Opinion
Le crash boursier
est à nos portes et les experts radotent
Robert Bibeau
Robert
Bibeau
Mercredi 25 septembre 2013
Analysons
l’économie politique contemporaine
Aujourd’hui, travail d’apprentissage
ardu. Il s’agit de lire à l’endroit un
texte écrit à l’envers, aporie d’une
star de l’économie qui pollue les ondes
télé et radio, tout comme ses collègues
encombrent les cahiers économiques des
journaux à la solde qui chaque semaine
vous abreuvent de leurs inepties
alambiquées (1) [Le blogue d’Olivier
Berruyer
http://www.les-crises.fr/].
Commençons notre décomposition
analytique par ce tableau explicite
(ci-dessous).
« Cinq ans
après la faillite de Lehman Brothers, le
capitalisme de connivence (sic) se porte
comme un charme. Le15 septembre 2008,
faillite de Lehman Brothers, stupeur et
tremblements. Gouvernements et banques
centrales se précipitent pour sauver la
finance et donc l’économie (sic). Le
terme d’ »économie irréelle« ,
popularisé par le philosophe
altermondialiste Patrick Viveret, se
répand.».
TABLEAU 1
|
2008
|
2012
|
Volume des produits
dérivés négociés hors
cote$ |
516 000 MM $ |
708 000 MM $ |
Endettement des pays de
l’OCDE (les riches) |
75% |
105% |
Déficit des pays de
l’OCDE en % de leur PIB |
3,5% |
5,5% |
Effet de levier des
banques « too big to
fail » |
31 Lehman B. |
De 13 à 85 |
Bilans des banques
centrales Fed et BCE
(créances pourries
échangées contre de
l’argent du néant) |
900 MM$
1400 MM € |
3 000 MM$
3 000 MM € |
Taux de croissance des
pays de l’OCDE |
0,5 % |
-,1 % |
Taux de croissance
mondiale |
2,7 % |
3,2 % |
Taux de chômage des pays
de l’OCDE |
5,9 % |
8 % |
Réserves de change
mondiales |
4 000 MM $ |
11 200 MM $ |
Réserves de change de la
Chine |
1 900 MM $ |
3 500 MM $ |
Que signifient ces chiffres, demande
l’expert en salopette ?
« Tous ces
chiffres -(Tableau 1)- ces milliards et
ces pourcentages – représentent-ils
l’économie réelle ou
l’économie irréelle ?
La seule évolution positive serait la
croissance mondiale, mais on sait que
dans les chiffres du PIB rentre la
dette. Cette croissance du PIB est-elle
donc réelle ou illusoire ? »
Où est l’erreur
commise par l’économiste en herbe ?
Simple, l’économie «irréelle» ça
n’existe pas. C’est une
métaphore colportée par les papagayos.
Toute opération
industrielle-commerciale-boursière-économique
est réelle ou elle n’existe pas.
Pire, toute action-transaction est
comptabilisée – créditée au vendeur et
débitée à l’acheteur. La marchandise
quitte réellement le port de Shanghai et
entre réellement au port de Los Angeles.
Si l’économiste veut indiquer que le
dollar américain qui sert à payer cette
transaction ne vaut rien (dans le sens
d’une monnaie de singe) alors qu’il le
dise ainsi – ça ne constitue pas de
l’économie «irréelle»
mais du commerce frauduleusement réel,
une arnaque, dont nous verrons tantôt
l’inévitable aboutissement.
Monsieur l’expert a
tout faux. Les politiciens et les
technocrates sont totalement incapables
d’influencer ce qu’il appelle l’économie
réelle, encore moins l’«irréelle » si
elle existait. Ils sont des pions
entraînés malgré eux par les lois
nécessaires du développement
impérialiste. Sur ces lois
personne n’a aucun pouvoir – le mode de
production et les rapports de production
capitalistes fonctionnent ainsi et dans
leur course au profit maximum ils
entrainent le système à sa perte
inexorable. L’expert économiste
poursuit…
« Depuis des
années les pays développés
importent des biens et services
en provenance des pays dits émergents et
exportent de la dette libellée dans leur
monnaie. Ainsi le monde s’est divisé en
pays
chroniquement exportateurs qui
détiennent des « réserves de
change » en dollars et en euros
et en pays chroniquement
importateurs qui exportent de la dette.
Les réserves de change des banquiers
centraux ne sont pas des liasses de
billets. Ce sont bien des titres de
dettes libellées en dollars et en euros. ».
Que voilà un récit
réaliste ! Vous voyez bien que
l’on traite d’économie réelle – l’expert
est assez lucide pour convenir que le
créditeur se retrouve avec des
obligations, des lettres de change ou de
créance n’ayant aucune valeur car le
débiteur le paie en monnaie de singe –
qu’il n’honorera jamais puisqu’il est
virtuellement déjà en faillite. Les USA
avec leur immense dette (16 400
milliards seulement pour le gouvernement
fédéral) ne pourront jamais rembourser
car ils ne produisent pas suffisamment
de marchandises ayant une valeur
marchande (du temps de travail et de la
plus-value cristallisée). Ce n’est pas
de l’économie irréelle, c’est une
arnaque bien réelle que de voir un
emprunteur rire de ses créanciers qu’il
inonde de papier monnaie dévalué.
« Nous
avons donc d’un côté des pays émergents
et des pays producteurs de pétrole.
Ce côté a accumulé des créances = de
l’argent en devenir si toutefois les
crédits sont remboursés par leurs
réputés riches clients. Nous avons
de l’autre côté des pays réputés riches.
Ce côté a accumulé des dettes – une
promesse de payer un jour – contre de la
consommation = du pétrole déjà brûlé,
(…)».
Encore une fois
l’expert désigne le monstre mais il ne
le démasque pas. Quelle sera la
résultante de cet immense vol
international selon vous ? La Chine, la
Russie, l’Inde, le Brésil, les poches
pleines de monnaie américaine et
européenne sans valeur face aux
États-Unis, l’Europe occidentale, le
Japon redemandant sans cesse d’autres
marchandises que ces anciennes
puissances coloniales ne savent plus
elles-mêmes produire, ayant délocalisé
leur production vers les pays ateliers.
Admirez le rire jaune de leurs
créanciers nouveaux impérialistes
floués, mais enchaînés au char des
débiteurs endettés ? Il y a péril en la
demeure.
A qui profite ce système moribond ?
« Depuis 2008,
le système s’est emballé. Mais dans ces
échanges qui s’est enrichi ?
Qui est le plus prospère ? Celui qui
doit de l’argent, le débiteur ou au
contraire celui à qui on en doit, le
créancier ? Personne ne peut dire à qui
ce système profite. Le débiteur a
consommé mais le créancier verra-t-il
son argent ?».
Le lâche petit
boursicoteur – assez prétentieux pour
décrire le coup fourré mais trop lâche
pour le démonter. À l’évidence les
pays qui prêtent des milliards à des
mendiants sont déjà filoutés. Quand
pourront-ils recouvrer leurs deniers ?
Jamais ! Personne ne profite de ce
système financier-boursier-flibustier.
Le créditeur et l’emprunteur sont
floués. La seule différence étant que le
débiteur (les pays impérialistes en
déclin) consomment des marchandises
qu’il ne paiera jamais, et les monopoles
occidentaux empochent des profits (car
50% des exportations chinoises sont le
fait d’entreprises occidentales
installées en Chine) en monnaie de
pacotille qu’ils ne verront jamais. Idem
pour les pays impérialistes ascendants.
Mais le pire dans
tout ce processus où le voleur se dupe
lui-même, c’est que nul n’y peut
rien. C’est le mode de production
capitaliste qui est ainsi conçu
et de plus on peut déjà percevoir le
moment où cette non valorisation du
capital – le capital devant
impérativement s’investir pour se
reproduire de manière élargie,
c’est-à-dire produisant de la plus-value
– la machine économique s’enrayera
durablement parce qu’incapable de
s’oxygéner ces nouveaux capitaux.
La mystification ultime, « La cause
profonde » de cette crise !!!
« La
cause profonde de cette crise n’est pas
à chercher dans des taux d’intérêt
inadaptés ou une question de
masse monétaire. Nous pensons
que la cause profonde de cette
crise est la « monnaie-dette » manipulée
par les banques centrales. Si
toutes les transactions passées avaient
été effectuées avec de la « monnaie-marchandise« ,
la réponse à ma question « qui est
riche ? » serait simplissime. Ce serait
sans hésitation celui qui détient la
« monnaie-marchandise » car il aurait un
stock de quelque chose qu’il serait
certain de pouvoir utiliser un jour.
Inversement, les pays de l’OCDE auraient
eu à se préoccuper de se procurer de la
« monnaie-marchandise »
nécessaire aux échanges et pour cela se
livrer à une activité véritablement
productive. Mais qu’est-ce qu’une
« monnaie-marchandise », vous
demandez-vous ? L’or, l’argent,
l’ambre, l’huile de baleine, le sel,
choisissez… Tout ce qui possède
une valeur intrinsèque et est facilement
reconnaissable, fractionnable et
échangeable. Les gens se sont assez
souvent mis d’accord sur l’or et
l’argent (…). ».
Voici étalée dans
toute sa nudité, à travers une dense
allégorie, toute la flagornerie de ces
experts ignares en qui chaque lecteur
des cahiers économiques simplets place
sa complaisance. La «valeur
intrinsèque» ça n’existe pas connard
d’économiste. En 1864, Marx,
que d’aucuns disent dépassé, et que seul
un dogmatique oserait encore évoquer, a
démonté cette fourberie, bien avant que
les pseudos-experts qui veulent
l’enterrer ne soient nés. Le trader
resquilleur propose tout simplement de
revenir au troc – à
l’échange de monnaie-marchandise contre
de la monnaie-marchandise (du pain, des
souliers, des automobiles, des haches,
de l’essence, du fil…). Ce
fut le premier artefact du féodalisme
dont se débarrassa le système
mercantiliste précapitaliste que cette
«monnaie-marchandise».
Vous vous voyez au
dépanneur, quatre poulets à la ceinture,
troquant une bouteille de liqueur et un
sac de croustilles. Devant vous un homme
portant un lot de planches
négociant l’achat d’un carton de bière.
Le système capitaliste a inventé UNE
marchandise universelle – la putain
financière-la monnaie par excellence
l’or, argent et papier, afin de
faciliter les transactions commerciales
et l’échange de toutes marchandises
contre toute autre marchandise – la
monnaie. La monnaie
reconnaissable, fractionnable et
échangeable, cette marchandise unique
– étalon et entremetteuse –
représentante de la valeur marchande. La
monnaie marchandise existe déjà,
monsieur l’analyste, et c’est elle qui
sans le vouloir vous entraine vers le
mouroir. Le manant ignorant poursuit
son galimatias :
« Inversement,
vous avez remarqué que la « monnaie-dette »
doit avoir « cours légal ». On vous
force à accepter un bout de papier avec
une marque d’un Etat dans un périmètre
donné. Hélas pour nous, la
« monnaie-marchandise » ne convient pas
à un système capitaliste dévoyé,
un capitalisme de copinage, de
connivence, de manipulation ou d’Etat.
La « monnaie-marchandise » pourrait
appartenir à tout le monde, serait
trop démocratique, pas
facilement manipulable (…) ».
C’est qu’il est en
colère le compère. La monnaie
dette ça n’existe évidemment
pas. Il y a la dette, libellée en
devise, et la bonne fortune consiste à
savoir quel est l’état de santé de
l’économie qui est derrière cette
monnaie (c’est-à-dire de savoir si dans
cette économie les profits sont
valorisés ou s’ils sont dilapidés ou
encore thésaurisés, ce qui revient au
même car du capital qui ne rapporte pas
est du capital mort, en putréfaction.
Le voilà
s’approchant de son objectif ultime, à
pas comptés le petit commis – l’air
effrayé d’imaginer la vérité dont il
s’apprête à vous révéler la complexité.
Si « L’économie » capitaliste ne
fonctionne pas c’est la faute
aux capitalistes roublards, filous,
malhonnêtes, dévoyés et de connivence,
rage-t-il. C’était donc là son secret ?
L’Hypocrite petit
complice. Le capitalisme ne peut
fonctionner différemment que de la
manière qu’il fonctionne. La
finalité de ce mode de production n’est
pas de distribuer de la richesse à tout
vent et à tout venant et de provisionner
chaque être humain des biens que ses
besoins réclament.
La finalité de ce
système économique est de reproduire le
capital enrichi – surmultiplié – riche –
de nouvelles plus-values à faire
fructifier, et la roue sempiternelle
recommence. Elle fonctionne l’économie
impérialiste, maître corsaire, cessez de
la vilipender ; elle fonctionne très
bien mais sa marche funèbre la dirige
droit vers le cimetière. Ce système
économique en crise systémique a livré
ce qu’il pouvait en productivité et en
marchandises dévaluées et aujourd’hui il
est impératif, non pas de le RÉFORMER,
ce qui est un vœu futile mais de le
renverser.
Un autre système économique ?
« Revenons donc
à notre triste sort. Le pays qui a le
plus à perdre avec l’aggravation de la
crise est évidemment la Chine avec ses 3 500 milliards de dollars de
réserves de change
au 30 juin 2013. Ce n’est jamais
plaisant de savoir qu’on s’est fait
rouler pour une grande puissance armée.
Au dernier G20, la
Chine a lancé l’idée d’un fonds de
réserve monétaire commun aux BRIC,
pendant que les lobbyistes
va-t-en-guerre contre la Syrie
s’affairaient en espérant plus de
déficits et de « monnaie-dette »
pour faire tourner des usines d’armement
et l’industrie bancaire. Brésil, Russie,
Inde et Chine… Serait-ce le
début d’un autre système ?& »
Non ! Oh que non !
Ce n’est pas le début d’un «autre»
système. La panacée a déjà été essayée
et elle n’a jamais fonctionné (Banque
Mondiale, FMI ça vous dit quelque chose,
monsieur l’économiste?). Plus de crédit
en monnaie frauduleuse et sans valeur,
plus de mesures d’assouplissement
quantitatif(QE) étasuniennes et
européennes pour renflouer le bateau
ivre de l’impérialisme donnera
exactement le même résultat que
précédemment. C’est-à-dire plus
d’inflation monétaire et davantage de
dévaluation des monnaies par lesquelles
tous les petits épargnants, les
retraités, et les ouvriers salariés sont
floués chaque année, leur pouvoir
d’achat s’asséchant comme du parmesan !
L’affrontement inter impérialiste
pendant le G20 paralysé
De fait, ce G-20
(2013) fut effectivement fort
intéressant mais pour des raisons très
différentes que votre appétence pour les
recettes économiques magiques, monsieur
le gigolo. Ce G-20 fut le tout premier
où l’alliance des puissances déclinantes
(États-Unis, France, Royaume-Uni,
Allemagne, Japon, Canada, Italie) de la
face moribonde de l’impérialisme
international s’est vue mettre en échec
par l’alliance des puissances montantes
(Chine, Russie, Brésil, Inde) et leurs
affidés ? Ceux qui espèrent encore tirer
leur épingle de ce jeu de poker menteur
financier se leurres. Les
États-Unis, le quêteux de service, mis
hors service sur le plan économique, ne
s‘intéressait pas aux propositions
économiques avancées par la Chine, et
jouait le matamore militaire – menaçant
ignoblement de bombarder le peuple d’une
néo-colonie de la Russie (Syrie)
afin de bien démontrer à tous ses
créanciers de quelle façon allait se
terminer cette épopée de la dette
souveraine américaine que ces gueux de
Wall Street ne veulent ni ne peuvent
rembourser..
Quelle décision a
fait tourner court aux menaces de
bombardements ? Cette décision
financière-boursière-monétaire s’est
prise loin des caméras, à votre insu,
mais elle a fait reculer le monstre
étasunien et la France impudente.
Concluons ce drame
shakespearien. Le dernier G-20 (2013)
nous fournit matière à bien comprendre.
Les pays débiteurs ne peuvent
rembourser. Les pays créanciers ne
peuvent bombarder ces pays endettés pour
les forcer à payer. Comme les États-Unis
et la France et le Royaume-Uni l’ont
démontré, ils sont déterminés à faire
usage de la force (pour l’instant contre
des tiers-parties comme la Syrie, mais
demain directement contre les pays du
BRICS) si ces pays tentent de les forcer
à rembourser leur dette inexpiée.
Cependant les
endettés hésitent entre deux solutions
drastiques.
La première :
lancer une offensive militaire après
l’autre jusqu’à ce que la Chine, leur
cible ultime, ait renoncé à son dû, ce
qui de toute façon n’arrangera rien. De
quoi sera fait pour les américains ce
lendemain de Canossa chinois ?
La seconde :
chacune de ces jadis grande
puissance se partage les activités
économiques que les monopoles chinois
accepteront de leur sous-traiter,
alors que les immobiliers étasunien,
français, britannique, italien,
espagnol, canadien, changeront de main,
prochainement administrés par leurs
nouveaux propriétaires chinois, indiens,
iraniens et même qataris et saoudiens.
Je ne saurais vous dire l’option qu’ils
choisiront.
À Moscou en
septembre 2013 le monde est entré dans
une nouvelle période d’équilibre de la
terreur. Non pas une terreur nucléaire
entre un camp social impérialiste en
faillite et un camp carrément
impérialiste ascendant, mais entre deux
camps impérialistes dits «néo-libéraux»,
l’un endetté, désindustrialisé,
décadent, armé jusqu’aux dents. Face à
un monde impérialiste ascendant,
créancier, où le capital produit de la
plus-value ouvrière expropriée en grande
quantité et qui entretient son ex-maître
sous peine de s’effondrer avec lui.
(1)
http://www.les-crises.fr/
(2)
http://www.les-crises.fr/les-cinq-stades-de-l-effondrement/
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