Opinion
Du printemps
occidental (mai-68)
Au printemps dévoyé (mai-2008)
Robert Bibeau
Robert
Bibeau
Mercredi 5 décembre 2012
Les mouvements
sociaux de Mai 1968 en France, en Europe
et en Amérique se sont soldés par une
«trêve» sociale, résultat d’un pacte
social signé entre les bureaucrates
syndicaux affairistes et les Conseils
des ministres des gouvernements
occidentaux sous l’œil complices des
organisations et partis politique de la
gauche plurielle et travestie (1). Ce
pacte social – cette quasi « trêve » –
aura duré quarante ans.
Suite à la crise
économique de 2008 qui n’en finit plus
de saccager l’économie des pays
impérialistes en déclin – la débandade
structurelle la plus sévère ayant frappé
le monde capitaliste depuis 1929 – la
classe capitaliste des pays occidentaux
a déchiré ce pacte social et lancé de
façon concertée des assauts féroces
contre les travailleurs et les couches
populaires des pays d’Occident et
réorienté ses capitaux en direction de
l’Asie émergente. La classe sociale des
capitalistes monopolistes a alors
intensifié et accéléré le processus de
délocalisation-relocalisation des
industries à fort coefficient de
main-d’œuvre, capital variable important
(CV) – faible valeur ajoutée (à cause
d’une faible mécanisation) et à forte
plus-value ouvrière.
Il en fut de même
d’une partie des usines à fort
coefficient de capital constant (CC),
industries innovantes, automatisées et
robotisées, délocalisées vers les pays
émergents. La classe capitaliste
monopoliste de ces pays ascendants
(Chine, Corée du Sud, Inde, Taiwan,
Indonésie) profite de ce mouvement pour
s’intégrer à l’impérialisme dominant, et
pour la Chine notamment, se tailler une
place au sommet de la pyramide
impérialiste mondiale.
Comment les
ouvriers des différents pays
capitalistes à travers le monde
répondront-ils à ces agressions
planifiées et répétées contre les
conditions de production de leur force
de travail – contre leur pouvoir d’achat
– contre leur reproduction étendue en
tant que classe sociale ?
Voici l’histoire de
cette guerre de classe contemporaine en
deux épisodes :
Mai 68, la « trêve » sociale, et, en
deuxième partie,
Mai 2008, la révolte sociale dévoyée.
Mai 68, la « trêve » sociale
(Première partie)
Les pavés lancés
par la jeunesse parisienne font encore
rêver les nostalgiques du Grand
Soir-des-insurgés, autant qu’ils font
trembler ceux que terrorisent les
révoltes populaires. Les opportunistes
d’hier, incorrigibles idéalistes,
proclament aujourd’hui le retour des
grands jours de Mai 68 et d’une nouvelle
ode révolutionnaire, de l’éducation
humaniste contre l’enseignement marchand
et autres utopies
petites-bourgeoises-opportunistes.
Quelles leçons peut-on tirer de Mai 68
et à partir de ce bilan comment peut-on
éclairer la route des révoltés entamée
depuis quelques années par les ouvriers
et la jeunesse du monde entier ?
Question et
investigation
Pourquoi la plupart
des leaders étudiants de la génération
de Mai 68 ont-ils mal tourné ? Étrange
malédiction s’acharnant sur ces fils de
bourgeois, n’est-ce pas ? Pourquoi
autant de néo-fascistes, de
révisionnistes, d’opportunistes, de
chauvins-nationalistes issus des rangs
du mouvement étudiant et s’épandant à
tout vent comme du chiendent ?
Deux
témoignages nous serviront de guide dans
l’exploration de cette grande esbroufe
étudiante et populaire. L’essai d’une
universitaire, M. Marion, intitulé «
Conséquences et héritage de Mai 68 dans
la société actuelle
», qui présente le point de vue d’une
intellectuelle universitaire sur cette
série d’événements turbulents (2) et un
second article sur l’activité de
l’extrême-gauche en France en Mai 68
(3).
Conjoncture économique et sociale de
Mai 68
Si en 1960 la
France comptait 310 000 étudiants
universitaires, en Mai 68 on en
dénombrait 800 000 et la croissance se
poursuivit, ininterrompue, jusqu’en 1990
(1 300 000 étudiants post-secondaires).
Il en fut ainsi dans tous les pays
d’Occident. En ce temps-là, l’État
n’attaquait pas le droit aux études
universitaires; au contraire,
il en favorisait l’accès de façon à
fournir un personnel scolarisé et de
bonne qualité aux entreprises
américaines se ruant à la conquête des
marchés européen, canadien et australien
florissants et exploitant la main
d’œuvre de ces pays afin de leur
extorquer la plus-value unique source de
toutes formes de profit. À l’époque,
la « deuxième puissance économique
mondiale» était constituée par les
oligopoles américains installés en sol
européen ce qui n’empêchaient pas
les entreprises monopolistes européennes
de se consolider et de se chamailler
contre les monopoles étatsunien comme De
Gaulle le démontra parfois. L’Allemagne
elle, sans rechigner, accepta de se
muter en atelier industriel de l’Oncle
Sam, de même pour le Japon de
l’impérialisme Asie-Pacifique (4).
L’impérialisme
américain était à l’apogée de sa
croissance et de son hégémonie. Les
bombardements au napalm décimaient
l’héroïque peuple vietnamien qui menait
une véritable guerre populaire pour
bouter l’assassin étatsunien hors
d’Indochine, ce qui advint le 30 avril
1975 après le sacrifice de quelques
millions de partisans vietnamiens,
cambodgiens et laotiens.
La dame Marion
résume ainsi cette période
d’effervescence atlantiste succédant au
Plan Marshall : « C’est
dans une période de
plein emploi, de prospérité, au plus
fort des
Trente Glorieuses, libérée des
guerres coloniales (sic) que cette
situation « insaisissable » a explosé.
Jusqu'à cette fin
des années soixante, l'ordre du monde
issu de la défaite nazie est bipolaire :
Est et Ouest se font face. Mai
68 est un moment charnière qui marque la
fin d'un monde.» (5).
Madame Marion
poursuit : « Mai 68 marque le passage
culturel d'une époque à une autre. La
génération du baby-boom, née après la
guerre, affirmait
ses vingt ans en 1968 et prenait la
parole. Contre ses aînés, elle va
refuser et ébranler ce partage du monde.
C'est un
double refus du modèle capitaliste et du
modèle stalinien (sic) qui inspire
les années soixante. La jeunesse est
antifasciste et anti-impérialiste. »
(6).
Le troisième monde – la mystique des
« non-alignés»
Il faut se rappeler
qu’en 1955 Zhou Enlai (Chine), Soekarno
(Indonésie), Nehru (Inde), Tito
(Yougoslavie), Nasser (Égypte) et le
prince Norodom Sihanouk (Cambodge) ainsi
que les représentants de 29 pays se sont
réunis à Bandung, en Indonésie, afin de
promouvoir une soi-disant troisième
voie,
celle des « non-alignés »,
celle d’un « troisième monde », en
double refus du camp socialiste et du
monde capitaliste comme s’il
existait sur Terre un troisième système
d’économie politique (7). Notez que
cette rencontre indonésienne des «
non-alignés » survient dix ans avant la
nuit de la « Gestapu ». Le 30 septembre
1965 un million de paysans et d’ouvriers
membres du PKI (Parti communiste
indonésien) furent égorgés par l’armée
indonésienne « non-alignée » aux ordres
de la CIA très alignée (8).
Par ailleurs,
madame Marion et ses comparses « bobos »
intellectuels sont incapables de décrire
ce « nouveau monde culturel » et ce
nouveau mode de production, cette
nouvelle économie politique qui serait
ni capitaliste, ni socialiste, issue de
Mai 68 et des « non-alignés ». Quelques
années plus tard la fumeuse théorie des
« Trois mondes » endossera
l’accoutrement du non-alignement
espérant réchapper cette lubie
évanescente.
Le XVIe
Sommet des pays soi-disant non-alignés
a réuni 120 États membres à Téhéran en
août 2012 (9). L’Égypte sous tutelle
américaine y côtoyait l’Arabie Saoudite
sous monarchie féodale de la famille
Saoude également sous tutelle
américaine. La Côte-d’Ivoire sous
domination française côtoyait la
néo-colonie camerounaise et l’Inde,
siégeant face à l’Afrique du Sud,
quelques jours avant que les armées de
ces deux pays ne massacrent des dizaines
de travailleurs sous-payés (10). Lequel
de ces 120 pays n’est pas régi par le
mode de production et les rapports de
production capitalistes ? Lequel de ces
120 États ne souffre pas sous domination
impérialiste mondialisé avec la
complicité complaisante de ses
dirigeants larbins?
Que reste-t-il de
cette utopique voie des « non-alignés –
nouveau monde culturel – théorie des
Trois mondes » ? Où sont les pays non
assujettis à une puissance impérialiste
ou à une autre, non spoliés par
l’impérialisme mondial ? Nous savons
déjà qu’en 1956 le camp socialiste a été
miné par les révisionnistes
khrouchtchéviens si bien que de nos
jours tous les pays du globe sont
assujettis à un système unique et soumis
aux lois du marché impérialiste que
l’économiste de renom J.K. Galbraith
présente de cette façon :
« L’économie de
marché est volontiers décrite comme un
héritage ancien. En l’occurrence,
c’est une escroquerie, ou plus
exactement une erreur communément
admise. Trop de gens apprennent
l’économie dans des manuels qui
entretiennent encore
les dogmes de la production
concurrentielle des biens et des
services et de la capacité d’acheter
sans entraves. En fait, il peut n’y
avoir qu’un ou quelques vendeurs assez
puissants et persuasifs pour déterminer
ce que les gens achètent, mangent et
boivent. »
(11).
Voilà déjà une
immense différence entre Mai 68 et Mai
2008. En 40 ans l’horizon
géostratégique, idéologique et
géopolitique s’est éclairci; et si le
monde est toujours
bipolaire, il confronte désormais le
monde du travail-socialisé-planifié,
sans pouvoir
mais plein d’espoir contre le
monde du capital financier privé,
monopolistique, anarchique, décadent,
omnipotent et désespéré.
Entre les deux, une coterie de
sous-fifres vendant leurs services qui
aux impérialistes français, qui aux
impérialistes britanniques, qui aux
impérialistes américains, qui au
social-impérialisme chinois. Certains «
nationalistes ouvriers » voudraient que
la classe prolétarienne sacrifie sa vie
pour «libérer» ces valets
plénipotentiaires du joug de leurs
maîtres autoritaires ! Que nenni !
L’épanouissement individuel – le
droit au bonheur !
Poursuivons notre
investigation des caractéristiques
idéologiques de Mai 68. Madame Marion
écrit : « Mai
68 exalte
l'épanouissement de l'individu,
son droit au bonheur, contre la
rigidité des hiérarchies et des
disciplines.
Dans le monde entier, des
mouvements contestataires analogues
retentiront. Mai 68 entraîna
d’importants changements culturels. De
nouvelles valeurs (sic) dont la
naissance d’une contre-culture,
c’est-à-dire d’une
révolution dans le domaine des rapports
sociaux et de civilisation (sic). On
assista à une brusque évolution des
mœurs, une façon de penser le monde
différemment :
Mai 68 a accéléré la conquête par
les femmes de leur égalité et a vu
naître un questionnement sur l'éducation».
Des années plus tard, surfant sur cette
vague culturelle réactionnaire, Samuel
Huntington, l’intellectuel fascisant,
présentera la théorie raciste du «
clash des civilisations » afin
de
promouvoir le devoir d’intervention
militaire « humanitaire » contre les
civilisations arabe, musulmane et
chinoise, soi-disant attardées et sans
droit au bonheur (!), en réalité pour le
bénéfice des puissances impérialistes
occidentales guerrières et en déclin
(12). Voilà un bien triste vestige
idéologique, héritage des courants
opportunistes anarcho-syndicalistes de
Mai 68, que l’on voit aujourd’hui
resurgir au milieu des présents
soulèvements populaires inorganisés.
Hédonisme,
égocentrisme, individualisme,
narcissisme, féminisme petit-bourgeois –
à la Hillary Clinton et à la Margaret
Thatcher – seraient des acquis de cette
révolte d’éphèbes encore glabres du «
Printemps de l’Occident ». Rappelons à
madame Marion et aux autres exégètes que
de nouveaux rapports sociaux
sont obligatoirement le construit de
nouvelles forces productives et d’un
nouveau mode de propriété des moyens de
production. C’est l’existence
sociale des hommes qui détermine leur
conscience et non l’inverse (Marx). Quel
nouveau mode de production sociale et
quel nouveau mode de propriété des
moyens de production furent initiés en
Mai 68 ? Ne cherchez pas, il n’y en a
pas. Nous verrons qu’il en fut de même
en Mai-2008.
En ce qui concerne
la
nouvelle
façon de penser le monde et la
contre-culture « civilisatrice » de Mai
68, cherchons-en les traces
tangibles. Quelle contre-culture peut-on
observer dans les galas de vedettes qui
ne payent pas leurs impôts et se mettent
à l’abri dans les paradis fiscaux; dans
le mainstream médiatique flagornant la
pensée unique; dans les festivals d’été
bon enfant; dans la musique éclectique
et décapante; dans la littérature
crypto-féodale désolante; dans le cinéma
hollywoodien violent et déliquescent,
tout ceci chapeautant ce nouveau
millénaire déprimant où famine et misère
ravagent plusieurs pays d’Occident et
d’Orient ? Croyez-vous que les ouvriers
grecs menacés d’inanition bataillent
pour accéder au nirvana du «bonheur» et
de la contre-culture petite-bourgeoise ?
En ce qui a trait à
l’évolution des mœurs et du mode de
penser, la mutation était déjà
amorcée suite à l’extension du
capitalisme marchand et industriel sur
la planète toute entière après
l’effondrement du camp socialiste
(1956). Le travail émancipateur de la
femme, le contrôle des naissances,
l’abaissement de la mortalité infantile,
l’allongement de la vie « utile » et
l’alphabétisation des populations ont
suivi partout l’industrialisation et les
hausses de productivité dans les champs
et les ateliers, ce qui explique
l’évolution plutôt que la diffusion de
la fumeuse « Révolution culturelle » de
la petite bourgeoisie « virtuelle »,
rêveuse, indolente, « démocrate »,
électoraliste, futile, narcissique et
libertaire de Mai-68.
Il est vrai
cependant qu’à cette époque les pays
coloniaux étaient « libérés » et placés
sous statut néocolonial soumis aux
thuriféraires nationaux sous contrôle de
quelques puissances impérialistes gérant
le camp du capital – le camp
impérialiste. Quand un
serviteur-sous-fifre ne fait plus
l’affaire, un coup d’État, une élection
truquée, une « Révolution colorée »
vient à point nommé rappeler ce peuple à
ses devoirs de soumission «
tiers-mondistes ». En Occident,
l’élection «démocratique» permettra de
changer la garde et les chiens de garde,
c’est-à-dire de changer de faction
capitaliste dominante (UMP-Socialiste,
Libéral-Conservateur, Libéral-Péquiste,
Travailliste-Conservateur,
Démocrate-Républicain).
Les casseurs de mai revendiquent
l’équité et la justice (des riches)
En Mai-68, en
Europe occidentale et en France
gaulliste, la jeunesse occupait les
universités pour réclamer que le
système scolaire joue adéquatement son
rôle d’instrument de progrès individuel
et d’ascension sociale personnelle
égocentrique, et qu’il offre
l’égalité des chances à tous et chacun
d’accéder aux emplois prestigieux et
bien rémunérés des bureaux feutrés. De
Nanterre et de la Sorbonne la jeunesse
exigeait d’être appréciée-évaluée
d’après ses capacités et non plus du
fait d’être bien née. Elle représentait
en-cela toute la jeunesse des pays
occidentaux et une fraction bourgeoise
de la jeunesse des pays néocoloniaux.
Les fils et les
filles de la petite bourgeoisie ont
chahuté l’oligarchie établie, prédateurs
des sociétés occidentales sclérosées, et
ils ont proposé de placer tout au sommet
de l’échiquier les valeurs d’égalité
et d’équité entre membres de la classe
dominante comprenant la petite
bourgeoisie florissante à laquelle
eux-mêmes souhaitaient accéder. «
Il faut partager les profits tirer de la
plus-value ouvrière avec la petite et la
moyenne bourgeoise », tel était le
leitmotiv « révolutionnaire » de cette
classe oubliée. En contrepartie la
petite bourgeoisie a promis de désarmer
idéologiquement et politiquement la
classe ouvrière enragée et trahie, ce
qu’elle fit.
Les accords de Grenelle (France) et
le contrat social occidental
Quelle était la
composition de classe des contestataires
et des casseurs qui ont tenté de se
dégager une place dans l’échelle
d’ascension sociale encombrée de la
France des grandes Écoles
aristocratiques ? Madame Marion répond :
«
Des centaines de milliers
d’intellectuels, de cadres, de médecins,
d’étudiants, d’artistes et de chercheurs
se sont lancés dans l’action et ont
tenté de changer le monde et de
réinventer la société ». Pour
réinventer une société il faut d’abord
renverser celle qui est déjà en place –
hégémonique et jalouse de ses privilèges
de classes. Rien de tel ni en France, ni
en Europe, ni au Canada, ni aux
États-Unis.
Quelqu’un
pourra-t-il nous présenter cette société
que les soixante-huitards auraient
soi-disant inventée ?
Rien ne ressemblait davantage à la
société capitaliste d’avant Mai-68 que
celle observée après Mai-68 et jusqu’en
Mai 2008. Le secteur tertiaire
parasitaire hypertrophié, basée sur une
frauduleuse pyramide de Pondi boursière
spéculative poursuivant ses ravages de
l’économie. Les crises de surproduction
succèdent aux périodes de récession et
la classe bourgeoise spoliant le
surtravail des ouvriers.
De fait, après des
mois d’échauffourées larvées, en
tournante dans différentes capitales
européennes, le mouvement souleva Paris.
Le grand capital international choisit
de tout miser sur la « bataille de
France » et d’y casser définitivement le
mouvement continental. Le Président
français Charles de Gaulle était une
pointure politique à la mesure de cette
mission diabolique.
Effectivement, le
mouvement des casseurs revendicateurs
fut brisé en France où les accords de
Grenelle assurèrent le rehaussement du
SMIC (salaire minimum) et un «
enrichissement » relatif de
l’aristocratie ouvrière française (on
commencera alors à spéculer à propos de
la «classe moyenne» florissante
aujourd’hui en cours de paupérisation).
La bureaucratie syndicale, la gauche
caviar et les révisionnistes cassoulets,
en collusion avec le grand capital
venaient de signer une
trêve et un pacte social qui
devaient durer quarante ans, du moins en
Occident (13).
Aussitôt, toutes
les capitales occidentales emboîtèrent
le pas et accordèrent des conditions
similaires à leurs étudiants, à leurs
aristocraties syndicales et à leurs «
bobos », chiens de garde du système
capitaliste pseudo « réinventé » ! Les
accords de Grenelle marquèrent la fin du
mouvement des récalcitrants de Mai-68.
La grande
bourgeoisie d’affaire venait d’acheter
la paix sociale sur le dos des
peuples néo coloniaux qu’il fallait
maintenant assujettir fermement afin
qu’ils fournissent la plus-value requise
pour cette mise en coupe réglée des
sociétés occidentales aliénées. La
course effrénée à la
productivité-compétitivité venait de
s’amorcer.
La stratégie
guerrière et mortifère des puissances
occidentales, et de sujétion des peuples
des pays néo-colonisés allait régler
cette affaire et entraîner dans ces pays
exploités moult guerres «contrôlées»
sous les yeux de cette pseudo-gauche
veule, repue et collaboratrice se
questionnant benoîtement-religieusement
à l’effet de soutenir ou non ces guerres
de massacre « humanitaire, collatéraux
et chirurgicaux ».
Un aspect
intéressant de la révolte étudiante de
Mai-68 effraie cependant madame Marion,
l’intellectuelle universitaire, qui
proteste vertement : « Mai 68 a
malheureusement vu naître des
groupuscules armés anarcho-communistes
qui pensaient que la libération du
peuple devait passer par la violence. »
(14).
Gauche Prolétarienne fut un acteur
éphémère de ce courant militant.
Diverses organisations opportunistes
similaires se sabordèrent au début des
années 80 sur ordre de leur gourou de
tutelle. Voilà enfin la réponse à notre
interrogation initiale… «
Pourquoi autant de
néo-fascistes, de révisionnistes,
d’opportunistes, de
chauvins-nationalistes issus des rangs
du mouvement étudiant de Mai-68
s’épandant à tout vent comme du
chiendent ? ».
Mai 2008 – Les anciennes puissances
impérialistes sur le déclin
Les récentes
révoltes ouvrières, étudiantes et
populaires tonitruantes apparaissent
comme des protestations et un refus de
la répudiation du pacte social
convenu par les bourgeoisies
impérialistes occidentales empêtrées
dans leurs crises économique,
financière, boursière et monétaire
récurrentes dont le monde impérialiste
ne parvient plus à s’extraire. Récemment
Noam Chomsky, toujours lui, pleurnichait
ainsi cette répudiation : « Les
capitalistes américains ont rompu et
rejeté le
fragile pacte non écrit entre le monde
patronal et celui des travailleurs,
pacte qui avait existé auparavant à
l’époque de la croissance et du progrès
(sic) ». Croissance éphémère de la
partie occidentale sur le dos des
peuples des néo-colonies spoliés,
meurtris, exterminés, néglige
pudiquement d’avouer le curé Chomsky que
les « bobos » acclament comme leur héros
(15).
Les crises
succèdent aux crises et l’impérialisme
vacille sur ses bases. Serait-ce
l’éruption de la fin? Le chômage
catastrophique frappe les États
occidentaux surendettés auprès des
banquiers et des requins financiers qui
rançonnent les peuples du monde entier.
L’impérialisme
américain bat en retraite et se voit
contesté dans toutes ses néo colonies en
Amérique latine pour commencer, puis au
Moyen-Orient, en Afrique et en Asie.
L’aigle américain détermine de moins en
moins ce dont demain sera oint.
L’Amérique est en faillite (bientôt 24
mille milliards de dollars de dette
souveraine). Les dettes cumulées de
l’État, des entreprises et des
particuliers équivalent à 350% du PIB
national. Il faudrait hausser les impôts
de 64 pour cent simplement pour
équilibrer demain le budget fédéral
américain (16). Ils ne parviennent pas à
vaincre le peuple afghan révolté et mal
armé. Les villes américaines sont en
déroute. Par exemple, Détroit se vide,
la ville est passée de 2 millions à 700
mille habitants. Le chômage
s’accroissant, le surendettement des
ménages atteint des sommets épiques – la
consommation diminue – et les revenus de
l’État périclitent. Crise de
surproduction au milieu de la famine,
leur système socio-économique ne répond
plus aux stimuli financiers. Les
«produits» boursiers dérivés-frauduleux
se comptent par milliers de milliards de
fausse valeurs qui se volatiseront lors
du prochain crash boursier
(rappelez-vous des « subprimes » du
crash de 2008). La spirale
déflationniste détruit les fondements de
l’économie, de la plus-value, du profit
et de la reproduction élargie et étendue
du système capitaliste (17).
Les États-Unis
d’Amérique flouent leurs alliés, leurs
partenaires et leurs créanciers en
imprimant chaque mois, 40 milliards de
dollars inflationnistes, de l’argent de
Monopoly, de la « monkey money », qui
déprécient d’autant la valeur des
créances en billets verts détenus par
les pays du Golfe (leurs alliés),
l’Iran, le Japon et la Chine, ainsi que
par les fonds de pension et les caisses
d’assurance des épargnants américains.
Bientôt cet argent ne vaudra plus rien.
Les États-Unis d’Amérique préparent une
grande dévaluation de leur monnaie,
c’est la raison pour laquelle des
milliardaires chinois achètent tout
l’immobilier de certaines villes
américaines pour se débarrasser de leurs
dollars de pacotille. Mieux vaut détenir
un parc immobilier que des sous de
loup-garou pensent-ils.
Barack Obama a
demandé à l’armée américaine d’être
prête à intervenir sur le territoire
étatsunien pour réprimer toute velléité
de révolte plébéienne américaine.
Obama a signé, le 31
décembre 2011, le
National Defence Authorization Act,
qui, ayant préséance sur la Constitution
américaine, permet à l'Armée d'arrêter,
d'interroger et de tuer des citoyens
américains soupçonnés de participer à
des activités « terroristes » ou
insurrectionnelles, sans aucune preuve,
sans aucun mandat, et de les détenir
indéfiniment sans procès (abrogation de
l'Habeas Corpus) aux États-Unis
preuve que la classe impérialiste
américaine a déjà identifié son ennemi
principal le plus dangereux… la
classe ouvrière américaine et ses alliés
(18). Classe ouvrière révoltée, enragée,
grosse d’une insurrection, qui risque
d’être massacrée inutilement par des
millions de flics et de soldats, parce
que sans organisation, sans direction
révolutionnaire pour diriger son
mouvement vers la prise de pouvoir
d’État (conscience de classe pour soi).
Nonobstant les
détracteurs «tiers-mondiste»,
aujourd’hui le maillon faible de la
chaîne impérialiste mondiale est au cœur
de l’Amérique aliénée, dépolitisée,
rétrograde, dégénérée, opprimée,
surexploitée, malaimée et sans
alternative. Barak Obama l’a compris et
il prépare sa classe à faire face aux
vents de révolte appréhendés. Romney, le
candidat Républicain défait, ne pouvait
pas jouer ce rôle et il risquait de
faire tout éclater prématurément. La
classe capitaliste monopoliste
étatsunienne a compris qu’en ce temps
troublé il fallait stranguler l’ouvrier
le sourire aux lèvres avec des mots pour
l’apaiser plutôt que de le confronter.
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