Opinion
L'unité des factions
en faveur du bantoustan palestinien !
Robert Bibeau
Vendredi 20 mai 2011
La résistance engendre l’unité des résistants. La collaboration
engendre l’unité des collabos et renforce la
collaboration. L’unité de tous les collabos ne peut pas
renforcer la résistance. Ce sont ces principes simples qui
doivent servir à apprécier l’entente d’unification signée par
treize organisations palestiniennes, pour la plupart membre de
l’OLP, au Caire en Égypte il y a quelque temps.
La photo ci-haut, montrant des manifestants palestiniens à
Ramallah le jour anniversaire de la Nakba (des photos semblables
ont été prises à Gaza et aux frontières syrienne et libanaise)
indique la raison pour laquelle l’entité sioniste ne tient pas
particulièrement à fragiliser le régime syrien de Bachar el
Assad, ni celui de Mahmoud Abbas à Ramallah, ni celui de Khaled
Mechaal à Gaza. En effet, Israël craint l’orientation
imprévisible d’éventuels nouveaux gouvernements syrien et
palestiniens advenant que les cliques au pouvoir en viennent à
être renversées. L’exemple libanais a déjà fortement ébranlé
Israël ; l’entité sioniste n’a pas su écraser la résistance
héroïque du Hezbollah libanais. La stabilité et la prévisibilité
des réactions gouvernementales arabes sont préférables à la
déstabilisation anarchique risquant de laisser émerger des
régimes populistes anti-sionistes en Syrie, en Palestine, au
Liban et en Égypte « démocratisées », voilà la doxa de l’État
major de l’armée sioniste à Tel-Aviv, le véritable dirigeant de
la base militaire américaine au Levant (1).
En Palestine, le dilemme est de maintenir au pouvoir la vieille
coterie de Mahmoud Abbas, président de pacotille dont le règne
est terminé depuis deux années en vertu même de la Constitution
palestinienne, ainsi que de ses nouveaux alliés du Hamas, ou
alors de voir émerger une nouvelle résistance absolument hors de
contrôle soutenue par la rue partout dans le Makrech Arabe.
« Cela
s’est traduit par de multiples rassemblements, encore faibles en
nombre de participants, systématiquement réprimés par le Hamas à
Gaza et par l’Autorité palestinienne en Cisjordanie. Sur la
place Manara à Ramallah, une tente occupée par de jeunes
« blogueurs » surmontée d’un calicot « Le peuple veut la fin de
la division » exprime clairement le ras-le-bol général d’une
situation devenue insupportable. » (2)
Ces jeunes « blogueurs » dont il est fait
mention ici étaient en fait commandités par les organisations du
Fatah et du Hamas afin de laisser croire que
les factions n’ont pas d’autre choix que de s’entendre puisque
c’est la volonté populaire représentée par ces faire-valoir
munis de leurs portables à clavier fournis par le fils Abbas,
détenteur grâce à Israël de l’exclusivité de la
commercialisation de ces appareils en Palestine occupée.
Le nouveau gouvernement égyptien, celui là même
mis en place par les apparatchiks suite à la retraite précipitée
de Moubarak, et toujours sous contrôle de l’ambassade américaine
au Caire, aurait été à l’origine de cette entente de trahison
nationale à laquelle treize factions, tout ce que l’OLP compte
de groupuscules en quelque sorte, auxquelles s’ajoute le Hamas,
cherchant tous à s’adouber pour se partager les futur postes
d’administrateurs dans les bantoustans virtuels (Gaza, Jéricho,
Ramallah, Jénine, Naplouse et Hébron). Le peuple palestinien
revit ces temps-ci le scénario désastreux des Accords d’Oslo, de
triste renom (3).
L’entente Fatah-Hamas dit ceci :
« Le texte prévoit la formation d’un
gouvernement de technocrates ou d’indépendants ; la tenue
d’élections présidentielle et législative d’ici un an ; la
réforme de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) et
une solution à la division des organes de sécurité. Comme il est
prévu par les accords d’Oslo, c’est l’OLP et elle seule qui est
habilitée à négocier des solutions de paix avec le gouvernement
israélien. Ce texte
facilitera sans aucun doute la campagne de l’Autorité en faveur
de la reconnaissance par l’Assemblée générale des Nations unies
d’un État palestinien indépendant dans les frontières de juin
1967, avec Jérusalem-Est comme capitale. » (4)
Convenons que des personnalités palestiniennes
indépendantes cela n’existe tout simplement pas. Quand une
nation toute entière de réfugiés, d’emprisonnés (11 000),
d’emmurés vivant sous blocus militaire, se bat pour sa survie
contre un État génocidaire, tout individu faisant partie de
cette nation est soit un combattant de la liberté et de la
résistance face à l’ennemi sioniste ; soit un défaitiste ou un
collaborateur déclaré ou inavoué, ce qui revient au même, l’un
s’est déjà vendu, l’autre est à vendre.
Ce gouvernement provisoire sera donc un
gouvernement de collaboration et de trahison nationale chargé en
conformité avec les Accords d’Oslo (que le Hamas prétendait ne
pas reconnaître) de préparer la future élection législative et
présidentielle où Fatah, Hamas et autres factions, feront
campagne sous occupation et sous blocus israélien. Ces élections
permettront de distribuer les postes et les rôles de gardes
chiourmes dans les bantoustans à venir, pendant que la soi
disant « communauté internationale à l’ONU », à la solde des
Américains, votera une résolution, sans autre effet que de
reconnaître selon le droit international le renoncement du
peuple palestinien à plus de 75 % de ses terres spoliées par
l’entité sioniste en 1948. Cette résolution de l’ONU constituera
la reconnaissance internationale de l’irréversibilité de la
Nakba, de l’irréversibilité de l’invasion et de l’usurpation des
terres palestiniennes par les hordes de l’entité sioniste avec
le consentement complice des carnassiers de l’Autorité et de
l’OLP.
Cette résolution de l’ONU n’impliquera aucune
obligation de la part d’Israël mais lui assurera en droit
international que plus de 75 % des terres déjà volées aux
palestiniens ne leur seront jamais rétrocédées. Pour les 20 ou
25 % des terres restantes, rien ne sera réglé et tout sera sujet
à d’autres interminables palabres entre l’entité sioniste et les
collaborateurs de l’OLP.
La récompense offerte au Hamas pour avoir
concédé, sans aucune contrepartie de la part de l’ennemi, cette
renonciation légale aux droits ancestraux du peuple palestinien
sur les terres actuellement occupées par l’entité sioniste, a
été l’annonce par le ministre des Affaires étrangères égyptien
de la réouverture prochaine de la frontière avec Gaza. Voilà ce
que c’est que de céder son droit d’aînesse pour un plat de
lentilles.
Les analystes de salon proclament ces temps-ci
que : « La décision de l’ONU d’une reconnaissance en septembre
d’un « État palestinien », venant s’ajouter à l’accord de
réconciliation (unité des collabos NDLR), constitue des points
d’appui pour « désenclaver » la lutte du peuple palestinien et
lui redonner sa place centrale dans le combat
anti-impérialiste. » (5).
Rien n’est plus faux. Cette « reconnaissance »
du renoncement à la libération de la terre palestinienne ;
de la renonciation au droit de retour pour
les millions de Palestiniens des camps de réfugiés
(ceux qui ont manifesté aux frontières de la terre de la Nakba
le 15 mai dernier et dont il n’est même pas fait mention dans
l’entente d’unité et de fraternité des collabos, ni dans la
résolution présentée à l’ONU), ainsi que le consentement à
l’usurpation des droits ancestraux palestiniens, garantissent
véritablement « l’enclavement » de la lutte de libération
nationale palestinienne. Cet « enclavement » amorcé lors des
Accords d’Oslo entérinés par l’OLP, poursuivant sans relâche sa
politique de capitulation et de trahison nationale auquel s’est
maintenant joint le Hamas.
C’est la capitulation et la renonciation à leurs
droits qui isolent les capitulards et entraînent la défaillance
de leurs appuis solidaires, jamais la résistance. C’est la
résistance à l’ennemi sioniste qui garantit l’unité des
combattants, jamais l’inverse.
Espérons que le peuple palestinien et certaines
de ses organisations de lutte nationale reprendront le flambeau
de la résistance et de la libération totale de la terre
palestinienne ancestrale jusqu'à l’éradication complète de
l’entité sioniste, bastion depuis soixante trois ans de
l’impérialisme occidental sur les terres arabes (6). C’est sur
ces bases militantes de résistance résiliente que doit se forger
l’unité des organisations qui adhèrent aux objectifs de
libération nationale du peuple palestinien.
(1)
http://www.oulala.net/Portail/spip.php?article4945
et aussi
http://www.ledevoir.com/international/proche-orient/323418/manifestations-de-la-nakba
-l-anniversaire-d-israel-souligne-par-de-violents-heurts-aux-frontieres?utm_source=infolettre-2011-05-16&utm
_medium=email&utm_campaign=infolettre-quotidienne
(2)
http://www.pressegauche.org/spip.php?article7232
(3)
http://www.michelcollon.info/L-Egypte-derriere-l-accord-Hamas.html
(4)
http://www.michelcollon.info/L-Egypte-derriere-l-accord-Hamas.html
et
http://www.michelcollon.info/Le-texte-de-l-accord-Hamas-Fatah.html
(5)
http://www.pressegauche.org/spip.php?article7232
(6) L’éradication de la structure étatique
sioniste, théocratique et impérialiste israélienne ne signifie
pas le rejet à la mer de toute la population israélienne non
arabe. Lors de la création du nouvel état probablement multi
ethnique, laïc et démocratique, il reviendra aux représentants
du peuple d’établir les règles de naturalisation des individus
vivant sur le territoire de ce nouvel état.
http://www.ism-france.org/analyses/La-nouvelle-lubie-de-la-gauche-arabe-article-14605
Robert Bibeau gère le site
Samidoun
à Montréal.
Le
sommaire de Robert Bibeau
Dernières mises à
jour
|