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Opinion
La Libye sous les
bombes « humanitaires » de l'ONU
Robert Bibeau
Hillary Clinton, Nicolas Sarkozy
et Alain Juppé, lors du sommet de Paris pour la Libye
Mercredi 23 mars 2011
Il était une fois
un berger qui, entendant ses agneaux en émoi et son troupeau aux
abois, s’approcha pour constater les dégâts… Un vieux loup à
demi édenté s’était faufilé dans sa bergerie et dévorait tous
les animaux qu’il pouvait attraper… Le berger courut dans la
forêt demander assistance au chef de la meute. Décrivant
son embarras, il quémanda secours à ce loup étranger: « Sire
venez sauver mes agneaux innocents, d’ici peu votre compagnon
mécréant, même à demi édenté, aura terminé la curée. ».
Le chef de meute, un
loup tartufe, rassura le berger : « Avant la nuit j’aurai
neutralisé ce gêneur, vous serez sorti de ce guêpier et il
s’échappera sans vous importuner, soyez en assuré. Où se trouve
votre bergerie que je trotte libérer vos protégés ? »
Sitôt dit sitôt fait, en deux temps trois mouvements, le loup
perfide eut vite fait de chasser ce canidé à demi édenté. Sur
cette lancée il prit sa place dans la bergerie apaisée et
termina lui-même la curée. Le
berger, risée du comté, raconte partout à la ronde les mérites
de ce chef de meute, nabot enragé, soi-disant épris de
« liberté », lequel, quant à lui, ne cesse de réciter ses
festivités dans la bergerie d’un berger demeuré.
Le bombardement du
peuple libyen par les avions de guerre et les canons américains,
français, britanniques, canadiens et italiens a-t-il de quoi
surprendre la « gauche » et les médias occidentaux, la Ligue
Arabe, la Russie de Poutine (1), la Chine et le Brésil
abstentionnistes et les autres imposteurs qui s’étonnent soudain
d’apprendre la multitude des victimes collatérales de
l’agression néo-coloniale contre un pays africain insurgé et
contre ses chefs de clans en guerre tribale opposant royalistes
sur le retour et tyran sur le départ ? Il y a parfois de ces
querelles entre clans stipendiés à propos du partage du butin
attribué aux sous-fifres locaux par les exploiteurs occidentaux
(2).
Quand un vieux chef de
guerre ne fait plus l’affaire, les puissants le remplacent et
espèrent qu’il s’éclipsera gentiment dans sa datcha à Charm-el-Cheik
ou à la Mecque avec ses milliards si mal gagnés. On proclame
alors la « Révolution victorieuse » et chacun rentre chez-lui
vaquer à ses occupations d’exploité ou d’aliéné. Si le démis
n’entend pas raison, il faut parfois que les maîtres étrangers
rappellent le tyran à sa mission et lui imposent leur médiation
pour le bénéfice des commissions à distribuer à chacun des
héritiers. Parfois, les maîtres séants doivent châtier ce chef
mécréant afin de donner une leçon à tous ces malfrats qui
pourraient être tentés de l’imiter.
Ne croyez surtout pas
qu’un chef de l’ALBA sud-américaine puisse venir proposer sa
médiation pour trancher parmi les insurgés. Ce n’est pas à un
révolté de faire justice parmi les néo-colonisés (3). Il y aura
des morts collatérales pour avoir refusé cette médiation
charitable mais c’est le prix à payer pour rétablir la « paix »
des exploiteurs parmi les spoliateurs.
Présentement les maîtres
interviennent en Libye afin de mettre fin à la chicane inter
clanique et ramener chaque camp gourmand à la raison. Les
livraisons de ressources pétrolières ne souffrent pas de telles
perturbations. L’Italie est en difficulté et ne souhaite pas
payer son pétrole plus cher que d’accoutumée.
Le secrétaire d’État à
la défense (« à l’attaque » serait plus approprié), M. Robert
Gates, avait pourtant
parfaitement décrit les sévices qu’il ferait subir à la Libye si
jamais il engageait ses troupes d’agression dans l’action.
Imposer une « zone d’exclusion aérienne » ça signifie, disait-il
la semaine dernière sur les ondes de la télévision américaine,
bombarder les infrastructures militaires anti-aériennes, les
tours de contrôle aériennes civiles et militaires, les pistes
d’atterrissage civiles et militaires, les radars, les centres de
télécommunications et les tours de télécommunications (qui sont
nécessairement en zones urbaines), les centres de transmission
de télévision et de radiodiffusion, les infrastructures de
transport, et quelques autres objectifs civils
à bombarder pour assurer
la sécurité des pilotes et des navires d’agression, au prix
évidemment de l’insécurité totale des populations civiles à
soi-disant protéger des griffes du malin, c’est-à-dire du clan
qui n’est plus adoubé par l’Occident après avoir été son
préféré. Il y a parfois de ces revirements d’alliances chez les
grands et les puissants.
Dorénavant les deux
clans en guerre ont le choix des bombes qui meublent leur enfer.
Personnellement je préfèrerais être bombardé par les mercenaires
de Kadhafi, beaucoup moins efficaces et meurtriers que
les nouveaux mercenaires
américains, français, britanniques, canadiens et italiens du
camp royaliste de l’Est libyen (4). Notez que le clan de
l’Est libyen n’a pas lui non plus l’aval du maître américain qui
ne semble pas le contrôler suffisamment. Par moment, cette
coalition « humanitaire » occidentale donne l’impression
anarchique d’un gang de voleurs sans chef de bande, ce qui ne se
produirait jamais chez les loups j’en conviens avec vous.
Cette guerre coloniale
illégale que les pays agresseurs ont lancée en contravention
avec leur propre constitution dite « démocratique » vise à
donner une leçon de « démocratie » à un peuple coincé entre deux
belligérants qui ne parviennent pas à se partager l’usufruit des
ressources nationales dilapidées. Quant à lui, le premier
ministre canadien Harper n’a jamais présenté de déclaration de
guerre à la sanction du parlement canadien, non plus qu’au
Conseil des ministres, en contravention absolue avec la
Constitution « démocratique » bourgeoise du Canada. Le chef de
l’opposition au parlement canadien s’en dit parfaitement
satisfait car il aurait fait de même s’il avait été ainsi pressé
par ses amis États-uniens. Comment ces gens peuvent-ils porter
une leçon démocratique en Afrique ?
Vous entendez déjà les
mensonges à propos des frappes « chirurgicales » manquées qui
tuent et blessent les
victimes collatérales, ces innocents libyens, justement ceux que
l’ONU était venue protéger, mais
aussi sur la
peine que ces massacres infligent à la « communauté des
pleureuses démocratiques internationales » venue déchiqueter à
coup de bombes à fragmentation ces gens révoltés, qu’ils
veulent prétendument libérer (libérer de la vie – oui); et toute
cette « gauche », cette droite, ces analystes et ces experts
télématiques qui déjà préparent la « victoire » des forces
coalisées comme en Irak (où elles prennent la poudre
d’escampette après avoir tout saccagé), au Kosovo (où elles sont
encore incrustées avant d’être chassées), en Afghanistan et au
Nord Pakistan (où elles achèvent d’être expulsées après avoir
beaucoup tué) (5).
Rien à attendre des
dieux de la peste… Combien de massacres les peuples du monde
devront-il subir avant que l’on se souvienne du passé ? Mais
n’ayez crainte, les peuples du monde n’ont pas mordu à cet
hameçon grossier et d’ici peu vous apprendrez que les
gouvernements occidentaux ont agi en abusant de leur autorité,
sans rien demander à quiconque, car la population, si on exclut
la « gauche humanitaire », n’a jamais cru en cette sirène de la
délivrance des peuples opprimés par leurs oppresseurs.
Un loup « libérateur »
au milieu d’une bergerie n’est jamais la solution pour un berger
sensé. Forces néo-coloniales française, britannique, américaine,
canadienne et italienne, hors de Libye! Cessez de tuer le peuple
libyen révolté, il saura très bien se défendre si seulement vous
cessiez de supporter et d'armer ses oppresseurs d’hier et
d’aujourd’hui.
ANNEXES
1.
Vladimir Poutine: «Ce qui se passe en Libye se fait sous la
bannière de la défense des civils. Mais lorsque l'on bombarde le
territoire libyen, ce sont les mêmes civils pacifiques libyens
qui meurent. Ou est la logique ou est la morale? Nulle part. »
http://sergeadam.blogspot.com/2011/03/libye-poutine-qualifie-la-mission-de.htmlh
2. La Ligue arabe critique les frappes de la coalition... Le
secrétaire général de la Ligue arabe Amr Moussa a critiqué les
frappes aériennes et
maritimes de la coalition en déclarant qu'elles
dépassaient le cadre des objectifs proclamés, s'agissant de
protéger la population civile, annoncent dimanche les médias
arabes. "Ce qui s'est passé en Libye diffère du but qui
est d'imposer une zone d'exclusion aérienne, et ce que nous
voulons c'est la protection des civils et pas le bombardement
d'autres civils", a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse
au Caire. Il a également annoncé son intention de convoquer une
réunion d'urgence du Conseil de la Ligue arabe afin de discuter
de la situation dans les pays arabes, notamment en Libye et au
Yémen. Lors d'une réunion précédente au Caire, les ministres des
Affaires étrangères des pays membres de la Ligue arabe ont
appelé l'Onu à instaurer en Libye une zone d'exclusion aérienne.
Jeudi 17 mars, le Conseil de sécurité de l'Onu a adopté une
résolution permettant un recours à la force pour protéger la
population libyenne des troupes du colonel Mouammar Kadhafi. Une
opération militaire a été lancée samedi par la coalition des
États-Unis, de la Grande-Bretagne, de la France, de l'Italie et
le Canada.
Les
premières frappes ont été portées par les chasseurs français.
110 missiles de croisières ont été tirés par la coalition dans
la nuit du samedi au dimanche. Selon les médias officiels
libyens, la coalition a frappé des sites civils dans les villes
les plus importantes du pays, notamment à Tripoli, Benghazi et
Zouara, ainsi que les dépôts de pétrole à Misrata. La télévision
libyenne a également annoncé la mort de 50 civils dont des
enfants, des femmes et des personnes âgées.
3. http://fr.wikipedia.org/wiki/Alliance_Bolivarienne_pour_les_Am%C3%A9riques
4.
http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=23854
5. À propos du dictateur Kadhafi :
http://www.aloufok.net/spip.php?article3770
6. http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=23814
http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=23814
et aussi
http://www.internationalnews.fr/article-r-69704544.html
Robert Bibeau gère le site
Samidoun
à Montréal.
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