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Où se situe la « ligne rouge » pour l'Iran
?
Piotr Gontcharov
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Mardi 28 avril 2009 "Y a-t-il une date limite pour les
négociations avec l'Iran?", a demandé le président du Comité des
affaires internationales de la Chambre des représentants, Howard
Berman, à la secrétaire d'Etat américaine, lors des premiers
débats sur la politique étrangère au Congrès américain de la
carrière diplomatique d'Hillary Clinton. A en juger par sa
réponse évasive, cette date n'est pas encore fixée.
Tout en ayant invité l'Iran à revenir à la table des
négociations, la Maison Blanche lui a posé, en même temps,
certaines conditions. Mais pas aussi rigides que sous George W.
Bush pour ce qui est du programme nucléaire iranien. Les limites
admissibles, concrètement, du développement du nucléaire iranien
ont été remplacées par des formulations prudentes sur l'espoir
de voir Téhéran développer une coopération avec le Hamas et le
Hezbollah.
Du temps du précédent maître de la Maison Blanche, la "ligne
rouge" passait par le niveau du développement des technologies
d'enrichissement de l'uranium (qui peut être utilisé pour les
programmes militaires). Où passe-t-elle aujourd'hui?
Selon Greg Thielmann, expert de l'Arms Control Association
(ACA - Association pour le contrôle des armements), qui a
participé à la réunion du groupe de travail du Forum
luxembourgeois qui s'est tenue récemment à Moscou, une opération
militaire contre l'Iran, si ce dernier refusait d'arrêter ses
travaux d'enrichissement de l'uranium, serait la pire des
options.
La logique de cette conclusion s'explique par l'histoire du
développement du problème iranien. L'Iran a commencé à violer
les clauses du Traité de non-prolifération des armes nucléaires
(TNP) dès les années 90 du siècle dernier, estime cet expert. En
2003, ces violations ont été connues de tous. C'est pourquoi,
pour Barack Obama, et pour les Etats-Unis, en général, la
solution idéale serait de revenir à la situation de 2003, aussi
bien pour le caractère des rapports que l'Iran entretenait avec
la communauté internationale sous le président libéral Khatami,
que pour le niveau technologique de son programme nucléaire, son
potentiel d'enrichissement étant limité alors à 164
centrifugeuses.
La "ligne rouge" d'Obama commence, elle, toujours selon Greg
Thielmann, là où le programme nucléaire iranien "commencera à
représenter une menace réelle pour le TNP". Mais les Etats-Unis
espèrent que l'attitude négative de la Maison Blanche envers le
programme d'enrichissement de l'uranium sera un facteur de
dissuasion pour Téhéran et que l'Iran s'abstiendra de lancer une
opération militaire. Si une opération militaire est lancée par
Israël contre l'Iran, cela "détériorera considérablement les
rapports américano-israéliens".
L'analyse de Greg Thielmann laisse entrevoir à la fois une
attitude plus que prudente envers une éventuelle opération
militaire des Etats-Unis contre l'Iran et la désapprobation
évidente d'une opération israélienne.
Il est clair que le programme nucléaire iranien devient
quasiment une composante spécifique du règlement de deux
problèmes majeurs actuels: le maintien du régime de
non-prolifération des armes nucléaires et le processus de
désarmement dans son ensemble. Par exemple, les Etats-Unis
justifient la nécessité de la défense antimissile en Europe par
la menace balistique et nucléaire iranienne. L'incidence
négative du programme nucléaire de la Corée du Nord sur le
régime de non-prolifération (même si Pyongyang s'est doté de sa
propre bombe atomique) ne saurait être comparée au danger que
représente le nucléaire iranien pour le TNP. Si l'Iran parvient
à maîtriser la totalité du cycle nucléaire, cela portera le
dernier coup à un TNP déjà bien mal en point.
Tout d'abord, parce que le Proche-Orient est une région où
l'apparition d'un Iran nucléaire non seulement perturbera les
équilibres fragiles des forces politiques et militaires, mais
les fera exploser, avec des conséquences imprévisibles pour tout
le monde. Et en premier lieu Israël.
Cela étant, il faut probablement poser la question ainsi:
peut-on éviter, en principe, un scénario militaire? La
confrontation Iran-Israël comporte sa propre logique, et il est
peu probable qu'Israël agisse en tenant compte de l'avis des
Etats-Unis. Le "redémarrage" de la politique des Etats-Unis à
l'égard de l'Iran, y compris le dialogue direct, était en
gestation depuis longtemps. Mais il ne doit pas se faire au
détriment des préoccupations de la communauté internationale au
sujet du programme nucléaire iranien, qui ont été à la base
aussi bien de la politique de l'AIEA que de la ligne suivie par
le groupe des Six sur l'Iran.
Les opinions exprimées dans cet article sont laissées à la
stricte responsabilité de l'auteur.
© 2008 RIA Novosti
Publié le 28 mars 2009
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