Opinion
De Lampedusa à la
source de l'immigration clandestine
Les réfugiés de la mendicité
Robert Bibeau
Robert
Bibeau
Mercredi 16 octobre 2013
Le drame de Lampedusa en Méditerranée
« L’incendie du 3 octobre, au
large de l’ile de Lampedusa, d’une
embarcation partie du port libyen de
Misurata et qui transportait à son bord
500 réfugiés originaires
d’Érythrée, de Somalie et du
Ghana (a fait 360 morts… NDLR). Parmi
les survivants, nombreux sont ceux qui
témoignent de
l’absence de secours, (…) de la part
de bateaux de pêche qui auraient vu
l’embarcation des migrants se retourner
puis couler à pic sans pour autant
intervenir comme conséquence de la
législation anti-immigration qui empêche
les embarcations civiles d’apporter de
l’aide aux « clandestins » avant
l’arrivée des garde-côtes » (1).
«
Honte et horreur » : ce sont les termes
utilisés par le président de la
république italienne à propos de la
tragédie de Lampedusa. Ces termes
devraient plus exactement être utilisés
pour définir la politique de l’Italie à
l’égard de l’Afrique, en particulier de
la Libye d’où provenait le
bateau de la mort. Les gouvernants
qui aujourd’hui battent leur coulpe sont
les mêmes qui ont contribué à cette
tragédie. » (2).
Voilà les faits tristes et
dramatiques, mais qu’y a-t-il derrière
cette façade d’indignation hypocrite ?
Pourquoi cinq cents personnes
embarquent-elles dans un rafiot conçu
pour deux cents passagers ? Pourquoi ces
migrants de la misère prennent-ils la
mer mouvementée au péril de leur
sécurité ? Qu’est-ce qui pousse ces
damnés de la Terre à cette transhumance
vers une mort annoncée ? Ces malandrins
n’ont-ils aucun instinct de survie ?
C’est parce qu’ils veulent survivre
justement que ces gens affrontent les
plus grands dangers. Il faut donc
comprendre que là d’où ils viennent la
vie est plus risquée et plus affligeante
que sur ces bateaux rafistolés – troués
– prêts à couler. Bien entendu,
l’industrie des contrebandiers de la
clandestinité a sa part de
responsabilité. Mais les «passeurs de
rêve» ne peuvent engranger les deniers
que parce que le flot des réfugiés de la
mendicité ne tarit pas malgré ces
assassinats avérés.
Examinez le problème de la façon
que vous le voudrez; toutes les avenues
vous renvoient aux pays d’origine
d’où ces victimes ont entrepris leur
odyssée.
Un mur électrifié, un rideau de fer, un
escadron surarmé ?
Quelques loustics suggèrent de
dresser aux frontières des barrières
jusqu’au ciel. En Israël on l’appelle le
Mur de séparation – qui sépare
les palestiniens «pestiférés», de leurs
geôliers de l’apartheid ostracisé.
Tout a été tenté pour endiguer
ces immigrés. Immerger des filets de
sous-mariniers pour bloquer les
traversiers. Essaimer des vedettes
rapides remplies de douaniers
suréquipés. Inonder les plages de la
Méditerranée de garde côtier bien armés
qui tueront les réfugiés avant que
d’embarqués risquant de
se noyer. Je puis vous l’assurer,
tous ces crimes contre l’humanité ne
stopperont jamais la marée des affamés
désespérés.
La source de l’immigration illégale est
en amont de la Méditerranée, du
Sinaï et de la Mer Égée. Là-bas, au sud
du Sud, à l’endroit d’où
partent les sentiers empruntés
par les richesses pillées,
prenant leurs sources dans les
puits de pétrole, les mines d’or, de
diamant, d’argent, de coltan, dans les
cratères de titane, de cobalt,
d’uranium, les forêts de cyprès,
d’acajou et d’ébène incrusté d’ivoire
sculpté et spolié (3).
Ces routes remplies des caravanes
de la mendicité prennent naissance
d’aussi loin que l’Afrique du Sud,
l’Angola, le Congo, le Gabon, la Côte
d’Ivoire, l’Éthiopie, le Nigéria, le
Kenya et le Soudan, et d’aussi près que
la Libye, la Tunisie, le Mali et
l’Algérie. Elles serpentent à travers la
jungle, la brousse
et le désert desséché pour venir
mourir dans les ports de Tripoli, de
Tunis, d’Alger et de Tanger, le long des
côtes de la mer vidées de ses ressources
pélagiques, que les cargos usines
frigorifiques, aux pavillons de
complaisance, emmènent vers des marchés
exotiques, ne laissant que peine et
chagrin aux petits piroguiers côtiers
africains (4).
Les monopoles d’Occident et d’Asie
saignent l’Afrique de ses ressources
et de son fric alors que ses fils n’ont
que l’exil en partage. Ils iront se
noyer au large du Pirée, de Ceuta, de
Gibraltar, de Malte et de Lampedusa. Ce
n’est pas sur les plages d’Italie, de
Grèce, de France ou d’Espagne qu’il faut
stopper les autodafés de ceux qui
refusent de mourir sans importuner les
oligarques subventionnés de la charité
intéressée.
La migration de la survie se
poursuivra tant que ces multinationales
ayant pignon sur rue à Paris, Londres,
Rome, Washington, New-York, Toronto,
Tokyo, Berlin et Shanghai continueront
la spoliation des déshérités pour le
bénéfice des pieds nickelés et de leurs
héritiers.
Quand des monopoles
internationaux de l’alimentation
spéculent à la bourse de Chicago ou de
Toronto sur les denrées de base (café,
cacao, thé, sucre, blé,
huile, riz, sorgho, mangues), ils
font s’effondrer le prix du kilo d’achéké
à Tombouctou et à Abidjan où les paysans
ne parviennent plus à survivre de la
vente de leur marchandise - ils ne
peuvent semer ni récoltés alors ils
meurent affamés ou ils empruntent les
chemins de l’exilé. Quand le Congrès
étatsunien subventionne le
coton américain il condamne le
fellah égyptien, les paysans nigérians
et éthiopiens à la mort assurée même si
ces derniers s’échinent à cultiver le
sol pour deux dollars par jour. Même
chose pour les céréales et le blé
canadien.
Quand les bureaucrates de
Bruxelles soutiennent frauduleusement la
production de poulet en Italie, de lait
en poudre aux Pays-Bas, de fromage au
Danemark, des métayers africains, leurs
fils et leurs cousins quittent leur
terre laissée en jachère et se mettent
en marche sur les chemins de traverse à
la poursuite des richesses spoliées,
exportées, sans transformation, via les
quais de la mendicité, transbordées vers
les usines des Cités capitalistes qui ne
leur ont rien laissé que leurs yeux pour
pleurer. Ils se révoltent, ils hurlent
et ils tuent, qui les a entendu ?
Quand Elf-Total, Shell,
Mobil-Exxon et les autres monopoles
exproprient les puits et le pétrole et
l’expédient, brut-non transformé, vers
l’Europe, le Japon, la Chine, ne
laissant sur place que des miettes pour
engraisser le Président d’opérette, ses
généraux et leurs adjudants chargés
d’écraser toute velléité des révoltés.
En ces temps de disette, derrière les
trains, les cargos et les tankers des
pilleurs de richesse, voyez les petits
chalutiers poussifs des expropriés
s’accrocher à leur destin, à la
poursuite de leur pain quotidien qu’on
leur exproprie et que l’on expatrie.
Comment stopper la marée humaine des
affamés ?
Que les prolétaires africains
remettent en question cet échange
inégal, aussitôt les Rafale, les
hélicoptères de combat, la Légion
étrangère de la Françafrique et les
escadrons de tueurs de l’Africom, de la
DGSE, de la CIA s’abattent comme des
vautours sur ces insurgés enragés. La
stabilité recouvre aussitôt le pays de
sa chape de plomb et les convois sont
rétablis en direction des ports en eau
profonde, vidant le continent de sa
chair, de son sang et de ses enfants.
Les oligopoles des milliardaires
volent les richesses d’Afrique puis
repoussent les esclaves salariés
africains vers leurs terres saccagées.
Pire encore, ces brigands
monopolistiques répriment ces
exploités-volés-vilipendés qui osent
s’indigner et réclamer l’usufruit de
leurs richesses usurpées.
Les prolétaires africains ont une
immense responsabilité pour stopper
cette saignée et la destruction de
leur postérité. Grâce au travail acharné
de ses ouvriers la Terre-mère africaine
peut parfaitement nourrir tout son
peuple à condition qu’un mode de
production socialisé et planifié soit
implanté et imposé. Seul le prolétariat
a la capacité d’ériger cette nouvelle
société; quand les ouvriers prendront
cette tâche en main la marée des
immigrés va s’épuiser, car le premier
choix de l’africain c’est son patelin,
son quartier, sa plaine, sa brousse, sa
jungle et son jardin. L’africain ne
vient mourir dans ces froides et mornes
villes du Nord que contraint, le cœur
étreint.
L’Afrique socialiste réservée aux
africains, et vous n’aurez plus de
jardinier encombrant vos jardins chers
européens, américains et canadiens.
Rapatriez vos soldats et vous verrez
diminuer l’afflux des
réfugiés de la mendicité (5). Il en
est de même pour les étatsuniens et leur
mur de ségrégation, d’exclusion et
d’exaction le long de la frontière du
Texas-Californie et du Mexique. Idem
dans les ports et les aéroports
canadiens.
(1)
http://www.legrandsoir.info/apres-la-mort-de-centaines-d-immigres-a-lampedusa.html
(2)
http://www.mondialisation.ca/la-tragedie-de-lampedusa-ce-dont-litalie-doit-vraiment-avoir-honte/5353092
(3)
http://www.palestine-solidarite.org/analyses.Robert_Bibeau.241012.htm
(4)
http://www.legrandsoir.info/apres-la-mort-de-centaines-d-immigres-a-lampedusa.html
(5)
http://humaniterouge.alloforum.com/lampedusa-chute-kadhafi-epouvante-desormai-t4289-1.html
et
http://haratine.blogspot.fr/2013/10/lampedusa-mais-ou-sont-donc-passes-les.html
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