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Opinion
Nicolas Sarkozy
plombé par sa diplomatie
Mustapha Tossa
Mercredi 23 février 2011
Nicolas Sarkozy révèle aux Français son incapacité
d’anticiper les événements. Son appareil diplomatique est resté
pendant de longues journées dans une posture hébétée à se
demander presque si une vie est possible après Moubarak.
Logiquement, cela devait être la grande séquence pendant
laquelle Nicolas Sarkozy devait parader sur tous les théâtres du
monde, le spectre de la présidence du G20 à la main, semant les
promesses les plus folles, infusant les dynamiques les plus
énergiques. Et grâce à sa fougue et à son habileté habituelles,
les Français des terroirs qui bougent, des usines qui
fonctionnent encore, des chaumières qui palabrent, devaient tous
le regarder avec des yeux de Chimène avec cette conclusion
prometteuse : un homme, aussi dédié au bien-être de la planète
qui se bat avec une telle combativité pour faire briller l’astre
France, ne pouvait pas être un mauvais président. Un coup
magistral allait être réussi. La confiance et l’affection des
Français allaient être de retour. L’impopularité des sondages
allait être un mauvais souvenir. Un énorme crédit allait
engranger. Même si Nicolas Sarkozy sait mieux que quiconque
qu’une élection, si décisive soit-elle, ne se gagne jamais à
l’international, il était l’homme de communication à utiliser
les tribunes les plus prestigieuses pour s’adresser avec
efficacité aux coins les plus reculés de l’Hexagone. Mais voilà,
cette belle mécanique bien rodée sur le papier ne marcha pas. La
révolution tunisienne qui exila le président Ben Ali en Arabie
Saoudite donna un premier coup de boutoir à ce schéma. Loin
d’accompagner ce mouvement de libération nationale, Nicolas
Sarkozy passa le plus clair de son temps à déminer son principal
dommage collatéral. Son ministre de Affaires étrangères Michèle
Alliot-Marie s’embourbe dans une affaire de collusion d’intérêts
politiques, privés et familiaux qui donne le tournis à
l’opposition. Au lieu de trancher en la faisant démissionner,
Nicolas Sarkozy s’enferme dans sa défense comme si son avenir
politique dépendait de son maintien au gouvernement. Cerise sur
le gâteau, la gestion post-changement en Tunisie fut
catastrophique. Le nouvel ambassadeur Boris Boillon, dans un
mélange de maladresse et d’arrogance, provoqua des étincelles
qui vont durablement desservir l’action diplomatique française
dans cette région.
Entre-temps vint la crise égyptienne. Autiste jusqu’à la
dernière minute à l’égard de la Tunisie, la diplomatie française
observa une étrange distance à l’égard du chaudron égyptien, se
contentant souvent d’accrocher son wagon à la locomotive
américaine ou de parler timidement sous couvert européen. Et
l’on découvre aussi que François Fillon, l’austère, l’intègre
Premier ministre, ne détestait pas les petites intentions
touristiques du régime égyptien. Avec le départ de Hosni
Moubarak, Nicolas Sarkozy révèle aux Français son incapacité
d’anticiper les événements. Son appareil diplomatique est resté
pendant de longues journées dans une posture hébétée à se
demander presque si une vie est possible après Moubarak. Ses
lenteurs dans les réactions à l’égard de la Tunisie et de
l’Egypte furent violement éclaboussées par la gestion de
l’affaire Florence Cassez, du nom de cette jeune Française
détenue au Mexique dans une affaire de kidnapping. Là où il
fallait doigté et retenue diplomatiques, Nicolas Sarkozy sortit
les bruyantes trompettes pour aboutir à un résultat
catastrophique : la France et le Mexique, pays
traditionnellement amis, vivent une crise diplomatique ouverte.
Fort de toutes ces contre-performances, Nicolas Sarkozy renoue
avec l’impopularité et le désamour. Désastreux pour un président
déjà an campagne.
Par : Mustapha Tossa
DNCP à Paris
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Aujourd’hui le Maroc 2011
Publié le 23 février 2011 avec l'aimable
autorisation de Aujourd'hui le Maroc
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