
celle des ménages de 33%. La formation
de capital passa de 25% à moins de 5% du
PIB et le déficit fiscal s’éleva de 7% à
30% du PIB. Le revenu de la balance des
paiements passa de 4,122 milliards de
dollars à 356 millions de dollars. Le
salaire réel baissa de 25% et le
coefficient de libéralisation de
l’économie cubaine (valeur du commerce
international dans le PIB) chuta de
70,2% à 25,9%[16].
Les spéculations sur l’avenir de
la Révolution cubaine allaient bon
train. Les Etats-Unis s’apprêtaient à
assener ce qui était censé être le coup
de grâce, en adoptant les lois
Torricelli en 1992 et Helms-Burton en
1996, lois extraterritoriales et
rétroactives qui aggravaient les
sanctions contre une population éreintée
par les difficultés et vicissitudes
quotidiennes. Au milieu de ce panorama
apocalyptique, Eusebio Leal défia la
fatalité, rejeta les pronostics
dantesques et se décida à réaliser
l’impossible : poursuivre l’œuvre de
restauration du centre historique de la
capitale, alors que la nation se
trouvait sans ressources et abandonnée
de tous[17].
Eusebio Leal s’est senti investi d’une
mission, mieux, d’un sacerdoce : sauver
sa ville de la désintégration, avec
cette abnégation et ce courage si
caractéristiques de l’idiosyncrasie
cubaine. De foi chrétienne, ancien
membre de
Juventud Acción Católica, Eusebio
Leal aurait d’ailleurs pu embrasser la
voie religieuse, s’il n’avait pas
ressenti cet amour passionné pour les
femmes, en particulier pour son épouse
Anita. Humble, Leal inscrit son œuvre
dans une prise de conscience collective
et ne la dissocie pas de la
collaboration de son équipe
d’historiens, d’architectes et de
professionnels de la construction et
restauration : « Je crois que nous avons
tous reçu un appel : nous avons
travaillé contre le temps, tributaire de
la pluie, du cyclone et de la crise
économique. Nous avons la perception
intime que si nous arrivons à rendre à
la communauté cette zone ancienne de la
capitale, nous aurons triomphé[18]. »
Pour répondre au défi titanesque de la
conservation de l’héritage architectural
et culturel de la nation dans un
contexte de grave crise économique où le
mot d’ordre était « survivre », en 1993,
Eusebio Leal, à la tête de la Direction
du Patrimoine culturel, nouvelle
institution créée à cet effet, a obtenu
des autorités une certaine autonomie
dans la gestion du Bureau de l’Historien[19].
Grâce à son talent personnel et sa
persévérance, il a transformé
l’institution en véritable réseau
économique et culturel comprenant des
hôtels, restaurants, boutiques, musées
et ateliers de construction et de
restauration, capables de générer les
fonds nécessaires à la préservation du
Centre historique. Les résultats sont
spectaculaires et lui valent une
renommée mondiale. Au total, près de
cent édifications anciennes, de
structure complexe et d’une grande
importance historique pour la plupart,
ont été restaurées autour de la Plaza de
Armas, Plaza de San Francisco, Plaza
Vieja, Alameda de Paula, Plaza de Cristo,
Plaza de la Catedral, le Prado et le
Malecón, sans oublier la forteresse San
Carlos de la Cabaña[20].
Eusebio Leal a également ranimé la vie
culturelle et sociale de la Vieille
Havane, avec une multitude d’activités,
d’expositions, de rencontres, de débats
culturels, scientifiques, sociaux et
commerciaux qui se tiennent chaque mois
dans les vingt-sept musées, maisons et
salles spécialisées, les onze centres
culturels du Centre historique, les
quatorze bibliothèques, les cinq
laboratoires de recherche, les trois
cabinets d’études centrales, le centre
d’archives historiques et dans la
photothèque. Eusebio Leal est devenu
l’exemple vivant que la sauvegarde
patrimoniale était possible dans des
conditions économiques d’une extrême
adversité. Ses qualités d’excellent
gestionnaire et sa condition d’amant de
La Havane ont fait de son œuvre un
indéniable succès économique et culturel[21].
Eusebio Leal peut se montrer satisfait
de son œuvre:
« Nous avons redonné vie à chaque
enceinte dans toutes ses manifestations,
comme digne habitat où prolifèrent
écoles, institutions culturelles et de
santé. Appeler résurrection ce qui
paraissait mort, semblerait à des
regards puérils une croisade romantique.
Et si cela était le cas, nous ne
renonçons pas à être romantiques ni ne
ressentons de honte pour cela à une
époque marquée par des événements
apocalyptiques. Nos besoins projettent
d’autres formes d’espérance : celle qui
naît de la récupération de la mémoire,
du rêve partagé par beaucoup de créer un
nouvel ordre[22]. »
Dans le Parc central de La Havane, sous
le regard azur du ciel, José Martí,
l’Apôtre cubain, le héros national, ,
celui de « por Cuba y para Cuba », celui
de « L’Âge d’or », celui qui unit son
« destin à celui des pauvres du monde »,
celui de « notre Amérique », celui qui
sait que « des tranchées d’idées valent
plus que des tranchées de pierres »,
celui de « la Patrie, c’est
l’humanité », celui qui partage la
conviction profonde que « toute la
gloire du monde tient dans un grain de
maïs », l’auteur intellectuel de la
Révolution cubaine, celui qui sut être
un homme de son temps, celui qui signala
le danger représenté par « le Nord
convulsé et brutal qui nous méprise »,
celui qui s’est immolé « face au
soleil » dans la bataille de Dos Ríos
pour l’indépendance de sa Patrie, celui
qui signale que « Dans les Andes peut se
trouver le piédestal de notre liberté,
mais le cœur de notre liberté se trouve
chez nos femmes », celui-ci, lève le
bras et indique la voie à suivre pour
préserver l’indépendance et l’identité
nationales. En même temps, il rend
hommage à l’œuvre de Don Eusebio Leal,
Ulysse des temps modernes, infatigable
travailleur qui, comme Antonio Machado,
sait qu’« il n’y a point de chemin, on
se fraye un chemin en marchant » et l’on
atteint l’utopie. « Patrie et foi » a
toujours été sa devise personnelle[23].
Docteur ès Etudes Ibériques et
Latino-américaines de l’Université Paris
Sorbonne-Paris IV, Salim Lamrani est
enseignant chargé de cours à
l’Université Paris Sorbonne-Paris IV, et
l’Université Paris-Est Marne-la-Vallée,
et
journaliste français, spécialiste des
relations entre Cuba et les Etats-Unis.
Contact :
Salim.Lamrani@univ-mlv.fr
[1]
Alejo Carpentier, La ciudad
de las columnas,
La Havane, Editorial
Letras Cubanas, 1982.
[4]
Eusebio Leal,
La Habana, ciudad antigua,
La Havane, Editorial Letras
Cubanas, 1988, p. 7.
[5]
José Martín Félix de Arrate y
Acosta,
Llave
del Nuevo Mundo: antemural de
las Indias Occidentales. La
Habana descripta: noticias de su
fundación, aumentos y estados,
La Havane, Comisión Nacional
Cubana de la Unesco, 1964.
[6]
Eusebio Leal,
La Habana, ciudad antigua,
op.cit.
[7]
Luis Suárez & Demetrio Ramos
Pérez,
Historial general de España y
América, Madrid, RIALP
Ediciones, 1992, Tomo IX, p.
199.
[8]
Francisca López Civeira, Oscar
Loyola Vega & Arnaldo Silva
León,
Cuba y su historia, La
Havane, Editorial Gente Nueva,
2005, pp. 28-30.
[10]
Jorge Ibarra,
Cuba: 1898-1921. Partidos
políticos y clases sociales,
La Havane, Editorial de Ciencias
Sociales, 1992, p. 225.
[11]
Enrique Cirules,
El imperio de La Habana, La
Havane, Editorial José Martí,
2003.
[13]
José Martí,
Obras completas, La Havane,
Editorial Nacional de Cuba,
1963, tome I, p. 196.
[16]
Salim Lamrani, Fidel Castro,
Cuba et les Etats-Unis
(Pantin: Le Temps des Cerises,
2006), p. 140.
[21]
Bertrand Vannière, « Patromoine :
Eusebio Leal Spengler, historien
de La Havane »,
Cubanía, 2009.
[22]
Eusebio Leal, « Habana
patrimonial »,
Dirección de Patrimonio Cultural.
http://www.ohch.cu/
(site consulté le 2 juin 2011).
[23]
Eusebio Leal, « Patria y fe ha
sido mi divisa personal »,
Cuba debate, 9 novembre
2010.
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